Les portes de l'autel sont désormais les seules choses qui te séparent d'Alexander et d'une promesse d'une vie nouvelle. Face au dernier obstacle de ta vie de jeune-fille tu ne peux pas dire que tu doutes. Mais tu ressens peur, appréhension. À tes côtés, ton père fulmine.

— C'est une mauvaise idée.

Tu restes droite, dressée dans ta robe blanche et éclatante. Tu t'es parée de tes plus beaux atours. C'est un ange, une déesse que tu veux présenter à ta cours. Tu veux ravir le cœur d'Alexander pour ne pas le motiver à fuir comme tu veux que d'un seul regard ses proches t'acceptent et se fassent garant de votre union. Pourtant, tu ne résistes pas à lancer un coup d’œil à ton père. Figure haute, large et grave. Le pli déplaisant à ses lèvres, tu as le même. Un héritage que tu lui dois. Et tu ne sais que trop bien ce qu'il signifie.

— Pourquoi ? C'était bien votre volonté à toi et maman de me voir emprunter le chemin du mariage. Et bien, vous voilà tous les deux exaucés.

Il secoue la tête. Claque sa langue contre son palais, son bras lié au tien. Tu sens ses doigts rageurs pincer le tissu de ton gant.

— Je n'approuve pas cet homme. Il n'est pas pour toi.
— Qui est pour moi ?

Tu réponds du tac au tac, le regard obstinément porté sur la porte massive en bois. Tu connais ses réserves. Pour faire valider votre union, vous aviez fait d'Alexander un autre. Un personnage conforme aux attentes des Lantsov. Mais ton père est malin, habile à reconnaître un écran de fumée lorsqu'il en voit un. Pour le tromper tu n'as que ton assurance et ta détermination. Seulement voilà, Ariana, tu as peur. Certaine de prendre la bonne décision pourtant, mais peur. C'est le bon. Mais il est en total opposition avec tout ce que tu as fantasmé chérir jusqu'à maintenant.

— Sois heureux pour moi. Tu me dois bien ça.

La musique se lance et avec elle s'ouvrent les lourdes portes de l'église. Sans un mot et seulement avec un soupir déterminé tu fais tes premiers pas dans la salle. Ton côté est remplit de gens bien habillés et guindés. Celui de ton fiancé est désert. Tu as une armée, lui à peine le tiers d'une escouade. Pourtant Dieu seul sait à quel point tu jalouses sa situation. Il t'observe d'ailleurs, aujourd'hui. Comme consciente de sa présence, tu lèves doucement la tête vers les figures de marbres qui se font ses intermédiaires. Tu n'as jamais été vraiment croyante. Seulement, tu espères secrètement qu'il te fera grâce de sa bénédiction. Ton cœur bat plus fort à chaque pas te rapprochant d'Alex. Tu accroches son regard, ne le quittes pas, autant pour te donner courage que pour lui imposer de rester à sa place. Arrivée devant lui, tu laisses le traditionnel passage de mariée se faire du père au mari. Tu presses la main d'Alex, étires un sourire presque timide.

— Je te crois. Tu es encore là.

Le prête en face de vous se racle la gorge, signe qu'il souhaite commencer. Comme beaucoup de chose dans cette cérémonie, il a été choisi par des Lantsov, pour des Lantsov. Son accent russe est à couper au couteau et si les tiens écoutent religieusement tu connais assez bien Alexander pour savoir qu'il ne sera pas insensible à se détail. Discrètement te lui assène un coup de coude et lui intime du regard de tenir bon car ton mariage ne doit souffrir d'aucun faux pas.

— ALEXANDER THOMPSON
— Doux Jésus.

Sa voix porte tant que c'est un enfer. Tu sembles te liquéfier sur place, trop consciente que ton fiancé peut d'un moment à l'autre exploser de rire devant toute ta famille, tes amis, bref, cet assemblé qu'il doit conquérir aujourd'hui. Tu te racles discrètement la gorge et malgré les convenances attrape la main de ton presque époux. Tu as soudain envie de t'enfuir d'ici. Tu crois que si tu vas adorer la première danse, tu vas détester cette cérémonie.

N'y avait-il jamais eu de moment aussi solennel et lunaire ? Tes mains dans la sienne, tu le sens presser tes paumes. Tu sais qu'il pourrait les broyer s'il ne se retenait pas. C'est surprenant de constatée que tu es désormais assez habituée pour ne pas tiquer. Ton expression reste lisse, ton sourire rouge qui creuse tes fossettes, l'absolue adoration qu'on attend d'une femme quand tu le regardes. S'il y a une part de spectacle à offrir aux tiens, tu ne peux nier cependant la joie authentique qui te transporte. Aujourd'hui tu te maries. Alexander prononce ses vœux. Tu n'en avais pas lu la moindre ligne si ligne avait-il pris la peine d'écrire. Le discours est... Étonnant sobre et touchant. Tu le soupçonnes de prendre une nouvelle fois sur lui. Tu le regardes en souriant, mais ton expression se fige à une expression toute bête et innocente mais que tu n'avais encore jamais entendu de sa bouche. Tu l'observes, l'air de lui demander s'il avait bien dit pareille chose. Le prêtre pose sur toi son regard pour t'indiquer de prendre la suite. Tu avais préparé un mot. Tu constates en ouvrant la bouche que tu en as aisément oublié la moitié.

— Moi, Ariana Sasha Lantsov, te promet ici de te prendre pour époux et de t'aimer chaque jour que dieu fera. Dans la pauvreté comme dans la richesse, dans la santé comme dans la maladie, dans la tendresse...

Et tu tournes tes paumes dans les siennes pour presses ses mains. Tu murmures pour que seul lui l'entende.

— comme dans la violence.

Tu lèves sur lui un regard entendu. Puis tu reprends.

— Je promets d'aimer chaque partie de toi et de t'être dévouée jusqu'à ce que la mort nous sépare, puisse-t-elle être longue.

Le baiser est bref, mais tu te surprends à ne pas en demander plus. Ton estomac se serre d'une excitation terrible et plus que de tendresse, c'est avec force que tu voudrais le ravir. Vous vous tournez vers l'assemblée et on vous acclame. Reine et roi du jour. Rapidement, tes parents et ta famille viennent vous saluer. Tu offres sourire charmant et merci chaleureux à tous en passant ton bras autour de celui de ton époux. À ton doigt une alliance, signe d'un pacte dont vous-mêmes n'êtes pas certains des termes.

— Ton discours était... Sobre et juste. Ça leur a plu.

Tu désignes du menton ta famille.

— Alex je-

Tu as envie de lui parler. Maintenant que vous vous êtes liés l'un à l'autre, il serait peut-être temps.

— Je n'ai pas menti. J'aimerai chaque partie de toi.

Tu lui lances un regard, l'air de vouloir le convaincre que tu ne veux pas être tenue au secret, encore moins être épargnée. Tu ne veux pas que ton partenaire de vie soit un mystère. En vérité, tu l'espères quelque part plus sombre que tu ne le soupçonnes pour ne pas avoir à culpabiliser de ce que tu vas lui dévoiler toi. Ariana Thompson (Anderson) n'est pas une oie blanche.

— Commence par me présenter aux tiens, veux-tu ?