Tu réajustes ta cravate devant le miroir... Dans quoi tu t'es encore fourré ? Partagé entre le coup de maître ou l'erreur fatale. Tu ne sais pas si tu as bien fait d'accepter. Pourtant, l'occasion était belle, la période idéale. Quoi de mieux que les fêtes pour verser dans le sentimentalisme et émouvoir ? Et tu ne diras pas que c'est son insistance qui t'a fait céder. Non, t'as encore ton ego intact (exacerbé). Tu soupires, laisses ton regard bleu froid observer le nœud parfait à ton col. Tu es impeccable, tiré à quatre épingles. Là, comme ça, tu fais digne, tu fais roi. Tu hoches la tête, satisfait, quand Grenat frappe doucement à ta porte pour te prévenir que ton invité attend dans l'entrée.

Tu soignes ton arrivée. Un sourire chaleureux aux lèvres, parce que tu es un homme agréable et sympathique, Jasper. Tu tends la main, serre la sienne.

— M. Davies, merci d'avoir accepté de vous déplacer.

Adara et Kastra, les deux vieux elfes de maisons, accourent pour débarrasser votre invité de son manteau et autres affaires. Tu déboutonnes ta veste, fait mine d'être à l'aise, avant de désigner la véranda devant toi.

— J'ai pris la liberté de nous installer dans la véranda. Suivez-moi.

Tu lui accordes un sourire, tu n'as même pas besoin de lancer un regard à tes elfes, ils savent ce qu'ils doivent faire. L'apparence est primordiale, la première impression vitale. La maison Fawley ne tombe pas en décrépitude comme tous veulent le faire croire. Elle est toujours digne, toujours grande, toujours gérée d'une main de maître. Et surtout, elle n'est pas le reflet austère et sérieux de son ancien patriarche. Il fut un temps où on se bousculait pour être reçu dans ce manoir, une époque où Fawley rimait avec bon goût et classe. Ton père avait ramené dans vos caisses des montagnes d'or, toi tu allais ramener la gloire d'antan. Tu voulais voir Aurel impressionné, satisfait. Tu voulais le voir ressortir de là en titrant dans son article qu'on avait jamais vu bannis aussi bien lotis.

On vous ouvre les portes, la véranda magnifique avec sa lumière qui inonde, le manteau blanc qui s'étend à perte de vue derrière ses vitres et son ambiance si cosy, si chaleureuse. Tu t'assois sur un large fauteuil, l'invites à faire de même sur celui en face de toi (son exacte réplique). Ici, tu reçois le journaliste d'égal à égal. Pas là pour le prendre de haut, pas là pour le faire sentir petit. Tu es un garçon modeste. Les gens aiment la modestie (l'ambition modeste, encore). Très vite, on vient vous servir thés et biscuits. Tu prends ta tasse (nature, sans sucre), croises tes jambes avant de lever les yeux vers lui.

— N'hésitez pas à vous mettre à l'aise. Je vais tâcher de répondre du mieux que je peux à vos questions, je me donne le droit de ne pas répondre, mais vous pouvez considérer que je n'ai aucun sujet tabou.

Et Dieu sait qu'il va apprécier.

Il connaît son métier. Tu aurais pu avoir des doutes vu son entêtement à vouloir ton interview mais ça te semble désormais évident. Il ne se concentre pas que sur toi, il cherche ses réponses également autour de lui. Bénis, sois ton sens du détail, tu marques déjà les premiers points.

— Garder son lieu de vie sain et bien entretenu est primordial.

La maison Fawley a été secouée par de violentes tempêtes mais elle ne s'ébranle pas pour autant. Elle reste droite, digne, même loin de ses années de gloire. Qu'il le contemple, Aurel, c'est tout ce que tu attends.

— Cette véranda servait aussi de lieu de réception à une époque. Il y avait des fêtes somptueuses chaque semaine, mes ancêtres n'étaient pas connus pour regarder à combien ils dépensaient.

Jusqu'à ce que les caisses se vident. Là encore, la maison aurait pu s'effondrer. Mais de l'adversité naît la grandeur et le clan avaient vu ses patriarches devenir de fins calculateurs. La maison Fawley était devenue alors plus sobre, plus raisonnable, semblable à ce qu'elle était du temps de ton grand-père et de ton père. On ne faisait plus de fêtes chaque semaine, on s'invitait en revanche à celles des autres. Et les coffres n'avaient jamais autant débordé de gallions. Tu lui offres un sourire charmant et absorbes une première gorgée de thé. C'est là qu'arrive la première vraie question. Et elle déstabilise.

Comment vous portez vous ?

Tu t'attendais à tout, ton père, les rumeurs du stupeshit, tout. Mais cette simple question élémentaire te fait écarquiller les yeux une demie-seconde. Comment vas-tu ? Merde. Il est bon.

— Aussi bien que ma situation actuelle me le permet.

Tu accentues ton sourire, noies le poisson.

Tu ne te dépeins pas de ton sourire, croises sagement tes mains, maintien ta position.

— En effet.

Tu es surpris. Cet homme est bien plus doué que tu ne l'aurais cru. Tu l'avais pensé opportuniste, jeune et téméraire. Tu l'avais pensé de la trempe des opportunistes en quête de sensations fortes, mais ce n'était pas tout à fait le cas. Ses mots étaient choisis, ses questions pertinentes, subtiles. Mais tant mieux. Tu n'es pas là pour jouer de subtilité. Il est en quête de matière. C'est précisément ce que tu vas lui donner.

— Je refuse que notre avenir soit scellé par la faute d'un seul individu. J'ai accepté la sanction de mes pairs sangs-purs car elle était légitime et importante dans l'immédiat. Beaucoup voient notre caste comme une secte et il est vrai que son fonctionnement s'en rapproche. Nous fonctionnons en cercle fermé. Il était alors important que la communauté sangs-purs montre au reste de la société qu'elle ne protégerait pas ses criminels.

Et dieu sait qu'ils sont nombreux. Une pensée pour Magnus Lestrange, celui qu'on pleure, peut-être le pire d'entre eux. Tu laisses quelques secondes s'installer le silence, laisses glisser ton regard vers le sol avant de le remonter vers Aurel, plus déterminé.

— Seulement, les Fawley ne sont pas des criminels. Mon père de par sa folie et ses actes nous a trahit. Il a trahi nos valeurs, notre famille, notre confiance. Nous payons chaque jour sa monstruosité. Ma sœur a été poussée à la démission, ma mère s'est faites isolée, nous avons tous beaucoup perdu à cause de lui. Cependant, ni moi, ni ma sœur, ni ma mère ne sommes Phileas Fawley.

Tu décroises les jambes, pars en quête du gorgée de thé avant de reprendre.

— Je tiens, car je ne veux pas laisser à mon père la satisfaction de nous avoir détruits. Nous sommes forts, nous sommes capables d'exister et de réussir sans lui. Je tiens, car je refuse de laisser gagner un être aussi abject que mon géniteur.

Tu ponctues ta confession d'un sourire, reposes ta tasse.

— Notre situation tend à s'améliorer, mais elle reste toujours fragile et complexe. Je m'efforce de reconstruire petit à petit. Ma sœur a pu ouvrir son salon de thé... Nous essayons de poursuivre notre route

C'est ça, c'est honorable. Un terme juste que tu espères voir figurer dans ses notes. Tu tapotes sagement l'accoudoir du bout du doigt, hoches la tête à son analyse. C'est très bien résumé.

— Vous savez, je pense qu'il faut être réaliste : les familles de sang-pur sont vouées à disparaître.

Tu lui adresses un sourire, comme-ci ce que tu venais de dire n'était pas une bombe en soit.

— Nous faisons partie des meubles, l'acharnement dont on peut faire preuve pour conserver notre statut est en grande partie porté par notre ego. Notre mode de vie est problématique sur de nombreux points, beaucoup d'entre nous en souffre. Cependant, c'est aussi ce que j'ai toujours connu. Si je ne suis pas très attaché à nos traditions, je suis un peu plus attaché à nos valeurs et à cette appartenance à un groupe.

Tu lui offres un sourire presque désolé, comme-ci tu avouais quelque chose de honteux.

— Je ne dirai pas que c'est ma priorité, mais j'aimerais réhabiliter ma famille, il est vrai. Refaire partie du groupe de nouveau, même si mes convictions personnelles me font dire que je ne rentrerais jamais totalement dans le moule. Peut-être même qu'elles me forceront à prendre un nouveau tournant ! Qui sait ?

Et tu espères que Clovis lira tes mots (tu en es sûr). Tu retournes habilement le couteau dans la plaie, espères faire ressurgir l'absurde de son projet de mariage, l'absurde de cette vie qu'il veut s'infliger. Et ça fait de toi un véritable hypocrite, parce qu'une partie de toi peine à imaginer la parentalité dans un cadre autre que celui pour lequel on t'a formé. Un mariage, une femme, des enfants. Sur ses trois facteurs, seul un t'enchante vraiment. Tu te fais un peu plus enthousiaste quand tu déclares.

— Mais oui, je souhaite ouvrir nos perspectives. Notre génération s'ouvre un peu plus au monde exétieur mais tout cela est encore bien trop timide à mon goût. Les barrières entre "castes" n'ont plus lieu d'être. J'aimerais montrer au monde que ce n'est pas notre sang qui nous définit mais bel et bien nos actes. Je ne veux pas que ma famille réussisse parce qu'elle a un héritage particulier, non, je veux qu'elle réussisse parce qu'elle le mérité, parce qu'elle s'en est donné les moyens. Un sang-pur ne devrait pas être sous-secrétaire d'état de par son nom ou son sang mais de par ses capacités réelles, par exemple.

Tu prends une gorgée de thé.

— J'ai quelques projets, oui ! Je déplore le manque de soutien des sangs-purs à l'égard de certaines causes. L'égalité entre toutes et tous, par exemple. J'essaye de mettre à contribution mes ressources en ce sens. Je travaille activement avec plusieurs organismes pour mettre en place des bourses. J'aimerais aussi travailler plus à l'intégration des cracmols, né-moldu et hybride et lutter contre leur discrimination. J'ai pu commencer avec mon propre club, le Dissemdium, mais j'aimerais aller plus loin. Je songe à me rapprocher des orphelinats et des différents organismes d'aide à l'enfance pour voir ce qui serait possible et urgent à mettre en place.

Un rire sonore, presque doux qui s'échappe de tes lèvres. On dirait que tu parles à un vieil ami. Ton regard dérive un peu, songeur. Il ne fait que suggérer ce que tu sais déjà. Cependant, la perche tendue est trop belle pour ne pas être saisie.

— Je suis bien de votre avis ! La communauté magique regorge de nombreuses personnes de talent et la majorité d'entre elles ne sont pas sangs-purs.

Tu sembles froncer les sourcils, comme-ci tu t'apprêtais à te confier. La transparence, tu sais que c'est quelque chose d'apprécier, tu sais que c'est ce qui fera la différence entre toi et eux, noyés dans leur secret. Oh, ça ne veut pas dire que tu n'iras pas mentir. Mais tu peux choisir de dévoiler une partie de la vérité.

— Pour être tout à fait honnête, je pense que c'est aussi une question d'ego et de fierté. Nombre de mes amis font parties de cette communauté et certains me regarde aujourd'hui comme si j'étais le pire des criminels. Un sourire coupable. Je suis assez vexé que ces gens avec qui j'ai grandi me méprisent du jour au lendemain. Alors j'ai envie de regagner mes lettres de noblesses, juste pour pouvoir leur faire comprendre ce qu'on ressent quand on vous regarde de cette façon. Peut-être qu'une part de moi à encore trop de mal à couper le cordon, aussi.

Tu prends ton thé, souffles du nez avant de boire une gorgée.

— J'imagine qu'être adulte n'empêche pas l'immaturité.

Mais c'est un défaut qui va te rendre plus humain, aussi.

— Mais en effet, vous avez raison. Je ne souhaite pas dépendre des sangs-purs, plus comme avant du moins. Je suis persuadé que nous sommes à un tournant de notre histoire et je ne compte pas rater le coche. Je ne sais pas si je suis prêt à totalement renier mes origines, mais je suis plus que prêt à ouvrir mes portes et à faire tomber certaines barrières.

Ton sourire s’étire, tu te tiens un peu plus droit, reprends.

— C'est un défaut, je suis assez touche à tout. Me limiter à un champ d'action me frustre alors qu'il y a tant à expérimenter. Je sais manier les finances et la finance est une arme polyvalente alors pourquoi me restreindre ? Ce ne serait pas très intelligent, surtout quand cette arme peut profiter à beaucoup.

Viennent ensuite les questions sur ton club. Tu te gonfles un peu de fierté. Le Dissemdium, ta fierté.

— J'ai monté cette affaire peu de temps après mon diplôme. À l'époque, je voulais choquer mes parents. Un sang-pur qui investit dans le milieu de la nuit, ça avait de quoi être mal vu ! Je voulais me prouver aussi à moi-même que j'étais capable. On retrouve l'ego, encore une fois. J'ai eu plusieurs années pour parfaire son fonctionnement et fidéliser sa clientèle. Les attentats n'ont pas tant affecté la fréquentation du Dissemdium, mon établissement offre un service d'excellence et c'est tout ce que mes clients demandes.

Tu fouilles dans la poche de ta veste, lui tend une petite carte du club.

— Le principe est simple, c'est un endroit discret, une zone libre où chacun laisse ce qu'il est et ses problèmes sur le seuil de la porte. Qu'ils soient nobles ou non, hybrides, cracmols, né-moldu, le Dissemdium est un endroit où l'on vient pour respirer et oublier. Les sorciers sont sous tensions, je ne fais que leur proposer une simple bulle d'oxygène.

Tu lâches un rire, complice.

— Mais peut-être que d'autres bulle d'oxygènes similaires pourraient naître aux royaumes unis.

Sa dernière question te surprend, cependant. Tu écarquilles légèrement les yeux, le sujet nettement plus sensibles que ton club ou tes opinions politiques. Le résultat d'une frustration présente depuis trop longtemps. Le conflit entre le devoir et l'envie, entre le besoin d'être un père meilleur et la terreur de te révéler pire et médiocre.

— Je n'adopterai pas un enfant pour prouver quoi que ce soit à qui que ce soit.

C'est répondu un peu brusquement, tu te racles la gorge, soudain plus gêné.

— J'ai toujours voulu être père. Malheureusement, le mariage est une question sensible pour moi dans le sens où je ne le conçois pas sans sentiment. Vous n'êtes pas sans savoir que les mariages sans amours sont une norme chez nous.

Tu fixes ta tasse à moitié vide.

— On nous a apprit que concevoir était un devoir et que la seule conception légitime d'exister était celle avec une femme de même statut. Horrible, n'est-ce pas ? Vous n'avez pas idée du nombre de mariages et de parentalités forcés qui ponctue notre communauté, même encore aujourd'hui.

Tu soupires, relève le regard pour le braquer dans le sien/Malgré tout, il se fait plus fuyant à mesure que tu parles.

— Je pourrais adopter et donner mon nom. Mais cet enfant ne sera pas reconnu par les miens. Il ne sera pas sang-pur. Vous trouvez peut-être ça stupide, mais c'est un vrai dilemme pour moi. J'ai foi en la force de mon nom et de mon héritage, je sais que je léguerai à mes enfants, quel qu’ils soient, toutes les ressources nécessaires pour vivre la vie épanouie que je n'aurai jamais... Mais je ne peux pas m'empêcher d'avoir peur que ce ne soit pas suffisant. Le statut... On nous apprit à craindre et a adorer notre statut.

Tu fixes le sol un moment, sembles réfléchir.

— Je ne veux pas adopter un enfant pour montrer une quelconque bonne foi. Je veux adopter un enfant parce que je l'aime, parce que c'est évident. Si un jour, j'ai la chance de faire la rencontre d'une telle évidence, je l'adopterais, sans aucun doute.

Tu prends le temps de la réflexion, tu n'as jamais vraiment réfléchi à ce qu'il se serait passé si rien de tout cela n'était arrivé. Pas d'un point de vue familial ou professionnel, du moins. Il est simple de rêver de l'impossible, il est revanche douloureux de rêver le réel. Tu fronces les sourcils une seconde avant de d’éclairer.

— Oui, je pense que oui.

Tu tapotes l'accoudoir, songeur.

— Le Dissemdium a été pour moi la preuve que je pouvais exister en tant que personne, pas en tant que fils de. C'est l'accomplissement de mon travail personnel, de mes propres ressources. Alors je l'aurai gardé malgré tout. Il est important de garder une preuve concrète de nos réussites, sans quoi on finit par les oublier.

Tu lui offres un sourire, il aborde le sujet qui fâche. Et tu sais qu'ils vont tous la lire, cette interview. Qu'il va la lire. Tu hésites une seconde, conscient de ce que tes mots vont impliquer.

— J'ai connu ce sentiment, oui.

Je le connais encore.

— Tout dépend de qui vous tombez amoureux. Vos parents seront enchantés si la personne est de même statut et de sexe opposé, nettement moins pour le reste. Je ne peux parler que de mon cas, bien entendu.

Même si tu peux aisément le généraliser.

— Mais pour répondre à votre question, on ne les gère pas. On les étouffe quand ils ne sont pas appropriés. On les étouffe jusqu'à les faire mourir. Ou, à défaut, on les tait.

Tu souris, ah, oui, tu vois où il veut en venir. Les histoires de cœurs font parler autant (voir plus) que les histoires d'argent ou de famille. Tu pèses le pour et le contre. Si tu lui en donnes plus, il voudra des noms ou jettera de lui-même le doute sur plusieurs candidat(e)s possibles. Cela risquerait de mettre dans l'embarras ton entourage. Evonice, Iphigenie avec ses projets de fiançailles, lui. Quoi que lui, ce ne serait pas si grave que ça. Mais tu ne vas pas t'abaisser à cela. Non, le bénéfice risque est encore trop peu intéressant.

— Votre question est "êtes vous amoureux de quelqu'un" n'est-ce pas ?

Tu le dévisages une seconde, toujours souriant.

— Il y a bien une réponse à cette question mais je vais la garder pour moi. Peut-être le sujet d'une prochaine interview ?

Tu lâches un rire, tritures ta tasse, si tu peux te garantir une nouvelle dose de visibilités tu le feras. Cependant, tu n'as pas fini déconstruire le portait de votre communauté.

— Mais sachez que nous ne sommes pas si différents de vous. Notre communauté est stricte, étriquée via des montagnes de conventions et de règles qui n'ont plus lieu d'être, mais que nous sommes forcées de respecter par tradition. Cependant, comme vous tous nous aimons, pleurons, rions. Nous avons des rêves, qui vont parfois à l'encontre de ceux de nos parents et, tout comme vous, nous devons parfois faire des choix difficiles entre ce qu'on attend de nous et ce qu'on veut, nous, en tant que personne. Le mot sacrifice convient très bien à notre mode de vie.

Tu le toises une seconde. Toujours souriant.

— Mais, monsieur Davies, vous pouvez noter que rencontrer des gens comme vous me donne le courage de remettre en question ce même mode de vie. J'espère pouvoir, dans mon parcours, en rencontrer bien d'autres. Et alors, peut-être pourrions nous commencer à évoluer sur la voie du changement.

C'est peut-être bien la première fois qu'on te dit inspirant. Tu dois l'avouer, le compliment n'est pas pour te déplaire. Tu te tasses sur ton siège, appréciateur, oui, c'est même tout simplement plaisant. Tu te targues pourtant d'être quelqu'un de relativement modeste, il faut croire que la modestie n'empêche d'aimer voir son ego flatté.

— Je suis ravi de voir que cette rencontre vous a été aussi profitable à vous qu'à moi.

Tu lui offres un sourire charmant, viens te lever ton siège. Tu as eu ce que tu voulais, ta parole transmise, la certitude que celui qui la récolte t'apprécie et la promesse d'une visibilité garantie aussi souvent que tu en auras le besoin. C'est parfait. Tu songes à demander à Iphigenie de se prêter à ce petit jeu. Tu la savais plus populaire que toi à Poudlard, la mettre en lumière ne peut que valoir le coup. Tu écartes ta mère des options, mieux valait l'inclure au minimum.

— Vous savez où me trouver pour vos "prochaines fois".

Tu passes devant lui, ouvres le bras pour t'inviter à te suivre. Tu vas le raccompagner, bien évidemment. Tu lui ouvres la porte de la véranda, veille à marcher à ses côtés pour instaurer ce rapport égal qui garantit sa confiance. Oh, tu penses que tu apprécies ce journaliste. C'est un allié de choix. Un allié de poids. Tu notes dans un coin de ton crâne qu'il faut que tu veilles à rester dans ses petits papiers tout en lui donnant l'envie de rester dans les tiens. Arrivé à la porte d'entrée, tu lui ouvres, le laisses passer devant.

— Ce fut un plaisir monsieur Davies, j'ai hâte de lire votre article !

Et tous ceux qui suivront.