histoire

2005 ¤ C’est la naissance d’Emyr Alawn Selwyn, peu de temps après Aeres, sa sœur. Le garçon tant attendu, qu’on nomme Roi ou Seigneur, est choyé, adoré. Il observe déjà le monde avec ses yeux si clairs et si profonds. Ses parents savent qu’il n’aura pas la vie que ceux de son rang se voient offrir à leur venue au monde et que son empire s’écroule déjà avant même qu’il ne soit capable de le découvrir par lui-même. Mais il transmettra le nom et le sang, et portera un nouvel espoir de ne pas voir la lignée s’éteindre.
Parfois en le berçant, ses parents le lui murmurent tendrement pour l’y préparer et pour qu’il ne l’oublie jamais.


2005 à 2016 ¤ L’enfant grandit dans les jupes de sa sœur et dans un cocon plutôt insouciant au départ.
Bien sûr, la grande armoire couverte d’or et de nacre dans laquelle il avait l’habitude de se cacher pour jouer finit par être emportée et, avec elle, les fourrures douces et chaudes qu’elle contenait, dans lesquelles il s’endormait parfois lors de parties de cache-cache. Mais ce n’était qu’une armoire, et ce n’étaient que des fourrures, il y en avait d’autres.
Bien sûr, il y a les tableaux, ceux qui peuplent les halls et les couloirs et qui le suivent de leurs yeux austères quand il cavale derrière sa sœur. Eux aussi finissent par être emportés mais ce ne sont que des tableaux. Et la plupart lui faisait peur de toute façon.
Plus tard, Emyr aura l’impression d’avoir été beaucoup plus préservé qu’Aeres à des âges similaires, quant à la situation de sa famille qu’il lui semble avoir mis plus de temps à comprendre.

A la mort de son père, brutale, inattendue, sans gloire et sans salut, le cocon jusque-là préservé se déchire, lacéré par la réalité qu’on avait tenté de maintenir encore un peu éloignée d’Emyr. Comme si tout ce dont on l’avait protégé jusque-là s’abattait finalement sur ses frêles épaules. L’instinct, d’ailleurs, lui dictera de s’emparer de la chevalière de son père avant qu’il ne soit trop tard. Et à raison.
Puis on commence à le gronder sévèrement pour un pantalon qu’il faut trop souvent raccommoder, un jouet qu’il malmène ou un vase qu’il casse par inadvertance en courant dans les couloirs. On lui intime d’être plus sage et plus soigneux, de se tenir droit, de tenir sa langue, de cesser les “pourquoi”, d’être digne, de se comporter comme un prince, de cesser les caprices. Puis on lui ordonne.

Sous l'œil impérieux de sa mère, Emyr obéit aveuglément. A mesure que les têtes des enfants Selwyn se remplissent de savoirs et de craintes, le salon spectateur de leur éducation stricte se vide en même temps que les armoires, les vaisseliers et les boîtes à bijoux. Plus de bureau pour parfaire son écriture ? Qu’à cela ne tienne, Emyr fera de l'escalier en marbre son support. Les fauteuils moelleux disparaissent ? L’arbre noueux au fond de leur jardin sera son trône pour sa lecture. On l’isole de ces petits camarades au sang pur comme le sien ? Il se réfugie dans les bras et dans le cœur d’Aeres.

L’année du départ de sa sœur à Poudlard est une année terrible.
Emyr est seul face à sa mère, et sans Aeres, il semble que la communication entre la génitrice et son fils se complexifie. Il est terriblement seul aussi, quand lui et sa mère doivent abandonner le château familial aux mains de son nouveau propriétaire, quand  il faut se réfugier et mendier les miettes auprès des rares amis de la famille à être restés loyaux quand la dorure s’est écaillée pour disparaître.
Le garçon n’a qu’une hâte : rejoindre l’école, comme une terre promise, peu importe qu’il faille affronter les autres. Comparés à l’oppression de la misère, de la pitié et de sa mère qui l’étouffent, les autres élèves ne lui font pas peur.


2016 à 2022 ¤ La rentrée arrive enfin et avec l’appréhension inculquée par sa génitrice, une part d’Emyr brûle d’envie d’y être quand l’autre aimerait disparaître à tout jamais pour ne pas avoir à entrer en scène dans un théâtre qu’il ne pourra plus jamais quitter.  

Sa mère a vendu l’un de ces tous derniers bijoux, qu’elle gardait précieusement en cas de besoin, pour offrir une baguette toute neuve à son fils et Emyr arpente Poudlard dans ses robes de sorcier et uniformes de seconde main ainsi que dans les vieux vêtements de son père. Il lui ressemble de plus en plus, les cheveux indisciplinés, grand et carré, hormis ses yeux glacés qu’il tient de sa mère.

Sa stature et son air distant l’aide énormément à ne pas se faire embêter, du moins directement et frontalement, tout comme ses résultats scolaires, notamment en cours de sortilèges qui en dissuadent plus d’un de le provoquer.
Même si ce que l’on murmure dans son dos s’insinue dans son esprit, pèse sur ses épaules et assombrit ses traits, Emyr reste déterminé et focalisé sur le fait d’être l’excellence exigée par sa mère. Alors on le voit partout : au club d’échecs version sorciers, au club de duel sans oublier dans l’équipe de quidditch des Serdaigle où il aura le rôle de batteur dès qu’il eut atteint l’année lui autorisant à s’inscrire pour l’un et à passer les sélections pour l’autre.

Toutes ses activités lui réservèrent une surprise qu’il n’avait pas prise en compte dans la planification si méticuleuse de sa vie : des rencontres. Elles n’avaient pas forcément été celles auxquelles il aurait pu aspirer en portant le nom des Selwyn, son rapport avec les autres sang-purs étant plus que complexe, jaloux de ces derniers, pour peut qu’ils lui rappellent un peu trop que de noble, il n’avait plus que le sang. Mais elles le forcèrent à s’ouvrir un peu plus pour découvrir autre chose parmi les sang-mêlés et les nés-moldus qu’il croisa au détour des couloirs pendant ses septs années, apaisant une partie de lui qui aura moins eu à faire semblant pendant un temps.
Il a un peu moins peur de l’avenir pendant un temps, jusqu’à ce qu’il se rappelle qu’il devra endosser le rôle de patriarche à la sortie de l’école.

A l’exception des vacances d’été qui ne lui sont supportables que grâce à la présence de sa sœur à ses côtés, Emyr passe toutes les autres vacances scolaires dans son école.  

Si on lui pose la question, il serait capable de répondre que son adolescence à Poudlard n’a pas été si terrible vu le contexte familial dans la société magique, alors qu’il brandissait son excellence comme défense lorsque les regards moqueurs glissaient sur sa tenue de bal terne et vieillotte.


2022 à 2025 ¤ La décision des Selwyn est prise : redorer leur nom et rendre à leur famille la grandeur de jadis est une priorité absolue dans la planification de leurs vies futures. Mais le traumatisme des décisions passées pèsent encore trop lourdement sur leurs épaules pour ne pas les inciter à la prudence.
Si le plan à long terme est évident, avec au centre de leur préoccupation leur sang, leur réputation, leur richesse, Emyr est fatigué de survivre. Il veut vivre et désire ardemment que sa sœur se l’autorise aussi. Elle est toute sa vie, comme sa famille.
Alors ils passent un accord et ouvrent une nouvelle porte. Leur nom ne les obligera pas à reproduire les erreurs de leurs ancêtres, et leur quête de grandeur ne les forcera pas à foncer tête baissée.

Emyr, qui s’est déjà épuisé sept ans à exceller, opte pour une double licence à Poudlard. On ne la lui déconseille pas bien que certains de ses professeurs s’inquiètent pour son état de santé général. Mais Emyr a changé, il n’est plus le petit garçon qui écoute, il est devenu l’homme qui fait. Alors les conseils avisés se taisent.  
La médicomagie sera son plan à court terme, comme sa sœur qui choisit la voix de la justice magique. Ils savent tous les deux qu’ils ont besoin d’un toit et d’une situation, aussi misérables soit-ils au départ, pour avoir l’impression de sortir légèrement la tête de l’eau afin de se consacrer à leur plus grand projet.
La technologie magique est un second choix évident, impérieusement dicté par le sang et le nom. Car plus tard, il l’a promis à Aeres, le nom des Selwyn brillera à nouveau dans le monde magique et ils réatablieront la grandeur et le savoir de leurs ancêtres.
Comme à chaque fois qu’il veut être reconnu et ne laisser aucune faille exploitable, il se donnera corps et âme à ses études.

Quand sa sœur s’en va, c’est comme un coup de poignard et il ne saura jamais par quel miracle il a tenu le coup pour mener à bien sa dernière année de DEMA. Peut-être simplement parce qu’il sait qu’il n’a pas le droit de flancher. Son seul droit, c’est l’excellence. Alors il réussit et en ressort grandi, fier. Mais aussi creusé, épuisé, frustré.
Il aime beaucoup trop sa sœur pour lui en vouloir mais Aeres lui laisse un goût amer dans la bouche dont il n’arrivera pas à se débarrasser, notamment envers les moldus trop inconscients et trop faibles chez lesquels sa sœur à fuit.
Au fond de lui, il commence à ressentir une pointe de jalousie car Aeres n’est pas la seule à rêver de fuite quand son frère arrive finalement à trouver le sommeil.


2025 à 2030 ¤ A peine son double DEMA obtenu, Emyr trouve une place en tant que médicomage à Sainte Mangouste afin de s’assurer un toit, aussi minable soit-il, et une entrée d’argent fixe, ne s’écartant pas une seule fois du chemin décidé avec sa sœur pour la sortie de ses études. Il ne veut plus survivre, il veut vivre, ne serait-ce qu’un peu, pour faire taire ses névroses qui lui font calculer la moindre dépense qui passe entre ses doigts.

S’attirant rapidement les faveurs du guérisseur en chef de son service, qui au départ pourtant voyait l’arrivée d’un sang-pur dans son service d’un très mauvais œil, Emyr se voit confier un travail de recherches qui l’envoie régulièrement à travers le monde sur le terrain.
Une façon élégante de s’offrir du répit face à la société magique par moment en prétextant des obligations professionnelles importantes quand il n’est pas prêt à affronter les regards lourds d’attente. Malgré tout, la majorité du temps, le cadet Selwyn a peu d'occasions de fuir et répond à ses obligations sans rechigner en faisant acte de présence partout où il est demandé, invité, ou juste parce qu’il se doit d’y être. Sa génitrice y veille.

Emyr revient de l’un de ses voyages expressément pour contribuer aux recherches qui suivent l’arrestation de Shumman, animé par le fait de trouver un remède au fait d’être dénué de magie. Le résultat du référendum lui déplaît fortement.

Depuis cet événement, Emyr se tient bien plus informé de l’évolution des mentalités au sein de la société magique, notamment celle du gouvernement en place. Les réceptions lui pèsent toujours mais regagnent son intérêt quand elles commencent à parler avis politique et jeux de pouvoirs.
Malgré sa mère et Aeres qui lui soufflent l’idée du mariage, il esquive pour le moment habilement le sujet. C’est trop tôt, leurs économies ne se renflouent pas, faisant de lui un sang-pur toujours très loin d’être un bon parti, il le sait. Les moqueries de l’école lui reviennent en tête, “Au moins, tu sais qu’elles ne te tournent pas autour pour ton argent, t’en as de la chance.”.  

Puis vient l’apparition de The Crow, de ses disciples et de son discours qui bouleverse grandement le jeune Selwyn à l’héritage perdu et au sang moqué. L’effet qu’il a eu sur le monde est fantastique, aux yeux d’Emyr qui rêve toujours de réhabiliter le nom des Selwyn et qui a toujours pensé que la magie était un état supérieur à maintenir au-dessus de tout.
Cette idéologie lui parle et fait écho à bon nombres de désirs comme une véritable tempête, après tout la magie et le sang sont les seules choses qu'il reste aux Selwyn, et sans en parler à sa grande sœur, Emyr en suivra les progrès secrètement et prudemment. Il se trouvera notamment, pour le travail, au Moyen-Orient le 6 août 2029.


2030 à 2032 ¤ Emyr fait partie des sorciers qui n’ont pas cru à la mort de The Crow et qui ont guetté une information qui pourrait leur donner raison.
Alors, conforté dans l’idée du retour du Corbeau par les rumeurs et le remue-ménage politique récent, le jeune homme ne perd pas de vue ses espoirs dans de nouvelles stratégies, voire de nouvelles alliances dans les cercles politiques qui pourraient servir au nom et aux coffres des Selwyn. C'est aussi un soulagement de pouvoir échanger avec d'autres que lui qui partagent ses idées, notamment celles qui font que son nom et son sang ont encore de la valeur dans ce monde, et que ça doit rester ainsi.

Il aborde son nouveau poste de guérisseur en chef avec le cœur bien plus léger, car dans les couloirs de l'hôpital, on le regarde pour ce qu’il vaut en ingéniosité et en capacité, pas en gallions. Emyr se félicite d’ailleurs d’avoir évincer de cette place un fils ou une fille de bonne famille dont les parents ont toujours été de généreux donateurs pour l'hôpital. Et c’est une fierté particulièrement immense, même si le procédé reste douteux.

Sentant bien que les femmes de la famille le mettent à l’écart de certaines situations concernant l’état de leurs finances, Emyr cherche à s’immiscer un peu plus dans ses affaires pour leur venir en aide, pour avoir l'impression d'être un peu plus qu'une vitrine.
Il est d’ailleurs un petit frère particulièrement attentif et dévoué quant au projet de lui trouver un mari digne d’intérêt pour le nom des Selwyn au côté de leur mère, tout en esquivant toujours le sujet du sien.

Résumé: