L’œil plongé sur une lettre de la part du Ministère, et plus spécifiquement du Bureau des Aurors, Vanitas joue des doigts sur son verre. Tourne, tourne le liquide ambré, tandis que les sourcils se froncent.

Encore un ordre de mission à l’étranger.
Décidément, ça n’a pas fini de tomber.

Et tandis que ses doigts glissent dans le pelage de Miaou, le pineapple qui vibre. Accroche de sa lumière le regard d’acier qui aussitôt s’inquiète de voir ton nom apparaître. Pas la peine d’attendre,
                                                pas la peine d’hésiter.
Il transplane dans le parc du manoir, sans même prendre le temps de couvrir sa chemise d’une cape. Au loin, ta silhouette se découpe dans l’obscurité déjà tombée et Vanitas se dépêche de courir.

- Jasper !

A peine arrivé, il se penche pour te soutenir ; son épaule qui maintient, son bras autour de toi. Ton visage se lève vers lui, amoché, et il ne peut s’empêcher de glisser une main contre ta joue. Ça fait mal, et il n’a aucun besoin d’être dans ta tête pour le savoir.
Quand tu t’essaies à l’humour, pour autant, ses traits se détendent.

Vraiment, Jasper, maintenant ?

- Non, sinon tu penses bien que je ne serais pas descendu. Une taquinerie. Qui cache son inquiétude. Allez viens, rentrons, je vais m’occuper de ça.

Il comprend que tu ne veuilles pas inquiéter ta sœur, à ta place, il aurait certainement fait la même chose. Se précipiter vers toi.
Ses pas qui commencent à te guider, à ton rythme, jusqu’à l’entrée.
Puis il n’a pas besoin de demander.

J’ai revu Clovis.
Son visage qui se ferme, sa main à ta taille qui raffermit sa prise. Il te tient, Jasper, tu sais ? Il t’empêche de tomber, au littéral, comme au figuré.

          Toujours.

- Tu n’aurais pas dû. C’est lui qui t’a mis dans cet état ?

La porte d’entrée se profile rapidement. Il ouvre, puis laisse les elfes de maison refermer. Doucement, l’esprit déjà occupé à réfléchir, il te mène jusqu’au premier salon où il t’installe sur le canapé. Congédie d’un geste les elfes et autres domestiques, puis ferme les lourdes portes d’un coup de baguette magique.

Il revient à toi, t’aide à retirer ton manteau qu’il dépose sur le parquet lustré.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé exactement, Jas, raconte-moi.

Il s’accroupit, juste devant toi. La baguette en bois de tremble dans une main, l’autre qui te soulève le visage à la lumière. Ton visage, si doux, toujours si beau, et pourtant terriblement fatigué.

Par la vie. Les injustices.

Et, encore et toujours, par Clovis.

ft. @A. Jasper Fawley | Octobre 2031

Je n’ai pas choisi.
Il s’en doute, c’est ça le pire.
Depuis sa mystérieuse résurrection, Clovis a tendance à apparaître partout où on ne l’attend pas. Vanitas le sait, il le vit, lui aussi.
Un ami, aujourd’hui devenu son supérieur, qui pas une fois n’a fait l’effort de venir le saluer. De venir le voir, en privé, pour rattraper ce temps égaré.
           Les doutes et les mystères persistent.

Un soupir.
Il te mène à l’intérieur, là où vous avez passé tellement de temps à échanger. Là où depuis que sa famille ne sévit plus, il a pris quartier pour fomenter, avec toi, son retour sur le devant de la scène. Et plus récemment, les moyens de laver ton nom.
Soudés.
           Alliés.

Il est face à toi, ton visage entre les doigts. Oh comme il aimerait juste pouvoir le caresser, te faire oublier comme il a pu le faire tout au long de ces années. D’une percée dans ta tête, il aimerait pouvoir tout arranger. Changer les souvenirs, te persuader que la vie n’est pas si difficile.
Il le pourrait.
Mais vaut-il mieux une vie douloureuse vécue avec le cœur ou un artifice de bonheur ?
          La question ne se pose pas.

Tout en t’écoutant, il agite sa baguette d’un coup sec.

- Episkey.

Un crac quand ton nez se remet en place.
Vanitas sort de sa poche un mouchoir, un de ces grands bouts de tissu brodés avec les initiales de la famille.

- Aguamenti, lancé au-dessus du mouchoir pour l’imbiber d’eau. Ne bouge pas.

Il tamponne, doucement, pour d’abord effacer les sillons de tes larmes qu’il ne peut s’empêcher de voir, puis les traces de sang séché.

- Vous avez discuté, mh ? Il pince les lèvres, essuie la peau juste sous tes narines. Je suis étonné que tu aies pu ne serait-ce que l’approcher. Au ministère, je ne le vois que de loin. Sauf son nom, évidemment, que je peux lire de très près sur tous les ordres de mission que je reçois.

Un soupir qui traverse ses lèvres.

- Je n’aurais jamais pensé qu’il irait un jour jusqu’à te frapper. Quel con.

Il retourne le mouchoir de manière à glisser une partie encore immaculée sur ton front. Puis le fait descendre, doucement, jusqu’à l’encolure de ta chemise. Les doigts de sa main libre qui effleurent une joue, ta mâchoire.

- Tu as mal autre part ? J’ai de l’essence de dictame s’il faut. Son œil valide parcourt ta peau glabre. Ce sera plus simple si tu te déshabilles.

Pour la science.
        Et l'humanité.

ft. @A. Jasper Fawley | Octobre 2031

Il a l’habitude, tu sais ?
On ne te changera pas, c’est ainsi que tu es. Un grand rêveur caché sous les affres d’une âme torturée. Et fidèle, tellement fidèle aux souhaits de ton cœur. Parfois, au cours de ces années, Vanitas t’a envié. D’être capable de t’accrocher, corps, cœur et âme à une histoire sans suites. C’est beau, Jasper, comme tu aimes Clovis. C’est beau, et pourtant, ça l’énerve.
Parce que sous la beauté de ton amour dévoué, c’est toujours la douleur qui finit par frapper. Comment tu feras, le jour où il ne pourra pas payer les pots cassés ? Vanitas ne veut même pas l’imaginer.

Tu l’as cherché, de ça il n’en doute pas. Il tamponne tes blessures, glisse son regard vers toi.

- Ca fait plus de quinze ans que tu le cherches. Tu as la plus belle endurance que je connaisse.

Il soupire, doucement, et te laisse parler. Ce n’est pas un reproche, plutôt comme un souhait. Un souhait muet, qu’un jour tu trouves une finalité à cette histoire. Bonne ou mauvaise, il faudra que ça cesse.

Parce qu’il faudra vivre, Jasper.

- Et lui, tu penses qu’il a vu comment toi, tu souffres ? Le mouchoir qui te caresse la joue. Tu sais qu’il est en vie, Jas, maintenant prends-toi un peu de répit. Ça fait trois ans que tu ne respires plus, trois ans que t’as le regard un peu plus vide.

Trois ans qu’il a l’impression, parfois, de te perdre.
Mais il n’en dit pas plus, se contente de t’effleurer. Vous vous ressemblez, en un sens, tu sais ? Vanitas a vécu sous la coupe de son père toute sa vie, et toi, c’est un peu comme si tu vivais sous celle de Clovis. On ne peut pas grandir ainsi, c’est bien quelque chose qu’il a appris.

Ta main sur sa joue. Il la regarde du coin de l’œil, attendri par ce contact qu’il a pris l’habitude de lire comme une excuse. Quand tu penses aller trop loin, quand tu crois abuser de lui, c’est toujours ce que tu fais. Tu penses qu’il ne le sait pas ? Il observe ta peau s’exposer. Les bleus, visiblement douloureux.
A moins que ce soit autre chose que trahissent tes yeux ?

J’aurais dû tomber amoureux de toi.
Son souffle qui s’arrête, un court instant. Son cœur qui tambourine un peu plus fort. Ça fait longtemps qu’il a abandonné cette idée. Longtemps qu’il a rangé ce stupide fantasme, pour simplement profiter. De vous, ce que vous partagez. Elle est loin, cette époque où il a vaguement espéré. Supplanté par Clovis, la bataille n’a même jamais existé.
Mais Vanitas s’en fiche. Ce n’est plus ça, ce sentiment qu’il pensait être de l’amour, qu’il recherche à tes côtés.
Depuis des années.

- Si tu étais amoureux de moi, il y a longtemps que tu aurais fui. Un léger rire. Alors restons plutôt comme ça, d’accord ?

C’est ce qu’ils font tous.
Son sourire qui s’étire, il passe le mouchoir imbibé sur ta peau. Tes clavicules, puis ton torse coloré. Et alors comme une habitude, comme une façon bien à vous de vous consoler, sa main libre qui passe contre ton cou, puis ta nuque qu’il attire. Ses lèvres, lentement, qui cherchent les tiennes. Se pressent.
C’est devenu tellement naturel.

- Pardon. Il se recule, juste son front se pose contre le tien. Je ne te fais pas mal ?  

Le mouchoir, du haut de ton torse qui descend vers ta taille.

- Je ne t’ai même pas proposé si tu voulais boire quelque chose…

Ses doigts, qui se ferment sur ta peau.

ft. @A. Jasper Fawley | Octobre 2031

A quoi bon ressasser des paroles que tu connais déjà ?
Comme tu le fais si bien remarquer, tu sais ce que Vanitas pense de tout ça. Alors plutôt que s’aventurer une nouvelle fois sur la route sinueuse de vos rares débats enflammés, il préfère te montrer que peu importe combien d’erreurs, il sera là pour te relever.
Et il ne te demande rien en retour, Jasper. C’est inné. Ca lui coule dans les veines, depuis des années, ce besoin de t’épauler. Il ne sait pas d’où ça vient, juste qu’il ne peut absolument pas s’en empêcher.

Un léger rire, au moment où tu mentionnes ta soeur. Pour elle aussi, il sait que ce n’est pas facile.

- Comme quoi, elle a parfois d’excellentes idées , avec un soupçon d’ironie.

Ce qu’il lit au fond de tes yeux, ça lui fait presque mal.
Parce qu’il te voit réfléchir, il te voit te torturer. Il sait toute l’énergie que tu as perdue à vouloir te faire changer. Comme lui pendant de bien trop longues années, qui a tenté de se conformer à un moule trop petit. Ne te fais pas tant souffrir, il t’en supplie. Tu as tenté de l’aimer, il l’a vu et, ne lui en veut pas, il l’a lu également en toi. Mais ça n’a pas fonctionné, aussi fort que tu aies essayé.
Et ce n’est pas grave, Jasper.
                                        Car ce monde, amants ou pas, vous pourrez l’éclater.

Alors il t’embrasse, ce tendre moyen que vous avez de communiquer ce qui ne passe pas. Celui également qui vous permet d’oublier. Et Vanitas en a besoin, tu sais ? Bien sûr que tu le sais. Et même s’il te dira qu’il vous préfère ainsi, même s’il te persuadera que c’est ainsi que va votre vie, il en crève d’envie, quelque part, de savoir si tu aurais fui.

Curiosité mal placée d’un désir enfoui.

Ses yeux se ferment un instant au glissement de tes doigts contre sa nuque, puis quand vous vous éloignez à peine, il t’observe.

Tu ne me fais jamais mal.
Est-ce que c’est vrai ? Au final, est-il vraiment si bénéfique autour de toi ? A te faire tirailler la conscience, le cœur en miettes pour un autre et la tête emballée dans tous les sens. Parfois il doute, Vanitas. Parfois il crève de peur à l’idée de ne pas rendre les choses plus simples mais compliquées.
Le problème, c’est que comme toi, il ne peut pas arrêter. Dépendant d’une relation qui n’a pas besoin d’être expliquée.

Sa main glisse sur ton corps, tu lui réponds et il ne peut qu’étirer un sourire. Il n’a même pas besoin de lire tes pensées pour savoir ce que tu demandes. Ses lèvres accueillent les tiennes, son corps se redresse le temps de te surplomber et de poser un genou sur le canapé. Il sent ta main s’affairer à sa ceinture et sans qu’il ne l’ait voulu, pourtant, il t’entend. Une main qui se pose en coupe sur ta joue, vos lèvres séparées de quelques centimètres à peine.

- Je ne t’abandonnerai pas.  

Ses doigts rejoignent tes cheveux, tirent un peu dessus pour encore t’embrasser.

- Je ne l’ai jamais fait. Et je ne le ferai pas.

Sa main libre contre ton torse, il te fait basculer pour t’allonger, la tête sur l’accoudoir de ce canapé usé par vos soirées. Ses genoux de chaque côté de ton corps, il retrace ta peau, qu’il connaît toujours par cœur malgré les bleus qui la parsèment. Presse ses lèvres, cherche à glisser sa langue derrière la barrière des tiennes.

Puis il se redresse, son bassin qui te maintient, et lentement commence à déboutonner sa chemise. Un sourire, au coin des lèvres accroché, quand il s’en déleste.

- Fais-moi penser, après ça, de te mentionner les derniers désastres de mes rencontres sur Witcher.

Pour te changer les idées, quand ses lèvres reviennent happer ton souffle. Quand elles caressent tes joues, le lobe de ton oreille, ton cou.

Votre relation.
Difficile à expliquer, mais tellement simple à vivre.

Vous.

ft. @A. Jasper Fawley | Octobre 2031

Je te crois.
Il l’espère. Putain, il l’espère tellement, que tu le croies. Parce qu’il t’a toujours tout donné, Vanitas, il a jamais failli. Même quand ça le faisait souffrir, même quand sa raison lui dictait de fuir. Ça fait pas de lui un héros, loin de là. Parce qu’autant que tu t’accrochais à lui, il avait besoin de toi. Vous avez besoin l’un de l’autre, comme deux organismes qui ont appris à souffler pour que l’autre puisse respirer.

Vanitas se redresse, suit du regard ta main qui le caresse. Tes yeux, qui l’admirent avec dans le fond comme un désir qui les anime. Il a appris à oublier, tu sais ? Ce que la lueur veut dire. Parce qu’il sait que ce n’est pas ta faute, ni la sienne. Il sait que tu as tout fait, tout au long des années, pour tenter de changer. Alors il retire sa chemise, frissonne quand l’humidité de tes lèvres découvre sa peau dénudée. Quand vous vous rencontrez, peu à peu plus fiévreux d’un désir dans lequel vous vous laissez brûler.

Un rire, léger, quand sa main se glisse entre les mèches d’ébène de tes cheveux.

- Non, mais j’ai reçu une demande en mariage et une intriguante obsession pour des photos de pieds.

A croire qu’il les attire.
Il se penche de nouveau vers toi, te renverse pour redécouvrir cette peau qu’il connaît. Il aime ton souffle, il aime vos corps pressés, cette évidence, cette simplicité. Et quand tu le supplies de ne pas te laisser partir, sa main balaie tes cheveux vers l’arrière, ses lèvres parsèment ta nuque de baisers plus pressés.

- Tu ne rentreras pas…

Son front retrouve le tien, le temps que vos regards se croisent entre vos respirations un peu plus échauffées.

- Je suis là. Il t’embrasse. Je vais te faire oublier.

Et ses mains qui s’égarent, entre vous, sur toi.

Encore une fois.

ft. @A. Jasper Fawley | Octobre 2031