C'est une journée comme les autres. Un planning chargé par un Blair mécontent et exigeant. Dans ton prisme tu le visualises constamment en colère et amer, prêt à en découdre sur le moindre des tes agissements. Pour une fois tu décides de t'en tenir à ce qu'il y ait écrit sur la feuille de projet. Tu poses pour le magasine Sorcier Hebdo dont tu feras la une le mois prochain, parfait timing pour le début de DALS qui avait été décalé à cause du retour de the Crow en janvier.

Concentré, dos courbé et jambes tendues, t'as les sourcils froncés, le sourire absent et le regard hautain. Le regard de tous les mannequins.

— « Hm ? »

Une voix t'interpelle, et alors que les flashs des appareils photos continuent de briller, tu tournes vivement la tête vers une silhouette assise parmi le staff de la direction artistique.

— « Isha ?! »

Ni une ni deux tu quittes le plateau de shooting pour le rejoindre. Posté comme un prince devant lui tu appuies tes deux mains sur ses épaules, penché en avant.

— « Mon fils mon sang MON FRÈRE. »

Tu lui chopes la main pour la serrer et le forcer à se lever, lui imposes une accolade tactile dont tu as le secret.

— « Pourquoi tu m'as pas prévenu que tu rentrais aujourd'hui de ton voyage ?! Et attends... comment tu sais que j'étais ici ? »

Tu mets pas beaucoup de temps à comprendre.

— « Ok j'ai compris. Blair. Cet enfoiré me fait des infidélités. »

Isha se trompe : tu détestes les surprises parce que t'as un besoin de tout contrôler et t'aimes pas du tout quand quelque chose d'imprévu s'invite sans que tu ne puisses l'appréhender. Cependant, le retour d'Isha est une surprise que tu sais apprécier, et mieux encore ! Qui fait naitre l'excitation dans le fond de tes yeux. Et puis bon... si ça peut te permettre en effet de mettre fin à ta journée de travail, c'est l'idéal.

— « T'es un Roi, tu le sais ça ? »

Tu ricanes, amer, quand il parle de Blair. Hausses un sourcil quand il parle de pouliche. Tu sais pas pourquoi ça te fait tiquer sur le moment de l'imaginer au bras d'une bimbo aux gros seins et sans cervelle du showbizz. Tu reprends vite ton sourire pour chasser cette image de ton esprit.

— « Ouai, sans doute. »

Il se recule et te demande d'aller chercher tes affaires. Tu lèves le pouce et sors ta baguette pour faire léviter ta pochette armani jusqu'à toi.

— « Des cadeaux ? »

T'as soudain l'air encore plus intéressé. Tu ricanes lorsqu'il t'apprend qu'il a déjà déposé des affaires chez toi. C'est vrai qu'il a encore les clés (tu lui avais laissé un double avant son départ). Tu souris.

— « Chez moi c'est aussi chez toi donc pas de soucis. Et je te raconterai tout ce que t'as manqué... Tu reviens pile à temps en vrai. Dans une semaine y'a le début de DALS. »

L'Egypte... c'est pas un pays qui te fait vraiment rêver et pourtant quand Isha en parle ça le rend presque digne d'intérêt. Tu l'entraines un peu à l'écart du studio et transplanes dans la cage d'escalier de ton immeuble londonien. Une fois devant la porte t'as juste à actionner d'un mouvement de baguette le mécanisme et puis rentres le premier. A peine arrivé tu manques de shooter dans ses bagages (il avait pas menti) et te jettes en arrière dans le canapé.

— « Je suis épuisé. J'espère que tu vas me faire à manger et me masser les pieds. »

C'est vrai que ça fait déjà un an qu'il est parti. Le temps a passé tellement vite ... t'étais si occupé que l'absence t'a semblé durer une semaine tout au plus. Malheureusement t'avais eu le temps d'oublier à quel point les soirées sans Isha manquaient de saveur. Tu t'installes dans le canapé et attend qu'il sorte les cadeaux de sa valise - parce que maintenant qu'il en a parlé t'arrives pas à penser à autre chose.

— « Ouai la prod m'avait déjà contacté en décembre mais malheureusement ils ont dû décaler l'émission à cause de The Crow et tout le bordel qu'il se passe en ce moment. »

Tu veux pas t'attarder sur les sujets d'actualité. Heureusement pour toi le voilà qui ouvre la valise. C'est l'heure de vérité. Tu t'exclames littéralement à chaque fois. Les mains plaquées sur tes joues t'es trop content Zadig. Redressé vers l'avant, tu regardes attentivement les détails.

— « Mec c'est... j'ai pas les mots. C'EST INCROYABLE J'AIME TROP PUTAIN. Et ça va grave avec mon style ?! Purée si je chope pas au prochain évènement je comprends pas. »

Comme si t'avais besoin de ça.
Mais t'es heureux Zadig, et tu seras fier comme un gosse de porter ces nouveaux beaux habits - ça te donne l'espoir d'être quand même chic et attirant sans avoir besoin de forcer sur ton charme de semi-vélane pour être désiré.

— « T'as fait des folies par contre. »

Il s'installe à côté de toi, tu te laisses retomber la tête sur le coussin, le corps un peu plus collé contre le dossier du canapé.

— « Oula, direct dans le vif du sujet. Non j'ai pas de meufs... je couche avec certaines mais j'ai la flemme de me poser. Et elles sont toutes casses-couilles je vais pas te cacher. Y'en a pas une ou je me dis ça va aller, juste on kiffe sur le moment et ça s'arrête là. »

Tu laisses tomber ta tête sur son épaule.

— « Je suis trop bien pour elles c'est tout. »

Avant de plisser les yeux. Tu grinces des dents.

— « Me dit pas que toi t'en as une. »

Parce que ça te saoulerait vraiment qu'il se range maintenant.

T'irais presque jusqu'à rougir quand il parle de ta personnalité. Tu sais quand même qu'il dit ça pour te rassurer. Parce que c'est évidement ton physique qui fait tout - tu le sais, t'as pas besoin qu'il te mente ou prétende l'inverse. T'as un caractère de merde et une attitude à chier. Cependant, tu dois bien admettre que ça te fait du bien. Il fait son boulot d'ami sans que t'aies demandé.

T'es plus attentif quand il parle des égyptiennes. Tu les images danser du ventre en petite tenue mais t'es plutôt sûr que c'est cliché. Ton rire qui se meurt d'un seul coup : il a quelqu'un en vue. Et merde, t'aurais bien voulu que ça lui passe pendant son voyage.

— « AH NON ! Tu vas pas laisser la vieille peau décider pour toi ! Elle est à l'autre bout du continent à parler aux esprits de la forêt, à bambi et au feu ou que sais-je. Merde putain on est à Londres. Pas de fiancée, pas même d'IDÉE de fiancée, on fait la fête et on profite de la vie à fond. Vous allez pas commencer à me casser les couilles avec vos histoires de mariage à la con entre sang-pur. »

Ça t'enrage Zadig, que ton meilleur ami se laisse marcher dessus par les désirs de sa grand mère. C'est un homme oui ou merde ? En plus t'es plutôt certain de qui il a en tête et t'es pas ravi.

— « Je veux pouvoir sortir avec mon meilleur ami sans qu'il soit cloitré dans un coin à conserver sa virginité pour la bonne. »

Absurde. Isha est définitivement pas vierge. T'es juste dans ton caprice. Heureusement le massage du crâne aide un peu à te détendre. Tu pousses un long soupire.

— « Je viens juste de te retrouver. Fais chier. »

T'as rien entendu de la partie où il disait "pas maintenant" parce que ça n'a pas d'importance. L'hypothèse a été lancé et elle te fait peur.

C'est vrai que tu l'as surpris plus d'une fois avec des meufs. Toi, Zadig Montgomery, superstar, meilleur ami qu'on puisse avoir, atteste sur l'honneur qu'Isha Lamedeer n'est pas vierge. Et son intégrité, plusieurs fois a été souillée à des fins alcoolisées. Et ce n'était pas pour te déplaire - seulement voilà, il était de retour, et avec lui tu l'espérais, les parties de chasse.

— « Ah tu me fais plaisir mon reuf. J'ai cru que t'allais me lâcher pour aller t'enterrer dans une vie bien rangée. Une vie bien merdique quoi ! Mais non... Je me disais bien que mon meilleur ami pouvait pas me faire ça. »

Tu lui tapotes l'épaule, insidieux.

— « Hahaha. Je comprends pas comment on peut vouloir des mioches, surtout avant trente-cinq ans minimum. Ma phobie un peu. »

Bien que le massage soit agréable, tu décides de le pousser pour te dégourdir les jambes. Chopes ton téléphone pour check les réseaux sociaux.

— « Evidemment qu'on sort, y'a toujours un abruti du showbizz pour organiser une soirée un mardi soir. »

Toujours. Parce que ça ne s'arrête jamais.