Avance Parsifal loin des foules
ignorant le froid mordant sa chaire
essayant vainement d'ignorer ces noires pensées qui l'assaillissent
prêtant une bien trop grande attention à ce qui l'entourait
(qui sait, peut-être que derrière cet arbre innocent
se cachait les monstres les plus terrifiants
prêt à le dévorer vivant)

Ne cherche qu'à s'éloigner du monde Parsifal
pour ne trouver que le calme
loin des amis loin des connaissances loin de Ashe
(surtout de Ashe)
n'osant non plus répondre aux messages qu'on lui envoie
(n'en a pas la force ni l'envie
alors qu'à nouveau les cauchemars l’assaillent férocement)
Silencieux Parsifal alors qu'il déambule dans les rues
dans les brumes noires de l'esprit
cachant les marques d'un corps meurtri par des coups sans amour
ne cessant de repenser aux jours passés dans le noir
aux minutes éternelles passées il y a cinq ans
s'y perdant et s'en enivrant bien malgré lui

Il erre Parsifal
profitant de sa liberté retrouvée
(mais il ne sait s'il s'agit réellement de liberté
quand elle n'est que conditionnelle et soumise au bon vouloir de tiers)
à la recherche du sommeil perdu et de la quiétude
quand soudain ta voix retenti
mais Parsifal dans sa détresse la prend comme menace immédiate
et soudain sursaute face à ce son inattendu
prêt à fuir alors qu'il s'apprête à reculer
quand finalement il te reconnaît
(Peur dévorante lui commande bien des choses stupides et fatigantes)

Rivage...?

Comme une confirmation
est-ce bien toi
ou un démon venu me tourmenter ?
tente Parsifal dans des efforts conséquents de ne pas montrer son malaise
mais pourtant il est bien là
latent
tapi au fond de lui
parce qu'il n'avait pas pu te contacter ni t'expliquer
parce qu'il n'avait pas eu le courage de s'excuser de son absence

Tu... ça va ?
Désolé pour ces derniers jours, je...
j'étais très occupé

parce qu'il a bien plus de force pour te mentir
que de t'avouer la vérité
que d'admettre sa détresse en face de toi
(surtout de toi)

Tu montres un soulagement évident de l'avoir retrouvé
il te laisse s'approcher de lui
(mais reste tendu)
et il ne t'offre qu'un sourire un peu crispé à tes mots
(qu'est-ce qu'il aimerait te dire sincèrement que tout allait bien)

Ça va, oui ment-il
un doux mensonge goût acide devenu normal
il reste muet un instant
cherchant une excuse plausible
remontant son écharpe
(pour ne pas que tu vois cette marque sur son cou
pour cacher cette lèvre fendue)
Le... le travail, rien de grave
il y a juste beaucoup de monde en ce moment
et je suis tellement fatigué Rivage
mais il se tait à se propos
(ses cernes parlent d'elles-même)
il ne te regarde même pas alors qu'il te parle
fuyant ton regard
(ne croise pas le mien)

Mal à l'aise face à toi
parce que tout s'est enchaîné à cause d'un malentendu
à cause de la jalousie dévorante d'un être
que tout s'est brisé en quelques minutes
et Parsifal n'a qu'une envie
c'est celle de te fuir avant qu'il ne s'en prenne à toi
qu'il ne s'en prenne encore à lui
(c'est pour te (se) protéger qu'il te fuit depuis des jours
qu'il fuit le monde entier pour ne pas qu'on voit ses maux)

Si tu savais Rivage
comme il avait froid depuis bien des années
qu'il n'y avait plus rien ni personne pour le réchauffer
et ça faisait bien longtemps aussi
qu'il n'essayait plus de chercher des moyens pour avoir chaud
(à quoi bon, de toute façon
puisque la chaleur s'éteignait bien trop souvent
tout comme la lumière ;
c'est si fatiguant de courir après quelque chose qui fuit
qu'on ne mérite plus)

Dans un geste innocent tu viens poser tes doigts sur ses mains
et son cœur s'accélère, la peur les lui fait retirer bien vite
dans un réflexe de survit acquis bien des années auparavant
(sans jamais se dire que toutes ces réactions qu'un simple toucher engendraient
n'ont jamais été normales)
il met quelques secondes à réaliser son geste
et soudain se sent pris de culpabilité

Je... Oui, j'ai un peu froid, rien de grave ;
D... Désolé, j'aime pas qu'on me touche les mains...

Le regard toujours fuyant
quand soudain tu lui parles d'Ashe
et l'ironie acerbe et involontaire le crispe
bien plus qu'il ne le veut
(parce qu'il se rappelle soudain de son corps constellé de bleus violacés
de ces réprimandes et ces douleurs qu'il subit constamment
dont il a fini par s'y faire
Un sourire maladroit se dessine sur ses lèvres alors qu'il passe la main dans ses cheveux
sourire bien trop faux pour être rassurant

O... Oui... Ne t'inquiète pas
je... hum... verrais avec lui...

Il sent Parsifal l'urgence de partir loin
car il sait qu'il ne tiendra pas plus longtemps
quelques secondes il laisse planer le silence
cherchant encore une excuse mais n'en trouvant cette fois pas
qu'importe, entend-t-il son instinct lui dicter
va t'en quand même ; c'est bien trop dangereux

Je dois... y aller, désolé dit-il
reculant déjà
(animal effrayé qu'il est)
s'apprêtant à s'en aller
(il est tellement désolé Rivage
de t'abandonner encore une fois
mais c'est bien plus fort que lui)

Il veut s'en aller Parsifal
mais tu n'es pas de cet avis
et ta voix s'élève, elle d'habitude si calme
tes doigts attrapent son poignet douloureux
Il étouffe un gémissement Parsifal
quand la douleur s'affirme en même temps que ta prise
Tu ne peux pas le laisser partir dis-tu
on lui a si souvent dit ça tu sais
que ces mots lui font bien plus de mal que de bien

Et alors qu'il se retourne et s'attend à recevoir un dur regard
comme avec lui
c'est des suppliques muettes qu'il voit
c'est de l'inquiétude qu'il y trouve
pour lui
Mais il n'a pas l'habitude de ce genre de regards Parsifal
qui dévoilent entièrement les esprits
auxquels on ne peut jamais mentir
et Parsifal dérouté ne sait comme d'abord y réagir

O... Oui, c'est la vérité...
c... ce n'était rien de grave... t'assures-t-il
mais pourtant il ne peut soutenir ton regard
(il n'y arrive pas
il est bien trop déstabilisant)
mais s'il y a bien une chose qui le déstabilisait bien plus encore
ce sont bien tes mots
si doux si bienveillants
comme il n'en avait plus entendu depuis bien des années
oh il les avait lui-même prononcé aux autres
dans son éternelle bienveillance destructrice
mais il ne s'est jamais autorisé à les entendre pour lui
et a même failli en oublier leur sens tant plus personne ne les lui disaient

A cette idée son cœur s'alourdit et se serre
mais il ne peut t'impliquer dans ses histoires
ni même en parler à qui que ce soit
(à quoi bon
qui le croira ?)
il ne veut pas Parsifal qu'on s'inquiète pour lui
surtout lorsque comme toi tu as bien d'autres problèmes à régler
porter le fardeau d'une âme brisée ne t'aidera pas et te sera inutile
alors sur ses lèvres se dessinent un sourire se voulant rassurant
(il est incroyablement faux)
et il ose enfin te regarder
J... Je te promet que tout va bien
ne t'inquiète pas
Et pourtant ses yeux crient le contraire et hurlent à l'aide

Tes mots le touchent bien plus qu'il ne veut l'avouer
ses mensonges, tu fais comme s'ils n'étaient qu'anecdotiques
(et pourtant qu'ils sont graves
vaines tentatives de se protéger d'on ne sait quoi)
Parce qu'il avait si souvent prier pour de l'aide Parsifal
mais elle n'était jamais venue
alors maintenant il ne demandait qu'un peu de force
pour tenir un peu plus longtemps

Et lorsque la manche s'abaisse la vérité éclate
(du moins une partie)
douloureuse et honteuse
Parsifal ne regarde pas ces traces lourdes de secrets
pas plus qu'il ne te regarde
se soustrayant précipitamment à ton emprise pour replacer sa manche sur son poignet
comme si tu avais découvert une chose affreuse sur lui
(tu avais découvert le plus lourd des secrets)

Il sent soudain un sentiment de honte l'envahir Parsifal
comme s'il s'était retrouvé nu devant toi
lui qui se cachait depuis si longtemps le voilà soudainement exposé
et il ne sait comment y réagir
pas plus qu'il ne sait répondre à cette bienveillance qu'on ne lui donnait pas
(plus)
à toute cette attention dont il est l'objet
et qu'inconsciemment peut-être il avait toujours demandé

J... je...

Perdu Parsifal
effrayé par cette façade qui s'effrite
cette carapace qu'il avait mis des années à construire
et soudain tout s'effondre à cause de stupides marques
(il se déteste de ne pas l'avoir mieux caché)
Il sent les larmes lui monter aux yeux
(pourquoi ? il ne sait pas
tout est mélangé)
alors qu'il fuit désespérément ton regard
tentant de les refouler du mieux qu'il peut
(ne me regarde pas pitié)

Ce... ce n'est...
pas ce que tu crois
mais les mots se bloquent dans la gorge
alors que ses maux se font de plus en plus visibles*
que les larmes se font plus menaçantes encore
(et il se déteste d'être à deux doigts de faillir devant toi
alors que tu avais bien d'autre choses à t'occuper
plutôt que de lui)

Il ne bouge pas Parsifal face à tes bras tendus
ne sachant comment y réagir
à lui on n'a jamais tendu ne serait-ce qu'une main
(parce qu'il l'ignore toujours)
mais quelque part au fond de lui il aimerait s'y blottir
dans ces bras si chaleureux et accueillants
loin des froides étreintes convenues dont il a l'habitude
(et il n'a envie de la refuser
tant elle semble si douce)

Désolé
alors que les larmes qu'il ne parvient plus à contenir
commencent à couler le long de ses joues
ne parvenant plus à les contenir
(tentant au moins de ne pas en verser des rivières entières)
On peut... on peut s'assoir ?
demande-t-il
toujours esquivant ton regard yeux baissés
essuyant ses larmes
Ne t'en fait pas pour moi je n'en vaut pas la peine je ne voudrai pas te déranger

Il ne s'avouera pas Parsifal
à quel point il était agréable qu'on s'inquiète pour lui
(il n'a jamais su ce que ça faisait)
mais il avait bien trop peur encore
de révéler ces secrets qu'il cache depuis tant d'années
ces secrets vicieux qui détruisent plus qu'ils ne guérissent
de se confier à quelqu'un
(c'est si effrayant de se dévoiler
quand bien même on se connaît depuis des années)

Je serai là que tu promets
que tu lui jures presque
douce promesse d'une douceur nouvelle qu'il (re)découvre
Il te laisse Parsifal faire tes gestes si tendres
(comment avait-il pu en oublier
ne serait-ce que l'ombre)
Tes mots aussi le touchent bien plus qu'il ne veut l'admettre
mais c'est étrange tu sais
de recevoir soudain tant d'attention
lui qui n'en avait plus reçu depuis bien trop longtemps
(maintenant il avait des marques violacées sur la peau)

Et il te sourit maladroitement Parsifal à tes mots à ton rire
parce qu'au fond vous étiez pareils
à refuser la sollicitude des autres quand vous en aviez besoin
et au fond tu avais raison
quand bien même il ne voulait pas qu'on le regarde
qu'on devine les contours de ses blessures
il y aura toujours des idiots attentionnés pour tenter de les soigner
Il te regardes aussi, sans rien dire
quand tu affirmes que tu ne le dérangeait pas
un simple remerciement muet dans les yeux
referment machinalement les doigts sur le paquet
sans pour autant poser les yeux dessus

Et la fatidique question
Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
et il hésite Parsifal au regard soudainement baissé
à tout te raconter
après toutes ces années à s'enfermer dans le silence
à éviter ce genre de question
Mais il a aussi peur Parsifal de tes réactions
des conséquences de ses paroles
C'est... c'est Ashe finit-il par avouer à voix basse
sentant son cœur s'emballer alors que la vérité éclate
Il a... fait une crise de jalousie
parce qu'il a cru que j'étais allé vers quelqu'un d'autre
et il a...
failli me tuer
mais les mots restent coincés dans sa gorge
(ils sont bien trop durs)
enfin, il... il est devenu fou...
Se tait ensuite Parsifal
n'osant aller plus loin dans ses explications
pas plus qu'il ne daigne te regarder
bien trop honteux le cœur serré
(il regrettait déjà d'avoir autant parlé)

Il imagine Parsifal
L'horreur se peignant sur ton visage a mesure que les mots dessinent la vérité
Qu'ils exposent ces secrets si longtemps gardés dans les failles du cœur
Il fixe obstinément le sol
Sans oser poser les yeux sur toi et ton visage
(Qui sait ce que tu pouvais penser de lui maintenant)

Et il sourit brièvement Parsifal
Sourire résigné d'une infinie tristesse
Non souffle-t-il c'est trop tard
Parce qu'il n'était pas parti plus tôt
Parce que s'il part c'était renoncer à tout
Il aurait tant aimé s'en aller maintenant
Loin de lui et de sa violence
Il y a songé bien des fois entre deux pensées noires
Se demandant s'il y avait eu un temps une autre voie
(Mais elle est bien loin maintenant)
Je peux pas... aller avec toi
(Et pourtant il aurait adoré)

Ne t'en fais pas pour mes poignets
Ça sera soigné d'ici peu
Et finalement il se tourne vers toi
Serrant son poignet comme pour le protéger
T'offrant un sourire peiné
(Parce qu'il sait que c'est frustrant
De ne pouvoir rien faire
Et il ne sait pas vraiment comment te rassurer)
Mais merci de t'inquiéter pour moi et d'essayer de me rendre la main
Et comme d'habitude Parsifal refuse ces mains si gentiment tendues
(Elles seront bien plus utiles tendues vers quelqu'un d'autre que lui)

Mais tu insistes pour qu'il vienne avec lui
et Parsifal refusera toujours
Parsifal a toujours refusé ces mains qu'on lui tendait
il ne sait pas comment te dire entièrement la vérité
ni même s'il le devait

Parce que ce serait encore pire , avoue-t-il
parce qu'il pourrait aller jusqu'à le tuer
(ne l'avait-il pas étranglé après tout)
et Parsifal se sent coupable de refuser ton offre
de retourner là-bas et risquer ses coups
(mais il n'a pas le choix tu comprends
il fait ça pour toi
pour lui)
Tes mains sont si chaudes quand tu les poses sur ses joues
mais elles ne parviennent à le réchauffer

Non, ça ira
je ne peux pas prendre ce risque
il détourne le regard
Je... Je suis désolé de ne pas pouvoir accepter
c'est trop compliqué
Il sent Parsifal que c'était une erreur de t'en avoir parlé
parce que tu refusais de comprendre à quel point c'était bien trop dangereux
il savait pourtant que tout partait d'une attention innocente
mais elle pouvait faire bien plus de dégâts qu'apporter du réconfort
autant pour toi que pour lui
alors s'il te plaît cesse d'insister
laisse-moi sombrer seul
ne m'accompagne pas dans ma chute vers le fond du désespoir

Tu lui en demandes bien trop Rivage
à essayer de lui faire promettre qu'il fuira la prochaine fois
de le prévenir si une telle chose se reproduit
Il ne t'en veux pas, Parsifal
D'agir ainsi
Parce que tu n'as pas tous les éléments en main
Parce que tu ne sais pas que ça durait depuis des années
Mais il ne t'en parlera jamais de ça
Se contentant de sourire tristement

Je... J'essaierai
Mais il ne le fera sûrement jamais
N'osant dire sur tu étais l'objet de la jalousie
Ni promettre réellement
(Parce qu'il ne tiendra pas sa promesse il le sait)
M... Merci
je... je ferais au mieux
détournant le regard
le sujet commençant à lui peser
ne voulant pas que tu t'y mêles plus que nécessaire
(tu découvrirais bien trop de choses en allant trop loin)