il est fier ; assez fier pour faire l’effort de s’habiller avec plus d’élégance que nécessaire. aujourd’hui alexander n’a pas seulement sorti sa chemise mais aussi son col roulé, son pantalon à pince, et ses chaussures cirées ; le tout dans un noir si profond que dans la nuit on ne distinguait que son long manteau couleur camel. c’était là le mieux qu’il puisse faire pour rencontrer la femme qui le fait frémir ; celle qu’il n’aura jamais et dont il ne se désole pas de devoir lui courir après.

dans les rues de la ville, sa démarche est assurée, presque dansante. s’il avait pu l’attendre à l'ambassade alexander privilégiait toutefois les surprises dérangeantes qui s’installent d’elles-mêmes sans qu’on puisse les ignorer complètement. comme le fait de s’inviter.

toc toc toc. il est 19h31 et il s’en désole, lorsqu'il arrive à l’habitation d’ariana. quand son elfe de maison vient l'accueillir, il trouve bien assez d'arguments pour que ce soit la maîtresse de maison elle-même qui se déplace jusqu’à lui - et quand elle apparaît à sa vue il leva la bouteille au niveau de son visage, l’air satisfait.

« ariana ! on dirait que tu as oublié notre rendez-vous ? nous sommes le 8 mars, anniversaire de la mort de ma mère. tu m’as invité l’année dernière… ça ne te dit rien ? je te racontais comme à cette date, je me sentais tristement seul, comme abandonné, le souvenir de son cadavre encré dans ma tête, ah, et les cauchemars… et ça t’as bien fait rire. tu as même dit : “ô mon pauvre alexander, tu veux dîner à la maison la prochaine fois ?”, et avant que tu ne t’esclaffes à me dire que c’était une blague, je précise que je suis bien apte à comprendre ton sarcasme, mais je tiens surtout à dire que ce n’est pas digne d’une femme de ton rang, ce genre de boutade. »

suite à ses mots, il se mit doucement à sourire, tel un escroc à découvert mais dont la supercherie ne pouvait ni être démentie, ni être vérifiée. s'il n'était pas totalement convaincue que le prétexte donné serait suffisant pour qu'elle daigne lui offrir sa soirée, il misait néanmoins sur cette alchimie perverse et néfaste qui ne faisait que les rapprocher pour mieux les détruire. en cela, alexander y trouvait autant de bon, que de mauvais - car s'il était celui qui les tirerait vers le fond, elle saurait toujours comment ne jamais sombrer totalement... voilà ce qui fera toujours survivre l'attraction qui les lie.

« fais moi entrer ariana .
je me suis fais beau pour toi. »

toute une palette d'émotion venaient marquer le visage de sa douce ; formant une toile oh si drôle selon lui qu'on ne pouvait qu'admirer toute l'évolution de sa peinture, comme si les textures changeaient au gré du temps. il admire, comme s'il en était l'artiste : surprise, colère, désarroi… colère.

alors qu'il songea à lever une main pour poser sa paume contre la joue d'ariana, une voix masculine lui coupa l'envie - il relève des yeux, perd son regard d'amoureux pour adopter celui d'un chasseur… mais à comprendre la situation, il valait mieux renoncer aux armes… et prendre cela comme un jeu. sourit, alexander, l'amusement dans la peau ; et puis il s'adoucit, comme épris de politesse.

« enchanté. » se contente-t-il entre deux paroles, laissant la scène se faire sans lui. c'est à l'expression de tigresse d'ariana qu’il comprit à quel point deux mondes les opposait - mais il ne s’en préoccupait pas tant, non. alexander savait danser de bien des façons pour plaire au public qui l’observe ; et il savait aussi parfaitement comment gâcher un spectacle.

« vous m’en voyez ravis ! » il dépasse ariana, sans pour autant la négliger : une main se glisse dans le bas de son dos, comme une caresse. mais sa douceur n’est jamais pure ; avant de retirer sa paume il a rendu ses doigts crochus comme pour la griffer, pourtant sans lui infliger de douleur.

près de cet inconnu qui lui gâche sa soirée, il initie une poignée de main pour se confondre dans toutes ces banalités sociétales qui forcent l'entendement entre deux êtres. « vous êtes sacrément aimable de m’inviter à sa table. comment avez-vous rencontré ariana ? moi ce fut lors d’un meeting entre politiciens. à l’époque je m’étais tenté à cet art compliqué ; mais voilà que je n’ai pas vraiment ce talent pour l’élocution et la prestance… heureusement ariana n’est pas de ceux qui s’arrêtent à si peu. sa curiosité… peut bien l'amener à s’intéresser à des bêtes de foire. » il laisse un rire se répandre, de sorte à masquer le caractère hostile de ses insultes déguisées. emporté par la simplicité de leur rencontre, il se tourne toutefois vers l’objet de tous ses désirs, espérant lui faire croire que la barrière du langage ne peut exister entre eux-deux. « Здорово, ariana. » , ses lèvres arquées pour témoigner de sa malice. il s’installa ensuite à table, déposant sa bouteille au centre. « si j’avais su, je serais venu mieux armé. pinot noir de chez bolney estate ! »

dans son coin, visiteur imprévu à l'oreille curieuse, il écoute en sirotant le vin qu'il a lui-même apporté. il faut avoué que depuis sa dernière escapade chez ariana, il garde en lui un soupçon d'amertume quant à consommer une boisson dont on lui gâche la simplicité du goût. toutefois une caresse vient balayer ce souvenir de sa mémoire, et il sait qu'elle joue dès à présent avec sa patience ; il se risquerait presque à lui demander d'y aller plus fort si un homme n'était pas là pour gâcher sa soirée et brider ses fantasmes.

« tout à l'air parfait. » il tourne vers elle la jambe sur laquelle elle a déjà son emprise, reposant son verre à pied. « hm ? c'est coutume, en russie, d'enfermer les femmes à la maison ? est-ce que les hommes du pays ont peur de constater qu'elles se débrouilleraient mieux sans eux ? elles sont pourtant si fortes, même si j'avoue que leur poigne manque de fermeté. c'est vrai ariana, il faut savoir être plus sauvage, dans tes initiatives des fois ! » il rit, fier de son humour déguisé alors que subtilement il la suppliait de presser avec rage ses doigts contre sa cuisse. mais il sait que sa parole sur la position des femmes dénote malgré tout des mœurs que d'ordinaire, il défend ; mais ça, encore une fois, seule elle le sait. il sert un peu de son vin à l'invité, avant de proposer son verre à ariana sans même la regarder ; le genre de geste qu'on n'a que pour son partenaire de vie ; celui qui veut dire « goûte dans le miens avant de te servir. ». et s'il n'y pensait pas, son inconscience en revanche luttait pour savoir si cet acte était un signe de propriété, ou une simple courtoisie débordante d'un amour certain. toutefois, l'un et l'autre n'étaient pas incompatibles.

« vos parents, vous disiez ? à vous entendre haymitch vous étiez destinés à vous marier. ahaha. c'est beau les raccourcis. » mais il ment et ça s'entend ; par son sarcasme il espérait bien lui faire comprendre que la nature de leur relation n'avait aucune profondeur. « mais c'est vrai que tu as bientôt trente ans ! et toujours sans époux… » il s'adresse ensuite à haymitch. « heureusement qu'on a jamais renvoyé quelqu'un de son poste pour motif de célibat. pas vrai haymitch ? quel âge avez vous, tiens ? »

il connait les risques de sa venue, quand bien même il n’avait pas envisagé la présence d’un inconnu sous le toit de la femme qu’il convoite précieusement ; le coeur saignant (il l’ignore volontairement) de savoir qu’il ne l’obtiendra jamais.

les secondes défilent et son sourire se fait de plus en plus doux, au fur et à mesure qu’elle marque sa cuisse comme s’il était devenu son bétail.

« avec une préférence pour le vin rouge. » répond-t-il alors que son sarcasme lui hurlait d’être plus taquin qu'une simple référence au sang.

laissant la conversation se faire il se permettait toutefois des interventions quand l’envie le lui suggérait ; le plus souvent pour relever un détail qui pourrait s’avérer gênant.

« c’est vrai ça, haymitch ! mariez vous avant ariana, une bonne femme pareille devrait suivre la cadence, avec un bon exemple. »

son absence qu’il justifia comme il pouvait après des mots si lourds, alexander s’en réjouissait sans pudeur. dès qu’elle s’exprime son regard est vissé sur elle, qui se lève pour le rejoindre - étrange réflexe qui semblait naturel il se recula un peu avec sa chaise pour l’accueillir.

« je ne savais pas que tu avais quelqu’un chez toi ce soir ariana. » l’honnêteté sans élixir de vérité, ses yeux dans les siens pour l’admirer comme elle l’aimait. ses mains autour de sa taille, il venu la tirer contre lui, enfouissant son visage contre son corps si frêle dont l’odeur lui avait cruellement manqué. « je ne serai jamais jaloux de rien ni de personne. je sais que tu ne trouveras jamais plus complexe que moi… je sais que je serai toujours ton projet le plus intense et stimulant. tu peux bien coucher avec le monde entier, je sais déjà que tu penseras à moi avant, pendant, et après l’acte. » il releva son visage, son menton contre sa poitrine mais ses yeux toujours désespérément à la recherche des siens. « tu n’as pas peur qu’haymitch nous voit comme ça ? je n’ai pas l’intention de te lâcher. s’il reste dix minutes de plus j’aurai même des paroles outrageantes. » ses paupières sont lourdes, il semble se reposer pourtant son emprise sur elle se resserre. « je peux être un bon citoyen pour toi si ça t'amuse de te croire dominante, mais pas pour cet ignare. »

il a beau vouloir être soumis elle dément, insinue qu’il puisse être capable de mensonge. son regard profond saurait être noir mais pour elle il y a toujours l’espoir d’un pardon, l’envie d’ignorer ses travers ; après tout elle ignore beaucoup des siens.

mais ce désir… infâme… ariana… de vouloir l’enterrer plus bas que terre… quand il se dévoue si hardiment pour un morceau de pain qu’elle se refuse constamment à lui céder. oubliait-elle l’essence même de son âme ? alexander est un fou.

une caresse, tendre, le genre qu’il arbhorre, le genre qui lui donne envie de briser des os, d’ouvrir des plaies, de couper la chair et d’arracher les ongles. mais il la regarde, sans osciller. l’esprit grouille d’horreur les yeux sont amoureux. mais son ordre. sans s’en rendre compte son visage devenait plus grave.

c’était rare, pour lui, de perdre ce sang froid divin qui sauve sa vie à chaque instant. si rare mais il n’était pas surpris qu’elle soit celle qui brise le masque ; elle avait été désignée, choisie, choyée pour ça.

quand elle s’éloigne, véritable reine au coeur de glace, il reste figé dans un silence. lorsqu’elle boit, il comprend seulement que ses désirs n’étaient pas des fantasmes mais des réalités qu’elle exigeait sans retour ; le voilà enfin qui exprime ce que son coeur profondément voulait cacher :

un mépris intense, niché dans un sourire en coin. quand les pas d’haymitch se font entendre, il prononce : « non. » la voix monotone, le timbre comme plat.

assez de courir, assez d'obéir, assez de soumission, assez d’envie pour autre que lui. assez. il en avait assez. se donner du mieux qu’il peut n’est pas - n’est jamais assez. il refuse, réfute : accuse. non. c’était bien trop, il ne recevait pas assez pour son rôle.

« je ne peux pas te privilégier à moi. » son verre gagne ses lèvres, d’une gorgée pleine il vida la coupe, se resserre sans un regard pour l’ingrate. il attend qu’haymitch apparaisse, que le clown de cette soirée vienne leur faire face. son sourire est intact.

lorsque l’invité légitime se prépara à parler, alexander toutefois sorti dans une vivacité étonnante sa baguette de sa poche, pointée sur l’homme qui dérange ses projets.

« bloclang ! »

l’effet de surprise est intact, sa fierté aussi. il place ses coudes sur la table, joignant ses mains sous son menton, sans lâcher sa baguette. « j’hésitai avec confundo aussi. » quand haymitch se ressaisit, il n’hésite pas à interrompre ses moindres mouvements. « stupéfix. » lancé avec moins de vivacité toutefois, sa magie témoigne de sa puissance et il termine au sol, immobile. « là maintenant j’ai très envie de lui découper la peau. alors. ariana. quel invité vas-tu congédier ? »

alexander ne voulait plus jouer.

il aurait dû le savoir : son jeu hargneux ne plaît que quand elle le maîtrise. l’entendre hurler son prénom avec autant de vivacité, oh, il n’en demandait pas tant… mais voici qu’elle se retourne contre lui, lui imposant silence et immobilité.

la rage était une lueur que ses yeux reflétaient amèrement. il écoute - que faire d’autre ? patiente. par son discour il n’a plus de colère, que du mépris. chaque nouvelle phrase écorchant ses oreilles il rêvait de pouvoir protester pour la faire taire, mais il se soumet (encore, comme toujours), bien heureux d’entendre qu’elle va enfin lever son emprise.

quand le sort prend fin, il tourne sa tête pour faire craquer sa nuque, roule un peu ses épaules au passage. un coup d’oeil sur sa baguette, et c’est là qu’il craque.

d’un rire moqueur, au sourire qui reste même quand de son il n’en fait plus. son visage fait non et il la regarde enfin, marqué de frustration, de doute, de rage insipide mais d’insécurités profondes, à la fois.

« azkaban ? je savais la justice magique franchement mal foutue, mais dieu que vous êtes forts en politique pour envoyer crever le moindre rat qui viendrait gâcher votre journée. des désirs des désirs des désirs, tu n’as que ça à la bouche, et quand on te les sert, si ce n’est pas sucré tu les vomis. »

il se lève, les bras pliés pour garder les mains en évidence, de part et d’autre de sa tête - posture de coupable dont on accuse le pire.

« j’ai toujours su que nous ne jouions pas dans la même cours ariana lantsov, mais jamais je n’ai manqué de respect à ta personne au point d'insinuer que ton existence était aussi vide que putride. et jamais je n’aurai levé ma baguette contre toi. »

du dégoût. c’était finalement ce ressenti qui venait se glisser dans tout son corps pour le tenir debout, face à cette femme qui avait osé la magie contre lui. il se penche une seconde, assez doucement pour qu'on ne le reprenne pas à être un détraqué, pour récupérer sa baguette, d’une main timide, et la ranger dans sa poche, avant de reprendre sa posture de criminel arrêté.

« j’ai l’impression d’entendre ma mère. une déception perpétuelle dont la mort serait un cadeau pour le monde… elle me disait pareil. et c’est même pire, en fait ? si elle prétendait que je n’aurai jamais dû exister, toi tu te tues à me faire comprendre que ma simple présence ici est un cadeau que tu me fais. je devrais te remercier à genoux, ariana, d’accepter que tu respires le même air que moi ? je devrais ? veux-tu que je le fasse ? et comment te sentiras-tu quand tu m’auras réduit en esclavage ? en seras-tu heureuse, enfin ? détruire pour se sentir vivant… au final, nous ne sommes pas si différents. mais quand bien même… »

il baisse enfin ses mains, récupérant sa propre bouteille.

« aurais tu envie à tout hasard de faire amende honorable ou dois-je rentrer chez moi en étant convaincu que je ne suis qu’un clébard de merde pour tes beaux yeux de princesse ? »

c’est que même s’il faisait l’effort de vouloir la comprendre : il ne le pourrait pas. la comédie dramatique grotesque dans laquelle il se prend nuits et jours alexander, n’est finalement qu’une pièce pour lui-même ; et personne n’est visiblement capable de rejoindre ses codes. la société, décidément, maîtrise absolument tout. quel gâchis.

elle se veut calme, pondérée. belle ariana garde son rôle de perfection, embassadrice et femme de caractère quoi qu’il lui en coûte. jamais elle ne semble vouloir ternir ce grand tableau qu’elle a d’elle-même ; et pour rien au monde alexander ne pourrait y apposer la moindre signature… dieu que ça le désole. mais comment pourrait-il la vandaliser ?

il lui faut toujours et inlassablement rester dans les clous… que la société jamais ne vienne l’emporter dans les tréfonds de sa prison.

quand elle lui somme de prendre congé, il reste immobile. son regard dérive dans l’espace, ses lèvres passent sous sa langue. c’est vrai qu’elle incarne magnifiquement bien la perfection, même dans sa colère, même dans ses doutes.

il pourrait passer sa vie toute entière à se moquer d’elle simplement pour admirer la moindre des crispations de son visage. peut-être était-ce ça, son amour à lui ? non… non le sien n’était pas dans la taquinerie mais dans l’horreur.

une gorgée de sa bouteille, puis il la dépose à nouveau sur la table. si ce devait être l’acte final de cette soirée, il voulait une fin de spectacle tout à fait mémorable. en quelques pas seulement il venu dans son dos, l’entourant de ses bras, déposant délicatement son menton dans le creux de son épaule. inspire, l’animal ; il se délecte une dernière fois… serre son étreinte mais se retient de l’étouffer et alors, il cesse, laissant plutôt glisser ses paumes le long de sa taille pour finalement l’inviter à se retourner face à lui. c’est à cet instant qu’il leva à nouveau ses avant bras, ne se défaisant pas de ce rôle abject que l’univers tout entier lui offre sans honte.

coupable alexander, coupable d’être vivant et c’est déjà un bien grand crime il le sait, alors il ne se défend pas.

« ne dis rien. »

car tant que le silence les gouverne ils pourront prétendre que cet instant intemporel n’a jamais prit racine dans leur guerre, mais bien avant ou bien après.

sans la toucher avec ses doigts de monstre, il garde la posture, mais se penche pour lui voler un baiser. idiot était-il de croire qu’un seul marquerait une bien belle fin, alors que chaque jour il s’affame d’elle. le second suivi, moins tendre, le troisième, plus gourmand. il s’avance, lui impose de reculer, pour que quand elle se heurt à la table ; lui puisse baisser les bras pour tenir le rebord du meuble avec hargne.

de ses lèvres seulement il lui montra sa servitude, sa passion, ses désirs toujours trop grands. il s’arrêta toutefois dès qu’il se surprit à vouloir y mettre les dents.

« bark bark. » puis il se redresse, dans un sourire insolent. sans un pardon de sa part, lui ne se considérait plus que comme le clébard de sa reine, après tout… pourquoi se fatiguer de plus de mots, après un tel moment. il fait le tour de la table, sans un regard pour elle, pour finir le verre à moitié vide d’haymitch, avant de lui dire, d’un signe de main bref et dédaigneux, qu’il s'exécutait en s’en allant.