La dernière séance du soir, à minuit moins dix.
La salle entièrement vide, entièrement pour vous. Ta main fermée sur la sienne qui la traîne dans la rangée du milieu, pile en face de l'écran. Contre ton torse, un énorme paquet de popcorn. Rien de mieux que cela pour une soirée en parfaite compagnie.

Là, doucement, tourne toi et... Assieds toi !

Lorsqu'elle se tourne, tu enlèves le bandeau de ses yeux, la poussant à s'installer, un sourire radieux aux lèvres.

Tu vas voir, c'est une pépite, je suis trop heureux qu'ils le diffusent ce soir.

Te laissant enfoncer dans le fauteuil collé au sien, un double fauteuil pour les couples qui permettait de ne pas s'embarrasser de l'accoudoir entre vous, tu enlèves tes chaussures et t'installes agréablement, absolument ravi de l'avoir entraînée là.
Une bonne soirée, en bonne compagnie.

Et on a de quoi épancher notre faim, regarde !

Le format du popcorn était tellement excessif, que vous auriez de quoi manger pour deux films au moins - mais tu n'avais jamais été très raisonnable avec Ponio.

Tu éclates de rire toi aussi, venant lui donner un léger coup entre les côtes, amusé.

Ponio !

Tu lui souris, l'encadre de ton bras, ravi de l'effet que ça semble lui avoir fait. C'était rare que tu te laisses aller à d'aussi simples plaisirs dans la vie, mais pour le coup, avec Ponio, tu t'en permettais plus d'un. C'était toujours si agréable de profiter de sa présence, de ses simples sourires, de ses joies. Et tu étais toujours là pour elle si elle avait besoin qu'on épanche ses larmes, qu'on essuie son petit nez, ou qu'on la rassure, tout simplement, car elle valait toute l'affection du monde.
Et tu aimais simplement la lui donner.

Oui, c'est la dernière rediffusion et ils ont oublié de la mettre sur leur planning - alors je me suis précipité dessus dès que j'ai su.

Clin d'oeil joyeux, tu voles un pop corn directement dans sa main. Sa question si légitime t'amuse doucement, et tu lui offres un sourire taquin.

Tu ne vas pas me juger, rassure moi ?

Doucement, tu enlèves tes chaussures, étend tes pieds sur le fauteuil devant vous.

C'est le portrait de Dorian Gray. J'adore ce film.

Son baiser te fait rire, et tu ébouriffes ses cheveux en réponse.

Tu vois bien qu'elle a envie de rire - mais elle a l'amabilité de le retenir. Et ça te plaît, chez elle, cette douceur et cette bonté qu'elle dévoile discrètement du creux de ses lèvres. Parfois c'était là, parfois c'était absent - mais c'était toujours aussi plaisant de le redécouvrir.

Tu juges - mais merci pour ta compassion.

Rire léger, tu laisses tomber ta tête sur la sienne, pensif, dévisageant les publicités idiotes, fermant les yeux quelques instants juste pour profiter de son odeur, de sa proximité. Cet équilibre entre vous est si agréable et plaisant que tu ne peux t'empêcher de souhaiter que cet instant soit infini - et dure l'éternité.

Je ferais ça la prochaine fois juste pour voir si tu y parviens.

Grand éclat de rire, tu lèves la main pour passer tes doigts dans ses mèches, à les démêler.

Ne me remercie pas, ça fait tout aussi longtemps pour moi. J'aime faire ce genre de choses avec toi, ça change.

Un sourire, tu reposes sa main sur la sienne, jouant avec ses doigts.

Tu l'as déjà vu ou pas ?

Tu ris légèrement, l'imaginant, petite, assise devant Dumbo pour la vingtième fois de la journée, entourée de goodies Dumbo, incapable de décoller les yeux de l'écran.

Tu pouvais réciter le film en entier je suis sûr !

Ça te fait rire, réellement. Elle avait cet effet là, Ponio, capable de te donner le sourire même quand les choses n'allaient pas pour le mieux. Il fallait croire qu'elle avait un don - ou que simplement, près d'elle, tu ne prétendais rien.
Tu hoches la tête.

Le livre est un chef d'oeuvre. Mais...

Elle t'interrompt d'un baiser, et tu ris légèrement, portant les doigts à tes lèvres, la dévisageant.

La tradition de quoi ?

Tu ne te départis pas de ton sourire lorsque le film commence.

Tu ris lorsque ses lèvres tombent sur ta joue, lui lançant un regard qui veut tout dire - tu l’avais déjà déshabillé.e plus d’une fois, et ce n’est pas une salle de cinéma qui t’empêcherait de le refaire.

C’est sûr que tu ne me donnes pas des pensées innocentes avec ce genre de traditions !

Taquinerie lancée aisément, tu viens enfoncer un doigt entre ses côtes, juste pour le plaisir de l’embêter - car pourquoi pas en profiter après, de cette humour qui semble se dégager de ses traits plus légers. Et les image défilent à l’écran, les sourires se dessinent sur vos lèvres, et progressivement le pot de popcorns se vide, progressivement ta tête se penche de plus en plus, jusqu’à ce qui tu finisses par la reposer sur la sienne, appuyé contre sa silhouette frêle, appréciant.
Car dans le silence de la salle, il n’y a que vos souffles, et pour une fois, tu te sens en paix Asclepios. Sans qu’on ne te demande rien, sans qu’on ne te pousse à rien, il n’y a que le calme et la paisibilité.
Car pour toi, Aponi, c’est cette apothéose de ce qui est doux et reposant. C’est un été florissant qui n’est pas encore brûlant de ses rayons solaires, c’est une nuit au bord de l’océan, sous le regard stellaire.
Aponi pour toi, c’est les vacances et le calme, le repos et la joie.
Et tu aimerais tant lae garder à jamais dans tes bras.
Mais tu n’es pas de ceux qui aiment garder les oiseaux en cage - préférant les voir revenir librement.
Car forcer la paix la rend faussée, et tu préfères simplement en profiter lorsqu’elle se présente à toi.