L'argent rend Eamon bavard.
Moira l'a vite compris.
Et quand il lui mentait, elle lui prouvait que cela ne servait à rien. Alors il n'essaie plus, laisse sa confiance se poser et profite de leur accord tranquillement. D'habitude froid et taciturne envers toutes personne se rapprochant un peu trop près de la loi, l’empoisonneur s'est détendu avec le temps. Avec un peu de chance même, lui accorde un sourire honnête.
Surtout quand cela concerne de l'argent, et qu'il va dans sa poche.

Moira ne sera pas accueillie par un de ces sourires aujourd'hui; Eamon attend. Bien que l'endroit soit charmant, entouré de roses qu'il observe déjà depuis vingt minutes, bras croisés, il patiente péniblement, toujours vêtu élégamment. Cette fois, l'extravagance de ses robes de sorciers n'est pas au rendez vous. Il évite, lorsqu'il s'agit de tels rencontres... Mis à part ses longes cheveux à peine attachés, il se fond dans la masse.
Contrairement à cette femme au pas déterminé qui s'approche de lui.
Mise en valeur par sa tenue, difficile d'en détacher son regard.
Ses sourcils se froncent légèrement de confusion : c'est elle.
Sans hoodie, dévoilée de toute panoplie discrète, pas de lunettes pour cacher son regard...
Une autre femme, qui coupe le souffle, jusque dans son attitude, qui jure avec celle dont elle s'est présenté à lui.

Aucun mots.
Juste lui qui se redresse, prend le temps de découvrir du regard cette nouvelle personne.


Large euphémisme, et pour un tel retard, et parce que c'est dans sa nature, elle ne recevra pas de compliments sur cette tenue. Ni d'aveu sur la surprise qui s'est emparé de lui, juste du déni.
Une fois analysée, il claque doucement sa langue sur son palais avant de détourner le regard, secouant légèrement la tête.


Franchement, ce qu'il faut pas voir ni entendre...

Greengrass.
Son regard s'illumine.
La famille de sang-pur ?
Voilà que sa grand-mère aurait de quoi être fière de lui, à fréquenter les dignes sorciers au sang noble. Pour des causes discutables.
Non... Ce serait trop cocasse.

Toutes ces réceptions organisées à la maison Ainsley, toutes ces tentatives de s'approcher de ces familles influentes, de nouer des liens solides avec. Ces maudites danses et rêves de grandeur imposées sur les générations suivantes, cette poursuite de l'échelle sociale, Eamon l'avait abandonné; elle ne faisait que venir d'elle même maintenant. Même une Smith investissait dans ses sombres affaires...

Manque de confiance, lui ?
Amusé, mais juste un peu.
Par contre, la bourse qui atterrit sur ses genoux lui arrache un sourire.


Son charme unique en son genre, composé d'arrogance, de méfiance et d'une façade doucereuse pour mieux cacher les deux premiers.
Eamon entrouvre la bourse, y plongeant un bout de ses doigts, évaluant vite fait la somme bien que ce ne soit pas nécessaire.
Il possède un minimum de confiance...
Alors il la range, et pose à nouveau son regard sur cette femme changée.


Si, complètement.


Mais avec quel Greengrass avait-il donc affaire ?
Jeune, il n'entendait que leurs prénoms, ceux des Lestranges, tous ceux de bonne famille. Ils sont n o m b r e u x.


Cassandre ? Moira ?
Enfin un visage pour ces noms qui accompagnaient vaguement son quotidien.

Elle n'a pas tort.
Si Eamon est doué en potion, poisons et concoctions en tout genre, d'autres domaines sont sévèrement délaissé, notamment la comptabilité. Il essaie, et c'est le mieux qu'il puisse faire...

Moira Greengrass.
Son intérêt grimpe lorsqu'elle prétend qu'on aurait peu entendu parlé d'elle.


Les sang purs, sujets fréquents des repas, plus que les influenceurs ou la politique. Des questions sur ces enfants au nom doré, dans la même classe que ses soeurs, et s'ils sont leurs amis.
Mais il n'avait jamais fourni cet effort.
Eamon ne faisait qu'amasser le plus de connaissances possibles, pas les amis.

Il range précieusement la bourse dans sa poche, laissant un soupir discret lui échapper, avant de relever les yeux vers Moira.
Bons augures ?
Un silence s'invite.
Puis il se laisse s'enfoncer légèrement dans le banc, perdant son regard droit devant lui, à garder son visage le plus impassible possible. Alors qu'il bouillonne encore de ce rendez vous à la gare.


Plus de loup au pelage blanc qui s'invite chez lui, plus d'ennemis qui tremblent s'ils osent le provoquer. Plus d'amour inconditionnel et de dévotion sans faille.
Juste lui, son talent, et les promesses d'un vieux serpent.


Il profite de cette identité fraîchement révélée pour enfin prononcer son vrai nom, le soufflant, en pleine réflexion.


Savoy s'en tire trop bien à son gout.
Lui aussi pourrait trembler, juste un petit peu.

Seulement aujourd'hui.
Et toutes les autres fois, oui.
Pourtant il demande avec parcimonie. La méfiance insuffle chaque mouvement, chaque parole d'Eamon Ainsley. Car demander une faveur c'est admettre une faiblesse, demander de l'aide c'est se reposer sur quelqu'un d'autre, et se risquer soi même. S'il désirait véritablement demeurer intouchable, alors il ne devrait même pas lui en parler. Car s'il arrive quelque chose au directeur, quelqu'un pourrait faire la connexion.
Quelqu'un pourrait le nuire.
Et même si Moira vient tout juste de lui offrir sa véritable identité, acte de confiance dit-elle, l'idée qu'elle le trahisse le hante encore.
Car, après tout, ce ne sont que des mots.
Ils s'oublient.
Et lui, pèse le pour et le contre.

Sa tête se baisse finalement, yeux sur ses bagues.
Vaincu par le besoin d'informations.


L'homme au seul ami.
Celui qui lui a arraché le sien.


Même s'il désirait suivre les pas de sa grand-mère et se laisser à la maltraitance d'elfe de main, un certain serment l'en empêchait.
Puis finalement, ses yeux noirs viennent se planter dans ceux de Moira. Elle aussi, reste très énigmatique... Mais un mystère à la fois.
Eamon lui adresse un léger sourire.
Comme pour inspirer confiance, rassurer sur ses intentions.


Il s'en tire juste trop bien.
Eamon ne peut pas le laisser s'en tirer comme cela.

Que ses yeux continuent de chercher, car les siens retournent aux jardins, sourcils légèrement froncés. Antoine Savoy l'agace. Il aura juste suffit de lui confisquer Croyance, et le voilà plongé dans un ennui désespérant. Alors, il ne faudrait pas que Moira se doute de la frustration qu'il lui provoque, en continuant de fixer ces roses, plus loin.

Eamon hausse les épaules; Mobby n'est pas important au point de lui expliquer qui il est.
Même si, en cherchant, elle découvrira sûrement ses origines à lui aussi. Que lui et l'elfe de maison se connaissent très bien.
Ce sera une petite surprise...

Un nouveau sourire, discret, au coin de ses lèvres.


Oh, il n'attend que de le revoir.
De lui sourire, de prendre l'espace et de venir parler des sujets qui fâche. Il a promis de ne pas malmener les hybrides, pas des les sorciers comme lui...
Finalement, ses yeux reviennent vers elle.
Difficile d'y cacher la malice.


Il rêverait d'avoir d'une bonne excuse pour en faire un ennemi : il leur fait plus facilement confiance.
Eamon se penche légèrement vers son interlocutrice;


Son sourire s'agrandit.
Qu'il lui donne seulement une bonne raison de l’empoisonner...
Et il lui redonne son espace, avant de soupirer et de se permettre un peu plus de confort en s'adossant finalement au banc.


Qui ne répond pas à ses questions.
Alors Eamon attend beaucoup de Moira.
Il cherche de nouvelles armes ailleurs.
En attendant de revoir Croyance.

Rapide et efficace.
Il la toise du coin de l'oeil, avant de laisser un léger sourire lui échapper.


Eamon, clairement sous un lampadaire lui même.
Trop prudent. Toujours à prévoir un plan de secours, trouver les faiblesses d'autrui. Mais il n'a personne pour trouver les faiblesses de Moira Greengrass... Sauf, peut-être, un peu de temps à lui consacrer pour essayer de les trouver lui même.


Dit-il en réarrangeant ses bagues avec nonchalance.
Prudent au point d'avoir parmi elle une vengeance garantie, au point d'avoir autour du cou un moyen d'y survivre si cela venait à se retourner contre lui.
Antoine Savoy est tout aussi prudent que lui.
Alors forcément, il doit avoir des choses à cacher.


Trop débrouillarde, trop d'informations entre ses mains, trop futée.
Sa méfiance maladive le pousse, malgré ces nombreux services rendus l'un l'autre, à continuer de la voir comme une menace.
Qui lui dit qu'elle ne vendrait pas l'emplacement de son atelier au Ministère si l'offre était suffisamment intéressante ? Il ne se gênerait pas.


Puis ses yeux se baissent.
Sur le chemisier entrouvert, sur la jupe crayon... Tout ce qui change des survêtements avec lesquels elle s'était introduite à l'empoisonneur.


Demie blague.
Eamon n'y peut rien, il a toujours veillé à son apparence et celle des autres. S'il pouvait choisir, il préférerait ne pas s'afficher trop longtemps avec un plébéien en claquette chaussette. Cela coule de source.
Et malgré la casquette lunettes, c'est compliqué de cacher les bases d'un beau visage. Mais là, malgré cela, c'est le jour et la nuit. Comme quoi, rien que mettre des vêtements flatteurs et un peu de maquillage, cela change du tout au tout.
Définitivement un plus.
Mais ce qui marque le plus l'empoisonneur, en jogging ou en robe, c'est sa férocité, qui force son respect.

Le jour et la nuit.
Moira Greengrass, l'opposé d'Acide, rayonnante et tout sourire. Sa comédie lui arrache un sourire, qu'il cache en détournant légèrement la tête.


Elle rit, puis prend congé.
Eamon hoche doucement la tête et la regarde s'en aller travailler, avant d'à son tour quitter le parc.

Deux jours après, même banc.
Impatient d'en savoir plus sur Savoy, de pouvoir le tourmenter comme bon lui semble. Si l'attente d'information était insoutenable, l'absence de nouvelle de Croyance l'était d'avantage. Encore heureux qu'il n'ait pas eu la faiblesse d'esprit, ou le temps nécessaire, de s'attacher à lui plus qu'il ne l'aurait voulu.
Mais le fait est qu'il fulmine encore qu'on le lui ai retiré son loup garou.
Et tous les autres...
C'est peut-être pour cela qu'il a l'air bien plus austère, assis sur son banc.

Sa tête se relève quand la détective approche, le sortant de ses pensées. Son visage se détend d'un iota, alors qu'il cherche à lire sur le sien si elle a de bonnes nouvelles, avant de se lever par politesse.


Eamon force un léger sourire, de nouveau, par politesse.
Il la laisse s'asseoir avant de la rejoindre sur le banc.
A nouveau, il a soif de pouvoir. L'empoisonneur s'impatiente, appréhende et garde tout cela tapi au fond de lui, assis le dos droit, d'apparence mesuré alors que ça bouillonne.
Les femmes de la famille Ainsley ont bien fait leur travail, et le fils héritier pourrait presque les rendre fier encore maintenant, si ce n'était pas déjà trop tard.


Car Moira est de nouveau éblouissante.
Et si elle a le malheur de revenir en claquette chaussette à son atelier, elle restera dehors.

La frustration dépasse sa retenue.
Croyance Halloway, dans les appartements d'Antoine Savoy. Ses sourcils se froncent alors qu'il fixe la photo, irrité.
Le loup blanc qui disparaît, la note de Savoy dans son salon... Alors il aurait protégé sa chose de son emprise ? Retiré le pauvre petit chiot de ses griffes quand cela devenait enfin intéressant, par affection ?
Jusqu'au point de le faire disparaître ? Lui, sa main armée qui semblait pourtant si dévouée... Et il vient se présenter à lui comme le noble chevalier défendant les hybrides, quand en fait il ne protège que ses intérêts.
Savoy l'agace.

Puis, la femme rousse.
Encore une fois, Eamon est loin d'être ravi : il reconnaît une de ses clientes, l'une des rares qu'il tolère.
Aurait-il baissé sa garde trop facilement avec elle ? Ne garderait-elle pas un oeil sur lui à la demande de Savoy ? Impossible de ne pas peser ses mots avant de discuter avec elle désormais. N'y a-t-il aucune créature que Savoy ignore ?!
Encore sur sa route, à se demander si ce n'est pas prémédité. Misérable directeur qui l'empêche de gérer sa réputation d'une main de fer, comme il l'entendrait dans le plus beau des mondes.
De nouveau entravé par les autorités, renié d'un futur glorieux à la lumière du jour ou dans l'ombre des bas quartiers.
Antoine se dresse comme son ennemi plus Moira en dépeint son portrait.


Eamon observe à nouveau les photos, les tenant fermement, mâchoires tout aussi serrées. Antoine Savoy s'est entouré de créatures magiques.

Un soupire quitte ses lèvres, alors qu'il vient y appuyer à répétition la tranche de la photographie, regard perdu d'une manière bien trop intense dans les tapis de fleurs en face.
En pleine réflexion.
Préparer sa vengeance devenait dangereusement une seconde nature, tout aussi aiguisée que la préparation de ses potions.


Mobby, aussi épanoui pouvait-il être, aurait peut-être dû se méfier un peu plus du petit fils de son bourreau en prononçant ces mots. Un contrat de plusieurs pages auraient été nécessaire pour entraver ce démon.
Car il peut faire pire que manipuler, bien que cela ne soit pas plus simple.
Oh, et des photos compromettantes pourraient fuiter, certes... Mais il peut trouver mieux. Trouver un plan vicieux, où Savoy regretterait l'idée même de faire un pacte avec lui.
Et la photo cesse de bouger, appuyée contre ses lèvres alors qu'il contemple l'idée de simplement se débarrasser de Mobby, de Maxine et s'il le fallait vraiment, Croyance.
Pas la peine d'aller si loin.
Mais Eamon y songe.
Et malgré tout les indices pointant en sa direction, Antoine a promis de garder les yeux de la justice loin de lui.
Et cela lui semblait être une vengeance correcte.

Puis une œillade à la femme rousse sur les photos. Une femme dangereuse, dit elle. Mais une si bonne cible pour briser le cœur d'Antoine.


Alors finalement, son allure se détend. Ses yeux noirs quittent les roses pour venir se poser doucement sur le visage de Moira et il lui sourit. C'est sincère, trop même. Un sourire qui ne dise rien qui vaille bien qu'on ne voit pas pourquoi.


Avant de fermer le dossier, son attention est attirée par le portrait de Croyance.


N'était-il pas au courant du marché passé entre lui et Savoy ? Pourquoi y traînerait-il encore ?

Maxine aurait peu de connaissances ? Et quoi, il aurait l'honneur de sa présence dans son salon de thé ? Eamon est presque flatté. Mais le dépit l'emporte, grâce au serment et à sa nature dhampirique.



Cependant, si elle est aussi dangereuse qu'elle le prétend, l'empoisonneur s'inquiète. Oui, pour Moira. C'est rare, mais cela arrive, lorsque les services qu'on lui propose lui sont chers.
Personne ne veut perdre sa reine aux échecs.


S'il devait commencer quelque part, ce serait par Mobby.


S'il y garde encore le balafré prisonnier... Il y a des chances. Et s'il y est retenu, il ne peut pas y aller aussi. Ce qui est une aubaine, pour l'elfe de maison.
Profite de ces jours tranquilles, Antoine.
Ils ne dureront pas longtemps.


Un kidnapping, ou presque.
Il range ensuite la photo dans le dossier et laisse un léger soupire combler le silence, avant de reprendre, moins sec.


De nouveau agacé par cette situation déplaisante.
Il devait bien y avoir une solution pour le revoir... Un moyen d'agacer Savoy comme il l'ennuie en ce moment, alors que lui ne doit avoir aucun problème. Qu'il garde Croyance jalousement dans sa demeure.
Et Croyance y reste.

Beaucoup de choses lui semblent encore impossible, à lui.
Mais ses paroles sont rafraîchissantes à entendre. Cela change de son pessimisme. Ou peut-être est-ce seulement dû au cadre particulièrement reposant.

Puis sa surprise le surprend à son tour, plissant légèrement ses yeux. Puis il détourne le regard. Il pourrait être impatient, oui... Mais après la perte d'un allié précieux, ce serait imprudent d'envoyer un second disparaître sans laisser de traces. Et donc, ce serait plus d'effort de les remplacer tous les deux.

Croyance, le tromper ?
Voilà que Moira arrive à lui arracher un rire.
Peut-être bien que c'est pareil, au final. Un loup satisfait d'être en cage, qui malgré sa dévotion profonde et sans limite l'offre au premier venu. Mais après tout, c'est ainsi qu'il s'est présenté à lui. S'abandonnant dans ses bras au premier ordre. Jurant sa vie à son service, et maintenant il se prélasse dans les appartement de Savoy ?
Ah, où sont les hommes de paroles  quand on a besoin d'eux?
Que peut bien offrir Antoine de plus ?
C'était trop beau pour être vrai.
Eamon achève cet égarement dans un soupir, avant de poser ses yeux sur elle, léger sourire aux lèvres pour dissimuler son insatisfaction.

Pas si loin de la vérité, et en même temps pas tout à fait.
Croyance voulait du réconfort, de la tendresse, des bras où se cacher et Eamon les offre contre une poignée de pouvoir.

Encore des mensonges.
Ebruiter des rumeurs sur le directeur ne l'arrange pas.
Si Croyance erre dans les couloirs de sa demeure, alors Mobby est en sécurité.
L'empoisonneur se tait, passant sa main sur son visage, couvrant finalement sa bouche, perdu dans ses pensées.

Soufflé comme pour lui; il n'en est pourtant rien.
Avec détermination, pour convaincre de sa bonne foi.
Il est impuissant dans cette situation. Mais il connaît quelques sombres -et insupportables- personnages qui pourraient toujours l'aider.
Et bien qu'il ne puisse prendre contact avec, le libérer de l'emprise de Savoy lui suffirait déjà. Si Croyance voulait bien s'en échapper.