Debout devant la porte d'un manoir en plein centre de Londres, tu restes debout à contempler la magie faire son oeuvre pour t'indiquer le chemin. Dans la poche de ta veste légère, est plié un papier avec les instructions laissées par Ronan Fitzgerald. S'il y avait bien eu quelque chose qui t'avait fait tenir lors de ton enterrement à Sainte-Mangouste pendant des semaines, c'était la promesse d'une nouvelle obsession. On t'avait murmuré l'existence exceptionnelle d'un être supérieur, on t'avait personnellement invité pour le rencontrer. C'est non sans cruauté et curiosité malsaine que tu te tiens face aux marches qui te mèneront vers cet ange tombé du ciel. Parce que c'est ce qu'il est, n'est-ce pas ?

Tu t'es assuré de partir lorsqu'Elijah est allé au travail. Tu n'as pas encore décidé de si toi, tu voulais y retourner. Le ministère te parait si loin désormais. Des mois qu'ils t'ont renvoyé (présumé décédé).

Le Chasseur n'est pas encore mort mais l'Homme cherche un sauveur. Tu grimpes jusqu'à la porte, apposes trois coups à celle-ci jusqu'à ce qu'on vienne t'ouvrir. Tu dévisages ton interlocuteur, avec l'infime conviction que c'est précisément celui que tu cherches.  Tu plisses légèrement les yeux avant d'étirer un sourire aussi doux qu'inquiétant.

— « Je suis bien à la bonne adresse ? »

Tu n'as pas le temps de sortir le papier plié de ta poche que ton regard se pose sur les ailes grisâtres qui se tiennent renfermées dans le dos du maitre de maison. Tu sembles tout à coup ébranlé, ne prenant pas la peine de cacher le prisme divers de tes émotions. Ta respiration siffle et tu portes une main à ton front pour en éponger le début de fièvre.

— « Qu'êtes-vous ? »

Tu forces le passage au moment où il s'écarte. Une fois à l'intérieur, les reflets colorés du soleil traversant les vitraux te permettent de le voir dans de meilleures conditions. Plus mystiques. Tu as face à toi le mélange onirique entre un monstre et un ange. Les petits oiseaux n'avaient pas menti.

— « Êtes-vous réel ou bien suis-je victime d'une hallucination ? »

Tu hésites à poser un genou à terre, mais les élans du prédateur reprennent vite le dessus sur ta conscience. Tu tapotes tendrement le couteau que tu caches dans ton autre poche, au travers du tissu.
Il est immonde.
((à l'image de ton monde))

Il est ce que tu désires voir. Dans le cas présent, tu hésites encore Atlas. Il est aussi terrible qu'il est terrifiant - même pour toi, les bêtes dans son genre te font encore trembler la nuit. Si tu es devenu chasseur, c'est avant tout pour suivre la voie des Priest, mais également pour nettoyer le monde des imperfections qui le rongent. Teivel Myhre... tu ne sais pas où le ranger. Il pourrait bien te dévorer tout entier si tu le laissais faire, autant qu'il pourrait marcher sur le monde à tes côtés.

— « Je suis bien réel, moi aussi. »

Tu penches la tête sur le côté, les yeux bien ouverts. Tu le laisses s'approcher de toi, un fin sourire ornant tes lèvres.

— « Mais cela ne risque peut-être pas de vous plaire. »

Le rictus narquois se mue en ricanement mélodieux. Tu ne peux retenir l'expression passionnée qui se reflète dans le bleu de tes mirettes quand ses ailes se lèvent. C'est un Dieu ! Non, c'est un monstre ! Je suis ce que tu désires voir, Atlas. Alors tu recules pour mieux voir.

— « C'est magnifique... Magnifique. »

Tu le rejoins, te colles à lui sans le toucher - seules tes lèvres atteignent son oreille, alors que tes doigts s'empressent de se contorsionner sous la tentation d'effleurer ses ailes.

— « J'avais prévu de t'égorger à la minute où je te verrai. »

Il n'y a plus de fausse politesse.

— « Mais tu es peut-être bien l'élu que j'attendais. »

Et ça ne change absolument rien à tes intentions.

Sa main se pose à ta taille, et tu prends sur toi pour ne pas te jeter sur lui et l'étrangler. Non, tu restes aussi calme qu'une mante-religieuse guettant sa proie. Si Teivel Mhyre doit être le nouveau Dieu à servir, il doit faire ses preuves. Tu ne suis la lumière que quand tu es certain qu'elle est assez sombre pour s'éclaircir.

Il rit à tes provocations. Ça te fait plisser les yeux car tu n'as aucune idée de ce qu'il peut trouver drôle. Ton sourire est fébrile, tu le perds à mesure qu'il voit en toi. Tu n'as jamais été très friand de magie. Tu l'as déjà pratiqué, tu as déjà prononcé un des sortilèges impardonnables, mais le plaisir n'y est pas. Tu n'es pleinement satisfait que quand le sang coule, que quand l'autre plaque ses mains sur la plaie pour la presser et empêcher la mort de l'étreindre.

Tu ne trembles pas quand il s'enfonce la pointe de baguette dans la nuque. Tu écarquilles les yeux. Tu veux voir s'il irait au bout - mais il n'en fait rien. Il te perturbe Atlas, il dérange ton système et tout ce que tu as pu apprendre des autres en les observant. Jamais tu n'as croisé individu aussi particulier. Eux qui sont tous insipides et prévisibles.

— « Je dois le reconnaitre, je ne sais pas lire en toi. »

Et peut-être que de ce fait, lui saurait (lire en toi).

— « Je ne sais pas si tu me plaies. J'ai toujours envie de te tuer. »

Tu te fends d'un sourire narquois. Oui, voilà. C'est comme ça que tu te sens le plus à l'aise. À énoncer des vérités dérangeantes à voix haute.

— « Mais aussi de te servir. »

Atlas Priest ne sert personne, hormis son intérêt.
((et ses pulsions interdites))

— « Ou de te comprendre. »

Tu recules pour explorer, tourner autour de lui comme un prédateur qui rode. Avant de rejoindre les premières marches de son palais. Prendre de la hauteur.

— « Dois-je pour cela ouvrir ton crâne et te dépecer au travers d'une autopsie ? Ou me conteras-tu tout tes secrets ? »

T'as les insultes au bord des lèvres. Tu trembles de les prononcer.

— « Non... Tu es trop précieux. »