Tu cours
Tu cours à t’en arracher les poumons
Tu cours car ta vie en ta dépend
Tu cours car si tu ne le fais pas
Tu crèves

Tu pousses les silhouettes, les malheureux, ceux qui pleurent, au diable, au diable, rejoignez la fureur des flammes, qu’importe, l’océan gronde ton nom et tu ne peux pas t’arrêter. dans ton sillage la braise, la fureur, la peur.
oui, la terreur
elle te court après, elle est féroce mais tu es plus rapide

Tout est en arrêt
le temps, la douleur, tout. Tu ne te donnes pas le droit de ressentir quoi que ce soit, tu ne peux que sentir tes intérieurs se déchirer sous cette main glaciale qui attrape tes tripes
son prénom au bout des lèvres
tu es furieux dans ta course, ton épaule bandée, cette attelle qui te fait perdre du temps

chevelure d’or dans la brise de ta rage
à défaut de pouvoir pleurer tu grognes, tu hurles sur ceux qui ont failli te voler la raison de ta survie, la raison de ton futur, l’inclinaison de tes sentiments, l’attrait de la vie.

une porte qui se claque alors que tu te précipites

Algae, Algae je suis là, Algae regarde moi, je suis là. je suis tellement désolé. pardonne moi je n’ai pas pu te protéger.

Tu ne peux pas la serrer de tes deux mains contre toi alors que viens la prendre fermement contre ton torse de ton unique bras valide, le regard plongé dans les flammes. elle pleure et tu pourrais arracher le soleil si tu pouvais pour le lui offrir pour qu’elle puisse se réchauffer, oui tu te sens invisible, là, à cet instant présent rien ne pourrait l’atteindre car tu es là.
((mais quand le dragon a fondé sur elle, où étais-tu, Melchior))
toujours en retard
le soldat

mon amour, c’est fini. les infirmiers autours, parasites qui puisent dans tes forces. une voix qui sort du lot et tu redresses la tête

… quoi ?

Tu n’as jamais vraiment été un homme de sentiments.
Quand t’étais enfant on t’a donné une boîte
et t’as tout mis dedans.
les colères, les amours, les joies
t’es devenu un soldat, tu as arraché le soleil pour t’en faire un étendard et tu écrasais les damnés, les malheureux, les solitaires
violent dans ta justice, violent dans tes gestes, précis et parfaits, t’étais plus rien, un automate et tu répondais aux chants lugubres d’une famille noble, d’un sang qui ordonne.

alors tu es devenu grand dans une force obligée. tu as décidé de prendre la place d’Atlas, ton monde, sauf que elle
elle est venue, véritable océan, et tu t’y es noyé
ainsi tu ne pouvais que dire
“ le soldat est mort
le soldat n’est plus
et aujourd’hui j’ai ouvert
la boîte de Pandore “

un regard surpris, un regard qui s'inonde de larmes alors qu’un rire éclate. ton front contre celui de ta reine, tu viens la serrer plus fort contre ton torse et même si tu n’as qu’un bras on peut sentir toute la stabilité de ton âme qui ne perdure que pour ses sourires.
tu te sens tellement
vivant
et ça fait presque mal, ça déchire ta poitrine, ton palpitant est si lourd, il était tellement immobile depuis des années.

Algae… ta main qui rejoint sa chevelure, un baiser sur sa tempe et alors que tu te permets de te reculer l’espace d’un instant, il y a tout l’amour du monde dans tes iris

on va être parents ? je n’arrive pas à le croire. non. je n’ose même pas l’imaginer. oh mais, je respecterai ton choix, amour, je comprendrai… oui je comprendrai que cela soit trop tôt, après tout nous ne sommes même pas encore mariés et .. et si tu le voulais je te supporterai peu importe le choix que tu décides de prendre, je t’aime, Algae, je suis si heureux, je suis désolé, je …

tu écrases ta paume contre ta bouche pour étouffer un sanglot, tu n’as jamais été un homme de sentiments alors quand ils montent à la surface tu ne sais plus comment te tenir
tu n’es plus le soldat droit
ton dos est courbé et tes cils sont trempés de larmes
d’un bonheur étouffant