Pas trébuchants sur le sol trempé d'une pluie violente. Odeur acide du goudron qui suinte d'huile et de déchets de l'humain. Carcasse elle, elle se traîne. Main posée sur les murs pour ne pas rejoindre l'eau et te noyer dans une flaque, souffle qui ne parvient plus à garder un rythme logique. C'est faible, exactement la même respiration que les animaux sur le point de mourir vomissent de leurs poumons. Gouttes qui viennent coller tes cils, rendant ta vision encore plus flou, mélanges de gris et de charbon, courbes qui se tordent et s'inclinent sous les râles douloureux.

T'as voulu suivre. T'as voulu faire taire les murmures qui trottent derrière toi, t'as voulu essuyer les demandes d'une femme du revers de la main, peut-être lui offrir ce qu'elle quémander. Mais t'as pas tenu. T'as pas tenu quand les clients sont devenu foule, quand son sourire est devenu morsure dans ton cou. T'as voulu porter un rôle qui était bien trop lourd pour tes épaules.

Alors tu retournes voir ce qui réchauffe ton visage meurtris. Tu retournes aux côtés de celui qui ignore tes cassures et tes sanglots, celui qui ne peux plus rien constater sur ton enveloppe tangible qui s'effrite.

Tu sens l'alcool, tu sens la nuit animée, tu sens les avances d'une femme, tu sens la peur.

Mais pour la première fois tu cherches de l'aide, du réconfort, un jugement acerbe ou une main dans ton dos, quelque chose. Tu ne restes pas à ramasser les cendres encore brûlantes de ton envolée, tu ne te caches pas de tes sentiments.
Tout ça parce que tu entends sa voix en boucle dans ta tête. Cette voix que tu as préféré ignorer à l'époque, parce que c'était plus simple, plus facile. Cette voix dure et sans retenu qui touchait la partie la plus fragile de ta petite personne.

Elle porte un nom, la voix, la raison.
Elle porte un nom que tu murmures après avoir toqué à sa porte, avec la tienne, toute cassée et étouffé par le bruit de l'orage qui s'emporte dans le ciel qui commence à faire vibrer l'électricité dans l'air.

Tu n'as même pas regardé l'heure, tu n'as même pas vérifié s'il était là, chez lui. Tu as juste réussit à venir, vêtements trempés et yeux rouges. Tu regretteras peut-être quand il te donnera un coup de poing pour l'avoir réveillé ou une gifle pour simplement avoir l'audace de te présenter dans cet état devant lui.

«  Isaac, je t'en prie. »

T'as tellement peur de rester seul, t'as tellement peur de te faire engloutir par tes pensées, de te faire dévorer par la culpabilité, par l'alcool et la cigarette. Tu supplies. C'est tout ce que tu sais faire, Croyance, supplier. Qu'on te blesse qu'on te sauve qu'on t'oublie, tu demandes toujours quelque chose que tu as atteint tes limites, tu sais jamais prévoir tes hémorragies, tu t'y prends toujours trop tard.

Et le voilà, le grand corbeau aveugle, le grand corbeau qui sans te voir transperce ton cœur de toute son entièreté.

Le seul qui de toutes ces ombres, te vois.

Une vision tellement réelle, tellement crue qu'elle donne à ta respiration des hoquets. Main qui se tend pour attraper ton col, tu t'attendais à sentir ses phalanges s'incruster dans ton visage pour te faire embrasser le sol, alors tu t'en contentes, tu es trop soûle pour répliquer, tu es trop effrayé par ta propre bêtise pour l'attirer dans ta chute.

« Merci .. » Un merci murmuré pour Isaac, étouffé par les débuts de sanglots que tu lui cacheras encore une fois. Un merci doux pour l'elfe de maison qui s'empresse de te prêter des vêtements puis la porte se ferme et tu te retrouves seul dans sa salle de bain.

Immobile, l'unique bruit qui te fais revenir sur terre sont les gouttes froides qui s'écrasent de tes cheveux sur le sol. Tu n'oses pas bouger comme si le moindre mouvement allait te ramener en face de cette femme, comme si le premier déplacement et il refermera la porte en te laissant derrière.

Pourquoi il n'y a qu'à ses côtés que tes larmes se permettent d'exploser hors de tes poumons. Pourquoi il n'y a que sa voix qui libère cette immense pression sur ta nuque.

Pourquoi tu pleures sans parvenir à t'arrêter, bras autour de ton fragile corps qui se fracture, tu essaies de tenir les bouts cassés contre ton torse mais tu t'effondres.

L'eau elle s'incruste dans tes fissures elle lave tes regrets elle adoucit les plaies elle fait rosir tes genoux. L'eau, t'aimerais qu'elle t'entraîne avec elle.

Tu t'y perds, Croyance, tu te perds dans des souvenirs dans des échos de voix que tu t'abandonnes à suivre cette fois. Tu vois cet enfant à la chevelure blanche qui partage ses sucreries lors de son premier jour dans cette école maudite. Sa peau est limpide, pas l'ombre d'une morsure, pas l'ombre de ce poison. Tu le vois parfaitement devant toi, limpide, mais tu ne sais plus ce qu'il ressentait. Pourquoi ce rire, pourquoi cette impatience. Tu vas te faire piétiner, tu vas donner tant et tant tu n'aurais plus rien, que ton souffle pour te souvenir que tu es vivant, que tes douleurs pour te rappeler que tu as perdu.

Le temps passe, infatigable lui.

Les vêtements que tu portes ont ce parfum, ce parfum que lui seul possède. Tu n'arrives pas à mettre le doigt dessus, pourtant toi aussi Croyance tu sens plus que les autres, l'animal oblige, alors pourquoi n'arrives-tu pas à déchiffrer cette odeur qui calme les battements affolés de ton cœur.

Le loup retourne près de l'oiseau.
Tu te tiens debout à le fixer, les astres noyés dans tes yeux ; perdus dans sa chevelure de jais, perdus dans sa façon de se tenir, comme il se tenait il y a longtemps devant toi.

« Isaac, as-tu déjà eu peur de moi ? As-tu déjà souhaité ma mort ? »

Tu te sens faiblir à nouveau. Il est tout ce que tu fuis ; ta raison tes faiblesses tes hontes ta douceur. Tout ce que tu déchires de tes crocs, tout ce que tu piétines de tes chaussures bas prix, tout ce qui hante tes cauchemars.

Sa voix qui elle toujours voyante vient loger ses paroles dans le creux de tes mains. Que faire de cela. Est-ce un non de sa part ou simplement un échappatoire à sa vérité qui ne loupe pas. Lui qui ne ment pas. Lui qui ne s'embarrasse pas du sang qui coulera de ses coups d'épée -ça ne t'a jamais dérangé- il ne coupe pas pour détruire mais pour réparer.
Fumée elle s'échappe de ses poumons fumée elle vient ravir tes pensées.

Tu observes la tasse de café un long moment. Du thé. Le thé ça te fait simplement pensée à Eamon et rien que d'imaginer son sourire tu sens tes intérieurs se fissurer. Oui du café. C'est préférable. Apprécié.

Pas en avant qui hésite tu ne sais pas où te mettre. Ici, l'air qui vibre sont ses yeux et plus que jamais tu te sens observé. Il voit l'invisible il voit le véritable, celui qui tremble derrière tes épaules, placé juste dans le creux de tes omoplates là où tu dois te tordre pour parvenir à l'effleurer du bout des doigts.

Ses yeux debordant de perles sont braqués sur ce bout d'âme caché.

《 Mh hm, du café c'est parfait. Encore merci. Pour tout. 》

Toujours ce murmure Croyance. Toujours cette voix qui , lourde sur le sol, prend son temps à s'envoler.

Puis de nouveau tu te perds à le regarder et tu t'approches. Ta main vient effleurer la sienne ne serait-ce qu'une seconde. Tu lui donnes parfaitement l'emplacement de ton corps avec ce simple détail. Tu lui informes un contact.

Parce que ta main se lève et tu voles doucement la cigarette de ses lèvres pour venir la loger entre les tiennes dans un soupir grogné de satisfaction.

《 Je t'empreinte ceci. 》

Tu t'éloignes, laissant la fumée venir noircir l'intérieur de ton corps alors que tu t'assoies , tenant la tasse entre tes mains.

Brûlante. Ta peau en rougit et pourtant tes doigts restent fermement agrippés.

Tu remarques aloès que tu as fermé les yeux. Quand tu t'es approché de lui. Tu ne voulais pas voir les détails de son visage, ses cils qui s'effondrent en cascade sur ses yeux brumeux, la rougeur de ses lèvres , tout ça tu ne voulais pas le voir. Il t'effraie Isaac. Il t'a toujours fait fuir Isaac. Tu sais qu'il pourrait être celui qui t'arrachera la vie d'une maniere ou d'une autre.

Le bruit de la pluie, de ton souffle , du calme étourdissant de la ville, de son cœur dans sa poitrine.

Le bruit de l'hématome qui prend en couleur sur les courbes de ton âme.

Regard qui tombe et plonge dans ce liquide noir qui encrasse tes poumons. Regard qui , attentif, trace des dessins dans la fumée du poison. Spectacle qui te tire la mail, il demande un encore, Et cet encore c'est la chaleur de son pouls dans le creux de sa gorge. C'est son dos qui se pose et rencontre le froid du verre. Incapable de t'en décrocher, incapable d'oublier.

« Je m'en doute. »

Fragile sourire sous les rougeurs de tes yeux. Fragile être qui a rarement perdu de sa rage. Il ne reste plus que l'oiseau, débarrassé de l'essence sur ses ailes.
Une gorgée qui réchauffe ton corps, une inspiration qui endort les souvenirs.

Que répondre. Quoi répondre. Tu ne peux pas lui mentir, tu ne peux tout simplement pas. Il connaît les intonations de ta voix il connaît la vérité dans celle-ci, il connaît les roulements de ta langue quand tu annonces le pire, il connaît le bruit de ta mâchoire qui se brise quand tu embrasses le pêché.

« J'ai .. » Tu déglutis, ça fait mal, ça fait mal d'arrêter de te cacher « J'ai fuis les avances d'une femme. » Si ce n'était que ça « J'ai été engloutit par le bruit de ce bar » Si ça n'avait fait que ces dégâts «  par un alcool trop fort » tu n'as pas encore décuvé Croyance, tu brûles, tu te déchires

Tes poings se serrent, trop fort alors avant de gâcher la boisson tu lâches tout et tu aspires les toxines qui vinrent se coller aux parois de tes poumons

T'as honte. T'as mal. T'es incapable de voir une fin douce pour ta personne. T'es incapable de laisser entrer dans ton monde quelqu'un qui ne veut pas t'arracher ton dernier souffle, qui ne veux pas mettre une muselière à l'animal qui ne veux pas voler tes yeux et tes dents.

L'échec, Croyance, l'échec. L'échec tu avais promit de ne plus le laisser t'approcher. Tu fais tout pour t'en dépêcher alors pourquoi revient-il, encore, toujours plus fort.

«  Ses baisers m'ont donnés envie de vomir. »

Sa main qui s'approche, sa main qui vers tes peines est attirée pour dans ta chevelure se loger. Après lui avoir rendu sans un mot le bâton de poison tu fermes les yeux. Sa voix calme qui apaise les battements de cœur, le bout de ses doigts qui brûlent chacune de tes mèches de cheveux. Il te propose de boire un liquide qui comme l'alcool éteint les flammes. De manière moins destructrice, de manière simple. Mais n'est-ce pas tricherie que d'accepter ?

Ta tête lourde de pensées abjectes ose se poser sur son épaule et ta main sur son torse, elle accroche le vêtement, désespoir désespoir qui noie ce garçon. Désespoir toujours sur ses épaules haut perché tu toises.

« Ce serait avec plaisir, merci .. »

Mais d'un coup l'angoisse te prend à la gorge comme un lion affamé, sa mâchoire s'entrechoque sur ta jugulaire et il ne lâche pas, l'animal.
Ton corps est prit de frisson et tes doigts se crispent davantage sur le haut de ton sauveur nocturne

« Attends- … attends un moment je t'en prie , ne pars pas, pas tout de suite » simple murmure dans le creux de son cou, voix brûlante de crainte

Souffle qui s'emballe, il te procure bien trop de réconfort le simple fait de te détacher de son corps t'effraie.
Chaleur qui épouse ton torse, chaleur qui caresse ta nuque, pas question que tu retombes dans le froid qui ne s'arrête pas. Pas question que tu retombes dans ces abysses.

Écume qui s'écrase contre les rochers tu te permets de t'écrouler, jamais tu ne flanches, toujours à t'infliger les pires tortures c'est debout que tu te vides de ton sang.

Mais lui il parvient à reposer ton âme.

Le contraste est immense entre les deux façonneurs de potions. L'un soigne l'autre empoisonne. L'un tranche l'autre ment. Et t'aimerai être assez fort pour simplement supporter la voix qui te ramène à la réalité avec sa dureté, avec sa froideur sincère cette sévérité innée.
Mais t'es qu'un roseaux. Tu te plies encore et encore sans jamais résister à quoi que ce soit.

Alors quand il te pousse à t’asseoir sur le sofa, alors quand il te demande de cesser de te plier sous son ouragan tu peux pas t'empêcher de rester silencieux.
Silencieux parce que t'es tellement perdu, silencieux parce que rester à ses côtés c'est fixer l'écroulement de ton cœur de manière limpide.

D'habitude tu balayes l'air d'un mouvement de la main, tu lui lances des remarques acides que vous savez tendres alors qu'il y répond, d'habitude c'est toujours en surface. Tu veux pas y plonger, dans ses eaux. Il est tellement lumineux, Isaac, jamais il ne se tournerait vers toi. Alors à quoi bon t'abandonner à tes sentiments, alors à quoi bon prononcer son prénom comme si tu voulais le dévorer.

« … alors laisse moi profiter une dernière seconde de mon taux d'alcool, laisse moi agir comme un enfant une dernière fois » alors que tu attrapes la potion entre tes doigts et que tu lèves ton regard brumeux sur celui nacré de l'ombre « t'es sublime Isaac, t'es agaçant, irritable et désagréable mais tellement charmant, affolant comme je pourrai tomber amoureux de toi si facilement » affolant comme jamais je ne t'atteindrai, affolant comme jamais tes pensées ne se perdront sur moi

sourire qu'il ne voit pas, sourire parce qu'il ne le voit pas
et t'avale le liquide
il pourrait te tuer, te faire boire n'importe toi
mais t'as confiance en lui
t'as toujours eu confiance en lui
étoile qui te brûle les joues dans ton ciel

puis l'effet opère et tu passes ta main sur ton visage dans un soupire fatigué. Maintenant il n'y a plus rien pour étouffer tes peines, maintenant tes pensées sont précises. Quel cauchemar.
Ton habitude de toujours tout faire exploser autour de toi et de fuir les pansements, sur ton corps ton âme et ton cœur.

« je suis désolé de débarquer comme ça. J'ai honte. »

c'est une bonne chose, ta honte Croyance, ce serait effrayant que tu sois insensible à ta destruction, que tu l'acceptes sans broncher, sans venir toquer à sa porte, que tu te laisses crever dans un coin de rue.

L'attrait du rouge, l'inclinaison pour la violence qui sur tes lèvres se posent. Souffle qui rejoint le tient, fatigué, désabusé alors que celui du blessé réclame. Il tend les bras vers la lumière qu'en ton sein tu gardes secret. Isaac, il tend les bras vers toi.
Parce que ta haine est douce, parce que ta haine ne recouvre pas son corps de morsures et d'ecchymoses.
Parce qu'il ne connaît pas mieux que les regards qui veulent le voir manger la poussière, parce qu'il ne connaît que les ongles qui se plantent dans sa nuque pour lui faire baisser l'échine.

Puis ça marche.
Ça t'arraches un faible rire alors que tu frottes tes yeux. Pourquoi ça marche.

« Avec plaisir. Promis je ne mettrai pas de poils partout »

Et tu lèves les yeux vers lui.
Un moment tu penses, tu te perds dans  ce long souvenir, celui où tu l'écoutais parler alors qu'il te montrait le chemin à prendre, celui où à l'époque, il te voyait. Chevelure blanche dans le vent visage immaculé.
Visage immaculé. Maintenant ravagé par ta propre colère.

Tu prends sa main et la porte à ta propre joue.
Pour la première fois tu le laisses voir. Tu le laisses voir les ravages que tu as tant essayé de lui cacher. Pour la première fois tu lui montres tes faiblesses.
Tu le laisses épouser tes immenses cicatrices du bout des doigts. ((les tiennes, tu es l'unique coupable, Croyance))

« Je suis tombé bien bas, pas vrai. »

Sincérité qui te fend le cœur, tu n'as jamais pu lui mentir à Isaac. Et tu n'as plus envie.

Revers de son doigt qui vole tes larmes ; elles sont tiennes Isaac. Il les pleure pour toi, il les pleure pour la chaleur de ton corps qui l'enveloppe et pour ta voix qui apaise ses peurs. Mais il les pleure aussi pour la place que tu possèdes, sous ton ombre là où même lui ne parvient pas à atteindre.

Puis ces derniers mots.
Tu portes ta main à ta poitrine et tes doigts se crispent contre le tissu de ton vêtement. Une douleur impardonnable qui te foudroie.
(( non Croyance, un regain de vie, toi qui étais mort depuis si longtemps ))
Mord l'intérieur de ta joue en observant sa silhouette s'éloigner

Ça fait mal, ça fait mal de se sentir (( aimé )) soutenu.
Ça fait mal de savoir qu'il ira te récupérer dans les abysses parce que c'est là qu'il s'est perdu.
Qui te rattrape toi, Isaac.

« Isaac… merci »

Tu te lèves à ton tour et t'approches de la fenêtre, regard qui s'égare sur la lune qui elle se moque. Ravissante, elle est charmante mais elle a ses doigts autour de ton cou. Elle serre et elle serre toujours plus fort. Mais comme l'amant désespéré que tu es tu continueras de la regarder.

« Dors avec moi »

Et tu ouvres de grands yeux, ta propre main qui se pose sur ta bouche comme pour retenir la bêtise qui s'en échappe. C'était murmuré, cette demande, c'était venu d'un endroit perdu dans la brume là où tes pensées se sont égarées, à côté de cet astre sublime.

Tes oreilles sont brûlantes et tu retiens ton souffle.
C'était sortit tout seul et tu veux disparaître.
Tu pourrais y ajouter une plaisanterie, un '' il faut bien que tu surveilles ton chien, il risquerait de pisser partout '' mais ton cœur est comme figé.

Et cette question, cette simple question.
Dans l'esprit commun elle est la couverture d'une seconde demande. Mais pas pour toi.
Et tu le sais, Croyance, que tu es bien un des rares idiots à demander ça sans artifices.

Alors tu veux bafouiller un ce n'est pas ce que je voulais dire, tu veux te trouver une excuse le plus vite possible parce que son refus, à lui, te blesse.
Tu te fais traîner dans la boue toute la journée par des diables en tenues de soirée mais lui, lui qui a accès aux profondeurs de ton être, c'est différent.

Dors avec moi parce que j'ai peur que ce soit mon dernier souffle, dors avec moi parce que j'ai peur que mon cœur ne me lâche, dors avec moi parce que j'ai peur de mon inconscient, dors avec moi parce que les nuits sont violentes et cruelles

« Pour te prendre dans mes bras. »

Ce fut un coup de lance, une attaque sans retenue sans réflexion, l'expression la plus sincère de ton cœur. Parce que ta plus grande faiblesse Croyance c'est que tu as bien trop côtoyé le métal, tu as trop de fois valsé avec le diable tu as trop de fois versé ton sang pour plus grands que toi. Alors la peur n'est pas là quand la voix gronde, alors la peur n'est pas là quand les mots sont couteaux.
Parce que ta peau est déjà recouverte de plaies.

La terreur est ailleurs. Elle est là où tu te trouves Isaac.
Il t'a vu avancer vers lui avec bien trop d'aisance alors qu'il avait touché le fond, il a prit peur dans la simplicité et l'habitude de ton désespoir. Dans ce détachement de l'âme alors tu avales le poison.

Un pas vers Isaac mais toujours loin
Un pas vers l'étoile qui se meurt mais toujours dans ta propre galaxie

Et tu passes ta main sur ton visage. Tellement habitué à lui dire la vérité que même les plus honteuses n'ont pas de limites.

« Je sais très bien que tu n'as pas vraiment cette image de moi, de plus tu sais bien que ce n'est pas vraiment … » tu observes un instant la fenêtre à nouveau « mon genre. » de faire oublier quoi que ce soit dans des draps, qu'on touche ta peau pour y arracher des soupirs, qu'on y dépose des marques brûlantes.

Mais Isaac pourquoi avoir dit ça dans ce cas. Tu n'es pas du genre à blesser pour ta propre satisfaction.

''pour te prendre dans mes bras'' pourquoi Croyance ?
Parce qu'il a toujours été des bras dans lesquels tu viens fuir, même ce jour là, quand tu posais tes yeux sur son corps endormi dans ce maudit hôpital.
Tu avais ressentit du dégoût. Dégoût de toi même quand tu hurlais contre l'univers de mettre n'importe qui d'autre qu'Isaac dans ce lit. Tu avais souhaité le mal sur autrui pour qu'on le sorte de là.
Mais jamais tu ne lui as tendu la main.

A l'inverse tu te recouvrais de blessures pour qu'il puisse te soigner.  

Ses mains qui tremblent, qui se crispent. Se retient-il de sombrer dans tes bras ou embrasser ta joue avec ses phalanges ? Et sa voix qui tonne, orage violent, furieux, ((effrayé))
Alors est-ce ça ? T'as changé Croyance. T'es plus l'agneau, t'es l'immense loup qui dévore tout sur ton chemin, les autres et ta propre vie.
''As-tu déjà eu peur de moi Isaac ? ''

Il n'a pas répondu.

Et tu l'observes s'échapper ( de toi ) et tu ne peux t'empêcher de baisser les yeux et rester ainsi un long moment. Tes bras qui se serrent autour de ton propre torse.
Tu t'étais promis de ne jamais l'affecter de ta destruction. Même ça tu n'y parviendras pas, Croyance.

Alors fantôme désabusé tu rejoins la chambre d'ami et tu te laisses disparaître dans les draps. Et tu trouves le sommeil parce que tu n'as plus de force, tu trouves le sommeil parce que tu es épuisé, sans arrêt.
Mais tu ne rêveras pas.

Et avant même que les réveils ne sonnent, avant même que le soleil ne fasse rougir le ciel tu sortiras de ta torpeur, tu plieras les vêtements qu'il ta prié, fera les draps à la perfection, tu récupères tes propres habits propres et sans un bruit
(animal qui chasse, tu es doué pour être discret)
tu sors de la chambre.

Tu laisseras un mot à l'elfe, une promesse d'un lendemain que jamais il n'entendra, un lieu à rejoindre que jamais il ne foulera.

Mais toi tu l'attendras.
Encore.
Et encore.