heal

up !

Elle avait du mal à se faire sa place.
Les années passaient, et malgré la bonne volonté de ses amis, elle sentait toujours sur elle les regards et les messe-basses. Si ça lui faisait du mal, elle n'en disait rien à personne. Si les bousculades au coin des couloirs l'attristaient, elle le taisait. Si les ricanements qu'on pensait tus lui arrivaient jusqu'aux oreilles, elle n'en laissait rien paraître. Elle se contentait toujours de sourire et de tenter d'avancer. De laisser glisser toute la méchanceté du monde sur ses épaules comme de l'eau. Elle ne voulait pas que ça la ralentisse - pas quand elle avait, malgré tout, la chance d'être entourée de très bonne compagnie. Qu'elle se rassure, avec le temps, elle se fera une place que personne ne pourra lui soutirer. Mais en attendant, on ne cessait de l'enquiquiner pour quelque chose qu'elle ne pouvait changer ; sa nature de née-moldue. Et si elle ne voyait pas bien ce que ça avait d'important dans son innocence, elle trouvait que certains laissaient leur statut leur monter un peu à la tête. Mais ça, elle n'en dira rien. Encore une fois.

Alors, elle avoue, elle ne s'attendait pas trop à ce qu'on la coince au détour d'un couloir. Persephone ne s'était jamais vraiment faite harceler ; les gens n'en prenaient pas la peine. Elle pensait elle-même ne pas en valoir l'attention et les efforts, vraiment, les gens auraient bien plus intéressant à faire. C'était donc un accident rare, une occasion isolée. Et elle ne savait pas trop comment la gérer. Bousculée, insultée, elle voulait juste retourner à sa chambre sur le retour de ses emplettes. Voilà qu'on se mettait à lui tirer ses cheveux encore entièrement bruns à l'époque, dépourvus de tout violet. Elle pensait que les trois adolescents qui semblaient prendre un malin plaisir à tenter de la faire pleurer se lasseraient, elle semblait s'être trompée. Ces garçons étaient étonnamment persistants. Et elle, encore bien jeune, ne savait pas comment se battre ni répondre à ce genre de comportements.

Et c'est là qu'il était apparu.
De toute sa grandeur, de toute sa splendeur. Sa cravate verte qui voletait comme ses poings qui semblaient être des étoiles filantes. Des comètes qui entraient en collision si vite, si fort - paf ! Elle était restée muette sous le spectacle, terrée contre le mur qui la soutenait. Et si les autres élèves n'étaient pas prêts de se laisser faire et s'adonner avec grand effort au combat qui venait de s'improviser, c'est lui qui avait remonté son dos, droit, vainqueur, après avoir fait déguerpi la populace. Ses cheveux s'étaient défaits, un peu en bazar - une occurrence bien rare, elle qui aimait tant prendre soin de sa chevelure - sous la maltraitance de ses tortionnaires. Elle ne s'était pas encore remise de la scène que la première chose qu'elle vit fut que les collisions n'avaient pas blessé que ces idiots - mais lui, aussi. Et ça, par contre, elle ne le laisserait pas passer.

Elle l'avait donc entraîné (peut-être un peu de force, oui) dans la grande cour, installés par terre sous la douceur du Soleil qui voulait bien les bercer. Heureusement, ses emplettes étaient tout ce dont elle avait besoin: un kit de premier secours. Quelle ironie. Alors qu'elle l'ouvre, elle regarde le visage en face d'elle. Son expression est mitigée, partagée. La reconnaissance flotte dans ses yeux, mais une certaine tristesse et culpabilité y émergent.

▬ Merci de m'avoir aidée, Alaric.

Elle ne pensait pas du tout que quelqu'un viendrait à son secours, pour être honnête. Son oreille gardait la trace d'une griffure hasardeuse alors qu'elle se débattait. Elle devrait être contente, elle devrait sourire. Elle n'y arrive pourtant pas. Pas quand son ami est dans cet état. Si elle avait longtemps été intimidée, impressionnée par le garçon en face d'elle, elle avait désormais pour lui une certaine affection. Et surtout, le besoin constant d'être sûre qu'il aille bien et qu'il ne cesse de se mêler à des combats en tous genres. Ce qui ne semblait pas prêt d'arriver, à son plus grand dam. Assise à coté de lui, bien redressée pour pouvoir partager sa hauteur, elle s'autorise à regarder l'état de son visage, voir ce qu'il faut désinfecter, où mettre les pansements. Elle a l'impression de voir des petites galaxies sur son ami et soudainement elle n'aime plus tant l'astronomie. Son regard est toujours un peu plus sombre, elle qui d'habitude brille tant, même dans sa timidité.

▬ Tu sais... Tu aurais pu crier, je suis sûre que ça aurait suffit à leur faire peur. Je te demanderai pas d'arrêter de te battre...

Elle n'est personne pour faire cette demande. Elle n'est pas là pour l'enchaîner ou le contrôler.

▬ Mais je suis pas fan de violence. Je suis contente que tu m'aies aidée, hein ! C'est pas la question. Mais si c'est pour que tu finisses blessé en retour...

Elle fait un peu la moue, attrapant du cotton et du désinfectant. Sa voix est douce, dénuée de tout reproche. Mais clairement, elle se sacrifierait sans hésitation au lieu qu'il ne soit blessé. Elle reprend, une main sur sa joue, l'autre qui s'occupe de désinfecter délicatement.

▬ Et puis c'était pas si grave, ça n'en valait pas la peine.

Ah, Persy. Toujours à diminuer les méfaits d'autruis quand ça la concerne. Une habitude vieille comme le monde qui ne cessera de grandir.

heal

up !

Elle aimerait être en colère contre lui ; mais comment pouvait-elle l'être s'il lui sourit ? Elle qui voulait le réprimander, lui faire la leçon, tous ses arguments s'envolent quand ses lèvres se courbent pour illuminer son visage. Elle est faible, Persy. Les sourires la désarment, parce qu'elle ne veut voir que ça. Ca la fait un peu rêver. Il sourit et elle, elle trouve ça très joli. C'est toujours une petite fierté que d'arriver à faire sourire autrui, c'est un petit murmure qui veut dire qu'elle les a un peu adoucit. Et quand il lui dit que ce n'est rien elle se résigne à un petit soupire. Si, si c'est quelque chose. C'est des traces sur sa peau, c'est de la douleur, c'est des marques qui vont mettre du temps à s'effacer et qu'elle, elle ne va pas oublier. Alors pour lui, c'est peut-être rien, mais pour elle c'est beaucoup. Et elle s'en veut qu'il soit tout amoché par sa faute.

Et voilà que les rôles s'inversent et que c'est lui qui fait la moue. Elle taira la pensée qu'elle le trouve mignon, comme ça. On dirait un peu un enfant dans un corps de grand. Ca lui arrache un sourire malgré elle. Mais pour ne pas le contrarier, elle taira aussi le fait que ce n'est pas la première fois et que ce n'est sûrement pas la dernière, non plus, que ça lui est arrivé. Elle ne veut pas qu'il en vienne à encore plus se bagarrer.

▬ Mais non, n'importe quoi. C'est pas comme si ça arrivait régulièrement de toute façon.

On pourrait penser qu'elle allait se fondre en excuse à son interruption - mais non. Elle se contente de délicatement poser ses mains sur ses joues, le rapprochant un peu d'elle, l'air sérieux et concentré. La proximité ne l'a jamais dérangée.

▬ Ne bouge pas. Sinon tu vas finir avec du désinfectant dans l'oeil.

Un calme qui sera la clef de sa réussite professionnelle, plus tard. Elle continue de désinfecter, méticuleuse - douce, mais ça n'empêche sûrement pas la douleur. C'est ce qui arrive, quand on se blesse. Elle soupire légèrement à la proposition, fermant les yeux.

▬ Pour te rabibocher derrière à chaque fois... ? Je vais devenir ton infirmière, à ce rythme.

Elle rouvre ses yeux, les pose sur lui. Une légère moue sur les lèvres. Inquiète. La culpabilité flotte encore dans ses yeux.

▬ Je te soignerai toujours s'il le faut mais... J'aime pas te voir blessé. C'est peut-être rien pour toi, mais pour moi ça compte.

Elle met le coton sale dans un coin, attrapant quelques pansements qu'elle commence à appliquer, passant son pouce sur l'un d'entre eux, près de ses lèvres, l'air un peu triste.

▬ Surtout quand c'est de ma faute.

Elle reprend sa tâche, silencieuse.
Ca se sent que la question lui pèse.
Elle laisse sa main se glisser sous le menton du blond, lui faisant tourner légèrement la tête pour être sûre de n'avoir rien manqué. Bien. Du bon travail, bien fait. Un petit sourire satisfait revient orner ses lèvres alors qu'elle ne revient caresser ses joues gentiment, toujours aussi avide de pouvoir toucher tout le monde.

▬ Ca, c'est fait.

Et puis, doucement, elle rigole. Ses yeux se font taquins, espiègles, alors que son sourire s'agrandit.

▬ A moins que tu aies besoin d'un bisous magique ? Comme le bon garçon que tu es.

Petite boutade ; elle ne peut pas s'en empêcher.

heal

up !

Malgré son inquiétude et son insatisfaction, elle ne peut s'empêcher de lever les yeux au ciel aux paroles du blond, un sourire amusé aux lèvres. Beau et intelligent - il l'était, pour sûr. Bien que ce n'était pas les raisons pour lesquelles elle aimait passer du temps avec lui, ou, encore, prendre soin de ses blessures. Quoi que, l'intelligence y jouait sûrement. Elle aime avoir des conversations enrichissantes, après tout. Et puis... Des personnes belles et intelligentes, autour d'elle, il n'y avait que ça ! Elle en était surprise. Son cercle social n'était pas aussi grand qu'il le serait d'ici quelques petites années, mais il était déjà assez impressionnant et pourtant ! Les personnes belles tant au dehors qu'à l'intérieur y régnaient. Elle en était profondément satisfaite. Surtout qu'elle n'était pas du genre à se baser sur des critères pour accueillir qui que ce soit à ses côtés, mais être entourée de gens biens la comblait.

Et elle savait aussi que c'était cette bonté qui poussait les gens comme Alaric à s'en faire pour elle et à en venir aux poings. Elle était petite, ignorante et faible. A l'exception de son intellect et de ses compétences sportives qui étaient plus que redoutables, quand on en venait aux mains elle savait qu'il y avait peu de chances pour elle de gagner. La fuite était toujours sa meilleure option - heureusement pour elle, elle courait vite et était endurante. Mais ce n'était pas la solution au final. La fuite n'était qu'un échappatoire, tant figuratif que littéral.

▬ Les corriger... Tu commences à parler comme mes frères.

Pas tant un reproche qu'un constat amusé. Un peu nostalgique, peut-être. Les années passent et elle rentre si peu - pour les vacances, seulement. Ils lui manquent toujours plus, malgré son intégrité au sein de la communauté magique. Alors revoir ses frères en quelqu'un est tant un plaisir qu'un sentiment un peu amer de ne pas pouvoir côtoyer les vrais. Elle sourit, pourtant.

▬ Non merci. J'apprécie la proposition mais finir dans des conflits...

Pas besoin d'élaborer pour comprendre qu'elle préférait éviter la chose à tous prix. Quitte à en payer les frais. Pourtant, si c'était pour quelqu'un d'autre, elle aussi n'hésiterait pas à s'interposer, quitte à en sortir sa baguette contre quelqu'un. Alors si elle critique, elle n'est peut-être pourtant pas la mieux placée pour la chose.

Son sourire s'agrandit à la moue d'Alaric - un enfant, vraiment. Ca la fait rire, elle en perd ses inquiétudes. Elle sait qu'il ne pense pas ce qu'il dit, que malgré tout à la seconde où il apprendrait qu'elle avait un problème il accourrait pour venir l'aider et la sauver. Elle repose son matériel et ne se gêne pas pour passer ses bras au cou de son ami, le serrant contre elle. Sa joue est contre la sienne, alors qu'une de ses mains vient caresser ses cheveux.

▬ Awww non ! Qu'est-ce que je ferais sans mon prince charmant ? Je vais mal finir si tu viens pas me sauver !

Elle rit un peu plus, profite du contact autant qu'elle le peut avant de s'autoriser à enfouir son visage dans le cou du Serpentard. Un certain bien-être la comble. Et toujours aussi avare qu'elle est, elle en veut plus. Alors elle se redresse, seulement pour venir se déposer sur les jambes de son camarade. Légère comme elle est, ce n'est pas un problème qui la préoccupe. Elle remet ses bras à son cou, s'autorisant à sourire à nouveau.

▬ Mon paiement pour les soins.

Fourbe, elle quémande son attention toute entière, son contact et ses cajoleries qui la ravissent. C'est peu cher payé pour avoir été rabiboché, pas vrai ?

Si elle le veut, elle prendra même des intérêts.

heal

up !

L'habitude, ça ne faisait pas tout. Elle n'a pas l'envie de l'embourber dans des problèmes et dans des combats qui n'ont pas lieu d'être. Mais elle comprend bien qu'il ne l'écoutera pas et qu'ils ne tomberont pas d'accord sur ce sujet, alors elle finit par l'abandonner. Elle sait, par contre, que ce qui suit n'est que de la mauvaise foi. Sûrement parce que sa confiance ne faillit jamais. Parce que ça lui semble absolument normal de l'avoir à ses côtés. Qu'il ne vienne à sa rescousse quand elle se retrouve embêtée. Comme elle le ferait pour lui, l'occasion viendrait à se présenter. Ou les blessures devraient être soignées.

Alors c'est dans l'insouciance qu'elle se prélasse contre lui, qu'elle profite de ce contact dont elle se nourrit, qui lui est vital pour exister. Le rire aux lèvres, la joie au coeur. Un coeur qui déborde sans cesse d'un surplus d'affection qu'elle partage avec qui elle peut. Il en fait partie. Pour le meilleur comme pour le pire. Et peut-être qu'elle devrait se préoccuper un peu plus des limites qu'elle ne cesse de franchir, des signaux qu'elle ne cesse d'envoyer, sans sembler visiblement concernée. Mais son amitié est trop grande, à cheval sur l'amour et engouffrant toute haine qu'elle ne saurait ressentir. Elle existe pour aimer. C'est tout ce qu'il y a à dire.

Alors ses rougeurs, elle les apprécie. Les aime comme le reste. Ca prouve qu'il y a de l'émotion en lui, et elle, elle trouve ça joli. Une oeillade qui s'éternise sans devenir pesante - elle ne se doute pas du dilemme qui le traverse, trop occupée à se dire qu'elle aimerait jouer avec les mèches blondes qui le coiffent. Que ses yeux lui rappellent le ciel sous lequel ils s'amusent. Beau garçon, à n'en point douter. Elle fait peut-être un peu tâche à ses côtés.

Son visage se rapproche, alors qu'elle est un peu surprise.
La sensation de lèvres sur front. Un petit tressaillement dans sa poitrine.

▬ Oh !

Elle cligne des yeux quand il se retire, les joues pleines d'un champ de tulipes qui semblent prêt à venir cueillir jusque ses oreilles. Elle le trouve beau aussi, comme ça.

Et oh, tu sais, ce n'était peut-être pas une bonne idée, Alaric.
Parce que son coeur s'emplie de toujours plus de joie, qu'elle fleurit à son tour - radieuse. Le sourire qui se fait soleil et les joues d'un rose léger ; loin de l'embarras, juste la joie qui ne cesse de la noyer. Un rire - pas moqueur, appréciateur. Innocent et candide. Et ça pourrait être bien ! Mais plus on lui donne, plus elle prend. Ses yeux brillent toujours plus qu'avant, alors qu'elle recommence à l'enlacer, son rire toujours si léger. A son tour, ses lèvres viennent se poser contre la joue du blond, brèves mais présentes. Finalement, elle se redresse, sans hésitation. Le regard avare et le coeur toujours plein d'affection.

▬ Encore un ! S'te plaît !

Presque une enfant dans ses caprices.
C'est si gentiment demandé.
Ce n'est pas comme si elle était pleine de raison, dans son savoir.
Une âme qui vole et s'accroche aux coeurs, insouciante, inconsciente.
Mais toujours pleine de douceur.
Alors peut-être qu'elle abuse, que son paiement n'est plus si équitable. Mais la moindre notion de redevance lui est déjà étrangère, quand elle s'adonne aux allégresses qui la bercent. Seulement l'envie d'être chérie, de vouloir accepter tout ce qu'on peut lui donner - ne restant pourtant qu'une amie. Qui brille, qui aime, qui charme sans savoir et qui rit d'un coeur pur.
Juste une amie très jolie.
Juste une amie débordante de vie.
Qui semble fleurir autant que les fleurs de la cour,
Dans son affection qui déborde un peu plus chaque jour.