Ça fait déjà un mois. Un mois de silence quasi total et de nuits presque blanches passées à penser. Il te manque, pas vrai ? Tu pensais ta colère et ta rancœur plus fortes que la peine qu'engendre son absence. Tu pensais être capable supporter les seuls bonjour adressés une fois tous les deux jours et les regards froids déviés la seconde d'après pour les rares qui se croisaient. Tu pensais avoir raison et tu ne sais toujours pas si au final tu as tort mais cette situation ne te convient plus du tout. Parce que tu vois souvent Grenat passer avec de l'alcool dans les mains, et tu n'es pas dupe quant à sa destination. La petite elfe te regarde d'ailleurs d'un air inquiet lorsqu'elle te vois emprunter le chemin des appartements de ton frère. Elle tente de t'en dissuader poliment, de préserver ce qu'il reste de lui autant qu'elle le puisse avant que tu ne l'arrêtes.

Sourire au coin des lèvres un peu amer, léger pincement au coeur en constatant que tu aurais adoré, toi aussi, avoir dans ton entourage un soutien aussi indéfectible que celui que Grenat avait à l'égard de ton frère. Tu effaces bien vite cette pensée avant de t'adresser à elle, l'intonation calme pour mieux masquer les incertitudes.

— Je ne vais pas lui créer d'ennuis Grenat, ne t'en fais pas. J'ai fais beaucoup d'erreurs mais j'ai appris de celles-ci tu sais.

Bien que tes intentions soient sincères tu ne formuleras aucune promesse, bien consciente que ta crédibilité n'existe plus vraiment après tes derniers écarts.

— Est-ce qu'il boit toujours autant ?
— ... Il boit plus qu'avant, madame. Surtout depuis... Vous savez. Les fiançailles de monsieur Clovis.

Tu soupires en entendant sa réponse, l'inquiétude qui transparaît dans tes yeux alors que tu serres légèrement le pineapple que tu tiens dans ta main. Grenat reprend la parole et tu tournes la tête vers elle a sa question.

— Vous allez l'aider ?

Tentes d'étirer un sourire rassurant, c'est pas très convaincant mais ça semble vous suffire à toutes les deux tandis que vous arrivez devant la porte de son bureau. La lumière qui filtre au-dessous t'indique qu'il s'y trouve et tu as peur d'ouvrir pour découvrir dans quel état. Mais tu inspires pourtant, laisses tes doigts toquer trois fois contre le bois avant de t'adresser à la petite elfe près de toi.

— Je vais essayer.

C'est pour ça que tu es là après tout, pas vrai ? Pour essayer, pour renouer, pour avancer. Peu importe comment tu appelles ça, c'est pour lui que tu es là. Parce que tu sais à quel point tout ça l'affecte. Toi, Clovis, tout. Alors tu ignores tes propres douleurs pour tenter d'apaiser ses maux, les vôtres à tous les deux et tu pousses la porte lentement. Entre en silence en prenant le temps d'observer rapidement la pièce avant de poser ton regard sur lui. Ton frère.

— Salut.

Et il est bien comme tu l'imaginais, Jasper. Épuisé, le regard dur, las et des cernes plus grosses encore. La peau pâle et les traits tirés, tu restes sans voix un moment, à te demander comment il fait pour simplement respirer encore. Le regard qui glisse sur le verre de scotch entre ses doigts, tu tiques -parles pour retenir la grimace qui menace de pointer le bout de son nez.

— Ça fait combien de temps que tu n'as pas fermé l'œil, Jas' ?

Tu t'approches doucement du bureau pour le contourner et t'assoir sur le bois, juste en face de lui. Ton pineapple posé face cachée à côté de toi, tu le regardes, ton frère. T'as de la peine à trouver tes mots.

— Je viens faire la paix. Une vraie paix, cette fois, et je ne te demanderais pas de me croire si tu n'en ais pas capable. Laisse-moi juste une chance de te le prouver. Je veux être là pour toi Jasper, sincèrement.

Je veux t'aider.
Le retrouver.

— J'ai quelque chose pour toi.

Ce n'est pas grand chose, mais à défaut de lui demander comment il va, comme si la réponse n'était pas évidente, tu sors de la poche intérieure de ta veste deux billets que tu lui montres avant de les poser sur le bureau en face de lui. Ils sont nominatifs et il y en a un pour vous deux.

— C'est une soirée pour fêter la sortie et le succès du dernier pineapple. Il y aura du beau monde, c'est l'occasion rêvée non ?

De faire des affaires, en sous-entendu.
Quand tu ne lui dis pas que du travail t'en as rien à foutre et que ton seul but présentement c'est de lui changer les idées. Mais tu connais ton frère depuis le temps et tu sais que si ça ne lui apporte rien il refusera de bouger.

C'était évident qu'il serait méfiant. Distant et sur ses gardes, qu'il te regarderait à peine, qu'il essaierait d'esquiver. C'était évident mais tu as décidé de ne pas laisser tomber -d'ignorer ces feuilles dont tu ne sais rien et qu'il agite en excuse, comme pour te mettre au défi d'en avoir une meilleure à lui proposer, pour d'aller t'assoir près de lui. Les billets posés sur le bureau, tu lui laisses le temps de réagir, de réfléchir sûrement. Un sourire en coin qui se dessine à tes lèvres quand il te demande qui tu as bien pu soudoyer. Se rétracte aussitôt pour te féliciter. Est-ce qu'il s'imagine au moins à quel point ça fait du bien ? De ne pas entendre que tes choix sont une erreur, encore. Que tu as tout gâché, encore.

— Je n'ai rien fait d'inconscient, si c'était la question.

Tu n'as menacé personne, tu ne t'ais infiltrée nulle part.
Et sans rien ajouter tu le regardes terminer son verre de scotch, tes iris perdus dans le vague. Tu grimaces un peu, te retiens d'en dire trop. Tout est encore trop fragile pour que tu te permettes le moindre faux pas.

Tu ne veux plus tout gâcher.
Tu es fatiguée.

— Et je suppose que tu veux m'y traîner ?
— Bien sûr.

Sourire malin à tes lèvres alors que tu te reprends rapidement.

— Ce n'est pas pour rien que ton nom est sur ce papier tu sais.

Tu n'avoueras pas avoir demandé son invitation avant la tienne au cas où il ne resterait qu'une seule place. Parce que c'est pour lui, tout ça. Toi tu peux attendre, tu sais gérer. Peut-être que tu as besoin d'aide mais il n'y a personne et tu n'es de toute façon pas là pour ça.

Il demande pour le dresscode et tu réfléchis en même temps que tu lui donnes les informations.

— Non, pas vraiment. Évite juste les smokings trop guindés et habille-toi simplement ?

Tu sais que Jasper a une définition de la simplicité vestimentaire pleine de bon goût alors ça devrait faire l'affaire.

— La soirée débute à 21 heures, ça te laisse une petite heure pour te préparer. Ça ira ?

Bien sûr.
(il n'a pas vraiment le choix)

Tu descends finalement du bureau et récupères ton pineapple et les invitations avant de te tenir debout face à lui. Soudain tu sembles plus soucieuse, sérieuse. Plus triste aussi.

— Je ne suis pas prête à m'excuser, ni à excuser tout court d'ailleurs mais.. J'ai compris que ça ne vaudra dans tous les cas jamais rien si tu n'es pas là. J'ai besoin de toi Jasper.

Encore un appel à l'aide.
Tu espères toujours qu'il se réveille, ton frère.

— Je file me préparer aussi. Rejoins-moi dès que c'est bon, ok ?

Un dernier sourire que tu lui adresses avant de te retourner pour quitter la pièce et rejoindre ta chambre te préparer également.

Et moi de moi.
Il n'imagine pas comme entendre ces mots te font du bien. Tu te dis que c'est peut-être là une chance pour vous de vous retrouver. Si tu fais des efforts vous devriez y parvenir, non ? Tu n'espères que ça alors que tu quittes le bureau pour te rendre rapidement dans ta chambre et te préparer. La tenue n'est pas bien difficile à trouver et tu passes sûrement plus de temps à parfaire le blanc de ta manucure qu'à t'habiller, te coiffer ou te maquiller avant de rejoindre le salon. Question d'habitude tu imagines.

Tu ne peux t'empêcher un sifflement admiratif lorsque Jasper te rejoint. On dirait presque quelqu'un d'autre, il est magnifique malgré son expression toujours trop sérieuse à ton goût.

— Je savais que tu étais un homme de goût Jas', mais je dois avouer que là tu t'es surpassé.

Tu retiens les blagues gênantes sur sa capacité à s'accaparer l'attention de toutes les femmes de la fête, ce serait malvenu vu la situation, et il en profite pour te demander qui sera présent. C'est malheureusement une question à laquelle tu n'as pas la réponse, parce que ça n'avait rien d'intéressant -mais t'aurais dû parier sur le fait qu'il demanderait, vu comme il est. Tu souffles un léger rire embarrassé tandis que vous vous mettez en route.

— Hm.. Ce sera la surprise j'imagine ? Je sais qu'il y aura beaucoup de représentants de marques, d'influenceurs aussi mais je n'ai pas demandé la liste précise.

Tu anticipes sa déception mais qu'importe.
Il ne peut plus reculer, pas vrai ?

* * *

Tu savais qu'il y aurait du monde ce soir, c'est pour ça que tu avais choisis cette soirée plutôt qu'une autre à vrai dire, mais tu n'imaginais pas qu'il y en aurait autant. Sourire satisfait qui se dessine à tes lèvres alors que tu les vois se défiler à l'entrée. À l'extérieur les flash de quelques journalistes venus couvrir l'événement, et bien trop rapidement les murmures à votre encontre. Les regards des uns et des autres qui se posent sur vous, tantôts surpris, étonnés tantôts dédaigneux. Tu hausses les sourcils, un peu dubitative face à tout ça tandis que Jasper de son côté ne se laisse pas démonter.

Et il est beau ton frère lorsqu'il se fait empereur au-dessus d'eux.
Il t'arrache un sourire soudain plus amusé.

— Ça ce n'était pas très compliqué. Aller viens.

Tu laisses s'échapper un petit rire avant de saisir son bras doucement pour l'attirer à ta suite. Tu fais pointer vos billets à l'entrée sans plus te soucier du regard des autres puis vous pénétrez enfin à l'intérieur. La pièce est spacieuse et déjà bondée de monde, les lumières tamisées et la musique d'ambiance laissent plus penser à une fête dans une boîte de nuit huppée qu'au type de soirée à laquelle devait s'attendre Jasper mais il y a une scène au fond, tapissée de velours carmin sur laquelle se dresse dans un support de verre le dernier Pineapple sorti il y a à peine quelques jours. Tu imagines au micro posé tout près qu'il y aura un discours durant la soirée.

— Tu bois quoi ?

Tout sourire tandis que tu l'entraînes déjà vers le bar.

Qu'il se mette aux réseaux ?
Tu étires malgré toi une légère grimace, presque mignonne couplée au sourire amusé que tu esquisses en même temps.

— Laisse la technologie aux jeunes tu veux ?

Un rire soufflé.
La proposition subtile de t'en occuper pour lui s'il le veut.

— Et puis, tu sais, ta belle gueule ferait tout exploser et c'est pas bon non plus d'avoir trop bonne presse.

Ça attire les vautours et vous en avez déjà assez comme ça pour l'instant. Enfin, ça n'est qu'une excuse à laquelle il ne devrait pas croire, prononcée tranquillement juste avant que vous n'entriez. La vraie question que tu te poses c'est : Et s'il s'y mettait réellement ? Non. Non l'idée a beau être tentante il a déjà beaucoup trop à faire, à penser. Vous avez tant à reconstruire aussi. De votre maison à simplement lui. Jasper. Un souffle discret qui s'échappe à cette pensée, tu chasses l'idée d'un sourire alors que tu le laisses découvrir ces ambiances dont il n'a pas l'habitude.

Et il semble dubitatif, ton frère tandis qu'il te souffle à l'oreille.

— Ils ont l'habitude. Ces soirées sont le quotidien de tous ces gens tu sais ? Ils savent gérer, la plupart sont là pour le travail après tout.

Même si tu lui accordes volontiers qu'on ne dirait pas. Tu l'entraînes jusqu'au bar pour passer commande sans être étonnée une seconde de ce qu'il demande.

— Ils ne proposent pas que de l'alcool Jas', tu sais ?

T'as pas pu t'empêcher.

— Un cosmopolitan pour moi s'il vous plaît.

Tu t'adresses au barman avant de lancer un regard à ton frère. Il ne semble pas du tout ravi d'être ici. C'était à parier. Mais tu n'as pas dit ton dernier mot et quand le serveur vous tend vos verres, tu le laisses s'exprimer. Hausse les sourcils pour te faire plus perplexe que tu ne l'es réellement, tu bois une gorgée de ta boisson avant de la poser sur le comptoir.

Laisse un soupir s'échapper de tes lèvres.
Ça te fait plaisir néanmoins qu'il puisse t'appeler de nouveau par ton surnom.

— Tu ne noueras rien ce soir.

Tu décides d'être honnête, te dis que ça vaudra sûrement mieux qu'un mensonge pouvant vous mener à la catastrophe.

— Je ne t'ai pas menti, tu sais ? Peut-être pas tout dit, mais pas menti. c'est déjà ça. Ils sont là pour le travail, seulement leur travail à eux, ce n'est pas de faire des alliances et de parler affaires barbantes durant les soirées, tu vois ? Ils sont là pour rencontrer du monde, se lier, s'amuser et surtout, pour faire de la pub. Si les marques s'arrachent les influenceurs c'est parce qu'ils leur permettent de rapporter gros sans réellement les payer. Beaucoup se servent de ce type d'évènement pour parader. Imagine ça comme... Un géant speed-dating ? Tu dois les charmer autant que l'inverse. Te constituer un réseau, pas des alliances.

Ça viendra plus tard ça.

— Et surtout... Tu devrais essayer de te laisser aller. Je sais que ce n'est pas simple et tu ne le fais pas souvent Jas'. La dernière fois c'était quand ? À Poudlard ? Je n'ai pas souvenir de t'avoir vu réellement prendre plaisir à quelque chose après ça.

Tu reprends quelques gorgées de ton cosmopolitan puis lève les yeux vers lui. T'es presque sûre que la dernière fois qu'il s'est amusé autant à quelque chose il était avec Clovis. Ça n'aurait rien d'étonnant. Et dire qu'aujourd'hui c'est lui qui lui brise le coeur punaise. T'as envie de l'encastrer.

— T'as besoin de décompresser de tout ce qui te tombe dessus en ce moment. Et tu vois très bien de quoi je veux parler, pas vrai ?

Bien sûr qu'il voit.

— Alors tu peux me parler si tu veux. Ou faire la gueule toute la soirée en buvant tous les verres que ce charmant barman acceptera de te préparer. Mais tu peux aussi venir danser avec moi, à défaut de le faire au bras de toutes ces superbes filles ?

Un sourire en coin.
Tu te lèves pour lui tendre une main.

— C'est toi qui voit.

T'aurais pensé qu'il t'en voudrai de n'avoir pas été honnête dès le départ et pourtant c'est tout le contraire que tu perçois dans son regard. Tes lèvres en sourire à ses mots, tu te sens soulagée et fière de cette impression qu'il t'offre d'être parvenue à quelque chose sans le moindre échec à déplorer. Ça te donne envie de continuer, de réessayer.

— J'ai eu de bons professeurs.

Autant d'exemples différents desquels s'inspirer, des plus fourbes aux plus sophistiqués. Tu railles un peu, un rictus amusé qui s'étire alors que tu en penses chacun des mots. Tes sourcils qui se haussent un peu à la mention de votre grand-père. Il n'avait pas tort, avant. Tu bois une gorgée avant de répondre, le verre toujours à ta main.

— Grand-père n'a pas vécu à la même époque. Les temps changent, c'est surtout ça.

Et ça il votre grand-père n'est certainement pas le seul à ne l'avoir pas comprit. La jeunesse dorée d'aujourd'hui aime faire la fête sûrement autant qu'elle aime briller et si tu veux y arriver, il arrivera forcément un moment ou il faudra s'adapter.

Il semble un peu plus sombre pourtant Jasper. À mesure que tu mentionnes tes inquiétudes son regard se détourne et ça t'arrache une légère grimace. Tu n'aimes vraiment pas le voir comme ça -t'aimerais tant savoir à quoi il pense, tellement pouvoir l'aider. Mais t'es pas encore sûre de savoir comment, alors que tu le vois descendre son verre comme on boirait de l'eau.

— Vas-y doucement Jas', tu sais que c'est pas bon dans ton état.

Juste avant qu'il n'en recommande un.
Tu soupires.

Qu'il t'avoue n'avoir jamais fait la fête pour faire la fête n'est qu'une demi-surprise en vérité. Tu te disais que ça avait du lui arriver au moins une fois, que ce soit avec Clovis ou avec Vanitas mais le fait que cela ne soit pas le cas ne t'étonne pas finalement. Ça t'attriste, alors que tu l'écoutes silencieusement se confier à toi. Voilà quelque chose qui n'était pas arrivé depuis bien longtemps. Des années non ?

— Si t'étais affreusement chiant j'me casserai pas la tête à te faire sortir, tu sais.

Sourire un brin moqueur tandis que tu lui tends ta main -et t'espères qu'il va la saisir, qu'il va essayer. T'as tellement besoin qu'il essaie pour une fois, lui aussi. D'avancer (d'oublier). Tu te fais curieuse quand il parle de dire quelque chose de choquant.

On les emmerde.
Avant de saisir ta main, et t'es pas certaine d'avoir déjà sourit aussi fort un jour.

— Exactement, aller viens ! On va leur montrer ce que c'est que de faire la fête pour de vrai.

Tu t'exclames la joie au fond des yeux pour l'emmener ensuite avec toi au centre de la foule.

* * *
Des ombres qui dansent sous le tamisé des lumières, les corps qui se collent, se décollent, se déhanchent le sourire aux lèvres sans ne plus s'arrêter. Et le temps passe alors. Des minutes aux heures tu ne sais pas vraiment, t'imagine être là depuis une vie au moins à contempler ton frère faire ce qu'il n'avait jamais fait jusque là. Et il a l'air plutôt bien, Jasper, malgré l'alcool qui coule dans ses veines et les verres enchaînés. Il aurait presque l'air heureux.

Des sourires alors que tu le laisses se faire charmer par ses fidèles -créer son réseau c'est tout ce qu'il fallait. Travailler en oubliant tout le reste, travailler pour oublier tout ce reste. Elles ont l'air de l'apprécier et lui te semble totalement déchiré.

Petit plot sur Jessica:

Mais il y a quelque chose de beau dans son regard, quelque chose qui te donne à toi envie de continuer à essayer. Il faut le sauver. Il n'y a pas d'autres options, pas vrai ? Parce qu'il mérite, Jasper, plus que n'importe qui d'autre à tes yeux il mérite d'être sauvé.

— À qui t'envoie un message ?

Curieuse alors que vos silhouettes s'écartent du monde pour respirer un peu. Le discours n'avait pas encore eu lieu mais tu imagines que ça ne saurait tarder. Le nom de Peter qui sort. Tu demandes.

— Peter ?

Précise alors qu'il parle du directeur de Poudlard et tu éclates de rire en tentant de récupérer son téléphone, ou à défaut de le dissuader. T'as eu l'air plutôt convaincante, tu crois, puisque déjà il te parle de Vanitas. Mais c'est qu'il compte inviter tout son répertoire ?

— Jas' laisse-le tranquille, il a une vie tu sais ! Aller passe-moi ça !

Des éclats de joie encore alors qu'il écrit et que tu le gênes en essayant sérieusement de récupérer son portable. Quand tu y parviens, t'as à peine le temps de voir le bordel qu'il lui a envoyé avant qu'il ne te le reprenne.

Et tu rigoles encore en commandant un nouveau cosmo au barman.
Puis tu te saisis de ton propre pineapple dans un souffle amusé pour y pianoter rapidement.

— C'est bon je vais l'inviter moi. Tu vas lui faire peur avec tes suites de lettres incompréhensibles. Tiens, regarde.

Tu lui montre le sms.

— T'es content ?

— Parce que tu fais dans la poésie toi maintenant ?

Les sourcils haussés et le regard rieur quand tu le laisses tranquillement filer jusque l'entrée. De ton côté tu décides de continuer un peu à danser, tout en gardant un œil sur le personnel qui s'agite près de l'estrade, annonçant l'imminence du discours. La musique finit par s'arrêter totalement et comme tous les invités présents, tu te tournes vers le directeur de la marque qui s'avance pour débuter.

Détourne le bleu de tes yeux pour les poser sur Vanitas enfin arrivé qui t'attire contre lui. Tu ne peux t'empêcher de sourire, sincèrement heureuse de le voir alors qu'il t'adresse une légère étreinte. Un rire à sa blague, tu ne peux évidemment pas t'empêcher d'ajouter, le ton malicieux.

— Et toi tu feras les deux du coup ?

Sourire sourire alors que tu les diriges au bar pour que Vani puisse commander ce qu'il souhaite. Un mètre de shot arc-en-ciel ? Tu lâches un bref soupir, pas vraiment étonné finalement de constater qu'en plus de Jasper, Vanitas allait s'y mettre. Tu imagines que c'est une bonne occasion pour réellement lâcher prise toi aussi. Quand tu y repenses, ça faisait vraiment longtemps.

— On fête le succès du nouveau Pineapple, et le type que tu vois sur scène c'est le directeur de la marque.

Tu expliques en désignant l'homme d'un léger mouvement de tête.

— Je comptais proposer à Jasper de lui parler mais j'imagine que ça va être à reporter.

Nouveau rire alors que le serveur place devant vous les shots ainsi qu'un cocktail orange et bleu face à Jasper. Face à votre surprise il s'adresse à Jasper, un léger rictus au coin des lèvres.

— C'est de la part de ma petite sœur. Elle m'a demandé de vous servir ce cocktail pour votre prochaine visite au bar. C'est ma spécialité et accessoirement son préféré.
— Votre soeur ?

Pour toi qui n'avait pas suivit toute l'histoire, tu es drôlement intriguée.

— Jessica Harper.
— Oh.
— J'crois qu'elle aime bien votre frère !

Jessica Harper, la jolie blonde qui l'avait bousculé un peu plus tôt. Si tu te doutais que Jasper ne connaissait pas sa réputation, pour toi qui la suivait sur les réseaux sociaux, tu savais. Cette fille est un boulet de canon.

Inviter le directeur de la marque à boire avec vous est une idée plutôt tentante en réalité, mais à la place de donner ton accord tu laisses un rire s'échapper. C'est que les envies ne sont pas toujours les meilleures options en vérité.

— C'est trop tôt encore, il n'acceptera jamais rien ce soir.

Du moins pas tant qu'il ne sera pas lui-même ivre, tu en es persuadée. C'est que tout le monde est là pour la même raison ce soir finalement, lui parler ou, au moins, tenter d'obtenir une entrevue plus tard histoire d'entrer dans ses petits papiers et de dénicher un contrat bien payé.

Ton regard qui dérive du serveur à Jasper alors qu'il lui pose le cocktail offert par Jessica, tu vois ton frère la chercher des yeux et la saluer. Elle n'est pas posée bien loin, sirotant tranquillement ce qui vu d'ici semble être un jus tout en discutant avec d'autres influenceurs. Elle adresse une œillade à Jasper qui ressemble clairement à une invitation, et tu ne peux t'empêcher de rire à sa réaction. Vanitas qui en rajoute, tu ne peux évidemment pas t'empêcher de rentrer dans son jeu.

— Oh mais ce serait avec plaisir, j'ai toujours rêvé de découvrir ce métier. Allons donc discuter de tout ça autour d'un verre chez moi.

Tu lui adresses un clin d'œil avant de lever ton shot à sa santé puis le bois cul sec. Il en place rapidement un nouveau devant vous alors que Jasper demande à être diverti.

— Jessica n'arrête pas de te regarder Jas', j'crois qu'elle t'aime vraiment bien.

C'est normal après tout, tu sais toi tout ce qui se dégage de lui et qu'il a à offrir ton frère. Une œillade complice à Vanitas, tu trinques ton second shot avant de le boire tout aussi vite.

— Et si j'allais voir Jessica pour l'inviter pendant que tu vas négocier la macarena du siècle. Bonne idée nan ?

La meilleure de la soirée sans aucun doute.

Va lui parler si ça te chante, je passe mon tour.
Tu sens ton coeur qui se serre un peu.

Et, alors que tu quittes des yeux Vanitas pour porter toute ton attention sur ton frère, les mots te manquent soudain. Prise de cours, tout se passait tellement bien que tu n'as pas fais attention. Il avait l'air de s'amuser pourtant, non ? Je ne peux pas. T'as un sourire qui s'étire en venant glisser une main dans son dos doucement. Tu ne lui en veux pas. Comment tu pourrais ?

— C'est pas grave Jas'.

Tu essaies de le rassurer comme tu peux pendant que Vanitas prend les devant. Tu hoches la tête à ses mots. On oublie tout. Vraiment tout. Vous allez boire autant qu'il le faut pour ça puis vous irez danser à vous en épuiser. Toute la nuit s'il le faut et même demain s'il le veut.

— On fait ça.
Ok Jas' ?

Tu as un sourire désolé pour le serveur qui, même sans vous prêter d'attention particulière, assiste à toute la scène. Lui-même décide d'adresser à Jessica plus loin un hochement de tête négatif pour la prévenir que ce n'est pas la peine d'attendre quoique ce soit.

Vanitas redispose des shots face à vous, tu te saisis du tien rapidement tout en faisant mine de réfléchir un peu. Étire une grimace quand il parle de bonheur.

— Ah Merlin non, le bonheur c'est définitivement à oublier..

C'est beaucoup trop mainstream pour vous.

— Va pour le pineapple. Et vos belles gueules aussi les garçons.

Un sourire, tu ébouriffes gentiment les cheveux de ton frère.

— Jas' ?
À quoi tu trinques toi ?