aux aguets. toujours. pour que tombent dans le creux de mes mains la moindre information, le moindre détail qui saura élever ma carrière auprès des diamants. pour détail par ailleurs, le grand izar nous impose ses absences ; qui alors pour me persécuter au bureau ? aucune critique infondée n'a frappé mes journées depuis qu'il a disparu.

c'est au premier échange de regard entre nous, qu'il avait été comme convenu que je serai mandatée à préparer les cafés tandis qu'il tripoterait les dossiers importants. heureusement les jours se sont lassés de ce scénario et depuis quelques temps maintenant, nous avions trouvé l'équilibre professionnel. enfin, seulement quand je ne rate pas son café. s'est-il un jour rendu compte que c'était volontaire ?

quand mes pieds foulent le sol de notre étage j'exécute mon trajet habituel, avec un rapide salut pour chaque collègue. la main batifole dans les airs mimant des airs de coucou!, jusqu'à ce que je pensais être un bureau vide, quand mon attention se porte immédiatement sur lui ; je redécouvrai alors un camarade perdu depuis des lustres. il était, malgré moi, de ces homme qui attirent mon regard dans la foule : le provocateur insatisfait, devenu mon ami. je crois? enfin. le genre à qui je ne dis pas bonjour dans un coup de vent. je m'approche alors, sans une boisson à offrir mais tout de même parée de mes yeux pétillants.

« izar ! mon dieu izar, j'ai sincèrement cru que tu avais déserté les lieux sans dire au revoir. je doute que tu ais manqué a grand monde au bureau… mais tu m'as manqué à moi. veux tu que j'aille te preparer un café immonde, comme tu l'aimes ? »

un sourire, pour moi — quand bien même il est timide, discret. izar a toujours ces mimiques qu’on croirait prudes mais qui s’avèrent être provocatrices. nous n’avons rien en commun, des mots que nous utilisons pour nous exprimer pleinement aux expressions de nos visages qui chez l’un de trahissent rien, mais pour qui chez l’autre tout est limpide. quand je dois lui faire face c’est toujours avec une pointe de jalousie et ce dégoût superficiel

du genre à vouloir lui ressembler sans l’avouer — du genre à détester l’idée qu’il puisse être plus intéressant que moi.

« en effet, mais malheureusement pour toi je suis pleine de secrets en ce moment… »

les lèvres retroussées, elles montrent mon orgueil et ma fierté : je ne trahirai personne et je compte bien m’en vanter. toutefois j’ai plus à en apprendre de lui, qui s’est absenté si longtemps. loin de moi izar le travail était si fade, comme un royaume sans sujet…

j’entame alors le pas pour rejoindre la machine à café. « toutefois j’ai été avocate dans une affaire pour meurtre. et mon client s’en est sorti. tu ne m’en veux pas d’avoir emprunté de tes livres pour ça ? » un rire étouffé je m’arrête devant l’outil en lui offrant toute mon attention. « cappuccino, latté ? je te l’avoue maintenant, je n’ai jamais vraiment fait attention à comment je dosais ton café. hm... je prends le mien au bistro en face. » les épaules haussées, je dépose derrière moi mes paumes contre le meuble qui sert nos intérêts pour finalement m’asseoir dessus. l’art et la manière d’agir dans l’élégance et le caprice toujours exaucé de me poser dès que je le peux. « montre moi en me racontant tes vacances mon tendre. je suis curieuse de savoir à quels bons plaisirs tu t’adonnais quand ici je trimais. »

coquin. il se sait intelligent, futé, rusé. il se sait aidé de son ego, poussé par une extravagance singulière — celle qui vous rend presque méprisable à défaut d’être méprisant. il a les bons bouquins car je ne les ai pas, c’est ce que sa voix laisse entendre, et j’en souris, aussi taquine que lui.

m’exécutant pour nous préparer nos café, je reste assise sur le meuble en me penchant pour récupérer les outils nécessaires, orchestrant une préparation millimétrée et quasiment parfaite ; à croire que je suis une maîtresse dans cet art alors que mes mesures sont au pifomètre.

et dans cette danse particulière je me permets pourtant régulièrement de jeter un coup d’oeil à izar, afin de ne rater aucun mot.

« hm, satisfaisant. quand tu veux un café abordable sans avoir à traverser la ville… »

quand je veux l’offrir aux collègues qui font rougir mon coeur. j’attends alors que coule le café, portant toute mon attention sur celui à qui je n’ai jamais offert un café d’en face.

« en france ? tu sais que j’ai un prénom français et que je n’y ai jamais mis les pieds ? hormis les détails horripilants qui semblent gâcher tes souvenirs, dis moi plutôt si les français sont comme on les décrit. aussi arrogants, horripilants, et nonchalants… que toi ? les black… vous avez toujours eu ce penchant étrange pour la france… finalement il n’y a pas de hasard. »

sourire, pour me moquer de celui qu’il m’a offert un peu plus tôt. au jeu des piques il doit bien le savoir ; j’ai grandi dans l’affront.

je me lève enfin, m'attelant à préparer le lait en lui tournant le dos. une fois toutes les pièces assemblées, je lui tends sa tasse.

« ton café, mon cher confrère. préparé avec plus d’amour que d’habitude… si ça ce n’est pas de la gentillesse. tu devrais en prendre de la graine, hm ? on apprend pas tout dans les bouquins… aussi bons puissent-ils être. »

me voilà conseillère particulière en café, quand bien même je n’y connais pas grand chose. quelle chance ai-je d’avoir du goût et d’être partageuse. pas vrai ? la gentillesse, izar. c’est une chose remarquable que beaucoup trop se permettent de monnayer… alors que la paix n’a pas de prix. mais quand on porte un tel nom, on ne doit pas vraiment connaître le plaisir du calme… ni le luxe de l'ennui.

je souris pour lui répondre, délicieux moment partagé alors qu’il me parle de cette france qui fait rêver. jusqu’à ce que ses yeux ne m’accusent, alors que ses paroles dictent mon crime. un rire étouffé, probablement plus semblable à un soupir narquois, et je fais non de la tête alors que la joie m'envahit.

c’est vrai. ce quotidien avec lui m’avait manqué. il n’y avait dans les parages aucun homme que j’aime respecter autant que je le taquine. mais qui aime bien chati bien.

« je ne suis pas arrogante moi, izar. je suis sincère. confiante. tu confonds… » je porte ma tasse de café noir à mes lèvres. brûlant, mais rien que l’odeur me sustente. « je ne mentais pas, quand j’ai dis que tu m’avais manqué. » je dépose ma tasse, un regard sur ce liquide aussi profond qu’amer. « j’aurai aimé que tu sois là dans les moments compliqués. il n’y a que toi ici qui m’inspire autant au ministère. » pointe de mélancolie au coin des lèvres, jusque dans la voix. je relève la tête pour lui faire face, izar mon ami inavoué. « ne pars plus comme ça sans me prévenir, s’il te plait. ou donne moi ton numéro, n’importe. mais ne disparaît plus. promets le moi, fais en le serment. je suis fatiguée de devoir me prouver aux autres, il n’y a qu’avec toi que j’ai l’impression d’être entière, d’être à ma place… d’être douée, véritablement. j’ai beau me donner à fond, je vois bien dans le regard des autres que je ne suis qu’une pétasse aguicheuse. »

sur ces mots hargneux qui m’échappent mon regard traque les quelques têtes que je sais ne pas me considérer avec respect ; mais c’est ainsi. je n’ai que ma langue pour pester, que mon travail pour leur prouver leur tort. jusqu’à ce qu’il s’absente, je l’ignorai, mais je n’avais aussi qu’izar, pour me faire me sentir légitime.

est-ce de la surprise, que je perçois dans ses yeux ronds ? alors monsieur black ne pensait pas pourquoi manquer à la petite choi ? mon visage s’illumine, répond à son sourire heureux.

lorsqu’il prétend que ma compagnie soit surprenamment agréable, je restreins un rire amical, mais pas une tape sur le bras ; dis donc. mais les boutades sont de bonnes augures entre nous, je lis sur ses lèvres la suite de ses pensées.

quand il évoque que nous pourrions échanger nos numéros, je sors mon portable. prête à lui demander de la façon la plus théâtrale du monde à ce qu’il me partage ses coordonnées, je suis toutefois interrompue par une question plus profonde qu’elle n’y paraît. mais est-ce le moment ? au milieu de tous ces autres.

une légère moue alors que j’observe les alentours. je ne sais pas si j’ai vraiment envie de répondre.

« hm… » ce genre de conversation se tient autour d’une table, avec un verre de vin. je le regarde à nouveau, souriante en légèreté alors qu’il semble si grave face à moi. « Je te raconterai tout ça autour d’un petit dîner au restaurant. Tu pourrais m’inviter ? A moins que tu n’ais pas envie de rejoindre mon harem. Au bureau on raconte que je couche avec tous ceux qui me font la causette… Hm, techniquement tu as déjà rejoint les bavardages indiscrets depuis dix bonnes minutes. Alors, ça te tente ? Je ne te fais pas l’affront de te demander un resto français si tu ne me demandes pas un coréen. »

rien ne t'échappes peut être autour de toi izar, mais dans mon monde de silence je crains toujours que ne traînent des chuchotements et que l’on m’écoute en secret.

« je te raconterai quand nous serons seul à seul. Prends mon numéro, tu me diras quand tu es disponible. » je lui tends mon portable où s'affiche ma propre fiche de contact, soutenant son regard.

étrangement distant pourtant sacrément proche, c’est assez perplexe de mettre un mot sur l’attachement que je lui porte, sans en mentionner l’aversion. mais parfois la haine n’est qu’un amour déguisé ; c’est comme ça que fonctionne l’école, non ? on peste sur la jolie fille de la classe parce qu’on a la rage de ne pas être son égal. c’est ce que l’effet que poudlard me donnait.

alors la rivalité se mue doucement en sourire, les reproches en blagues, et nous voilà engagés dans un serment à partager une table un soir, pour raconter nos pensées intimes. seuls les idiots ne changent pas d’avis.

je récupère mon téléphone pour le ranger dans la poche de ma veste, prends mon café dans une main; il n’est plus aussi brûlant à présent.

« si tu m’emmènes dans un kebab je trouverai le moyen de te faire faire des travaux d’intérêt général. »

sourire sournois avant de prendre une gorgée : délicieux. j’espère que le sien l’est autant que le mien.

« hm, oui, j’ai du défendre une affaire de meurtre. je défendais l’accusé. » j’ai libéré le coupable. « c’était tellement intense. du début à la fin, j’avais l’impression qu’un souffle de travers et je mettais en péril toute ma carrière ! c’est la première fois que je m’occupais de ce genre de cas. » les sourcils haussés, je redépose ma tasse, signe mes mots par réflexe dès que je me mets à parler vite. « c’est pour ça que je t’ai emprunté des livres, aussi j’aurai préféré que tu sois là pour me donner des conseils, ou simplement m’encourager. tu sais que j’aspire à être plus qu’une simple avocate, mais il faut passer par ce genre de dossier pour se faire un nom. je m’en suis super bien sorti. tu aurais dû voir ça ! j’espère gagner en popularité avec ça. que tout le monde se dise : quelle main de fer dans un gant de velour, cette femme ! » qu’on ne s’arrête plus à ma gueule d’ange. « je me suis beaucoup renseignée sur la justice moldus, et c’est dingue le peu de chose qu’on a en commun, finalement. mais rien d’étonnant quand on voit le taux de récidive par là bas. m’enfin. » une courte caresse sur son bras accompagnée d’un air prétentieux, et j’abandonne mon sérieux pour plus ludique. « si tu as besoin de l’aide d’une avocate compétente, n’hésite pas, maintenant que tu as mon numéro. »

car ma confiance se gagne seule, et je dois me féliciter de mon parcours pour entraîner les autres, sinon pour faire taire ceux qui se pensent plus arrogants que moi. l’art d’être fier de soi, izar, c’est de faire comprendre à tout le monde qu’on l’est, sans attendre qu’ils le remarquent tardivement.

jamais n’a-t-il tort, le grand monsieur black. jamais aux yeux des autres ; quelques fois pour mes yeux à moi. quand il défend les présumés innocents que les moldus prient, moi en un sourire je garde en silence le véritable combat que j’ai dû mener contre vent et marées, celui qui m’a changé à jamais ;

alors j’ai défendu un coupable que personne ne présumait innocent.

quelquefois il faut bien l’endosser, ce rôle de diable, quand on promet la liberté au prince des démons.

heureusement le passé jamais ne renaît de ses cendres. alors quand il fait mention de ma carrière, de ses exploits à son évolution, comment ne pas trouver en lui le collègue parfait ? celui qui me respecte, celui qui croit enfin en moi ; celui qui me voit pour mon statut et non par pour le genre que j’incarne.

« justement oui ! et tu n’es pas au bout de tes surprises. je te raconterai ça, ça fait partie de ce que tu as raté pendant tes petites vacances. n’oublie pas ce et bien plus, tu pourras le répéter à tous nos confrères. la petite sourde finira par donner les directives, et je serai bien contente de pas les entendre chouiner. » clin d'œil à mon ami, je sirote encore ma boisson.

« je dois te laisser, j’ai un rendez-vous dans dix minutes. » j’observe ma montre et me corrige « plutôt cinq minutes en fait. envoie moi un message quand tu as trouvé le resto ! » j’observe la tasse que je lui ai préparée avant d'entamer le pas.

« promis, je t’offrirai un café la prochaine fois !  » j’ai cru comprendre par sa soif inexistante que j’ai encore beaucoup à apprendre.

mais izar était un bon cobaye ; quel bonheur de le retrouver.