Il observe le dossier. Se demande jusqu'où tout ça va le mener. Entre ses mains, le stylo-plume est vide d’encre. Il n’a pas envie de continuer cette mascarade, pas envie d’observer les prochaines décadences. De tous les dossiers sur lesquels il avait travaillé, celui-là le rebut. Mentir était un fait qu’il acceptait, pratiquait sans même y penser. Chercher à modifier la nature était différent. Il se relève, lisse sa moustache. Passe la tête par son bureau. Suivant.

Il n’attend pas - sait pertinemment que l’autre suivra. De toute manière ou ces victimes voudraient-elles fuir ? Dans le dédale du département des mystères, les cris s’évanouissent. Il observe la jeune femme face à lui - lui sourit. Désolé de la convocation. Il n’est pas responsable - mais cela atténuera un peu son regret. Le suivi se passe bien, même si nous sommes dans la première phase de la recherche. Son papier devant lui semble être un script qu’il a appris à réciter. Est-ce que tu es d’accord pour que des agents t’accompagnent à ta prochaine transformation ?

Il aimerait lui dire de fuir et changer de prénom - qu’il couvrira ces traces et s’assurera que le ministère ne l’a retrouve pas. Il se sert les dents. Il a un travail qu’il accomplira.

Les loups-garous représentaient un groupe hétérogène. De l’avis de Betsalel, ils se ressemblaient tous. Les prunelles tirées de leurs transformations, il y avait dans leur démarche chaloupée les élancements d’un prédateur. Il trouvait cela presque hypnotisant.


Les loups sont des machines à tuer.
Pourtant, il la trouverait presque innocente.

Sa question le fait sourire - éclairant son visage d’une douceur étonnante. Il se décide de lui répondre franchement et d’un coup de baguette isole la pièce. L’arme est posée calmement, indice qu’il ne cherche pas à menacer la jeune femme face à lui. Indice qu’il est un allié plutôt qu’un ennemi. Non, en réalité, vous n’avez pas vraiment le choix, le ministère peut se montrer réellement désagréable quand ils le souhaitent. Avec les derniers trouble, il suffit qu’un corps un peu mâché soit trouvé pour que les loups prennent le blâme. Il jette un coup d'œil au dossier. Surtout que vous êtes sans meute et isolée.

Betsalel n’a jamais jugé les hybrides - jetant un regard d’incompréhension sur les discriminations ambiantes. En Israël, les loups garous vivaient en meute, et les accidents étaient rares et éparpillés. Éduqué avec la patience d’une mère aimante, il avait appris à ne pas juger sur la fourrure. Mais.

Il relève le visage pour contempler la jeune femme. Je peux faire en sorte que la phase d’observation n’aboutisse à rien chez vous. Que mes agents concluent que pour les recherches… il n’y ait rien. La fleur est là, posée avec délicatesse. La vérité c’est qu’il n’y a besoin que d’une phase d’observation et de quelques gènes, comme des poils prélevés sur une bête. Jordan n’en saurait rien. Vous seriez déclaré inapte pour la suite des évènements et laisser tranquille.

Les mains sont jointes et croisées sagement, comme si la proposition tombait sous le sens. Ne vous inquiétez pas pour nos agents, ils ont l’habitude. Et les dommages collatéraux étaient une partie du métier après tout.