Il est agacé. Après avoir fait les cents pas une grande partie de la nuit dans le salon, après n'avoir pas fermé l'oeil du tout autant à cause de l'insomnie que de tout ce qu'il entendait à l'étage. Ezra et Noah, les mots doux, les moins tendres, les gémissements, l'odeur du sang -animal, dans tous les sens du terme. Il aurait pu entendre jusqu'au froissement même des draps s'il s'était approché de plus près, mais il ne s'y est pas risqué. S'est détourné même, dégoûté (écœuré). Noah ce fils de chien, il peine encore à comprendre d'ailleurs comment Ezra fait pour toujours tomber dans ses bras. C'est infernal.

Aussi infernal qu'Elijah de bon matin (tout le temps). La porte du placard qu'il claque un peu trop brusquement alors qu'il tient un paquet de céréales entre ses doigts, Hermès hausse les sourcils avant de lui rendre son regard dégoûté. Il essaie de tenir, de faire un effort encore mais avec cet enfoiré de vampire tout est tout de suite bien plus compliqué.

— Pousse toi.
— Ta mère.

Un peu comme un bonjour de bon matin, sans qu'il ne se pousse pour autant. Il ouvre un second placard pour récupérer un bol et se servir presque trop tranquillement.

— Et toi ? Visiblement à rien alors arrête de jacasser tu casses les couilles.

Choppe une cuillère dans l'un des tiroirs pour l'enfoncer dans son bol, puis part dans le frigo se servir du lait. Le remettre après avoir terminé pour que tout soit clean. À l'étage entend Noah qui se réveille, ça lui arrache un grognement frustré tandis qu'il porte sa première bouchée à sa bouche, adossé contre le comptoir. Ignore volontairement la pique sur Atlas par flemme de répondre et plus préoccupé par ce qu'il entend à l'étage. La porte qui s'ouvre et se referme, puis après quelques instants plus tard Noah qui descend en souriant. La première chose qu'il voit ce sont les marques sur son torse, puis celles dans le creux de sa gorge (il déglutit), la première chose qu'il sent c'est l'odeur d'Ezra qui l'imprègne encore tout entier, se dérobe à sa peau pour venir le faire rager. Lui, Elijah aussi.

C'est qu'il est fier ce con en plus. (évidement)
Il devrait pas.

— Quel clochard putain.
Il a vraiment rien capté ce bâtard.

Ça sonne aussi comme un bonjour alors qu'il décale déjà balancer sa merde dans la salle de bain. Hermès lève les yeux au plafond avant de les reporter sur Ezra qui descend à son tour, enfin. Il a sa tête des mauvaises nuits, rien d'étonnant avec ce qu'il avait entendu après ses affaires avec Noah.

— Salut salut. D'abord, café.
— Yo.

Nouvelle bouchée de céréales, un sourire qu'il retourne à Ezra avant de décaler sur le canapé. Choppe la télécommande, à défaut d'avoir sa baguette à portée de main, pour allumer la télé. Peu importe la chaîne, qu'il puisse simplement se retenir d'encastrer la moitié des personnes de cette pièce dans le mur.

Ezra serait pas super content.
Et ça lui prend déjà la tête rien que d'imaginer devoir réparer sa connerie. Il va tenter de rester sage pour une fois, malgré ses poings qui appellent au sang.

À peine le temps de poser son cul dans le canapé que ça commence. La tête dans le frigo, les échanges, les insultes. Il a la flemme de tout ça, Hermès. Pas qu'il ait décidé dans un élan de bon coeur d'être sympa aujourd'hui, il est simplement fatigué. Des jours qu'il ne dort pas et bientôt la pleine lune. Y en a que ça énerve, lui ça le crève. Purement et simplement. Alors il ne réagit pas, du moins il n'a pas besoin de se retourner pour imaginer une scène qu'il connaît par coeur et préfère se renfrogner en mangeant ses céréales les yeux dans le vide. C'est mieux pour Ezra s'il ne fait rien.

Mais comme d'habitude il faut que Noah ouvre sa gueule.
Regarde ta télé et t'en mêle pas.
Pour une fois qu'il comptait ne rien faire, c'est con.

Il se pose son bol sur la table basse et se retourne pour s'adosser contre le dossier du canapé.

— Ta sale pute de mère t'a jamais apprit à pas agresser les gens qui t'font rien Priest ? Ou alors c'est une invitation que t'assumes pas. Fallait l'dire que tu crèves à c'point d'mon attention, j'termine mes céréales et j'suis tout à toi.

Sourire carnassier qui se dessine à ses lèvres alors qu'il se retourne pour récupérer son bol et se remettre dans sa position initiale. Parle plus fort pour que tous l'entendent.

— Fais toi bien enculer en attendant connard !

Un fuck en l'air puis il reprend sa dégustation en tentant d'ignorer au mieux ses doigts qui tremblent. Il a besoin de se défouler mais il ne veut pas, pas sans justification valable. Pas devant Ezra. C'est difficile (ça sonne faux) mais il le faut.

Lève d'ailleurs les yeux sur ce dernier lorsqu'il s'arrête devant le canapé, le regard un peu perplexe, il le dévisage un instant.

— Quoi.

Tire sur son poignet lorsqu'Ezra achève de poser son bol sur la table pour le faire s'assoir sur le canapé juste à côté de lui, et lorsque c'est fait, il n'attend pas pour s'allonger de tout son long en posant sa tête sur ses genoux. Le bol sur le ventre, ses iris dans ceux d'Ezra qui semble un poil perturbé par tout ça.

— T'es grave plus confortable que l'appuie-tête, y a un problème ? J'ai pas dormi.

Comme une excuse pour justifier son acte. La vérité c'est qu'il en avait simplement envie et qu'il devine d'ici à quel point ça doit faire chier ces sales rats de Noah et Elijah. Alors il profite, comme toujours. Sourit encore alors qu'il prend une céréale mais avorte son geste avant de quitter le bol. L'esquisse se perd alors qu'il le regarde encore, Ezra, qu'il avoue le plus honnêtement du monde.

— T'as une sale gueule.

Sympa mais vrai.

— Nourris-moi s'te plaît. Flemme.

— Ça t'amuse de les exciter comme ça ?

L'ombre d'un sourire en coin qui se dessine à tes lippes, taquin.

— Qui sait.
Oui.

La vérité c'est que tu fais ça par envie, tout ça n'est au départ rien d'autre qu'une pulsion que tu as naturellement assouvie -pourquoi pas après tout ? Les faire rager tous les deux ce n'est qu'un bonus en plus et encore. T'en as rien à foutre sur l'instant, pas assez réveillé et trop fatigué pour t'en préoccuper. Les doigts d'Ezra dans tes cheveux t'arrachent un léger souffle de satisfaction alors que tu lui demandes de te nourrir. Ça aussi, ce n'est qu'une envie à la base. Une lubie étrange qui sonne comme une provocation mais rien de calculé.

Il n'a même pas le temps de se pencher totalement, Ezra, que déjà tu te fais violemment éjecter du canapé. Le front qui cogne contre le bord de la table basse en même temps que tout se renverse sur toi t'arrache un grognement à la fois plaintif et surprit alors que tu restes au sol, immobile. Écoute à peine Elijah te hurler dans les oreilles avant d'embarquer son frère plus loin sur l'accoudoir.

Bordel de merde.
Les poings serrés sur le tapis, tu trembles.

Inspire, expire. Une goutte de sang pour rouler de ta tempe jusque la moquette alors que tu inspires encore. Expire. Ton sang qui se mélange à celui poulet des céréales d'Ezra. Tu prends appuie sur le bord de la table renversée pour te lever, attrape de ta main libre l'un des deux bols en céramique. Fusille Elijah du regard, assassin. Tu souris plus et tu prêtes même pas attention à Noah qui t'a enjambé pour aller se poser près de la télévision. Télé qui fait un bruit assourdissant soudain.

C'est donc dans l'écran que part se loger sauvagement le bol.
Que ça fasse silence.

Puis tes iris qui viennent se poser droits sur Elijah.

— Je mords le premier qui approche. Et je vide de sa merde de sang.
— Ah ouai ?

Ok.

Sans le quitter lui des yeux tu t'approches, ne feint même plus le pseudo calme que tu essayais tant bien que mal de garder alors que ces imbéciles te provoquaient sans cesse.

— Alors viens.

Tes doigts pour griffer (s'agripper) à la clavicule d'Elijah alors que ton poing libre s'abat contre sa joue avec une force inouïe -celle du loup-garou qui bout et que tu renfermes depuis trop longtemps. Celui qui griffe, griffe, griffe à sang les parois de ton être pour s'évader au clair de lune. Encore une putain de semaine à tenir.

Une semaine de trop.
Tu craques.

— VIENS PUTAIN MORDS-MOI SALE PUTE !

Tu lui sautes dessus pour vous faire tomber à terre (s'il ne l'était pas déjà au premier coup), que sa tête claque sur le sol, qu'il s'éclate le crâne ! Tu veux qu'il crève. Alors tu frappes. Encore, encore et encore, perds totalement le contrôle.

— VAS-Y T'ATTENDS QUOI MORDS ENFOIRÉ ! J'vais te fumer Strauss, J'VAIS T'FUMER PUTAIN DE CONNARD DE MERDE, MORDS !

Mords.
(vous n'attendez que ça)

T'as mal.
Ses crocs dans l'épaule, ses doigts qui te griffent, se plantent dans ta chair comme tu plantes tes points sauvagement dans la sienne et tu ne hurles plus. Ce ne sont plus des hurlements mais bien des râles, des grognements presque bestiaux -t'es plus vraiment toi-même Hermès quand ce connard t'aspire le sang. Tu te sens vaciller bien trop vite, pour compenser alors tu frappes plus fort. Une fois, deux fois. Puis tu finis au sol, la tête qui cogne contre le canapé t'arrache un grognement douloureux. Ça tourne pas mal mais t'y voit encore assez clair pour constater qu'Elijah est ligoté, que Noah joue les chevaliers et qu'Ezra... Ezra t'en veut.

Putain.

Les mains à plat contre le carrelage pour t'empêcher de t'écrouler, t'as du mal à respirer. Essoufflé par la rage et l'adrénaline, la violence et le manque de coordination, de sang. Ton sang putain. T'as craqué, t'as aimé ça, hein ? C'est sûrement ça le pire dans l'histoire, c'est que t'as aimé et il a tout vu Ezra. Il t'a vu grogner, menacer, frapper et sourire, il t'a vu fou comme rarement il t'avait aperçu avant. Alors t'as pas pu lever vers lui mais t'as entendu. Il est déçu Ezra, il s'enfuit -la porte de la salle de bain que t'entends se verrouiller. Tu dis rien mais tu te lèves aussitôt, chancèles, t'as les mains qui tremblent encore et la gerbe, entre deux envies de meurtres, mais t'avance sans te soucier des deux restants.

Il ne devait pas voir ça, Ezra.

— Fait chier putain...

Soufflé avant que le plat de ton poing ne cogne doucement la porte de la salle de bain. T'as plus la force et t'as bien trop honte (bien trop mal).

— Ez' ouvre s'te plaît.

Cogne une seconde fois.

— Ouvre-moi, j'veux pas avoir à défoncer la porte. Faut qu'on parle.
Vraiment.

Alors tu se laisses glisser contre le mur juste à côté en attendant qu'il daigne t'accorder un peu d'attention. T'as mérité tout ça. Tu l'as pas cherché mais tu sais que tu la mérité, et c'est sûrement pour ça que ça fait aussi mal et que les tremblements de tes doigts ne s'arrêtent pas.

— Ezra..

Lâche un soupir avant de laisser ta tête se loger en arrière, contre le mur. Tu gardes un œil sur le bout du couloir, au cas où Elijah et Noah décideraient encore une fois de venir tout gâcher.

T'es tellement mort que tu réagis même pas quand Elijah apparaît au bout du couloir pour rejoindre sa chambre. Trop las pour réagir, lui trop rapide pour que tu ais le temps d'être surprit ou de lui grogner dessus de dégager de là. T'en as même pas besoin d'ailleurs, puisque quand toi tu t'entêtes à essayer de raisonner Ezra, il claque la porte. Tant mieux. T'es pas heureux mais peut-être un peu soulagé. Tu sais pas trop, c'est un peu confus sous la couche de haine que tu lui voues à lui et à Noah.

À côté de ça Ezra refuse de t'écouter.
Casse-toi qu'il dit.
Ah.

Il croit vraiment que tu vas t'en aller maintenant ? Tu peux pas. T'en as ni la force ni l'envie, tout ce que tu aimerais c'est lui parler, lui expliquer -expliquer quoi d'ailleurs ? Que t'as un problème ? Il doit le savoir maintenant. Pourtant tu insistes, encore, pendant que l'autre abruti range le bordel qu'il n'a pas fait mais dont il est la cause. T'as été trop con pour te laisser avoir, encore, t'as été trop faible Hermès. Et maintenant c'est Ezra qui renifle, te plante même sans te regarder.

— Parler de quoi ? Que tu prends ton pied à te faire sucer le sang par mon frère ?
— Ouai, entre autre.

Parce que ça sert plus à rien de mentir, il a tout vu, ils ont tous tout vu et ça t'enrage. Ton poing qui se serre un peu (toujours tremblant) alors que tu retiens de justesse la connerie qui allait sortir, celle qu'on évite de balancer quand on essaie de se réconcilier avec quelqu'un tu sais ? Le fameux "j'veux pas entendre ça d'la bouche du mec qui s'fait sucer par un enfoiré avant d'aller gerber le reste de la nuit" ou quelque chose du genre.

Et finalement, après un peu d'insistance, il cède.
Mais vous êtes bien trop vite stoppés par Noah qui se pointe le sourire aux lèvres et un bol de céréales à la main. Il est sérieux là ?

— Putain mais quel clébard.

Marmonné dans ta barbe, même si t'es sûr qu'ils ont tout entendu.

— Range ta queue tu bandes, salope.

Si tu sens son regard sur toi, de ton côté tu ne le regardes pas parce que tu sais que si tu le fais tu vas lui sauter à la gorge -et tu veux pas. Même si tu kifferais. Alors tu prends sur toi, encore, le laisse jubiler et pavoiser comme la chienne qu'il est en attendant de voir si Ezra va mordre ou non à l'hameçon.

Il le fait.
Sérieusement ?

Claque ta langue contre ton palais alors que la porte s'entrouvre et que tu le vois attraper le bol. Tu boues intérieurement et de rage claque ta main sur le bois quand il va pour refermer; tu n'as peut-être plus toutes tes forces mais ça reste assez pour les retenir, lui et cette foutue porte. Rapidement ta main libre vient saisir un de ses poignets et malgré les vertiges tu te redresses rapidement.

— Même pas en rêve Ez.

Les iris qui le jugent un peu malgré eux, t'es déçu Hermès. Vous étiez censé parler, il avait accepté et il a fallu que cet enflure se ramène pour qu'il change d'avis. Ça fait mal mais t'acceptes tant bien que mal -t'as pas vraiment le choix, hein ? Ceci dit, tu ne dégageras pas.

Ton corps qui profite de sa surprise pour se saisir du bol et le poser sur le premier meuble à portée de main (qu'on t'accuse pas encore de tout gâcher) tu l'attrapes lui ensuite sans prévenir pour le porter sur une épaule, celle où tu n'as pas été mordu, et l'emmener jusqu'au canapé, l'adrénaline de ta colère t'aidant à ne pas tanguer.

— Tu m'emmerdes.

Grogné en chemin, sans préciser auquel des deux tu t'adresses. Puis, tu le laisses tomber dessus sans délicatesse pour t'assoir à côté de lui. D'un regard l'empêche de ne serait-ce que songer à se relever pour partir ailleurs, c'est mort.

— Il va t'ramener ton bol, tu l'suceras plus tard s'tu veux l'remercier.

C'est quand même sorti finalement.
(sel et jalousie quand ça nous tient)