Souffle court, souffle bref rapide et précis, une direction à prendre un chemin à suivre. Ombre parmi les ombres, écorché parmi les blessés tu plonges dans un miasme gluant, froid, brutal alors que la brume humidifie tes cils. Souffle court souffle tremblant. Tu as entendu les rumeurs, les voix murmurés, tu as entendu les doigts qui se crispent et les regards fuyants. Tu as récolté les informations avec une précision chirurgicale, tu as extirpé le ver de la viande pourrie pour le regarder sous tout ses angles ; vérité crue et honteuse, tu sais où aller.
Le ciel Croyance, lève la tête et regarde le ciel Croyance. Regarde le , sans nuages, te montrer avec pudeur là où il laissera la lune se lover contre ses courbes, parce que ce soir Croyance, ce soir tu vas déchirer les étoiles à nouveau, tu vas déchirer ta peau encore et encore, ce soir elle est ronde, la lune, ce soir elle se moque, sa voix vient chanter ton prénom, cette voix qui regorge d'amour, un amour violent un amour qui te pousses à tuer. Tuer le temps tuer les malchanceux tuer les libres tuer  sans regarder derrière toi tuer à en perdre la raison.
Ce soir tu viens tuer, mais de quel côté es-tu Croyance.

La porte s'ouvre et tes doigts s'égare à nouveau dans la poche de ton long manteau. Tu fais rouler entre ceux-ci cette petite fiole, elle glisse et son verre froid fait frémir ta peau. C'est bientôt la fermeture, seulement une âme fluette s'égare dans le fond de sa tasse, là, au fond de cette pièce joliment décorée. Tu t'es perdu à fixer cette silhouette, malheureux, tu as oublié de tourner la tête. Tu as aussi oublié de reprendre ton souffle, mâchoire crispée, tendu, tout ton corps est tendu.

Malheureux tu n'as pas encore vu son écho.

Aller Croyance, tombes à la renverse dans des souvenirs enterrés, prend cette pelle lourde de sens pour déterrer son cadavre, met de la terre sous tes ongles alors que ses longs bras se lèvent pour t'enlacer, ferme les yeux alors que son souffle dans tes cheveux s'égare.

Grand devant toi, sourire posé là par hasard sur des lèvres roses. Fraction de seconde, fraction dans ton cœur alors tu te recroquevilles rapidement dans un léger hoquet. Tu te baisses parce que tes yeux ne sont pas ciel d'azur ils sont orange sanguine rivés sur le sol. Tes mèches cache cet écart, tu as loupé une pulsation. Croyance. Il n'est pas ton cadavre Croyance. Reprend ton souffle, souffle court souffle bref rapide et précis.

La porte se ferme derrière toi mais tes mains tremblent. Tu te racles la gorge comme pour paraître -normal- comme pour adopter les habitudes qu'autour de toi les hommes incarnent. Un pas puis un autre, tu t'avances et tu te penches vers ton cauchemar alors qu'il se tient derrière ce comptoir, simple barrière de prévention pour l'heure.
Ta voix n'est que murmure ta voix est faible elle est mélodie dérangeante.

«  - … On dit que vous servez de l'or vêtu de miel dans une tasse mais aussi les pommes qui firent taire les plus insolents. »

Seulement maintenant tu oses lever les yeux vers les siens. Seulement maintenant tu laisses son odeur pénétrer tes poumons dans une douloureuse inspiration.

«  - Eamon Lucius Ainsley. »

Tu prononces son nom comme un ancien amant qui connaît par cœur les inclinaisons de ses pensées. Tu prononces son nom comme un damné invoquant son démon. Oh tu vas saigner Croyance. Tu vas perdre ton sang dans ses bras alors qu'il se nourrira de ta chaire et de tes entrailles. Et tu entendras un rire, encore, un rire.

Et voilà qu'il parle. Et voilà que sa voix laisser échapper l'air que tu gardais en vain dans tes poumons dans un soupire. Elle est légèrement plus douce que celle du Diable, plus ronde, elle joue parfaitement son jeu. Ce sourire.

Immense animal qui se dresse devant toi Eamon, ses yeux qui reflètent la lumière comme deux énormes lunes , ils sont rivés sur toi, Eamon. Ce sourire, il te l'arrachera. Ce sourire il le fera devenir froid, il le forgera sur ton cadavre. L'animal derrière Croyance il a posé son joug sur toi. Il te suivra partout où tu iras, il se penchera au dessus de ton lit, ses lunes elles creuseront un tunnel dans ton âme, elles y écriront leur noms à l'encre du regret.

« .. Croyance -tu ne crois plus en rien- .. Amans -amour, amour, amour, tu seras sa fin- Halloway. »

Toujours penché sur lui tu es comme immobile, immobile en suspension dans l'air dans le temps dans cette minute qui se fait douloureuse. Tu ne peux que rejouer les mêmes mouvements mais cette fois avec adresse. Tu ne bégaies pas tu ne baisses pas le regard tu ne cherches pas le contact d'une main chaude et la saveur d'un baiser. Cette fois il n'y a que le goût du fer qui perlera sur vos lèvres, cette fois il n'y aura que le bruit des déchirements, de vos cœurs, de leurs vies, à ceux que tu iras traquer dans la nuit.

Et le Cygne laissa le Serpent mordre son cou car il savait. Il savait que c'était une fin plus honorable. Parce que noyer le rampant est si aisé. Parce il ne suffit que de quelques coups d'ailes pour lui briser les os sur un rocher. Alors pourquoi le Cygne se laisse vider à blanc. Se laisse sombrer dans une transe mortuaire.

«  Si je te donne la Mort.. me donneras-tu la Vie .. »

C'est soufflé comme une réplique. C'est une question qui n'a pas encore de réponse. C'est cette voix qui se languit. Cette voix qui veut cesser de raisonner en vain.

Tu sors doucement de ta poche la potion de tue-loup sur le bois qui commence à cesser de briller alors que le soleil s'étouffe. Et tes yeux continuent de dévorer. Dévorer le chemin que le sang prend dans les veines de son cou. Dévorer les cils qui couronnent les iris de jais. Dévorer les battements de son cœur.

Tu la sais difficile à réaliser, cette solution. Ton médicament. Tu le sais aussi mortel. Pas pour toi non, pour ceux qui n'ont pas cet animal dans leur dos, qui toujours attend.

Tu attends les mouvements. Tu traques Croyance. S'il ne reconnaît pas le contenu de cette potion, s'il s'offusque s'il tourne le dos alors il ne pourra jamais donner la vie. Ta vie. Il ne pourra que prendre. Et tu n'as plus que tes reins à donner Croyance. Tu n'as plus que tes yeux à offrir, ta langue et tes poumons, tu n'es que corps tremblant qui tend les mains vers un fantôme.

Qui va briser cette approche physique, est-ce que le serpent risquera de retirer ses crocs, est-ce que le cygne va finir par s'envoler. Est-ce que l'animal perdra patience.

Un contact. C'est un contact qui, enfin, te fit perdre le fil. Froid, délicat. Ta peau frissonne et ta mâchoire se crispe, tu tombes encore tête la première dans cette même étendue d'eau. Tu connais ses profondeurs par cœur, tu t'y noyais dès qu'il prononçait ton prénom. «  Croyance. » et lui aussi, il le dit. Il le dit avec cette même froideur invitante qui roule dans le fond de sa gorge. Tes yeux se relèvent lentement. Tu peux sentir tes lèvres se mouvoir dans un sourire. Un sourire si triste si brûlant si déchirant. Et pourtant si plein d'espoir. Tu le vois, Croyance, tu le vois en face de toi, ses immenses ailes recouvertes d'essence, ses cornes se tordre dans des courbes moqueuses, tu le vois, ton démon. Et il te tend la main.

« …  » alors toi, tu prend sa main dans la tienne et tu la diriges vers ton cou, la laissant t'étrangler « Dans ce cas ma vie serra tienne.. »

mots en suspens, mots qui dansent, mots qui se veulent discrets. Il y a quelque chose derrière tout ça, tu n'offres pas ta vie au premier venu, tu offres ta vie à ceux en qui tu sais parfaitement qu'ils pourront t'arracher ton dernier souffle. Tu ne veux pas être sauvé Croyance tu veux injecter dans tes veines ces mots qui te feront tant de mal.
Tu veux souffrir mais tu veux souffrir jusqu'au bout. Tu veux recevoir les plus grandes plaies mais qu'elles soit présentes jusqu'à la fin. Si tu lâches son cou il ira arracher le tien.

« … je t'offrirai le poison qui coule dans mes veines, je t'offrirai un monstre qui écraseras tes ennemies et amants, je t'offrirai une vengeance et un affront. »

Tu observes ta mort en face tu observes ta plus grande erreur. Mais c'est comme ça que tu continues de marcher, que tu n'arrêtes jamais. Tu deviens toujours plus fort, tu deviens toujours plus grand. Immense loup immense créature tu te dresseras haut dans le ciel recouvert de ton propre sang pour venir arracher la lune et la dévorer.

« … Mais Eamon tes mensonges devront transcender mon âme , les liens que tu noueras autour de ma gorge devront être fiables, invincibles. »

Sinon le loup se retourne vers son maître. Sinon le loup arrache les ligaments, brise les rêves et dévore les mains perfides.
Enchaîne-le , Eamon, trouve de quoi le satisfaire, fais tes demandes, prononces tes souhaits, commercial tu devrais t'en sortir aisément. Ordonne lui de te trouver une couronne, ordonne lui de parsemer ton chemin du sang de tes rancœurs.

Il laisse glisser ses doigts sur ta peau, sur l'angle de ta mâchoire et tu fermes les yeux. Tu le laisses incruster son venin sous ta peau, tu le laisses te marquer. Un nom. Alors les iris se braquent à nouveau et tu inspires l'air sec de ce salon de thé vide et silencieux. Il te tend une épée et attend en retour une guerre.

« Attends mon retour ici.. Attends que la lune se taise. »

Tu lui tournes le dos, reprenant la potion et tu t’engouffres sans un bruit dans les secrets, dans les murmures, dans les nuances d'encre au milieu des bas-fonds de minuit. Le soleil n'est plus, le temps se met en route. Tu n'es pas en cage cette fois Croyance tu n'es pas emprisonné de ta propre chambre qui porte le goût du deuil.

Sans même t'en rendre compte ; tu cours. Tu cours mais tu es toujours aussi effrayamment .. silencieux. Ton souffle ne lutte pas, il est limpide, la nuit n'est pas aussi sombre, tu chasses. Pour la première fois de ta vie tu chasses un être. T'as tué la bête et t'as prit sa peau. Et il chiale, le gamin qui se cache dans ta poitrine, il chiale, il te supplie de t'arrêter il te supplie de pas le laisser t'étrangler il te supplie de l'épargner.

De t'épargner

Mais tu n'as jamais reçu de courroux pour tes fautes Croyance, tu ne peux pas rester ici sur cette terre à observer le sang couler de tes mains sans qu'une mâchoire se plante sur ta nuque. Tu dois être cette mâchoire. Tu dois être le tueur et le tué.

Pourquoi t'es si rapide. Pourquoi t'es si doué. Comment tu fais pour trouver les informations. Comment tu fais pour savoir où il traîne le soir, pourquoi t'as réussit à voler ces réponses sur les réseaux, sur les photos qu'il poste, inconscient, sans savoir qu'un animal le cherche. Et pourquoi il est là, complètement allumé, l'odeur de l'alcool rendant sa personne encore plus hideuse.

Pourquoi tu l'observes, au loin, là où lui ne peut pas te voir, là où personne ne peut te voir mais toi si. Toi tu peux.

Les heures tournent, la lune monte .. monte.. monte.. alors dépêche-toi.

Le liquide coule le long de ta gorge, tu vides la potion de son contenu. Les lumières s'éteignent, les mains s'agitent dans des saluts maladroits et les hommes se séparent pour finir leur nuits chez eux. Tu te mouves dans son ombre. Seul, il est seul, ils sont toujours seuls les forts, ils sont toujours seuls les hommes, ils n'ont pas peur les hommes, jamais rien ne leur arrive aux hommes, ce n'est pas eux qu'on agresse dans les rues, ce n'est pas eux à qui on brise les os, non, les hommes ils marchent ivres le sourire aux lèvres.

Tiens, la voilà, la lune, la voilà, ta reine. Celle qui t'ordonne de te tordre en deux de douleur celle qui t'arrache l'espace d'un instant toute humanité pour se rire de ta médiocrité.
Cette fois l'homme se retourne, quand il entend la peau se déchirer, les griffes racler le sol froid et humide. Cette fois il arrête de sourire l'homme.

Mais voilà. Il a tellement peur en voyant cet immense loup immaculé se dresser dans l'angle de la rue qu'il ne pense même pas à sortir sa baguette, il tourne les talons pour fuir – essayer – parce que toi Croyance en un bond te voilà sur lui et il tombe tête la première et plus un bruit. Il a épousé le sol à une vitesse grandiose, il ne reprendra conscience que bien plus tard et tu ne seras plus qu'une plaisanterie '' bien sur !! toi tu t'es fait agresser par un loup-garou qui t'a fait trébucher !! '' tu ne seras qu'un cauchemars qui reviendra en boucle hanter les rêves.

Dressé sur un corps brûlant tes iris se plongent dans sa chevelure et tu te demandes ce que tu fais. Tu te demandes pourquoi tu es là. Tu te demandes pourquoi tu vois, dans le reflet de la lune, l'image , non, l'écho de ton corps si jeune qui te regarde en larmes. Tu es tombé si bas.

Peux-être que cette fois tu deviendras plus qu'une arme. Peut-être que cette fois son étreinte sera douce. -le poison commence à faire effet-

Puis ta pattes, tes griffes, ces énormes griffes qui ne sont que lames de couteaux ; elles s'abattent sur la pauvre main de cet inconnu et dans un élan de puissance que tu ne t'es jamais autorisé tu lui voles un bout de son cœur et de son corps. Tu n'utiliseras que tes griffes car tes crocs maudiraient à jamais sa vie et tu ne veux pas répandre la maladie.
L'animal se mouve , déchire la poche de ton pantalon et lui voles aussi son porte-feuille. Tu n'as que faire de cela et il finira au fond de l'eau mais pour la vision externe c'est simple ; cette fois l'homme souriant fut victime d'autres hommes souriants.
Méfaits réalisés tu t'éloignes, te retire, récupère les bride de tes vêtements et disparaît, la gueule pleine


Après de longues heures d'attente, alors que ta patience est mise à rude épreuve voilà qui se dessine derrière ta porte une immense silhouette. Une silhouette que tu n'as jamais vu auparavant, un loup qui te fixe, un loup qui entre, un loup qui s'avance vers toi et dépose à tes chaussures une alliance tâchée d'une liquide bien trop rouge pour être de la boue que tu reconnais Eamon parce qu'il te sait observateur. Puis les yeux se braquent sur toi, ils luisent, exactement comme l'homme qui te donna sa vie.

Cette fois c'est lui qui te dévore du regard. Tu sais pourquoi, immense créature qui fuit le crépuscule, immense créature qui fuit l'humanité te voilà enchaîné. Enchaîné pour protéger ton cœur, enchaîné pour tromper tes plaies. Puis il s'approche enfin après avoir récupéré sur le sol sa preuve. Incroyable. C'est la première fois que l'on utilise ce mot pour décrire le loup. Incroyable mais effrayé. Il l'a sent, ta peur. Il entend ton rythme cardiaque. Ton souffle s'emballe alors pourquoi tu tends la main pour engouffrer tes doigts dans son pelage.

Croyance toi aussi tu retiens ta respiration. Tes yeux toujours doucement posé sur son visage tu te plonges dans ton observation. Ses yeux qui glissent sur tes cicatrices, ses yeux qui embrassent l'angle de ta mâchoire, ses yeux qui viennent se noyer dans les tiens. Et toi tu les ferme. Tu le laisses commencer à te mentir, tu le laisses commencer à t'achever, un peu plus, toujours un peu plus. Tu te laisses penser des «  ça semble si réel »

ça semble si réel. Sa voix, il n'y a maintenant que sa voix bien trop douce et ses caresses bien trop tendres. Si tu n'étais pas un idiot, Croyance, tout ça pourrait être sincère. Mais tu ne te sens pas légitime de recevoir alors tu ordonnes et tu reçois le pire des poisons. Celui qui sent bon, celui qui étourdi, celui qui fait rosir les joues.

La lune enfin perd son emprise sur toi, après de longues minutes de silence ou tu le laissais simplement, immobile, s’imprégner de toi. Alors ton corps se craque, se fissure, se brise et maintenant Eamon tu ne te tiens plus devant un immense loup mais un homme brisé.

Tes cheveux couvrent la moitié de ton visage alors que tu tiens à peine debout. Angelot qui tremble après avoir dévoré Adam et Eve. Un pas en avant, puis un autre et tu laisses ton corps s'évanouir contre lui.

Il porte le parfum du regret.

 «  A quel point .. es-tu prêt à donner pour me posséder, Eamon. »

Tu es tellement épuisé que si tu ne te trouvais pas contre son torse il ne t'entendrait probablement pas. Mais l'heure est au contrat. Tu n'offres pas ton âme à n'importe quel diablotin.

« A quel point es-tu prêt à offrir pour que je maintienne » tu redresses la tête légèrement, tu puises de tes dernières forces « ce sourire » si proche. Tu es si proche. «  de tes lèvres. »

Croyance tu ne parles pas du sourire qu'il expose sur son visage lorsque le soleil illumine le dos des clients qui attendent de remplir leur vessies, tu parles de celui que tu as pu goûter lorsque tu lui as ramené l'honneur et la fierté.  

Laisse tes bras épouser ses courbes, laisse ton regard apprendre par cœur le rougissement de ses joues, laisse tes doigts s’enivrer de la sensation de ses cheveux. Que ta peau comprenne comme la sienne réagit, si tu veux tromper le damné parfaitement si tu veux dévorer son âme pour qu'il ne reste que coquille vide. Plutôt vivre enchaîné que plié en deux de douleur, plutôt vivre la tête remplis de feux d'artifices que ton ciel tant détesté.

Tu souris, ton sourire est si heureux. Une joie désagréable, une joie que toute personne seine y comprendrait la détresse, sentirait ce malaise étrange. Tu viens de trouver ta raison de vivre, la sienne. Tu as trouvé ton sacrifié Eamon, tu as trouvé ton bouclier, celui qui prendra la balle pour toi, celui qui tueras pour toi.

Et tu te poses les questions . Pourquoi maintenant, pourquoi lui, pourquoi offrir ainsi tout son être. Pourquoi un enfant de la lune vient t'offrir ses armes.

Parce que si tu meurs Croyance, tu auras un nom à blâmer autre que le tiens.

« Ta vie. »

Attention à ton offre Eamon, il paraît si fragile, l'angle dans tes bras, il paraît si tremblant, là, recouvert de blessures et de souvenirs brûlants mais l'ange il n'est pas tombé. Il n'est pas déchu, on ne l'a pas poussé. Il a sauté tout seul, l'ange. Et il a dansé avec les pires démons, bien plus effrayant que tout ce que tu connais Eamon.

« .. Qu'il en soit ainsi. »

Tu murmures contre ses lèvres, plongé dans son regard. Plongé dans ces eaux que tu aimes tant, celle qui porte le goût du sang et la saveur d'un cœur qui se brise. Ce bruit, en boucle, quand ta tête est immergée.
C'est la première fois que tu possèdes en échange de ton existence. C'est la première fois que tu vois en ta pauvre personne une importance – mensongère, bien sûr – mais si agréable.

« Tu seras Roi parmi les rois »

Utilises ma force intelligemment. Tu es incendie. Ouragan. Tu as laissé tout en toi exploser sans plus aucune maîtrise. Tu peux enfin t'endormir et laisser la colère prendre le dessus tu peux enfin arrêter de lutter.

Ta main vint se poser sur sa joue, délicate, discrète, on en oublie même que quelques heures plus tôt cette même main arrachait une alliance, on en oublierai presque qu'il y a quelques heures tu traquais sous le regard inquisiteur de ton astre.
Ton touché est douceur mais ton regard, oh Croyance ton regard. Ton regard lui il brûle, il brûle et il hurle à Eamon. Il met en garde, il rappel ta nature.

Puis tes doigts s'égarent sur le col de sa chemise. Un élan de colère te prend, furieux, il ne vient pas de toi il vient de cette partie – infime – de ce souvenir -écrasé- qui veut te faire sortir de là. Alors tu empoignes le tissu dans ta main, tu tires dessus, tu montres les crocs et tu scelles le contrat.

Tes lèvres viennent se poser contre les siennes alors que tes cils couvrent tes yeux. Cœur qui s'arrête mais ne saute pas, simple hoquet maladroit, parce que c'est comme ça que les démons s'empoisonnent mutuellement, parce que c'est comme ça que les légendes s'écrivent ; sur un baiser, sur une promesse, sur un meurtre et une possession.
Saveur farouche saveur violente saveur du vice.

« Épouse moi, jusqu'à ce que ma mort nous sépare »

C'est soufflé au creux de ce baiser, c'est la seule réclamation que tu feras, la seule utilisation de sa vie.
De ta mort, de l'ennuie que tu provoqueras peut-être un jour chez lui, de la faiblesse qui peut-être feras courber ton échine, dans ce cas il n'en sera plus rien. Qu'un tas de cendre à ses pieds, qu'un croc dans une fiole, que du sang dans une seringue.
Mais l'heure n'est pas aux regrets, le temps chante la torture et les mensonges.

Pouce qui frôle tes lèvres, paroles que tu décide de croire. Un mensonge forcé, un mensonge pour la vie. Tes yeux ne se décrochent plus de son visage. L'infirmier ne souriait pas, l'infirmier n'a jamais sourit, l'infirmier t'a fait goûter le sang la douleur et l'amour. Lui ? Lui t'offre quelque chose de bien plus troublants. Il t'offre une vision du future.

Viens me chercher si c'est urgent. Si tu en avais la force tu rirais sûrement. Oh Eamon, c'est toi qui viendra hurler son nom, c'est toi qui suppliera la lune de se lever plus rapidement pour que sa mâchoire claque, pour que ses pattes écrasent les côtes et que les cicatrices creusent la peau jusqu'aux poumons. Tu as donné un avenir à un démon. Un démon qui s’enivre d'amour, qui étouffe la haine par un baiser, qui donne des couronnes à ses meurtriers.

« Ne t'en fais pas pour ça. »

Mâchoire qui se crispe alors que tu poses ton front contre son torse, étouffant une quinte de toux douloureuse. Fragile corps, qui se douterait que tu possèdes en tes mains la vie de plus d'un, que quand tu te bats tu gagnes toujours.

On ne peut pas gagner contre quelqu'un qui a tout perdu.

Enfin tu te recules, sortant de son étreinte -chaude, c'était si chaud, doux, pourquoi son odeur restes dans le fond de ta gorge- et tires une chaise pour t'y appuyer. Il entre dans ta tête Croyance. Tu pensais t'offrir à l'être le plus abjecte pour avoir tellement mal que ton corps s'endormirait tout seul. Ça se passe déjà mal pour toi. Tu as sous-estimé sa voix, son regard.

Ta main glisse sur ta propre nuque, dégageant tes cheveux qui commencent à être bien trop longs. Les yeux clos tu reprends ton souffle.

« Eamon. »

Tes jambes ne parviennent que très peu à tenir ton maigre corps, demain sera rude. Comme si tout ton corps avait été mit sous pression, que tes muscles allaient se briser sous l'effort. L'un après l'autre. Alors avec tes dernières volontés tu t'approches de ton malheureux tas de vêtements, cherchant dans la poche de ton -presque- manteau ta baguette et la prend en main, murmurant un faible «  frabicae reparo » les déchirures prennent fin, les tissus s'embrassent et s'unissent. Fatigué tu remets tes habits, ne laissant que ta chemise que tu boutonnes, à moitié éveillé, luttant pour ne pas t'effondrer sur le sol et y rester.

« Tu as empoisonné la mauvaise personne, à Poudlard. »

Eamon, il ne te connaît pas ton nom par des murmures derrière les épaules, il a simplement suivit une rumeur qui s'est avérée être un souvenir et un visage familier.

Tes iris se plongent dans les siens, brûlants.

«  Tu aurais dû empoisonner les Directeurs. Tu aurais dû effrayer ceux qui t'ont tant dévisagés. »

Faible sourire. Tu étais dans la foule, tu étais dans les éclats, dans les questions et tu as continué ta route, les yeux baissés. Tu t'étais murmuré un faible ; comment parvenir à une justice sans faille quand chaque actes est dictés par un sentiment.

Une dernière fois tu lèves ta baguette et tu y inscris ton adresse en lettre de feu.

«  Tu auras toutes tes réponses ici.  »

Il n'est jamais trop tard, oui Croyance, il n'est jamais trop tard pour faire demi-tour, pour oublier son visage oublier ses lèvres et son sourire. Mais as-tu déjà écouté tes sentiments ? As-tu déjà écouté la faiblesse de ton corps qui hurle que tu arrêtes ?
Les marques sur ton visage en son bien la preuve que non.

Ses mouvements sont flous, troubles, ton diable se mouve et parle, sa voix charme tes peurs, sa voix  est miel dans un verre d'épines. Elle n'est là que pour attirer l'attention ailleurs, ailleurs du sang et des plaies.

Tu essaies de suivre le mouvement mais le monde tourne, le monde se tord s'incline et s'étire sous ton regard fiévreux. Une fatigue qui tombe d'un coup sur tes épaules. Une fatigue d'une nuit entière à courir après ton nouvel amour, une nuit entière où ton corps fut broyé par sa mâchoire, une nuit qui n'est que la petite sœur de toute celle où tu préféra regarder les rosaces de ton plafond plutôt que tes rêves.
Alors tes joues sont rouges lorsque l'épuisement fait monter la température de ton corps. Alors ta main se rattrape à la porte du salon de thé pour ne pas tomber. La simple idée de dormir là, devant son temple comme le chien que t'étais te donne envie de gerber.

« Mon corps semble m'entraver, je n'avais pas envisagé une telle fatigue »

C'est toi l'agneau. C'est toi qui d'un coup de couteau tomberas, dans la boue et les caveaux, carcasse parmi les souvenirs, corps entre les tombes, nom rayé et recouvert de mousse.

Une erreur de calcul, cela ne se reproduira plus parce que tu es enfant prodige -forcé- Croyance, tu es ligne précise qui ne dérive pas, tu es lame chirurgicale qui découpe la peau : adroite et parfaitement coordonnée.

Tu n'as jamais eu peur de montrer la faiblesse de ton corps. Tu n'as jamais eu peur de montrer ce visage épuisé parce que tu te reposes sur celui qui hurle. Tu te reposes sur ses yeux fous, sur ses griffes sur sa violence viscérale.

« Je suis à bout de souffle Eamon.... »