Si Naomi ne faisait pas parti des joueurs pour ce match de fin novembre, elle avait fait tout son possible pour arriver le plus tôt possible. Comme bien souvent, lorsque son équipe devait conquérir, l’usage d’être dans les premiers arrivées pour ressentir le terrain, l’air qui se levait. Un temps aussi, pour rendre grâce à Ayida Wedo, espérer un temps favorable et un vent bienveillant qui permettrait à son équipe de gagner. Mais aujourd’hui, la conception d’équipe était bien biaisée. Malgré les deux années passées auprès des Météorites, malgré les matchs officiaux et amicaux qui avaient été joué contre ses anciens coéquipier, Naomi avait prévu un léger rituel.

Non pas dans l’idée de favoriser la victoire de quiconque, mais de faciliter le match. Elle savait, comme beaucoup d’autres joueurs, sans même fouiller dans les esprits, que le premier match de la saison était toujours le plus stressant. Car on ignorait jusqu’à quel point les entraînements des autres avaient pu parfaire leur jeu. Et si le vent ne prévoyait pas de se lever aujourd’hui, la brume pouvait parfois être trompeuse.

Alors elle en profite d’être arrivée si tôt, qu’aucun spectateur n’est encore présent dans les gardiens. Son nom et son visage son suffisant pour entrer sur le terrain, faire un petit tour de celui-ci en levant la tête bien haute. Ses pensées pour Lwa du ciel, si un vrai rituel, construit entièrement et agrémenté d’offrande pouvait être plus bénéfique, Naomi ne voulait pas non plus abuser de sa gentillesse. Mais le malheur d’une tête élevé lorsque l’on fait les cent pas sur un terrain qui ne va pas tarder à être utilisé, c’est qu’on à vite fait de foncer sur la première chose mouvante de ces lieux.

« Oups, désolée je… »

Qu’elle baisse finalement la tête pour observer la personne qu’elle venait de bousculer.

« Oooooooh. »

Les deux index qui se pointent avec harmonie en direction de l’homme qu’elle reconnaissait. Il faut croire qu’elle n’était pas la seule à avoir des habitudes avant les matchs. Hisao Ueda, poursuiveur des flèches. Elle ne lui avait jamais vraiment parlé jusque-là, toujours des rencontres rapides après les quelques matchs qu’ils auraient pu jouer l’un contre l’autre. Mais le temps souvent manquant pour apprendre des choses sur lui.

Elle donnerait presque l’impression d’avoir été prise la main dans le sac. Sa présence avait pourtant un but, aucunement négatif, mais jamais Naomi n’aurait imaginé qu’elle tomberait sur un joueur en arrivant aussitôt. Il fallait croire qu’elle se trompait et la vérité était, que se tromper lui était tellement rare que c’était ça, l’aura qu’elle dégageait.

« Je ne te savais pas aussi en avance sur tes matchs. Saaaaaaaaaaaaaa…o ? »

Elle avait hésité Avait tourné son prénom et son nom dans sa tête, sans grand succès, à tel point que la syllabe du « a » avait duré une éternité.

« Je trouverais mieux la prochaine fois. »

Un acquiescement, Naomi en était bien convaincue. On aurait pu douter, croire qu’elle ignorait le prénom de la personne qu’elle venait de bousculer ou pourtant, Naomi et ses surnoms étaient une si grande histoire d’amour qu’elle n’arrivait simplement pas à accepter les prénoms de tout chacun (à quelques exceptions près). Et pour Hisao ? Lorsqu’elle y réfléchissait, il n’avait jamais vraiment pris le temps d’y penser.

Dorénavant mains levées vers le ciel, elle clamait son innocence de tout acte malveillant.

« C’est justement ça le problème. C’est dur de se dire que cette pelouse n’est pas la mienne aujourd’hui. »

Qu’elle ne l’était plus dans son intégralité, qu’elle l’avait abandonné pour une pelouse un peu plus à l’ouest. Quand bien même il n’était pas qu’une question de ciel et de pelouse, la réponse n’est-elle pas évidente entre deux joueurs de Quidditch ? Si une personne était bien placée pour le comprendre, c’était bien lui. N’étaient-ils pas de la même espèce ?

« J’avais un peu envie de profiter avant d’être enfermer dans les gradins. »

Le plus dur que d’être parmi la foule à observer et croiser les doigts. Glaner quelques informations aussi, par dépits car Lancelot n’aimait pas la voir rentrer les mains vides. A croire que profiter et s’amuser ne faisait plus partie de son vocabulaire depuis un temps.

« Et j’espèrais pour vous que le temps ne soit pas trop capricieux pendant la partie ! »

Que le vent soit calme et d’une neutralité entre les deux équipes. Et qu’aucun tournant météorologique n’apporte malheur. Puis, elle s'avance un peu de lui pour lui chuchoter avec crainte.

« Tu penses que je vais avoir des problèmes ? »

Question légèrement rhétorique, car elle n'en avait jamais eu jusque là.

Elle a ce petit sourire espiègle et la tête qui s’incline très légèrement sur le côté.

« Ça je le sais, mais si tout le monde t’appelait ainsi. Ça perdrait un peu de saveur, tu ne trouves pas ? »

Le concept du prénom, celui qu’une mère ou un père offrait à son enfant pour que le monde puisse l’acclamer de cette façon, était un concept bien particulier aux yeux de Naomi. Cette manie qui pouvait sembler désagréable pour certains, mais qu’elle n’arrivait jamais à s’en dégager. Une mauvaise habitude en somme, mais qui reflétait très bien l’état d’esprit de l’Irlandaise. Cette façon de considérer le monde, de leur apporter un peu de cette joie qui l’anime au quotidien. Bien que la façon pouvait très facilement être remise en question.

« C’est ça ! Certains préfèrent rester chez eux et ne pas profiter des matchs adverses, tandis que d’autre arrive plus tôt que tout le monde pour profiter d’un terrain qu’il faudra dompter plus tard. »

Et rare était ceux de la dernière catégorie, bien trop centrée. Si se rendre dans les gradins pour observer le match était assez courant, il n’était pas très fréquent de se rendre sur les lieux avant tout le monde pour marcher sur le gazon du stade. Du moins, lorsqu’on ne participait pas ce jour-là. D’autant plus que si Naomi devait dompter un stade, ça ne serait aucunement celui des Knaresborough, vieil ami qu’il était.

« J’ignorais qu’on avait nos points communs. »

Vif clin d’œil. Un mystère qu’elle n’avait jamais prit le temps d’éluder car leur échange avait toujours été rapide et insipide.

« Je pense aussi, mais sait-on jamais. »

Bras dorénavant croisé sous sa poitrine, qu’elle vient acquiescer. Elle n’allait pas révéler ses histoires de rituel qu’elle faisait avant chaque match, que Naomi faisait son possible pour qu’Ayida Wedo accepte sans sourciller que quatorze joueurs viennent se battre dans un lieu qui lui appartenait, sans même l’avoir prévenu.

Légère moue alors, lorsqu’elle se rend compte qu’Hisao venait de prendre sa question d’un grand premier degré.

« Je ne sais pas. »

Qu’elle hausse légèrement les épaules avant de remuer ses bras pour se dédouaner de toute malveillance.

« Enfin, je n’ai rien à me reprocher personnellement, mais peut-être qu’on pourrait penser l’inverse ? »

Supposer, arriver à des conclusions sans même analyser. Certains étaient très bons pour ça.

« Tu sais, que je sois là avant tout le monde alors que je ne joue pas aujourd’hui. »

Parce que les Avery étaient pleins de mystère, tout comme leur magie. Alors, grand nombre pourrait s’imaginer un monde. Bien qu’elle cet air emplit de naïveté, elle savait pertinemment ce que les autres pensaient d’elle.

Et pourtant, sur son faciès, ce n’était qu’un doux sourire.

« Tout le monde ? »

Songeuse que ses bras viennent se croiser sur son buste, le regard plissé qui observe le ciel. Donnerait cette impression d’être incertaine quant à sa réponse, car tout cela était si instinctif dans la majorité des cas, Hisao qui faisait preuve d’exception, que Naomi ignorait même si elle entreprenait un tel renommage à l’ensemble de la population, dès leur premier échange.

« Sans doute ? »

Qu’elle fini par se vendre malgré tout. Elle dont l’obtention des prénoms était d’une grande facilité.

« Mais ça ne plaît pas toujours. »

Si ça pouvait le rassurer. Car bien souvent le visage de ses rencontres les trahissait dans l’immédiat. Certains avaient même clamé qu’elle était irrespectueuse, mais Naomi n’en trouvait pas le sens. Elle qui faisait ça par amour et pas considération, elle qui appréciait le monde et les sorciers qui le peuplaient avec un grand intérêt. Désirait-elle être amie avec toutes ses rencontres ?

« Mais bon. »

Hausse des épaules, car elle ignorait si cela était véritablement intéressant, comme le laissait sous-entendre Hisao. Tout comme, Naomi ne semblait pas vraiment impactée par le refus de l’usage des surnoms de certaines de ses rencontres.

« Par Merlin que je suis blanche comme la neige. »

Ses bras qui se séparent tandis que l’une de ses mains vient se présenter devant Hisao, paume face à lui et s’exprime d’un grand geste lointain avant de retourner au niveau de sa hanche.

« Après, sachant qu’ils n’ont pas le droit d’entrer sur le terrain, ça le rendrait tout autant suspect. »

Voir même bien plus, à son humble avis. Car à l’instar des journalistes, Naomi était une joueuse de Quidditch, ancienne gardienne des Griffes qui jouaient aujourd’hui. On pourrait s’imaginer qu’il était plausible qu’elle cherche à encourager ses anciens coéquipiers en leur passant un bonjour soudain. Quant aux journalistes ? Ils n’avaient pas vraiment de raison d’être présent avant le début du match, sauf s’ils cherchaient à déconcentrer les joueurs avec des photos et des interviews tout autant ridicules avant même que le score ne soit connu.

« Toujours oui, mais surtout lorsque je joue. Je l’avoue. »

Qu’elle n’avait donc rien à faire en ce jour, car elle n’ouvrait pas la saison. Sa main s’élève alors jusqu’à ses lèvres pour en masquer l’embarras. Feinterait d’avoir été prise sur le fait.

« Je n’aime pas rester passive et attendre qu’on joue. C’est toujours plus intéressant dans prendre l’air avant le match, avant que les lieux deviennent bruyants avant l’arrivés des spectateurs. »

Car ils savaient tout les deux à quels points il était difficile de s’entendre et de se vider l’esprit avec les hurlements des différents fans et journalistes.

« Ils ont beaux faire vivre le match à leur manière, parfois c’est un peu compliqué. »

Plus encore pour les gardiens et attrapeurs qui avaient besoin d’une grande concentration sur l’entièreté du match. L’un pour arrêter les poursuiveurs qui ne faisaient que voler dans tout les sens, et le second pour être le premier à mettre la main sur le vif d’or.

D’un accord continu, sa tête ne fait qu’acquiescer à chacun de ses propres mots et ne s’arrête pas pour autant à ceux d’Hisao. Et elle se rend compte alors, de sa rapidité d’exclamation, que cette façon constante qu’elle à de s’exprimer avec éclatement et enthousiasme semblerait quelque peu le perturbé. Car après tout, il était toujours difficile d’arriver à suivre l’esprit fougueux de la jeune Avery. Une joie qui finalement se transforme en frisson, qui vient parcourir la totalité de son échine.

« Ne m’en parle pas. »

Qu’elle en avait des très mauvais souvenirs, quoique d’une majorité lointaine, de journaliste qui avait outrepassé la bienséance. Naomi qui malgré ce qu’elle pouvait clamer n’était pas qu’une joueuse, mais aussi un nom. Un nom empli de mystère, car le monde savait que les Avery avaient leur secret, des héritages qui n’étaient pas très connu. Alors, il y avait la curiosité, l’interrogation. Parfois même, la dégradation. Et d’avoir signé en tant que personnalité publique en rejoignant une équipe de Quidditch, n’avait pas vraiment améliorer l’état de sa vie privée.

Et outre sa propre personne, Naomi n’évoquerait même pas l’absurdité et les clichés désobligeants qu’elle avait parfois eu le malheur de croiser. C’était d’ailleurs pour cette raison qu’elle ne leur prêtait plus attention mais que malgré tout, les rumeurs finissaient à atteindre ses pensées par le biais des gens qui l’entouraient. Le seul réconfort était qu’ils ne recevaient plus un seul gallion de sa part. Fronce alors un instant les sourcils, pour se souvenir si elle avait tout de même entendu le nom de son interlocuteur dans des affaires délicates.

Soupir alors, rien ne lui revenait. La chance peut-être qu’il avait été épargné. Même les vies les plus basiques pouvaient trouver un certain charme pour ses vautours, eux qui aimaient parfois déformer la douce réalité d’une vie monotone.

« Exactement ! »

Que l’enthousiasme ne semble pourtant pas l’avoir quitté, parce qu’elle s’exclame avec une telle excitation. L’avis étaient pourtant partagé du grand nombre, mais rare étaient ceux qui le prenaient véritablement à cœur. Car autrement, ils ne se retrouveraient pas à deux sur un terrain vide, mais bien l’équipe au complet. Bien que chacun avec sa façon de surmonter un début de match, si certains s’enfermaient dans le mutisme, d’autres cherchaient les interactions sociales.

« C’est ça ! Et finalement, entre ceux qui nous encourage et ceux qui encouragent l’équipe adverse. Finalement, l’un cherche à aider leur joueur préféré tandis qu’inconsciemment les autres arrivent parfois à les perturber. »

Léger haussement d’épaule.

« C’est pour ça que souvent les premiers matchs sont compliqués, que ce soit pour les vétérans qui ont perdus l’habitude avec le manque de match ouvert que les nouveaux joueurs… »

Parce qu’en évoquant cette possibilité, elle pense aux nouveaux joueurs de Griffes qui n’avaient peut-être -sans doute- jamais été confronté à ce mouvement de foule. Et à jouer dans ce genre de condition.

Et alors prise au dépourvu que sa tête s’incline, que les yeux se froncent laissant transparaitre une ride sur son front.

« Je vais toujours bien ? »

Ignore pourquoi elle aurait pu donner cette impression de ne pas aller bien auparavant.

« C’est plutôt à moi de te demander ça, je n’ai pas spécialement envie de briser ta concentration avant le match. Et que ton jeu en pâtisse, parce que tu n’as pas pu profiter de la quiétude du terrain par ma faute. »

Car une fois encore, si lui avait une raison d’être là. Naomi s’était plutôt invitée, plus qu’autre chose.