Presque un mois.
Un mois que les choses ont changé, Jasper, pas vrai ?

Il a longtemps hésité, Vanitas. Il s’est plongé dans le travail, sur Neal et cette relation qu’ils sont en train de nouer. Il a fait ce qu’il a pu, il a trouvé des arguments. Tu n’as pas le temps. Tu n’as pas envie. Il est occupé. Encore et encore, les excuses. Mais là, il n’y arrive plus.
                                                      C’est trop.

Et tu avais promis que vous ne changeriez pas de sitôt.

Alors il transplane, la boule au fond de l’estomac. A peine devant la porte principale, il la pousse comme s’il était chez lui. Pendant un temps, c’était presque comme si. Aussitôt un elfe à sa rencontre, et Vanitas sourit. Il retire sa cape, le retient d’un geste quand il propose de prévenir le maître des lieux.

- Pas la peine. J’y vais, je connais le chemin.

Et ses pas qui le mènent jusqu’à la porte de ton bureau. Ses doigts autour de la poignée, quelques secondes pour se permettre d’inspirer. Et il entre, Vanitas, s’arrête à un pas de la porte pour t’observer. Toi. Toi, tes yeux, ton regard, ta présence qui pendant des années a été si naturelle. Si nécessaire, si désirée.
           Putain.
Est-ce que tu peux lire, Jasper ? Est-ce que tu peux deviner au fond de ses yeux ? Ou est-ce que tu vas nier, faire comme si de rien n’était, comme toutes ces fois au cours du mois quand vous vous êtes à peine croisés ?

- Bonjour. Vanitas Cornwell, enchanté.

La porte qu’il claque pour la refermer, puis ses pas qui le mènent jusqu’à ton bureau en bois. Ses mains posées dessus à plat, son corps qu’il penche un peu vers toi. Dans son regard, une lueur que tu n’as peut-être pas l’habitude de voir dans ces circonstances.
                       Provocation.

- Il ne me semble pas qu’on se connaisse, ou peut-être s’est-on croisés un jour ? Mh ? Je ne me souviens plus.

Passif-agressif, jusque dans le ton de sa voix.

- J’espère ne pas déranger, je détesterais être une gêne dans un quotidien si putain de parfait.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Jalousie.
Est-ce que c’est vraiment ça, ce sentiment qui lui tord les entrailles ?
Putain, non, ça n’a rien à voir. Ça n’a rien à voir, et tu es vraiment un con de vouloir mettre ce genre de termes sur la table. Tu le sais, pourtant, non ?

Tu réponds à sa provocation, tellement calme que ça ne fait que l’agacer davantage. Pourtant, ce n’est pas dans l’optique de se disputer qu’il est venu te chercher. Tu te lèves, tu lui fais face. Il déteste la froideur de ton regard. Ce n’est pas la première fois qu’il y a droit, vous avez eu vos lots d’altercations au cours des années, mais cette fois-ci, ça lui fait mal.

- Tu me demandes vraiment ce qu’il y a quand ça fait des semaines que tu m’évites ? Putain, Jas, j’arrive pas à croire que t-…

Mais ses mots se coupent dans sa gorge.

Les yeux plantés aux tiens. C’est quelque chose qu’il ne contrôle pas entre vous, il n’y peut rien. Tes pensées, ta tête reliée avec la sienne et toutes les images qui défilent comme un exposé. Son visage se ferme, un court instant, juste avant qu’il ne se redresse en soufflant du nez. Désabusé, quand il passe une main sur son visage.

- Sérieusement ?

Il prend appui sur la table, juste pour se donner l’impulsion de reculer et de se retourner. A la recherche de son calme, de la patience qui le caractérise normalement. En vain.

- Sérieusement. Un léger rire, avant qu’il ne reprenne en te faisant face. T’as eu ce que tu voulais, tu l’as baisé, donc ça y est ? J’peux sortir du décor ?

Il se passe les mains dans les cheveux, tire sur les racines comme un tic nerveux. Respire, pour essayer de contrôler les pulsions mauvaises qui ont envie de l’animer. Ce n’est pas ce qu’il est. Ce n’est pas ce qu’il est, mais quand on le traite comme tu l’as fait, c’est difficile de résister. Son cœur cogne dans sa poitrine, son esprit encore plus submergé par tes souvenirs.

- Arrête d’y penser !

Un profond soupir, frustré, presque douloureux, la distance qu’il cherche à mettre entre lui et toi. Là, tout de suite, il n’a certainement pas envie de voir ça. Et il n’a pas non plus la tête à réfléchir combien il est égoïste.

Il a le dos presque contre la porte quand il te regarde, maudissant ce lien si spécial entre vous qui lui rend difficile de ne pas lire dans ton esprit. Maudissant la place qu’il t’a laissé prendre dans sa vie.

- J’aurais dû le savoir, que ça finirait comme ça.

Parce qu’il ne sait pas comment combler le vide maintenant que tu es presque parti.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Arrête de lire !
Il te fusille du regard, agacé que tu lui demandes une chose pareille après toutes ces années.

- Tu sais très bien qu’avec toi je n’y arrive pas !

Ça l’énerve que tu t’énerves. Ça l’énerve que tu n’essaies même pas de comprendre. Il te regarde te servir un verre, tente de se concentrer sur le liquide ambré pour sortir de tes pensées. Tu crois que ça lui fait plaisir, de te lire en plus de t’écouter ?

Tu recommences à parler, son regard à nouveau dans le tien. Il assimile tes reproches, les narines frémissantes quand tu accuses Neal de votre situation. C’est plus fort que lui, son poing frappe contre la porte. Tu sais très bien qu’il n’a rien à voir dans cette histoire, Jasper. Tu sais très bien que le problème, ce n’est ni Neal, ni Clovis, ni aucune des personnes avec qui vous avez pu coucher jusque-là.

Votre problème, c’est ça.
C’est votre relation, c’est ce feu qui vous anime. Si vous n’en aviez rien à foutre, il n’y aurait pas matière à se disputer, si ? Il t’écoute, suit des yeux ton verre quand il claque sur la table. Puis il revient à ton visage, endure chacun de tes mots. Et ça le tue. Ça le tue parce qu’il le sait bien, que Neal est blessé. Il le sait, qu’il a du mal avec tout ça. Il est au courant, il l’a lu, et ce bien mieux que toi.

- Tu crois que je ne le sais pas ?!

Il ne le mérite pas.

Il se prend la tête à deux mains, s’avance à nouveau au centre de la pièce tandis que tes pensées l’obsèdent. Tandis que tu affirmes que vous ne pouvez pas reprendre où vous en étiez. Putain, putain, putain. Il relève les yeux sur toi, le souffle court et l’expression presque voilée.

- PERSONNE ne m’aime ! D’accord ?! J’vois pas pourquoi on le ferait !

Il rejoint ton bureau en quelques enjambées, attrape ton verre pour le terminer cul-sec. Vous êtes brisés, tous les deux, pas vrai ? Des putains d’handicapés. Et il ne comprend pas, Vanitas, que tout à coup tu n’aies plus besoin de lui pour avancer.

- J’en ai rien à foutre que tu te tapes la Terre entière, Jasper. J’en ai rien à carrer que tu te sois enfin fait Clovis, c’est même génial ! L’amertume au bout des lèvres. Ce qui me met hors de moi, c’est que finalement tu n’en as rien à branler.

Il fait glisser le verre vide jusqu’à toi.

- Ca va faire plus de dix ans. Ça va faire plus de dix ans que je suis là au moindre coup dur, que je suis là en permanence, dès que tu en as besoin. Et regarde ! Ça fait des semaines que je t’appelle, et que tu ne réponds pas. Ça fait des putains de semaines que je suis dans le brouillard, que je suis perdu, que j’ai besoin de toi, et tu fais la putain de sourde oreille.

Une babiole sur ton bureau qu’il attrape, hésite à balancer au travers de la pièce avant de finalement choisir de la faire rouler entre ses doigts. Encore, et encore, jusqu’à ce que le contact le calme un tant soit peu.

- Le jour où Neal partira parce qu’il comprendra dans quel merdier il s’est fourré avec moi, tu seras où, Jas ? Dans les bras de Clovis, trop occupé, parce que t’as plus rien à venir chercher avec moi ? Il est là, mon problème.

Il repose la babiole, le regard planté sur toi.

- Tu me rayes de ta vie. Et t’en as rien à foutre de savoir si ça me détruit.

Egoïste, Vanitas. Il est égoïste, c’est juste qu’en temps normal il ne le montre pas. Parce qu'en temps normal, c'est à lui de ramasser, pas de s'effondrer. Cette fois-ci, c'est tout simplement trop.

Les paumes de ses mains contre le tranchant du bureau, le gris de ses pupilles qui tombe sur les papiers, les stylos, n’importe quoi tant que ce n’est pas sur toi. Et sa voix, comme un souffle quand il reprend :

- Ca fait des années que tu affirmes que tu préférerais m’aimer. Que ce serait plus simple, si tu m’aimais... Il relève les yeux, soupire. Tout ce que je te demandais, c’était de ne pas disparaître de ma vie du jour au lendemain.

Si toi, qui le connaît mieux que personne avec ses défauts, tu es incapable de l’aimer et de rester... Qui le pourrait, Jasper ? Il se sent pitoyable, Vanitas, d’avoir des pensées comme ça. Il se sent pitoyable d’être encore cet enfant-là.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

CA SUFFIT !
Le souffle coupé par ta voix, Vanitas te regarde. Il t’observe faire le tour de ton bureau, se laisse asseoir quand sur ses épaules tes mains pressent. Vidé. Par ses insécurités, par ton absence qui n’a rien arrangée. Le menton qui se lève, tes paroles qui lui donnent envie de réagir. Mais bien sûr, que ça se passera comme ça ! Ils sont tous toujours partis, Jasper. Tous. Il n’y avait que toi pour rester, toi et sa sœur. Tu t’accroupis, et il veut t’attirer, Vanitas. Il veut glisser ses doigts dans tes cheveux, t’amener à lui. Il veut t’expliquer, mais quand il fait mine de parler, tu le coupes.

Sourcils froncés, pourtant il obéit. Il se tait, il te laisse vaquer dans tes pensées au sein desquelles son esprit est déjà glissé. Et sa tête se secoue, doucement. Qu’au moins un de vous deux réussisse. T’as toujours été comme ça, Jasper. Défaitiste. T’y as jamais cru, à ta putain d’histoire. Ni à la vôtre d’ailleurs, si vous pouviez la nommer comme ça. Est-ce que tu crois pas que c’est aussi ça qui bloque quelque part ? Puis revient Clovis. Cet appel que tu attends, ton visage désespéré dans le miroir, les draps froids, le vide autant extérieur qu’à l’intérieur de ton cœur. Ça le calme, Vanitas. Ça le remet à sa place. Il oublie ses soucis, pour un court moment, empathique en faveur des tiens. Ton cul par terre, tes mots qui se déversent, et lui qui ne souhaite toujours que t’attirer.

La confiance en lui. C’est ce qui lui manque, oui, il en est tragiquement conscient. Et si tu n’étais pas là pour vous recadrer, jusqu’où serait-il allé ? Sa main qui se tend vers ta joue, tendre, au moment où le ricanement franchit tes lèvres. Il déteste ça, te voir si amer. Il déteste que vous pensiez de la même manière. Parce qu’il culpabilise Vanitas, en plus de tout le reste. Ses doigts n’ont pas l’occasion de te toucher, déjà tu te lèves pour vous servir un verre et le lui refiler. Il le sait que tu as raison. Ça le bute de l’admettre.
Putain.

Il plante son regard au tien.

- Tu fais chier, Fawley. Une gorgée avant de continuer. J’aurais préféré qu’on s’explique dès le départ, plutôt que tu ne joues le héros tragique et m’ignores. Je veux bien admettre que tu tiennes à moi, mais ta méthode pour le montrer, elle est pourrie.

Encore une longue gorgée, le verre qu’il repose sur le bureau.

- C’est pas qu’à toi de gérer ça. C’est notre relation, je ne suis pas qu’un employé dont tu peux disposer parce que tu as décidé que c’était mieux pour tout le monde, Jas. Une main qu’il se passe dans les cheveux, un soupir. Je tiens à lui. Je tiens à lui et je suis mort de trouille, parce qu’en plus de m’être laissé avoir, c’est réciproque. J’ai besoin de toi, d’accord ? Sexe ou pas.

D’ailleurs il aurait aimé le savoir, tu sais ? La dernière fois que vous l’avez fait. Il aurait aimé savoir que ce serait la dernière, que ce lien aussi allait se briser. Putain. Sur le bureau, sa main serpente jusqu’à se tendre pour trouver la tienne. Tu le réconfortes. T’as toujours été là. Ne change pas ça.

Doucement, son sourire s’étire. En quelque sorte apaisé, même si la boule dans son ventre n’est pas tout à fait dissipée. Il t’aime, Jasper. C’est juste dingue comme il t’aime, et il ne sait même plus s’il peut le dire à voix haute de peur de tout chambouler. Alors à la place, ses doigts caressent ta peau. Le ton concerné et les yeux plantés sur toi quand il parle.

- Raconte-moi ce qu’il s’est passé. Il resserre sa prise sur ta main. Laisse-moi au moins garder cette place, raconte-moi.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

La mâchoire qui se contracte, les pensées qui vaquent. Retour vers cette soirée, vers une conversation qui semble aujourd’hui rêvée. Le pire, Jasper, c’est certainement que tu as raison. Tu as tenté de lui expliquer, tu as tenté de lui faire comprendre ton point de vue, il le sait.

- Peut-être pas.

Il veut bien l’admettre, oui, il ne t'aurait pas écouté.

- J’aurais quand même préféré que tu essaies.

Car s’il n’avait pas insisté, s’il n’était pas venu aujourd’hui à l’improviste, jusqu’où la situation aurait-elle tiré ? Jusqu’à quand planifiais-tu de le faire patienter ? Il regarde dans tes yeux fatigués par la vie, relit avec toi votre histoire. Ses travers, nombreux, mais aussi tout ce qu’elle a pu vous apporter de bon. Toutes ces fois où elle vous a permis de tenir. Toutes ces fois où vous vous êtes fait rire, où vous vous êtes aimés, sincèrement, et où tout le reste s’occultait. Tu parles de ta sœur, et ça le fait sourire.

- C’est qu’il y a peut-être une part de vérité sur laquelle travailler, Jas.

Mais pas la peine de te le rappeler, pas vrai ?

Tu reprends la parole, et si les choses semblent inutiles à évoquer sous prétexte qu’il peut lire tes pensées, Vanitas t’es reconnaissant de les formuler. Parfois, entendre les mots de vive-voix a bien plus de valeur. Cela prouve non seulement que tu y penses, mais également que tu y crois ; il hoche la tête quand tu termines. Apprendre à fonctionner normalement. Ca ne sera pas facile, mais il comprend, maintenant.

Et il veut se donner une chance avec Neal.

Pourtant, quelque part, il a mal. Parce qu’il ne peut pas s’empêcher de se demander ce que vous seriez dans un monde où Clovis ne serait pas rentré. Est-ce que c’est ce qu’il a fait ? T’a-t-il finalement bêtement attendu toutes ces années ? A t’enfermer dans un monde de culpabilité, rêvant inconsciemment que tu choisisses de l’aimer. Ridicule, Vanitas. Il est capable de le voir, désormais.

Vos mains s’agrippent, ça le soulage, puis tu lui demandes de ne pas lire. Il fronce les sourcils, Vanitas, se force à retirer son esprit.

- Je vais faire ce que je peux, même si tu sais pertinemment ce que j’en pense.

Les secrets, ça ne peut rien apporter de positif. Et des secrets à propos d’un homme tel que Clovis, disparu plusieurs années avant de revenir ? Non seulement en tant qu’auror, mais aussi en tant qu’ami, ça ne lui plaît pas. Néanmoins, il choisit de t’écouter sans insister, cherche à se concentrer non pas sur le secret mais sur votre histoire qui n’en termine pas d’être chaotique.

- Faire le mort, un domaine dans lequel Clovis excelle.

Sarcasme ravalé en même temps qu’une nouvelle gorgée.

Ses yeux se plissent, il observe ton visage. Et c’est dingue tout ce qu’il arrive à y lire sans même user de la legilimancie. La déception. La frustration. Cet amour qui te ronge, encore et encore. Il termine son verre avec toi, le repose sur la table en prenant le temps de réfléchir. Léger sourire à ta dernière remarque, pourtant il a tout sauf envie de rire.  

- Je l’imagine parfaitement, oui.

Sa main libre montée jusqu’à son visage, il se masse les tempes en soupirant. Dix ans. Dix ans à garder ton secret, à te consoler chaque fois que quelque chose t’a blessé.

- Tu te bousilles la vie, Jasper. Son bras tendu pour attraper la bouteille, remplir à nouveau vos verres. Je comprends que tu sois amoureux, profondément, mais tu le dis toi-même, ça va faire quinze ans. Quinze ans, Jas, c’est plus de la moitié de ta vie à pleurer en silence et à te laisser détruire.

Une dernière pression de sa main sur la tienne, avant qu’il ne la lâche pour te tendre ton verre. Ce n’est pas le moment de penser à cette addiction-là.

- Tu veux mon avis ? Il te le donnera de toute manière. Fais un break. Accorde-toi une pause, arrête de penser à lui. Il est revenu, tu peux dormir sur tes deux oreilles maintenant, alors pose-toi. Pose-toi quelque part, seul ou pas, pense à ton putain d’avenir. Est-ce que tu le vois avec lui ? Et si non, alors cesse de te torturer, je t’en supplie. Tu vas finir par en crever.

Il attrape son verre par le bord, s’enfile une longue gorgée. Sa voix est basse quand il reprend, concerné.

- Est-ce que tu penses qu’il en reviendra ? Le regard planté sur toi. Du peu que je l’ai aperçu, Clovis a l’air… vide. Torturé. Tu crois qu’on peut encore le retrouver ?

Cet homme, celui d’avant.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Les yeux levés en direction du plafond, quand tu oses lui dire que ce n’est pas si simple. Oh, il le sait. Si tu savais comme il en a conscience, que ce n’est pas si simple. Sinon, ça ferait des années que tout serait arrangé. Ça ferait des années que tu aurais cessé de courir après des chimères, après un homme qui ne t’a jamais rien donné en retour de plus qu’une addiction et une envie quotidienne de crever. Tu te tues pour un conte de fées, pour une histoire qui, tu le sais, n’aura que si peu de chances de bien se terminer. Et ça le frustre, Vanitas. Ça lui fait tellement mal de te voir comme ça.

Il t’écoute, le verre entre ses doigts, le regard plongé sur toi. Un peu amer, quand ouvertement tu assumes que votre histoire n’est que ton pansement. Ta tentative de t’enfuir, loin des griffes de Clovis. De ça aussi, il en a conscience. Il a toujours assumé, d’ailleurs. Mais parfois, comme aujourd’hui, ça lui fait mal de se le faire balancer.

- Je le sais. Et je ne sais pas quoi te dire, je ne sais pas quoi te proposer d’autre. Rien à pa-…

Il s’arrête, prend une nouvelle gorgée.

- Oublie, j’ai rien dit.

Il ne veut pas y penser. Il ne veut pas te le proposer. Bien sûr qu’il existe des moyens, plus radicaux, certes, mais diablement efficaces. Des moyens qu’il n’ose pas te proposer, parce que ce serait inhumain. Ce serait faire comme si de rien n’était. Pourtant, quand il te voit ainsi, quand il te devine au bord du gouffre, quand de ta tête s’échappent toutes ces pensées morbides aux airs d’un chant du cygne…

Est-ce que ce serait vraiment pire ?

D’oublier, plutôt que de mourir.

- Ne t’en fais pas pour mon histoire, je vais… tenter. Essayer de faire les choses bien. Mais là, tout de suite, ce n’est pas ça qui m’inquiète. Ce n’est plus ça.

C’est toi.

Il écarte son verre, Vanitas, se lève de sa chaise pour arpenter la pièce. En pleine réflexion, à propos de Clovis, de toi, de cette situation. Son absence, son changement de comportement, la mort de son père, les accusations. Toi, Jasper, encore, Iphigénie, Valerian. Il soupire, se passe une main contre les tempes. Ça pulse contre son crâne, quand il relève les yeux vers toi.

- Tu en fais trop. Il y en a trop sur tes épaules. Tu t’es vu, Jas ? T’as des cernes de la taille du Pembrokeshire.

Un soupir.

- Je sais que c’est comme ça, que c’est ton rôle, que personne ne peut le faire à ta place, que ce sont tes affaires, mais putain. Je te jure, c’est de pire en pire dernièrement, tu te rends pas compte.

Encore ses doigts qui massent ses tempes menaçant d’exploser.

- Et arrête de penser au suicide, par pitié, tu m’empêches de réfléchir.

Les bras croisés contre son large torse quand il se cale contre un mur, près du bureau. Il t’observe, le regard pénétrant. Il n’a pas l’air, mais il essaie vraiment de ne pas te lire. Ça en plus du reste, ça le fatigue.

- Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ? Quelle tâche pourrais-tu me déléguer, Jas ?

Il s’avance, pose ses mains sur ton bureau pour se pencher vers toi.

- Il a quelques mois, j’ai annoncé publiquement que j’étais allié à ta famille. Laisse-moi te le prouver.

Encore.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Tu es fatigué, Jasper. Fatigué du monde, fatigué de la vie. Vanitas le voit, il le lit en toi, c’est tellement trop. Il aimerait pouvoir faire tellement plus. Pendant des années il a pansé tes plaies, il a recouvert les blessures, mais maintenant que tu lui retires ça… Que peut-il faire ? A quoi peut-il bien t’être utile ? Il ne le dira pas, peut-être le montrera-t-il, mais ça lui fait peur. Ca le terrifie.

Tu dors peu, c’est le cas de le dire. Vanitas voit l’alcool, il voit les bouteilles, il te voit penché au-dessus de la cuvette. Un soupir, ses tempes qu’il masse comme si c’était à lui de survivre à tes gueules de bois. Puis quand tu t’essaies à l’humour, il n’a pas la force de sourire. Même si c’est vrai - pas la peine de te détailler - il ne se fera pas l’affront de rire. Et tu sais pourquoi ? Parce que pas une seconde alors qu’il parle ne se dispersent les images macabres. C’est éreintant, d’autant plus alors qu’il tente réellement de fermer son esprit au tien.

Un bref signe de la main quand tu t’excuses. Puis il s’avance, Vanitas, te propose de t’aider. Délègue, Jasper, n’importe quoi. Laisse-le garder sa place, laisse-le s’impliquer pour toi. Ses doigts qui se resserrent sur la table quand tu lui dis que tu ne sais pas. Façon déguisée de tout bonnement refuser.

Reste-là.
Ses dents qui se serrent. Que ce soit à cette façon de le laisser derrière ou à ta manie de voir les choses d’office par le prisme du pessimisme. Il soupire, Vanitas, attrape son verre pour boire. Si tu savais. Si tu savais comme il aimerait interférer, comme une bonne fois pour toute il aimerait aller chez Clovis, le sommer de choisir. Mais plutôt que s’énerver, il boit encore une gorgée.

- Je te respecte suffisamment pour que tu puisses dormir dans une chambre d’amis.

Car la sienne est désormais proscrite, pas vrai ?

Il te regarde faire de même, terminer et mettre de côté ton verre. Son sourcil qui se dresse, un léger pouffement qu’il ne peut empêcher de sortir.

- Monsieur et Madame Déchus, j’ai hâte de recevoir les faire-parts.

Une main qu’il glisse dans ses cheveux bruns pour les repousser en arrière, son corps qui se mouve pour reprendre place sur le fauteuil face à ton bureau. En parlant de mariage, tu le ramènes à penser une discussion qu’il a eu avec Neal, il y a un moment. Ses jambes qu’il croise.

- Je peux te parler franchement ?

Question rhétorique. Il attend néanmoins ton aval avant de rependre.

- On est en 2031, Jasper. Tu es patriarche de ta famille, tu es activiste, je ne comprends pas pourquoi tu te plies encore à ces inepties de mariage pour donner naissance à un héritier de sang-pur. Ce sont des conneries, tout ça. Tu n’as pas besoin d’une femme à ton bras pour être sympathique, c’est le monde qu’on veut changer, ça.

En tout cas, c’est le monde que lui veut changer. Ce sont ses idées, sa façon de penser depuis son adolescence. Depuis qu’il a ouvert les yeux sur la société, qu’il a commencé à devenir militant. Il t’observe, Vanitas, chercher à savoir pourquoi tu t’y raccroches tant.

- En voulant à tout prix racheter ton image, ce que je peux comprendre, ne te méprends pas, tu perpétues en quelque sorte un mode de vie... injuste. Tu le sais. Se marier sans amour, pour l’image, enfanter pour la lignée…

Le genre de raisons qui ont fait de lui un enfant triste et maltraité.

- Je sais que tu es quelqu’un de bien, et je sais que tu seras bon avec ta femme et tes enfants. Mais… je sais pas, je trouve que c’est contraire à tes idéaux. Nos idéaux. Ne reproduis pas le schéma, par pitié. C’est en agissant différemment, en osant sortir des clous, qu’on réussira à faire évoluer ce monde.

Il attrape son verre pour le terminer.

- C’est ce que je pense.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Fin sourire, léger signe de la main. S’il n’y a que ça pour te faire plaisir, ce sera la chambre bleue. Son regard suit la cigarette que tu tires, ses mots qui franchissent la barrière de ses lèvres. Ce n’est pas la première fois que vous abordez le sujet du mariage, de votre avenir, de votre façon de voir la société. Point sensible, bien que profondément intéressant à aborder, Vanitas s’en est toujours ressorti frustré. Ce n’est pas assez. Ce n’est jamais assez.

Ta fumée qui s’envole en volutes vers le plafond, ses doigts qui jouent avec le rebord de son verre. Avant même que tu ne donnes tes arguments, il savait déjà ce que tu allais dire. La communauté ne reconnait que ça. Le mariage. Les enfants de sang. Le sang pur, pur, pur, qui doit rester pur. Et les familles comme celles de Vanitas, dans tout ça ? C’est à se demander si tu prends sa lutte au sérieux, Jas. Car tu as beau dire que tu supportes sa façon de penser, tu pars du principe que les choses ne changeront pas avant des années et des années.

Un tic de la langue. Parce que tu parles de ton père, de ta réputation.

- Le meilleur moyen de racheter ton nom, c’est de prouver que tu n’as rien à voir avec lui.  

Un soupir, son dos qu’il plaque au dossier de la chaise.

- Ca veut dire quoi, Jasper ? Ceux qui ne se marient pas avec une jeune fille de bonne famille n’ont aucun poids dans la société ? Ou bien est-ce que cela ne concerne que les sacro-sang purs ? Tu pourras te marier avec la plus adorée et la plus adorable des sang-purs, ceux qui veulent te cracher dessus le feront toujours. Ce n'est qu'un bout de papier, pas une consécration. Ce que j’essaie de te dire, c’est que ce n’est pas la personne qui partage ton lit qui fait de toi une personnalité importante. Ce sont tes idées. Et pour qu’elles pèsent dans la balance, il faut les clamer.  

Mais il sait que vous ne voyez pas le monde de la même manière. Contrairement à lui, tu n’as jamais osé dire les choses à voix haute, tu n’as jamais osé aller à l’encontre de ce pour quoi tu as été éduqué. Vous n’êtes pas du même bois, Vanitas et toi. Le tien patiente jusqu’au bon moment tandis que le sien est incandescent.

Son sourire, plus doux à l’évocation d’enfants. Il sait que tu veux être père, et il est persuadé que tu en feras un merveilleux.

- Il existe une multitude de façon de fonder une famille, sincèrement, cet argument n’est pas valable.  

Décroise les jambes, se penche pour venir te prendre la cigarette des doigts.

- Je sais que tu n’en démordras pas, ça fait dix ans que j’essaie. Mais sache que je ne vais pas attendre que tu aies des gosses pour faire éclater cette société dans la bonne direction. La clope entre ses lèvres, une inspiration de nicotine. Je refuse que d’autres enfants vivent ma vie au nom d’une société qui ne prend pas à cœur le bonheur de ses citoyens. Ce sont les détracteurs, qui sont dans le faux. Pas nous.  

La cigarette qu’il te donne de nouveau, l’œil sérieux planté sur toi.

- Ton plan est bon, mais il est trop timide. C’est maintenant qu’il faut agir. Après The Crow, après les insécurités, pendant que tout le monde commence enfin à se poser des questions. Je peux convaincre ma famille, je peux convaincre autant de personnes que je le souhaite, tant que d'autres grandes familles comme la tienne ne suivront pas, rien ne changera, Jasper.  

Un nouveau soupir, tandis que sa main glisse à l’arrière de son crâne.

- Pardon, c’est toujours pareil, je monte sur mes grands chevaux. C’est juste que je ne supporterais de te voir malheureux alors que je suis persuadé que le changement est au bout de nos doigts. J’ai subi pendant près de 26 ans, je suis enfin patriarche, je refuse d’attendre. Les Cornwell changeront, j’en fait le serment, et j’espère que nous serons un modèle pour les autres.  

Sa main glisse le long de sa mâchoire, masse doucement. Il a la chance d’avoir une influence, Vanitas. En raison d’un mode de vie strict et de relations conservées à la perfection, les Cornwell sont parvenus à rester sur la scène de la politique malgré leur sang (si peu) mêlé. Mais bien que sa famille possède du poids, c’est loin d’être suffisant. Il a besoin d’alliés, mais à défaut d’en avoir, il ne changera pas de cap pour autant. Le sourcil dressé, la pression qu’il cherche à faire redescendre.

- J’espère au moins que je serai garçon d’honneur, à ton mariage. Je détesterais voir quelqu'un d'autre organiser ton enterrement de vie de garçon.

Léger rire, fatigué, mais toujours son sourire.  

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Les sourcils froncés, un tic de la langue à ta remarque. Quand tu joues au cynique, ça a le don de l’agacer. Il termine de parler Vanitas, puis te suit du regard quand tu te lèves. Il sait d’ores et déjà ce que tu vas dire, pas seulement parce que tes pensées cognent contre son esprit. Vous avez déjà eu cette conversation. Encore et encore.

Il entend tes arguments, il les comprend. C’est d’autant plus difficile pour toi de voir les choses autrement que tu as grandis au sein de ce monde. Un monde dans lequel il faut avoir de l’importance. Un monde dans lequel l’image, la réputation, tout ça est au-dessus du reste. Il le comprend tellement, Vanitas, parce que réhabiliter son nom c’est lui-même ce qu’il cherche à faire.

- Tu ne penses pas que le problème ce sont ces gosses et leurs parents qui leur demanderont de pointer du doigt ? Putain ça me met en rogne si tu savais. Je sais que tu as raison sur ces points, c’est ça le pire. Mais je peux pas m’empêcher de me dire que c’est à force de cogner dans la porte qu’on finira par l’ouvrir.

Une main lasse sur son visage, les yeux accrochés à la cigarette que tu écrases dans le cendrier.

- Tu peux mettre en place tout ce que tu veux, Jas, mais le mariage… Son poing qui se serre. On parle de ta famille, on parle de ton bonheur, celui qui t’échappe des mains depuis quinze ans. Tu as du mal à concevoir les choses différemment parce que tu ne parviens à te sortir de ce que tes parents t’ont inculqué. Je peux pas croire qu’il n’y ait pas d’autre solution.

Un rire.

- A moins de renverser les familles de sang-pur, mélanger les cartes et les redistribuer.

Dans quelle mesure est-ce que cela serait possible ? Combien de gallions, combien de pertes seraient nécessaires à une telle entreprise ? Il soupire, regarde tes jambes avant de passer sur ton visage. Il faut que le nom de Fawley signifie de nouveau quelque chose de grand. Exactement ce qu’il souhaite faire avec les Cornwell, seulement c’est autrement que Vanitas a les choses en tête. Se démarquer de la bonne manière, se rendre indispensables, aimés, puis éclater les codes. Montrer qu’il y a d’autres façons de penser. Vos idées sont tellement similaires et pourtant si différentes en finalité.

- Réhabiliter ton nom, redorer le mien. Un sourire qu’il finit par étirer. Faire exploser cette société. Conquérir le monde.

Ça a toujours été le plan.

Cependant quand tu énumères les actions que tu comptes mettre en place, son sourire se perd. Sérieux lorsqu’il se redresse sur sa chaise, se penche vers toi. Izar. Il avait déjà entendu parler des premiers engagements, rompus. Voilà que tu souhaites les remettre sur la table, alors que Vanitas sait pertinemment que…

- Iphigénie ne veut pas se marier. Ça le tue. Tu veux forcer ta sœur à la même vie de malheur que la tienne ? Jasper, dis-moi que tu n’es pas sérieux.

Il se lève de sa chaise, les poings serrés sur la table avant de se redresser totalement.

- Putain…

Il imagine, un court instant, forcer sa propre sœur à se marier. Demander à cet esprit si libre, finalement en train de s’épanouir, de se perdre dans le mariage au simple bénéfice du nom des Cornwell. Ça lui donne envie de gerber, et il ne comprend pas que tu ne puisses rien qu’y penser.

Tique de la langue, se retourne pour échapper à ton visage. L’injustice, ça a le don de l’énerver. Et tu es injuste, Jasper. Malheureusement, il sait qu’il ne peut rien y faire. Iphi… Il ose à peine imaginer comment elle doit se sentir. Ça lui fait mal, Vanitas, parce que c’est comme si elle faisait aussi partie de sa famille. Long soupir, avant que finalement il ne revienne te faire face.

- Est-ce qu’au moins Izar prendra soin d’elle ? Est-ce que tu es sûr de toi, avec les Black ? Un léger silence avant de reprendre. Ils ont toujours été… flippants. J’ai peur pour elle, Jas, est-ce que tu es sûr de ce dans quoi tu l’embarques ?

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031

Tu sais qu’on ne les changera pas.
Il t’observe, le visage momentanément fermé. C’est la différence entre lui et toi, Jasper. Vanitas, lui, il veut y croire. Il veut se persuader, encore et encore, que vous pouvez les changer. Vous pouvez les faire évoluer, vous pouvez modifier le prisme par lequel ils voient le monde. Il suffit de s’acharner. Il suffit de montrer que les choses fonctionnent encore mieux quand on les fait différemment, et il est vrai qu’en ce sens ta façon d’agir pourrait marcher. Les réintégrer, prouver que la réussite sourit à ceux capables de s’ouvrir et de muter. Le plan est bon, mais il prend tellement de temps. Du temps que Vanitas n’est pas prêt à sacrifier.

Et puis il se résigne, soupir au bord des lèvres. À quoi bon lutter ? Vous travaillerez de concert , c’est évident. Même objectif, méthodes différentes. Et c’est peut-être ça, finalement, qui les mènera là où vous voulez.

- Tu es si pessimiste, Jas. Parfait pour le premier rôle du théâtre de ta vie.

Léger rire, sardonique pour cacher un triste fond de vérité. Il est là, ton prisme à toi. La tristesse, le verre à moitié vide, la fatigue, le sacrifice. Il aimerait tellement changer ça. Il aimerait tellement que le monde soit plus facile à vivre pour toi, réussir à te (vous) guider. Mais quand tu parles d’Iphigénie, quand tu abordes cet épineux sujet, il ne peut pas s’en empêcher. Les images dans sa tête, si difficiles à barrer. Il veut les repousser, il veut tout stopper, mais ça s’infiltre. Elle, vous, votre mère, encore ta déprime.

Il serre les dents, Vanitas, se masse les tempes du bout des doigts.

- Crois-moi, ton esprit n’est pas une partie de plaisir à visiter.

Le ton un peu plus sec qu’il le voudrait, il rompt le contact avec tes yeux dans l’espoir que ça facilite le barrage d’accès. Puis tes mots se déversent, ses pas longent la pièce. L’esprit en ébullition, car il aimerait trouver la solution qui te permette de ne pas en arriver là – ces foutus mariages. Putain. Il n’a jamais connu ton père que de loin, pourtant… Plus le temps passe, et plus il a l’impression de te voir lui ressembler. Si tu savais, Jasper, la peine que ça lui fait.
Car il sait que c’est tout ce que tu abhorres.

Ton verre claque contre la table, Vanitas s’avance pour le prendre entre ses doigts et le terminer cul sec.

- Si tu penses que ta sœur se contentera de prendre le nom des Black pour refaire sa vie loin de toi, c’est très mal la connaître. Elle continuera à se battre.

Et peut-être que c’est aussi de ça dont tu as besoin. Il dépose le verre au bout de la table.

- Laisse moi ajouter une dernière chose, après quoi le sujet sera clos - je sais reconnaître ta limite et généralement quand tu te mets à jurer c'est qu'on en approche. Il prend le temps de réfléchir. Cesse de te positionner comme un martyre qui se doit d'affronter sa vie de merde. Tu n'es pas seul, Jasper. Profite de tes alliés. Repose-toi sur nous.

Tu n'es pas seul, c'est ce qu'il aimerait te rentrer dans le crâne, Vanitas. Mais tu as toujours été foutrement borné, certainement autant que lui. Juste pour ça, et pour le simple fait qu’il te voit tant lutter, il accepte d’arrêter de tirer sur la corde déjà si tendue. Prête à craquer.

- Le navire ne sombrera pas, je pourrais t'en faire le serment. Et je ne suis pas le seul qui fera tout pour que ça n’arrive pas.

Quelques pas pour faire le tour du bureau, il vient presque s’asseoir dessus, juste devant toi. Il sait à quoi tu penses, et ce n’est pas parce qu’il lit dans tes pensées. C’est écrit sur ton visage, dans le pli de tes sourcils et la courbe de ta bouche. Quand il te voit comme ça, Jasper… Bordel, si tu savais. Elles sont si proches, juste au bout de ses doigts…

Des habitudes désormais inappropriées. Est-ce que tu les devines ? Est-ce que tu le ressens, toi aussi ? Ce besoin, cette envie. Il déglutit, la voix basse quand il reprend :

- Je sais ce que je vais faire pour t’aider. Je vais non seulement garder libre cette chambre dont tu aimes tant la vue, mais je me déclare également emmerdeur attitré. Froncement de sourcils amusé. Je t’interdis de dire que je tenais déjà ce rôle.

Ses doigts qui glissent sous ton menton pour le redresser, dévalent ta mâchoire puis ton cou sans qu’il ne puisse l’empêcher. Il étire un sourire qui se veut moins triste et fatigué qu’apaisant. Doux (douloureux).

- Je veux que tu te reposes. S’il te plaît.

Et en disant ça, il a conscience de l'ampleur de la tâche. Il laisse retomber sa main, la pose contre le bois de la table.

- Ce n’est pas avec ton allure de mort vivant qu’on te trouvera une femme.

Il déteste l’idée de te marier.
Il déteste imaginer te sacrifier.
Mais si c’est vraiment ce que tu souhaites, il ne te laissera pas seul pour tomber.

ft. @A. Jasper Fawley | Novembre 2031