Les lieux étaient silencieux à cette heure de la journée. Seuls résonnaient les bruits réguliers et apaisants du pilon en bois contre le mortier en pierre, le crépitement du feu sous plusieurs chaudrons de tailles très variées, et le frottement du balai enchanté contre le sol en brique rouge. On entendait également, mais dans une moindre mesure, la pluie qui s’écrasait sur les carreaux.
L’espace était essentiellement occupé par de hauts présentoirs où les potions les plus courantes et les moins onéreuses trônaient en libre service, méticuleusement référencées, ordonnées et étiquetées. Pour les potions les moins courantes ou les plus complexes, il fallait s’adresser à la personne derrière le comptoir en bois sombre et massif, car elles n’étaient accessibles qu’au maître des lieux et ses protégés, voire directement faites sur demande en fonction de vos besoins.
Derrière ledit comptoir se situait une première salle de préparation ouverte sur la boutique, où trônait en son centre un foyer et un large espace de travail abîmé par le temps et les expériences mais toujours fidèle au poste. Il était encombré de chaudrons, de pots et de bocaux en tout genre, de livres et de balances plus ou moins usées, et contrastait avec le reste de la boutique parfaitement rangée. Tout autour de la salle, de larges fenêtres embuées apportaient une source de lumière naturelle appréciable, lorsque le temps n’était pas à l’orage. Faisant également tout le tour de la salle de préparation, des étagères débordantes d’un chaos organisé.

La clochette cristalline de la porte venait de retenir, résonnant à chaque étage du bâtiment. En effet, la propriété du maître des potions s’étendait sur plusieurs niveaux, et était nettement plus grande que ce qu’elle paraissait être vue de l’extérieur. Elle comprenait notamment l’habitation du maître au dernier étage, et sous elle, une bibliothèque, des salles de stockages et de préparation, un salon pour recevoir des personnes importantes. On y accédait par un escalier superbement ouvragé mais tordu, d’où pendait de nombreuses plantes qui avaient repris leurs droits autour de ses rampes.

Sambre venait d'apparaître au milieu de l’escalier, venant de l’étage supérieur, sa baguette pointée sur la caisse en bois qui flottait devant lui et qu’il ne s’embêtait pas à porter malgré qu’elle ne soit remplie que de bocaux vides. Il remonte les manches de son col-roulé, faisant cliqueter les nombreux bracelets étincelants à ses poignets par la même occasion. Ses cheveux sont noués derrière son crâne en chignon négligé.

- Bonjour… Je peux vous aider ?

Il sourit, particulièrement chaleureux, ça on ne pouvait pas le nier.
D’un geste délicat et précis, il envoya la caisse se poser sur le comptoir où le pilon et le mortier travaillait toujours de concert sans l’aide de personne, d’un geste plus sec, il raviva les feux puis descendit souplement l’escalier pour les rejoindre, non sans remettre quelques fioles à leur place, bien qu’elles aient toutes l’air déjà bien rangées.
De nouveau, il agita sa baguette d’un geste souple pour lancer un “finite” informulé, le pilon et le mortier redevinrent alors inanimés et Sambre les attrapa du bout des doigts avant de se tourner vers l’inconnu.

- Essence de dictame ? Potion contre les furoncles ? Aiguise-méninges ? Poudre d’obscurité instantanée ? Ou potion tue-loup…

En versant délicatement le contenu du mortier, qui semblait volatile et précieux, dans un bocal qu’il referme avec précaution, il relève les yeux vers son client avec un petit sourire au coin des lèvres. Ses yeux, qu’il avait teinté d’une douce couleur violine le matin même, semblaient le jauger du regard. D’habitude, il avait toujours été bon pour cerner les besoins du client, mais là il avouait qu’il séchait.

- Amortentia ?

@feat  Mads M. Kovačić <3

Sambre esquisse un sourire poli quand l’inconnu lui fait signe de n’être intéressé ni par ses potions, ni par son attitude avenante et commerciale.
Malheureusement pour cet homme, Sambre n’avait pas le droit, entre ces murs, de lui proposer quelques pilules du bonheur pour lui redonner le sourire, bien qu’il semblait en avoir grand besoin. Le jeune homme ne s’était pas gêné pour jauger son vis à vis, aussi froid que le jour de pluie qu’ils vivaient aujourd’hui. C’était plus difficile de le cerner, caché derrière ses petites lunettes noires très vintages, mais sa voix trahissait son absence d’envie de se trouver en ces lieux.

Observant l'inconnu se répandre sur le comptoir en bois massif, alors que lui-même glisse le bocal sur l’étagère la plus proche, Sambre ne se départit pas de son sourire lumineux et suit du regard ses mouvements, posant ses yeux sur le pineapple avec curiosité.
Quand la photo s’affiche devant lui, le sourire du jeune homme reste vissé sur son visage angélique.

- Nous avons de nombreux clients, Monsieur, qui nous achètent un tas de choses. Notre boutique est très diversifiée.

Une pointe de malice se glisse dans sa voix. Le naturel est toujours difficile à chasser, surtout pour le blond qui semble se détourner du pineapple comme si sa curiosité venait de retomber comme un soufflé. Sa mine enjouée affiche maintenant un désintérêt visible alors qu’il s’éloigne légèrement vers le plan de travail chargé pour y déposer le mortier et le pilon.
Cet homme, il l’avait reconnu.
Un monsieur-tout-le-monde qui avait besoin de se booster un peu pour oublier que l’âge le rattrapait.
Qui a dit que le métier de potionniste était toujours passionnant ?

- Je ne suis pas sûr de vous avoir entendu vous présenter, Monsieur.

Revenant sur ses pas, Sambre lui adresse un nouveau sourire poli, s’accoudant à son tour sur le plan de travail qui les sépare l’un de l’autre. Insistant.

- Sambre Lawrence, enchanté.
Dites-moi… Pourquoi vous interrogez-vous sur les habitudes de consommation de cet homme ? Vous êtes de la famille ? Un ami inquiet ?

Son désintérêt n’était qu'apparent, finalement, puisqu’il prenait le temps d’en plaisanter. Et finalement le jeune potionniste se redresse en s’appuyant sur la surface en bois, du bout des doigts, prenant un air contrit.

- Il n’est pas dans nos habitudes de révéler celles de nos clients. Certains de nos travaux révèlent du secret professionnel.

@feat  Mads M. Kovačić <3

C’est un nouveau sourire et un petit hochement de tête qui répond au dénommé Mads, quand celui-ci consent à donner au potionniste un nom à mettre sur un visage. De là, cependant, à dire que Sambre était content, il y avait un monde. Probablement, dans un sens, il l’était, oui. Satisfait de l’avoir fait céder à un caprice. Cependant, si on devait faire preuve d'honnêteté au regard de la situation, Sambre était surtout rassuré.
Si l’individu cédait à la discussion, c’est qu’il avait un tant soit peu de patience et de civisme. Ce dont on pouvait légèrement douter à son attitude pressée et son air contrarié.

Car si Sambre avait fait du zèle sur le moment, il se mord actuellement légèrement la joue pour ne pas provoquer davantage son visiteur. L’idée de se faire agresser pour un client ne l’enchantait pas. Pour un client lambda encore moins.Le sens du sacrifice, ce n’était pas son truc.
Et il venait à peine de réaliser que l’homme en face de lui était peut-être un gros bras venu réclamer des dettes ou un dealer. Un dealer oui, ça ne le surprendrait pas.
Alors, quand Mads évoque enfin sa mission, le jeune homme tombe littéralement des nues et ouvre des yeux ronds, d’abord surpris, suivi d’une moue dégoûtée sans pouvoir retenir son étonnement.

- Quoi… ? C’est tout ?

Posant ses mains à plat sur le comptoir qui les sépare, le plus jeune des Lawrence a les sourcils froncés et c’est à lui d’avoir l’air agacé cette fois-ci. Un sentiment contagieux de toute évidence.

- Vous me menacez pour une stupide histoire de coucherie qu’une pleureuse vous a demandé d’élucider, bien plus pour prouver une faute dans un divorce juteux que pour rassurer son petit cœur brisé ?

Cette fois, Sambre lève les yeux au ciel en soupirant et se décale très légèrement du comptoir.
Intérieurement, il est plutôt rassuré et à deux doigts de le montrer par un soupir de soulagement. Il ne s’agissait ni d’un dealer en colère, ni d’une personne chargée de récupérer de l’argent de manière musclée.
Est-ce que cela voulait dire que son minois était sauf ? Peut-être pas mais il y avait de l’espoir.

- Écoutez, je comprends que ça soit votre gagne-pain et je veux pas de problème, surtout pour une histoire… pareille.
Il s’était retenu de remplacer “pareille” par “ridicule” au dernier moment. De justesse.
- Mais je ne vois vraiment pas en quoi je peux vous aider. Ce type est servi par plusieurs d’entre nous, et on ne pose pas de questions quand des clients viennent nous voir pour retrouver la libido de leur jeunesse. Non seulement ça ne nous intéresse pas, et ça ne nous regarde pas.

Sambre s’arrête soudainement de parler et échappe un nouveau soupir contrarié en se rendant compte que dans son agacement, il avait plus ou moins répondu à la question.

- Vous voyez, franchement, vous perdez votre temps.

@feat  Mads M. Kovačić Tadam !

- L’amant de ce vieux porc ? Non mais vous plaisantez ? Vous l’avez bien regardé ? Vous m’avez bien regardé MOI ?

C’était sorti tout seul malgré le ton courtois que Mads avait pourtant décidé d'utiliser pour remettre les compteurs à zéro. La décision était d’ailleurs plus sage car Sambre se sent instantanément plus à l’aise comme ça et cesse de réfléchir au sort le plus utile si le détective privé était devenu agressif.
Alors après ce petit coup d’éclat, Sambre inspire un bon coup et reprend un sourire bien plus digne en relevant les yeux sur Mads comme si de rien était, hochant la tête pour approuver sa démarche.

- Vous avez raison, reprenons comme si rien de tout ce petit manège n’était arrivé, comme des adultes.

Un rire secoue le jeune homme cependant quand son vis à vis émet l’idée de négocier et il souffle avec une pointe d’ironie dans la voix, le sourire légèrement crispé et le regard quelque peu insolent. Qui proposait de repartir sur de bonnes bases déjà ?

- Ma fibre commerciale me susurre à l’oreille qu’il ne s’agit pas tout à fait de négociation lorsque quelqu’un menace encore ma “jolie petite bouille blonde”, bien que tout compliment soit bon à prendre.

Mais déjà plus calme, Sambre semble plus enclin à écouter ce curieux personnage tenter de le convaincre.
Et malgré tout, le petit jeu du détective devenait amusant et il ne peut s’empêcher de suivre ce dernier dans son rire lorsqu’il se moque de sa cible et l’analyse comme l’aurait fait un profiler. En soit, ils étaient tous les deux un peu pareil avec leurs jobs, à fond, donnant le meilleur d’eux-même, même si c’était pour retrouver un sale type insatisfait de sa vie de couple, ou produire une potion capable de lui faire satisfaire sa maîtresse des heures durant.

- Je ne suis pas toujours présent lorsqu’il vient. Je suis chercheur et potionniste avant d’être “commerçant”. Je le sais simplement parce que cette potion n’est pas en libre service et qu’elle est produite en petite quantité, presque sur demande.

Le jeune homme contemple de ses yeux violines le manège du professionnel qui semble décidé à ne pas le lâcher tant qu’il n’aura pas quelque chose à se mettre sous la dent. C’était bien sa veine, à Sambre. Pouvait-on réellement parler d’un manquement à l’éthique s’il venait à parler de quelques habitudes de sa clientèle ? La question était plus épineuse quand il s’agissait d’un pauvre type qui n’avait rien demandé mais en même temps, n’avait jamais demandé à personne de conserver son secret…

- Je la produit… Au moins une fois par semaine. En quelques rares fioles, pour lui, et probablement pour d’autres. Je suppose qu’elle est efficace, s’ils reviennent régulièrement puisque légalement, nos potions ne doivent pas créer d’addiction.

Puis Sambre hausse un sourcil avant de plisser les yeux, l’air quelque peu étonné, voire suspicieux. Finalement, le coin de ses lèvres s’étire et il se penche par-dessus le comptoir, vers le dénommé Mads, soufflant avec une innocence insolente dont il a le secret.

- Je me demande bien ce que votre générosité pourrait bien pouvoir m’apporter. Je veux dire, hormis le fait de ne pas écraser votre point sur mon visage.
Mais je suis tout ouïe, posez-moi vos questions, je tâcherai d’y répondre du mieux que je peux.

Quand il se redresse, il a un haussement d’épaules désinvolte et l’air plus détaché bien que, sans vouloir jouer au con, dans sa docilité se glisse à nouveau une pointe de malice alors qu’il se hisse sur le comptoir pour prendre de la hauteur.  

- Seulement, si vous perdez votre temps finalement, il ne faudra pas venir vous plaindre. On ne rembourse ni les potions, ni les ragots.

Et pour être en accord avec leurs futurs échanges, Sambre prend le temps de lancer, amusé.

- Si vous voulez mon avis, il en a plusieurs… des maîtresses.

@feat  Mads M. Kovačić Tadam !

Il resterait probablement chez Sambre, envers Mads, une petite rancoeur dans les jours qui suivraient : pas pour avoir menacé son visage ou encore l’avoir dérangé dans son travail à une heure où le calme de la boutique était un vrai bonheur, mais bien pour avoir osé insinué, ou même simplement imaginé dans sa tête de mule qu’il aurait pu entretenir une liaison avec un vieux porc infidèle.
Sous ses soyeuses mèches blondes trop parfaites, le potionniste n’a pas manqué d’offrir au détective une moue boudeuse, lui reprochant ouvertement cette “option” de son regard violine qui s’est assombrie un bref instant pour le lui faire comprendre.

Il le gratifie d’une légère grimace hautaine également, ayant parfaitement compris que les “bonnes bases” n’étaient que façade. D’ailleurs, d’un geste vaporeux, comme s’il remettait en place sa veste, il s’assure que sa baguette est bien dans la poche intérieure de celle-ci. Non mais.
Après tout, le détective restait autoritaire et n’inspirait pas une chaleureuse discussion amicale. De toute façon, ça n’avait pas l’air d’être son but. Quel métier éreintant que devait-être le sien. Les recherches ne valaient le coup, pour Sambre, que lorsqu’elles étaient réalisées pour des potions. Le reste était une perte de temps, comme cet interrogatoire.

Mais le détective avait surprenament l’air d’y trouver son compte.
- Pour les nombreuses maîtresses, c’est une supposition. Je connais mes potions, je connais mes dosages. Quand quelques gouttes d’une fiole classique suffisent, la fréquence de la demande ne devrait pas être aussi récurrente. S’il ne saute pas plusieurs partenaires… Vous allez retrouver un ou plusieurs cadavres morts d’épuisement dans votre enquête de grande importance.

Le rictus du jeune homme n’a pas pour but d’être discret.
Penchant la tête sur le côté, Sambre observe Mads avec une attention toute particulière, voire renouvelée, quand celui-ci entre dans la vraie négociation. Celle qui ne nécessitait pas de le passer à tabac pour obtenir de maigres informations sans intérêt.
Finalement, d’une moue lasse et insolente, le potionniste semble enfin se dérider un peu et un sourire s’étire alors sur ses lèvres, sans pour autant se départir de son insolence habituelle. Faudrait voir à pas déconner.

- Vous êtes bien plus charmant quand vous ne menacez pas, et que vos négociations ressemblent enfin à quelque chose.

Là encore, l’ironie est palpable mais l’intérêt l’est également, quand, jusque-là, Sambre prenait littéralement cette histoire de tromperie par-dessus la jambe en ne perdant pas l’espoir que le détective se lasse un peu.
Un rire lui échappe alors qu’il se détache du comptoir lentement.

- Perdre un client hm ? Pourquoi… ? Vous allez lui arracher ce qu’il cherche désespérément à redresser ? Où peut-être aller vous cracher l’identité de votre indic’ ? Ce serait beaucoup moins charmant…

Songeur, cependant, Sambre n’est pas connu pour être un ingrat, bien au contraire. Et à chaque proposition sérieuse que l’on peut lui faire, il y réfléchit avec sérieux, pesant le pour et le contre, ainsi que les avantages à saisir une quelconque opportunité.

- Très bien, ami, je vous aide à mettre la main sur votre infidèle. Quitte à ce que vous veniez le cueillir devant cette boutique, parce que je suis bon prince. J’ai bien précisé devant. Pas d’esclandre à l’intérieur, vous avez votre réputation, nous avons la nôtre.

Il insiste sur les mots précis, pour que Mads imprime.

- Et vous me devrez un service qui compensera cette terrible perte. Bien que vous pouvez aussi m’acheter cette fameuse potion également… Elle ne fait pas de mal, seulement du bien.

Se gardant bien de préciser qu’elle n’était pas si terrible que ça. Mais Sambre était un peu trop opportuniste pour se priver d’un service presque gratuit.
Certes, il allait céder aux attentes du détective… Alors, finalement, ça valait compensation.

Contournant le comptoir en le frôlant du bout des doigts, il ose réduire finalement la distance entre lui et le détective, quittant la protection que lui apportait le meuble ancien et massif pour le rejoindre de l’autre côté. D’un geste vif, il sort sa baguette du revers de sa veste pour verrouiller la porte de la boutique et le petit panneau indiquant l’ouverture annonce à présent qu’ils sont fermés.

- Vous me suivez ? J’ai besoin d’un registre un peu plus personnel à l’étage.

Passant devant Mads, dans un cliquetis de bijoux caractéristique de sa personne, Sambre grimpe l’escalier en bois chargé de plantes séché jusqu’à une salle de préparation du premier étage. Elle est assez vaste mais semble n’être prévue que pour un potionniste compte tenu de l’unique siège qui y trône malgré de nombreuses surfaces de travail. Et une fois à l’intérieur, Sambre attrape un carnet qui semble avoir particulièrement vécu.

- Qu’est ce qu’il vous faut pour clore cette grande enquête ? Que je vous prédise le jour de son prochain passage ici ?

@feat  Mads M. Kovačić Tadam !

Sambre était d’un naturel curieux, il ne pouvait pas le nier, et souvent, cette curiosité le mettait dans des situations plutôt hasardeuses. Alors quand le détective croit bon de recadrer ladite curiosité, le jeune homme accueille la réponse avec des lèvres pincées et une moue qui affiche clairement que ce n’était pas ce qu’il attendait. Sérieusement, c’était quoi le problème de ce type ? D’habitude on lui parlait, on se confiait, ne serait-ce que pour se faire mousser un peu devant ses yeux violets. Mais du côté de Mads, rien. Pas une seule anecdote à se mettre sous la dent, quand Sambre était persuadé qu’il était du genre à rouler des mécaniques, aux vues de la facilité qu’il avait eu à utiliser la menace comme première technique d’approche.
Ce rustre devait prendre cette affaire bien trop personnellement pour se dérider si peu. Et la curiosité du jeune homme rongeait son frein.

Une fois muni de son carnet de clients, Sambre écoute d’une oreille attentive tout en parcourant ses pages du bout du doigt, levant par moment un regard sur Mads, quelque peu dans le jugement.
Voilà qu’il se révélait voyeur avec ça. Cela-dit, le flagrant délit était sûrement ce qui lui rapportait le plus dans ce genre d’histoires ridicules.

Quand Mads s’empare de sa main, Sambre ne peut retenir une certaine tension qui le fige, maquillant alors le mouvement de recul qu’il avait amorcé, de toute évidence peu à l’aise lorsqu’il n’était plus protégé par son comptoir. Sa main baguée s’ouvre lentement et son intérêt se porte sur le petit objet que le détective glisse dans sa paume.
Il y a dans ce gadget, quelque chose qui redore la profession aux yeux du potionniste, qui ne peut s’empêcher de l’observer de plus près en hochant la tête.

- Astucieux votre engin. Est-ce que c’est moldu ? Ou y a-t-il un sortilège de localisation à l’intérieur ?, puis se rendant compte que Mads n’avait pas l’air d’avoir la patience de lui expliquer son métier, il lève les yeux au ciel et souffle. Soit. Je suivrai votre plan à la lettre. Et je ne crains rien de mon client. Soyez certain que ce n’est pas son comportement que je redoute le plus.

Contrairement à celui de son interlocuteur, sur lequel il darde un regard méfiant, mais le sous-entendu était si gros que Sambre ne prend pas la peine d’être plus précis.
La main refermée sur le petit objet, le bout de papier entre ses doigts, Sambre récupère sa main pour porter le numéro à hauteur d’yeux, jetant un coup d'œil au détective par-dessus avec un sourire en coin.

- Mh… Il va falloir être beaucoup plus gentil avec votre humble indic’ pour qu’il serve, Mads. Mais je ne manquerai pas de l’utiliser, au moins pour vous prévenir dès que votre gadget sera en place.

Une petite pique lancée à la tête du rustre qu’il était pour qu’il cesse de se comporter en distributeur de ce qu’il pensait être des friandises pour gentil petit chien obéissant.
Pliant le papier qu’il glisse rapidement dans la poche arrière de son pantalon, Sambre revient sur la petite machine confiée par le détective après un bref coup d'œil à son registre personnel.
Il la tient entre ses doigts pour l’observer à la lumière.

- Votre infidèle devrait revenir dans trois jours si son rythme de consommation n’a pas changé entre temps. Malgré tout, je m’attends à tout moment à le voir débarquer plus tôt.

Curieux, mais également particulièrement suspicieux sur le personnage qui se tient devant lui, il demande en haussant un sourcil, alors que son regard se raccroche à celui du détective.

- Vous pouvez suivre les mouvements de cet objet dès à présent ? Mes mouvements, pour le temps que je le porterai ?

@feat  Mads M. Kovačić Tadam !

Que Mads ne s’y trompe pas. Ce n’est pas parce qu’il satisfaisait la curiosité du jeune potionniste en répondant à ses questions avides de savoir qu’il remonterait aussi facilement dans son estime. Mais de toute évidence, le détective connaissait le dicton “on attrape pas les mouches avec du vinaigre”, vu la façon dont il diluait ses réponses et les distribuait à petite dose pour garder l’attention du blondinet.
Cela-dit, il avait raison de procéder de la sorte, car Sambre, aussi curieux soit-il, avait imaginé le mettre dehors une bonne centaine de fois déjà. Pourquoi restait-il seul si tard dans ce maudit atelier déjà ?  

- Un gadget moldu hein… Pourquoi est-ce que ça ne me surprend finalement que très peu.

Étrangement, ça collait plutôt avec le personnage versatile qui le harcelait pour cette vulgaire affaire d’adultère.
L’individu devait être le genre à voguer entre les deux mondes, pour ces affaires en outre mais Sambre était persuadé qu’il était également du genre à ne prendre que le meilleur des deux mondes sans se soucier des enjeux entre les uns et les autres. Et Mads le lui confirmait oralement. Sans surprise.

Et sans surprise, il continuait d’être désagréable, faisant grimacer le jeune homme qui pourtant, y mettait du sien au prix d’un énorme effort et de la crainte de se faire refaire le portrait. Tu parles d’une discussion agréable.
Piqué, encore une fois, Sambre siffle, vexé de se faire rabrouer constamment par ce rustre.

- Par pitié non, épargnez vous la peine de toucher à ma “tignasse”, ce sera déjà un immense service que vous me rendrez.  

Franchement, s’il continuait à être aussi agréable, peut-être était-il préférable que Sambre envisage de se faire récompenser à distance. Oui, Sambre boudait, les sourcils froncés comme un prince capricieux qu’on malmène et qu’on taquine sans qu’il n’apprécie cela.
Ce type était contrariant, et l’insolence de Sambre revient au galop quand Mads prend encore un malin plaisir de le taquiner, le confortant dans sa méfiance et sa moue agacée.

- Peut-être bien, qui sait ?! Cela dit, ce serait bien votre chance ! Je pourrais vous en fournir les adresses, ça pourrait vous aider à vous détendre ?

Le petit prince commence à montrer les dents, poussé dans ses retranchements, surtout en voyant Mads approcher, et il plisse les yeux, qu’il doit d’ailleurs rapidement relevé sur le détective alors qu’il a heurté une étagère en reculant pour tenter de remettre de la distance entre eux, en vain. Sambre se tasse un peu d’ailleurs sous sa main. N’avait-il pas précisé de laisser sa tignasse vierge de tout contact ?

- Puisque vous avez trouvé le bouton de votre engin, tâchez de ne pas l’activer avant que votre mouchard soit en place.

Sambre sert les dents, ronchon, quand Mads lui relève le menton pour accrocher son regard améthyste au sien sans faillir malgré la position qui n’est pas des plus confortables et des plus agréables pour lui.
D’ailleurs, d’un geste vif, une tape sur la main du détective fait en sorte d’éloigner ce doigt prenant ses aises sur sa peau d’albâtre, trop impérieux à son goût.

- Je ne doute pas que vous soyez particulièrement retors et ingénieux quand il s’agit de briser les genoux d’une pauvre âme qui a le malheur de vous croiser durant votre “travail”.

Sifflant entre ses dents, Sambre pose le bout de ses doigts contre le torse du détective pour y exercer une pression qui se passe d’explications.

- Malgré vos manières plus que déplorables, j’ai dit que je vous aiderai et je n’ai qu’une parole. Éloignez-vous.

@feat  Mads M. Kovačić Tadam !