Tu avais attendu les indications d'Elijah, avais installé de ton côté ton matériel à l'endroit prévu pour le piège. Tu ne sais pas comment tu ressens la chose Atlas, à l'idée de capturer le monstre qu'est devenu ton frère - mais si l'excitation est présente, la méfiance est également de mise. Tu restes prudent, hésitant à l'idée que le vampire puisse te la mettre à l'envers. Tu es un diable aux ambitions gourmandes. Tu ne chérirais pas d'en avoir seulement un, tu veux les acquérir tous les deux.

La tension à son paroxysme, tu dissimules ta présence derrière des arbres. Tu as usé de sortilèges pour masquer ton odeur et les battements de ton cœur. Habillé dans la tenue des grandes chasses, tu restes en position jusqu'à ce que tu entendes leurs voix portées au loin. Un sourire s'imprime sur ton visage en entendant Elijah fanfaronner à l'avant. La risette s'efface en grimace quand c'est celle d'Hyperion qui parvient à tes oreilles. Tu déchantes, et monte par vague une colère sévère et implacable. Ils sont tout prêts et tu prends sur toi pour t'armer d'une patience salvatrice. Le cœur est lourd même si l'âme est vide. Tu souffles pour te calmer, les mains agrippées au fusil à fléchettes tranquillisantes.

C L A C.
Et un cri de douleur tranchant l'air glacial. Tu sors lentement de ta cachette, les bottes traçant dans la boue du marécage un chemin tout tracé jusqu'à eux. Tu te dévoiles à la lueur d'une lune en croissant, une main à l'égal d'un serre se posant sur l'épaule d'Elijah. Tu prends de haut l'animal capturé, penchant la tête sur le côté, un rictus victorieux et suffisant. Jubilatoire. Tu écartes le vampire pour le faire tomber sur le côté.
Il n'y a que lui que tu veux voir.

— « Hyperion. »

Tu n'attends pas une seconde de plus et vises sa jambe de ton arme, lui plantes une premiere seringue dans la cuisse et une autre à l'épaule. Suffisant pour l'immobiliser totalement, l'endormir dans plusieurs minutes.

— « Comme on se retrouve. »

Tu te prends d'un petit rire névrotique avant d'essuyer la salive qui coule lentement sur ton menton. Te calmes et convulses encore de quelques spasmes hystériques.

— « Ha..ha. »

Inspires. Expires.

— « Qu'est-ce que tu disais déjà ? Hyperion te salue ? »

Il prend enfin conscience des réalités. Il hurle ! Il hurle comme un goret et tu prends un plaisir sordide à contempler sa déchéance. Tu restes interdit un instant à le détailler - à admirer ses traits déchirés par la peur et l'horreur. Tu reprends conscience de toi même quand il perd la sienne et que son visage s'affaisse lentement sous une fatigue artificielle. Si avant de sombrer, il prévient Elijah de son erreur (te faire confiance) tu roules tes yeux sans bouger la tête vers celui-ci même pour jauger de sa réaction. Il ne se méfie en aucun cas, et c'est parfait pour toi. S'il savait qu'Hyperion avait raison !

— « Quel enfant bruyant. »

Tu soupires, satisfait, face au silence retrouvé. Elijah s'affaire à trainer le corps raidis de ton frère, et ce malgré le piège à ours toujours accroché à sa cheville.

— « Attends. Tu vas lui arracher la jambe sombre imbécile. »

Tu sors ta baguette pour réouvrir le mécanisme, ainsi libérer la chair déjà bien abimée. Le sang a traversé le tissu de son pantalon kaki.

— « Nous sommes des sorciers, l'aurais-tu oublié ou bien ton absence de qualification te rend inapte à pratiquer ? »

Tu soulèves Noah dans les airs, le fais flotter à côté de toi et tends la main au semi-vampire. Tu étires un léger sourire mielleux et poses ton autre main sur l'épaule de ton frère pour transplaner avec eux à l'intérieur du domaine Priest, sur le petit chemin de terre où sont enfouis sous les feuilles de novembre les charognes de vos méfaits.

Tu conduis Elijah à l'intérieur, ouvrant d'un coup de baguette le garage. Il y a une sorte d'hérésie spirituelle à accueillir un vampire chez soi. (Maintenant que tu lui as ouvert la porte il n'est plus question pour lui de repartir).
Quand elle claque derrière vous et se verrouille, tu penches la tête pour loucher vers lui.

— « Ne fais pas comme chez toi. »

Tu traverses la maison jusqu'à l'entrée de la cave, et quand tu descends les vieux escaliers en bois, tu sens le corps à côté de toi légèrement s'agiter. Tu as sous-estimé le dosage ? Les chiennes aboient à te voir, elles sont beaucoup moins nombreuses qu'autrefois. Tu laisses tomber Noah au sol. L'agencement n'est plus le même depuis plusieurs années. La cage prévue à son emprisonnement (sa punition divine) est isolée, beaucoup plus spacieuse qu'autrefois.
Tu l'enfermes dedans, sans prendre le temps de soigner la plaie à sa cheville. Peut-être qu'il le méritera, plus tard plus tard...

Tu te tournes vers Elijah, qui a suivi jusqu'ici.

— « Qu'est-ce que ça t'inspire mon ami ? »

Mon ami.
La bonne blague.
Bientôt ennemi, à l'agonie - et derrière les barreaux d'une prison que tu as confectionné tout juste pour lui.

— « AH ! Le loup se réveille. »

Tu tires une chaise de sous l'escalier pour t'y asseoir, roi incontesté d'un royaume de rats et de cafards. Croises les jambes, la tête reposant dans le creux de ta main, accoudée à l'accoudoir. Sourire.

Tu n'écoutes plus, tu n'entends plus, Atlas. Elijah peut bien piailler dans ton dos, tu ne quittes pas Hyperion des yeux. Tu avais fantasmé cette scène durant des années, et elle s'était concrétisée ces dernières semaines. Tu remercieras le semi-vampire quand le moment sera opportun, à ta manière. Pour l'instant il t'importe peu. Tu tiques un peu quand le vomi se répand sur le sol. Tu frissonnes, c'est peut-être le seul détail qui te met un peu mal à l'aise - le reste est comme dans tes rêves. Les parents ne sont pas là pour te retenir, et tu vas sauver l'honneur de la famille.

Quand il arrête d'hurler, tu te racles la gorge après une grande inspiration de satisfaction et articules d'une voix doucereuse :

— « Tu as été égoïste petit frère. Tu t'es enfui sans donner de nouvelles. J'étais mort d'inquiétude. »

Tes yeux trahissent l'ironie des propos tenus. Vous n'étiez pas vraiment inquiets, juste fous de rage que cette création funeste ait pu s'échapper dans la nature. Tu étais responsable de ce monstre Atlas, à partir du moment où tu l'as laissé en vie. C'était TA chose, TON erreur - et Jane et Steven ne se sont pas fait prier pour te le rappeler. Une humiliation quotidienne que tu as subi et tu n'attendras pas qu'ils soient rentrés pour l'achever. Non non non d'abord... On répare, morceau par morceau, pièce par pièce.

Tu te lèves de ton trône improvisé en bois usé et fais craquer tes doigts. Tu tournes la tête seulement vers Elijah adossé au mur au fond. Tu plisses les yeux sans arrêter de lui sourire. Non pas maintenant... Attend encore un peu Atlas - le moment où il ne pourra pas t'échapper, où il aura baissé sa garde. Tu sens son regard dans ton dos mais c'est galvanisant.

— « Bien. Maintenant que les retrouvailles sont faites et que les présentations n'ont pas lieu d'être, passons à la première expérience. »

Les moldus ont inventé des tas d'outils intéressants pour faire mal ; des choses qui t'empêcheront d'être accusés si jamais le ministère fouillait cet endroit. Pourquoi le ferait-il d'ailleurs ? Tu n'as jamais prononcé les sortilèges impardonnables Atlas, et il n'y a que des chiens ici, l'un a seulement hérité d'un don de parole (bien qu'il ne sache plus vraiment comment l'utiliser).
Tu t'avances vers l'établis sous l'escalier, prends dans tes mains une perche électrique. A reculons tu t'arrêtes devant la cage et passes le bâton entre les barreaux. Tu appuies du bout de celui ci contre sa poitrine pour le forcer à reculer.

Première décharge.
Deuxième.
Assez pour le faire convulser.

— « Donc tu réagis. Etablissons une règle. Dès que tu aboies trop fort, c'est une décharge. »

Coup d'oeil à Elijah. Est-ce qu'il apprécie le spectacle ? Est-ce qu'il comprend pourquoi tu fais ça ? L'éducation prend du temps.
Tu lui tends la main, la voix douce et mielleuse.

— « Tu veux venir essayer ? Dans mes souvenirs, tu voulais le voir souffrir. »

Troisième décharge.
Au cas où il aurait eu la mauvaise idée de parler.

Tu profites de chaque seconde Atlas, sadique à tes heures perdues. Les secondes vibrent comme des minutes. La déchéance de ton petit frère est une douce vengeance. Lui qui a osé te défier alors qu'il aurait pu refaire sa vie et s'enterrer. L'arrogance est toujours punie par un acte de cruauté. Tu jouis de le voir se tortiller au sol comme une charogne oscillant entre la vie et la mort. Il ne sera bientôt plus (cette alternative t'effraie plus que ce que tu ne le voudrais) et ça sera de ta main, de ta main uniquement !

Elijah s'approche quand tu lui proposes de contribuer à la torture. Tes yeux brillent Atlas, et tu mets de côté un instant la haine qui vous anime pour partager quelque chose avec ton complice. Tu l'observes, troublé, hypnotisé par ce que tu juges comme l'odeur du sang. Tu plisses les yeux, et l'enthousiasme s'estompe, témoin de sa véritable nature.
C'est un monstre, tu dois l'enfermer !

— « Strauss. Strauss ! »

Tu pestes, furieux. Il n'en a pas l'intention ? Très bien. Tu appuies sur le bouton pour déclencher une nouvelle décharge sur Noah, afin de lui arracher un rale d'agonie étouffé dans ses glaires et sa gorge déjà bien irritée.

— « Je m'en occuperai moi-même. Remontons pour l'instant. J'ai un petit creux. »

Tu restes toi même en toutes circonstances - détaché au possible. L'odeur t'incommode et quand une des chiennes aboie, tu libères sa cage d'un coup de baguette. Elle se rue vers toi, puis te contournes pour remonter les escaliers. Tu jettes un regard froid vers Noah et un demi sourire sinistre s'étire au coin de tes lèvres.

— « Si tu te tiens tranquille il doit me rester de la pâtée périmée du moins dernier. »

Tu tournes les talons, puis te stoppes pour dire à l'intention d'Elijah.

— « Passe devant. »

Pour finalement lui emboiter le pas. Une fois en haut, tu refermes avec précaution la porte de la cave pour étouffer définitivement les sanglots de la Bête.