Une semaine s’était déjà écoulée depuis que la salle commune des Serpentards avait été victime de mystérieuses friandises ensorcelées par un philtre d’amour puissant. La nouvelle avait fait le tour de l’école, évidemment mais le responsable n’avait pas été retrouvé. Les verts et argents présents ce jour-là évitaient de revenir sur le sujet, et on pouvait les comprendre aux vues du l'imbroglio chaotique dont ils avaient tous été victimes. Depuis ce jour, les élèves s’épiaient comme si chacun menait l’enquête de son côté et chacun semblait se tenir à carreau, du moins tant que la paranoïa commune n’avait pas été balayée par un autre évènement. Ce qui ne saurait tarder dans une école comme Poudlard.

Affalé sur l’un des canapés caractéristique de la salle commune sous le lac, comme un petit prince s’affale sur un trône, Sambre observe le calme qui y était revenu depuis.
On ne pouvait pas réellement dire que le jeune homme était fier de sa bêtise. D’ailleurs, il ruminait encore le fait que rien ne se soit passé comme il l’avait prévu. Toutes ces friandises, on les lui avait volées, et même s’il avait lui-même produit le philtre d’amour caché à l’intérieur, il n’y pouvait quand même pas grand-chose si les Serpentards étaient à ce point des ventres sur pattes. De fait, il n’avait pas eu sa vengeance d’amoureux éconduit non plus, alors finalement, ils n’avaient tous eu que ce qu’ils méritaient.
Et jusqu’à ce qu’il ait eu peur de se faire prendre, la scène avait été plutôt cocasse.

Un soupire passe les lèvres de l’adolescent, sculptées en une moue boudeuse qui trahit son ennui. Rien de ce qu’il peut capter de ses yeux violines ne lui inspire quelque chose. Rien ne le fait vibrer, tout est mort et il en vient même à regretter les friandises ensorcelées ne serait-ce que pour avoir un peu d’animation.
Une voix, cependant, attire son oreille et le fait se redresser dans le large fauteuil en cuir, dardant des yeux avides d’agitation sur l’entrée de la salle commune. La jeune fille qui lui tressait les cheveux pour s’occuper avait, de toute façon, terminé son œuvre et s’éloigne en reconnaissant sans mal l’attitude du petit prince qui vient d’avoir une illumination.

- Beck !

L’air ennuyé de Sambre laisse place à un petit sourire en coin en voyant le roi fauteur de troubles pénétrer dans leur salle commune et qu’il appelle d’un ton bien plus enjoué que la dernière fois où ils se sont adressés la parole.
C’était comme ça, entre eux, et ce depuis le premier jour de leurs rencontres.
Beckett inspirait à Sambre l’envie de braver les interdits, ce que le jeune homme ne s’autorisait pas souvent à faire seul finalement et domaine dans lequel Beck excellait. Et puis, quand les choses tournaient mal, ce qui pouvait arriver plus souvent qu’il ne l’aurait fallu, le petit prince le reprochait ouvertement à son camarade qui n’avait pas suffisamment assuré leurs arrières.
Jusqu’à la fois suivante où inlassablement, ils s’entraînaient vers de nouveaux projets foireux.

Comme aujourd’hui, où, particulièrement avenant, Sambre était celui qui allait déclencher à nouveau leurs rouages infernaux par son ennui chronique du jour. A moins que Beck ne l'envoie sur les roses mais, tout de même, il n’oserait pas ?

- Tu as l’air de t’être plutôt bien remis de “l’incident” de la semaine dernière…  

Ce n’était peut-être pas très malin de la part de Sambre d’entamer la conversation par le souvenir encore vif de leurs regards qui se croisent alors que Beckett venait d’avaler une ou plusieurs friandises ensorcelées, mais le plus jeune des Lawrence avait du mal à oublier la scène qui en avait découlé.

- Tu trouves pas que tout est… Super calme depuis ? On dirait que plus personne n’ose s’amuser.

Son regard de biche, qui à l’innocence du serpent, crible son camarade de sous-entendu, et ce dernier devait commencer à avoir l’habitude de cette attitude typique qui attendait de lui une occupation, quelque chose pour sauver le prince en détresse de son ennui.

feat @Beckett Campbell Tadam !

Sambre offre un sourire doux et fait mine de ne pas voir que sa question relative à l’incident du philtre d’amour est beaucoup trop abrupte et déplacée. Tout était trop frais de toute évidence, pour Beckett comme pour tous les autres élèves victimes de ce mauvais tour. Certains diront que c’était cruel de raviver ce souvenir mais le jeune serpentard balaierait l’idée d’un geste de main contrarié. Lui ? Cruel avec Beck ? Il n’oserait pas. C’était une façon idiote de le taquiner, voilà tout, et la taquinerie n’avait jamais tué personne.
Sambre n’était pas dans la tête de son camarade, mais bel et bien au chaud dans la sienne, à mille lieux d’imaginer ce que sa magie avait pu provoquer chez lui.

- Tu sais aussi bien que moi que les incidents, ça va, ça vient dans cette école…

Trop concentré sur son propre ennui et la perspective de le tromper avec Beckett pour s’interroger sur les conséquences de ses actes. Il le fera peut-être plus tard, ou peut-être jamais, qui sait.
Car déjà Beck répond à son appel, faisant s’agrandir le sourire sur le visage du petit prince et briller ses yeux aux reflets violets qu’il plonge dans ceux de son camarade.
Il y avait peu de chance que Sambre lui avoue un jour comme il aime le voir s’animer à l’idée de faire une folie ou deux, et ce, même s’il faut passer sous le jugement des yeux experts qui semblent évaluer son propre potentiel à vivre l’une de ces aventures. Mais c’était bel et bien le cas, raison pour laquelle le plus jeune des Lawrence revenait sans cesse chercher le frisson de l’interdit auprès de lui.
Et ça valait bien la peine de se faire juger par ce regard là. Alors Sambre attend, patient, confiant. Les idées de son camarade ne l’avaient jamais déçu et quand il a sa révélation, c’est presque religieusement que le jeune serpentard attend qu’il l’exprime.

- Je savais que tu étais l’homme de la situation ! Qu’est ce qu’on…

Sambre s’interrompt quand leurs mains se mêlent, Beckett semblant tenir à lui faire la surprise, du moins à garder le secret encore un peu, entraînant alors dans son sillage son camarade, un sentiment d’impatience et un autre, de frustration. Mais sans hésitation, Sambre consent à le suivre à l’aveugle, laissant l’ennui sur le canapé qu’il occupait plus tôt.

- Tu me prends pour quoi Beck ? Un trouillard de première année ? Franchement tu m’fais mal.

Entre la vexation et une pointe d'amusement, il souffle en roulant des yeux. Beck pose les termes du contrat, et même si l’impatience et la curiosité le rongent, Sambre promet, la mine déterminée, peut-être pour lui prouver qu’il n’était pas juste bon à s'asseoir sur un trône.

- J’ai ma baguette, et d’accord je f’rai pas demi-tour. C’est promis.

Ils traversent un flot d’élèves à contre-courant et c’est plutôt agréable, cette sensation de ne pas suivre le mouvement.
La plupart de ceux qu’ils croisent sont plongés dans de grandes discussions, occupés à plaisanter entre eux, à ressasser leurs journées pour les moins chanceux. Et dans cette marée humaine qu’ils traversent, l’instant est très bref mais Sambre à presque l’impression d’être invisible. Un sentiment rare mais pas désagréable.
Le brouhaha s’éloigne et ils ont déjà atteint une cour extérieure quand Sambre retente de faire cracher le morceau à son sauveur.

- Déjà… On prend pas la direction du stade de Quidditch… Allez, donnes-moi au moins un indice ! Beck !

Faussement ronchon, il souffle avec sa malice de sale gosse.

- Tu me faisais beaucoup moins de secrets la semaine dernière, pendant “l’incident".

feat Beckett Campbell Tadam !

Sambre avait haussé les épaules avec une moue faussement étonnée. “Qui fait ça ?”, avait-il soufflé comme l’innocent petit prince qu’il n’était pas. Et il savait que Beckett ne serait pas dupe mais c’était plus fort que lui, il fallait qu’il nie cette propension à lui reprocher toutes leurs bêtises, même celles qu’il cherchait en s’enroulant autour de son petit camarade avec le regard brillant.

Moue boudeuse, joueuse, la curiosité dans les yeux, Sambre lâche paresseusement pour le taquiner, puisque Beckett refuse de cracher le morceau.

- Il est nul ton indice.

Chacun son domaine de prédilection après tout, l’un est un aventurier, l’autre est un orateur.
Sambre ricane, ne loupant pas une seule miette de ces joues qui prennent une superbe couleur et s'étendent sur le visage de son camarade.

- Moi je ne rougis pas comme un Poufsouffle invitée à son premier bal.  

Sa voix est un ronronnement satisfait alors que ses doigts se resserrent sur la main de Beckett de peur qu’il l’abandonne en plein milieu de leur escapade. Avec, peut-être, une pointe de culpabilité de l’embêter de la sorte, le prince murmure en roulant des yeux.

- Aller Beck, je sais bien que tu étais sous l’effet des chocolats, et que tu ne pensais pas un mot de ce que tu m’as dit.

Sa voix meurt sur ses lèvres quand la forêt se détache devant eux, contrastant avec le ciel encore clair, sombre, immense, impressionnante.
Au moins, la surprise du lieu aura le mérite de le faire taire quelques instants, le temps de s’approcher de la limite à ne pas franchir.

- La forêt ? J’aurai dû m’en douter !

Secouant la tête, cette fois c’est à lui de presser le pas en jetant un coup d'œil en arrière, puis de donner un petit coup d’épaule dans celle de Beckett pour le presser à son tour.

- Personne ne nous verra, accélère et ça ira !

Sambre avait à peine conscience de la facilité qu’il avait à se laisser entraîner quand les doigts de Beckett étaient noués aux siens. Peut importait la spirale de bêtises dans laquelle il était capable de l’entraîner.
Un pas par-dessus une énorme racine et ils y pénètrent, dans leur spirale, loin des regards, sous les branches qui obscurcissent déjà l’orée de la forêt.

- Tu vas te décider à me dire ce qu’on doit trouver cette fois ? Si tu veux me faire chercher un nid d'acromentules, c’est mort par contre. J’ai horreur des araignées, sauf quand elles sont réduites en poudre dans une potion.

Un bruit sourd leur provient d’entre les arbres, lointain, alors le serpentard se rapproche de son camarade de maison, tout contre lui, pour observer les bois par-dessus son épaule, ne pouvant se vanter d’être un grand courageux, et de connaître cette forêt par cœur. Non, il ne faisait pas partie des élèves qui pouvaient s’en vanter. Sa témérité venait essentiellement de son addiction au frisson. Pas spécifiquement de son courage.
Il souffle à l’oreille de l’aventurier.

- J’ai promis de ne pas faire demi-tour et je m’y tiendrais Beck. Mais promet-moi une chose… La prochaine fois, emmène moi avec toi dans la salle de bain des préfets.

feat Beckett Campbell Tadam !

Si jusqu’à présent, Sambre s’amusait beaucoup à taquiner son ami, notamment sur ce fameux “fâcheux événement" dont il allait bientôt falloir taire le nom pour éviter que Beckett ne passe sa vie avec le visage aux couleurs de Gryffondor, une fois dans la forêt, le garçon faisait bien moins le malin maintenant.
D’ailleurs, il ne riait plus trop dès les premiers bruits qui leur parviennent de derrière les arbres inquiétants, fronçant les sourcils alors qu’il essaie de se convaincre que, si près de l’entrée de la Forêt Interdite, il y avait peu de chance de trouver une créature vraiment dangereuse.

Et à la provocation de son camarade de maison, il ne se prive pas de lui pincer les côtes pour se venger de sa taquinerie.

- Ne nous portes pas la poisse. J’aimerai éviter de tomber sur quelque chose de plus flippant qu’une acromentule, qui tape déjà dans le haut du panier en termes de truc dégueu.

Rien que d’y penser et un frisson glacé d’effroi lui dévale le dos, alors qu’il grimace légèrement en imitant son compagnon, sa main rejoignant la baguette dans les pans de sa robe. Mais de son côté, il l’attrape fermement entre ses doigts pour se donner du courage. De toute façon, ils auront bientôt besoin de lumière s’ils s’enfoncent toujours plus loin dans l’ombre.

- Un ours ? Tout à l’heure tu parlais d’une biche et je préférais franchement l’idée ! En plus… Je suis pas spécialement sûr qu’on puisse comparer un centaure en colère à un ours… Je veux dire, ils seraient capables de nous flanquer une flèche entre les deux yeux pour nous faire taire…

Songeur, il ajoute en haussant les épaules avec une nonchalance qui ne durera pas, c’était certain.

- Moi, c’est ce que je ferai en tout cas.

Scrutant toujours les épais branchages, Sambre n’avait pas lâché Beckett d’une semelle et si ce dernier lui avait peut-être lâché la main en cours de route, le garçon s’était empressé d'emprisonner sa manche ou sa cape entre ses doigts fins.  
Pas rassuré, mais curieux, il fronce les sourcils, et secoue la tête.

- Un trésor ? Dans cette forêt ? Jamais entendu parlé.

Mais Beck savait comment attirer la curiosité de son ami, et déjà, un air fanfaron se dessine sur le visage de Sambre qui renchérit rapidement, l’air beaucoup plus intéressé tout à coup.

- Quel genre de trésor ? Une relique de l’un des fondateurs ? Un recueil de sortilèges interdits ?

Cette fois, il se décolle courageusement de Beckett, et le regrettera sûrement plus tard mais pour le moment, l’idée de trouver le diadème de Serdaigle accroché aux crins d’une licorne l’a remotivé.

- Quand même, je me demande où est-ce que tu as bien pu entendre parler de ça Beck. Tu espionnes encore les conversations des fantômes du château ?

feat Beckett Campbell Tadam !