Il est pas réveillé. C'est le problème quand on passe la soirée à baiser, se lever le lendemain matin devient compliqué. Alors il s'est jeté (ou presque), en dehors de la chambre dans laquelle il avait passé la nuit pour aller se changer chez lui, en profitant pour s'occuper d'Arsène.

Forcément, il avait les yeux encore collés, et ses cheveux (comme toujours) le faisant ressembler à un hérisson empaillé. Alors, forcément, il a oublié de sortir Arsène des poches de sa veste, se retrouvant sur son balai avec un furet qui n'avait rien d'aérien. Comme il était trop tard pour faire demi-tour, Stian avait décidé, pour une fois, d'utiliser son privilège d'employé sorcier et de garder son animal de compagnie sur lui. Le fait qu'il soit maudit permettrait probablement de le rendre intéressant pour tout les autres qui comme lui, se penchait particulièrement sur la magie noire et ses différents dérivés.

Et enfin (enfin !) était venu l'heure sacrée de sa pause, où il s'était dirigé avec entrain dans l'espoir de griller sa première clope de la journée. Il aurait dû en profiter pour demander à un medicomage de le débarasser des traces des ébats de la veille, mais son addiction avait gagné le bras de fer mental. Entre porter des suçons, ou se refuser une clope, le choix était vite fait.

Il avait pas prévu de sentir son cœur s'arrêter. Parce qu'il ne savait pas que t'étais là. Il ne t'avait pas entendu. Et même si il avait voulu, il ne t'aurait pas vu. Car Stian est handicapé, son œil droit comme voilé d'une couverture ombrée qu'on n'a jamais levé.

Il sursaute, d'un bond si profond qu'il réveille le furet jusqu'à là endormi dans son écharpe, qu'il rattrape habilement de ses mains.


"Woah- Arsène, déso-!"


Heureusement plus de peur que de mal, et le voilà à te fixer d'un air bien plus réveillé, la surprise ayant clairement ombragé ton air mal-luné.


"Greengrass ? Et…"


Il plisse ses yeux à lunettes, certain d'avoir déjà entendu le nom du félin au cours des années que vous avez partagé. Son regard s'illumine d'ailleurs, comme le sourire qui tranche son visage.


"Midas ! Salut à vous deux ! Ça faisait un bail que je t'avais pas croisé Nathaniel, comme on n'est pas sur les même projets !"


Parce qu'il est sociable, et pas inapte socialement, et qu'il a toujours été respecteux et sympatique de ceux qui l'entoure. Et surtout, parce qu'il n'a aucune raison de te détester, où de ne pas t'aimer. Il était un peu comme toi tu sais, plus jeune. Ses mots parfois trop asserré, et ses regards trop aiguisés. Oh, ça lui était passé, mais il était conscient que tu n'étais pas sincèrement méchant. Ou peut-être, surtout, il essaie de se convaincre.

Parce que c'est pourtant plutôt connu chez les langue-de-plomb, qu'il est borgne. Et que la surprise n'est pas toujours appréciée. Mais il sait aussi qu'il peut s'agir d'un simple moment d'innatention. Et que peut-être que, même si tu n'en montre rien, tu as probablement été aussi surprit que lui. Alors il se reconcentre sur Arsène, qui gigote et se débat entre ses doigts, observant curieusement le chat entre tes bras.


"Hum… Arsène est plutôt sociable, ce serait ok de le laisser jouer avec Midas ? Il a besoin de se dépenser."

Tu grimaces à l'entente de ton nom de famille. Et Stian le remarque. D'ailleurs, son regard te détaille un peu plus curieusement, alors que ta réaction lui amène un semblant de familiarité. Lui aussi, il y a encore quelques étés, il grimaçait quand on l'appelait Holgata. Parce que son simple nom portait trop de poids.
Alors il s'adoucit légèrement, ses yeux se faisant plus doux. Il comprend tu sais. Il t'entends.

Et puis, à ton affirmation, il va déposer Arsène au sol, le petit furet exécutant quelques bons enjoués mais maîtrisés, demandant immédiatement à jouer alors que son propriétaire s'installe pour les observer, traînant sa carcasse en une position plus reposante.


"Non, j'ai trop besoin d'une clope."


Il sort d'ailleurs son paquet, te jetant un regard avant de te le tendre, la sienne déjà entre ses lèvres.


"T'en veux une ?"


Il attend, son bras tendu ayant étiré son col, laissant apercevoir quelques indices permettant de comprendre son état déchevelé et fatigué. C'est pas un secret au bureau, qu'il est plutôt actif dans son lit, quelque soit le genre en face de lui. Mais habituellement, il prend au moins le temps d'avoir l'air décent. C'est peut-être pour cela d'ailleurs, qu'il ne commente pas sur ton ton tranchant, qui est tout aussi insolent que sa tenue du moment.

Alors il tente le partage, pour te faire baisser, doucement mais sûrement, les barrières que tu as érigé, un sourire se formant sur ses lèvres abîmées par la quantité de baisers qu'elles ont volé.


"Sinon je peux aussi te payer un café."


Oui, il tente de t'amadouer. De t'apprivoiser.

Soit. Si tu n'en veut pas, il s'allume la sienne, prenant garde à ne pas éjecter la fumée dans ta direction. Ou celle des animaux en train de jouer.

Il te remarque quand tu détournes le regard. N'ose pas non plus mal l'interpréter. Il en a déjà trop bavé pour se formaliser sur un homme plus jeune préférant ignorer évidemment les traces de ses ébats. Tu ne le sais pas, mais vous vous ressemblez plutôt sur la raison à cela. Lui aussi, son amour est mort et enterré.
Sauf qu'étrangement, ça n'a fait que le rendre plus ardent. Comme dans la recherche d'un nouvel être parfait. Comme un désir éternellement insatisfait. Parce qu'il n'arrive pas à le remplacer; l'oublier.

Et soudainement, il a l'impression d'avoir gagné, même s'il ne va pas le crier, alors qu'il sourit sincèrement (aisément) alors que tu acceptes son offrande.


"Pwahah, ça marche, je te l'offre sur le chemin du retour."


Si tu pouvais lire son esprit, ces sentiments, tu saurais qu'il n'a rien de méchant. Que, le plus souvent, ses mots sont ceux qu'il pense, et qu'il ne se camoufle que rarement. Pas maintenant.

Il a l'impression qu'un chat errant s'approche enfin doucement, après qu'il est passé des heures dans le froid à attendre sans bouger. C'est métaphorique, en réalité il s'agit plutôt d'années. Voilà longtemps que vous vous connaissez sans pour autant vous être jamais réellement abordés.

Il est surprit ensuite, par les paroles qui sortent de tes lèvres, alors qu'une hilarité soudaine l'agrippe lorsque tu continues. Il se retient, très clairement, mais ses épaules tressautes pendant assez longtemps, visiblement.

Finalement, après une nouvelle bouffée, il te jette un coup d'œil amusé.


"Et alors, pourquoi tu restes là toi ?"


Il ne te laisse pas le temps de réfléchir à sa phrase et mal la prendre. Parce qu'il rajoute immédiatement.


"Que je saches, de nous deux, je suis celui avec la plus mauvaise des réputations."


Traitre de son propre sang. Il aurait dû finir à Azkaban. Et si la magie noire n'effraient pas les pur-sang, Stian à sût s'élever au dessus des rangs.
Son regard se pose sur toi, amusé. Un peu plus vieux aussi. Comme rattrapé par les années.


"J'peux t'appeler Nath' ? J'suis pas fan des noms de famille et ton prénom est un peu compliqué pour mon palais norvégien."


Il aime pas les formalités. Préfère être relaxé.