All up in the club just to live it up I'm just a random girl with gentle manners In my dreams I rock and I rule the W o n d e r l a n d (ft. hermès / musique)

Sous les lumières et les artifices, la musique et les cris, elle se souvient. Elle se souvient d'une énième personne - elle en a vu défiler tant depuis son premier jour - cherchant à savoir son nom, son numéro, sans comprendre qu'il aurait mieux fait de finir son verre bien trop cher pour ses moyens, au vue de sa tenue, et de partir. Elle fait attention, pourtant. Du moins au travail, elle ne cherche que calme et tranquillité, en dehors de toute l'agitation toujours présente sous les projecteurs au rythme des basses. Peut-être avait-elle la patience particulièrement fine, ce jour-là. Ca ne serait pas rare. Alors, quand elle en était venue à agripper son col quitte à délaisser le cocktail qu'elle était en train de préparer, elle fut presque contente de te voir arriver.

Pour une fois.

Ta carrure familière, tes cheveux bruns qu'elle avait appris à reconnaître malgré elle (elle qui fait si peu attention aux autres), ta main sur l'épaule de ce gars insupportable et ta voix calme - éclipsant de sa vue cette tare qu'elle se serait bien vite fait d'écraser. Pour une fois, peut-être que l'éclat infime d'un brin de reconnaissance était venu se nicher dans son estomac ; elle n'avait pas envie de perdre son job. Mais restons assurés, elle fit bien vite d'en chasser l'idée. Retournant à ses préparations et commandes, elle n'avait pas pensé à toi du reste de la soirée. Un accident comme un autre dans les nuits que sont vos journées.

Et ce soir encore, elle avait admiré les lumières qui brillaient dans le noir, les silhouettes qui s'élancent et s'enlacent sous le capharnaüm de la musique du club. Elle avait servit moulte clients, en écoutant certains s'épancher dans leur tirade pleine d'ébriété, d'autres cherchant à égayer sa soirée sans qu'elle ne le leur demande et évidemment les inévitables qui ne cherchent à l'impressionner. Elle ne sait pas si c'est les cheveux bleus qui les attirent comme un papillon à la lumière, mais elle trouvait ça toujours presque drôle. A quel point ils (ou elles, ne discriminons donc pas) commençaient plein d'assurance avant de rapidement finir désespérés devant son manque évident d'intérêt. Au moins, la majorité avait la décence de comprendre qu'il était plus sage d'abandonner. Bien. Ca lui évitait de devoir les enterrer.

La foule avait quitté la piste et il ne restait désormais plus que les braves travaillant dans l'enceinte du club. A son bar, son territoire, elle s'occupait de laver la petite montagne de verres qu'il lui restait, preuve du succès de la soirée. Si le bruit du club ne la gênait pas, elle appréciait tout particulièrement ce moment de calme après la tempête où elle pouvait être en tête-à-tête avec ses bouteilles et son évier. Un moment où elle peut laisser ses mains aller à des mouvements répétitifs et familiers sans trop penser. Ses cheveux sont noués dans une queue de cheval, habitude pour ne pas les avoir dans le passage lorsqu'elle fait ses commandes. Même s'ils deviennent toujours plus longs et que ça ne les empêchent pas de couler dans le creux de ses reins. La seule chose qui brise le silence de sa bulle est le cliquetis régulier de ses boucles d'oreilles à chaque mouvement qu'elle s'autorise. Elle pensait que ça resterait le cas jusqu'à là fin de son travail, mais des bruits de pas qui se rapprochent l'interpellent et elle te voit.

Encore une fois.

A venir à son bar quand plus personne n'est là, quand il n'y a plus d'urgence à gérer et comme à son habitude, dans sa joie cosmique de te voir - disons simplement que contrairement à beaucoup d'autres, elle ne te déteste peut-être pas entièrement - elle brise le silence qu'est sa marque de fabrique dans ces murs peu saints.

Sale gueule. Plus que d'habitude.

Elle coupe l'eau, attrape un torchon et commence à sécher machinalement ses verres. Elle ne les laissera pas tranquille tant qu'ils ne brilleront pas. Elle observe tes traits, le jugement de sa phrase se continuant dans son regard. Vous n'êtes pas exactement connus pour vos échanges d'affection. Pourtant, contrairement à l'accoutûmer, elle finit par demander.

Dure soirée ?

Malgré le ton neutre et désintéressé de sa voix, la question est là. Comme quoi, au pays des merveilles les miracles finissent bien par arriver.

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C’est une partie de va-et-vient qu’elle connaît très bien qui commence. Tu soupires et tu lances une pique - comme toujours. Ca te fait sourire. Elle aussi, un peu. Même si c’est pas aussi beau que toi. Un peu trop railleur pour que ça soit appréciable. Dès qu’elle se met à exister, l’image de la jolie poupée ne peut que s’effondrer. C’est pas pour rien qu’elle se tait. Elle a des clients à servir, au lieu de les effrayer.

Je parle seulement pas aux abrutis.

Et elle ne peut s’empêcher d’ajouter.

Mais faut croire que je fais des exceptions. J'te parle, après tout.

Rien de venimeux, juste le plaisir simple de pouvoir sortir un brin de sarcasme sanglant. C’est comme ça, entre vous. Rien de doux et d’aimant, parfois un peu violent. Mais toujours (ou presque) en bonne amitié. Aussi tordu cela soit-il.

Tu confirmes ses soupçons - ta soirée a été à chier. Ca arrive. Elle connaît. Un peu trop bien, même. Et elle a le meilleur des remèdes, juste pour toi. Quand tu lui demandes ce qu’elle a de plus fort, elle n’hésite pas une seconde à se retourner vers ses boissons. C’est habituel, mais elle essaye toujours de changer un peu les choses qu’elle te sert. Déjà parce que boire toujours la même chose est horriblement chiant, mais aussi parce que préparer toujours la même chose est aussi affreusement ennuyant. Et elle ne vit pas pour s’ennuyer.

Mais avec plaisir.

Et sans réflexion, elle se saisit d’un verre particulier qui n’est pas sorti si souvent, à son plus grand dam. Elle le pose sur le comptoir et attrape une bouteille de Pernod qui, une fois ouverte, la ravie de son odeur si particulière. Un sucre et une cuillère un peu étrange et elle s’attèle à la tâche minutieuse que de préparer un spiritueux. Elle sort l’eau la plus fraiche qu’elle a et, goutte à goutte, elle laisse le sucre mouillé fondre dans l’absinthe avant de diluer jusqu’au ratio voulu. Elle ferme la bouteille d’eau, mélange avec la cuillère qu’elle retire et sert ton verre… Avant de se faire le même. Elle profite, peut-être. Après tout, l’absinthe est sa boisson préférée. Pas de mal à partager. Une fois chose faite, elle se hausse sur un tabouret pour se mettre en face de toi, prenant une gorgée de sa boisson.

Santé. A nos sales gueules.

Faut avouer qu’avec le gars qui l’a saoulée tout à l’heure, elle avait pris dix ans. Heureusement qu’elle a évité la baston. Elle n’a pas envie de se faire reprendre par Jasper… Même si elle sait que ça sera probablement inévitable, un jour.

T'as vraiment l'air claqué.

Et elle doute que ça soit un simple client chiant à gérer qui puisse faire cet effet.

C'est pas que la soirée qui est dure, hein. Qu'est-ce qui peut bien te tourmenter ?

Pas que vous soyez confidants. Vraiment. Mais parfois, se plaindre, même en surface, ça fait un peu de bien. Et elle a l’habitude de passer ses soirées à écouter. Alors elle peut bien faire une heure supplémentaire. Surtout si elle a de l’absinthe à siroter.

T'as enfin dit la connerie de trop à la mauvaise personne et t'as la mafia qui veut te flinguer ?

Improbable, mais pas impossible. Bien que ça ne soit qu’une boutade. Elle t’observe, en attendant. Toi et tes traits fatigués. Peut-être qu’il te faudra plus qu’une absinthe pour passer la soirée.

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Le bon sens.
Si tu savais à quel point elle en est dénuée. Non, elle ne vit qu’au grès du vent, loin de toute cette raison que prêchent les grands. Elle suit ses pulsions et ses instincts - toujours, éternellement enfant. Le sarcasme revient entre vous et l’amuse toujours autant malgré son manque flagrant d’émotion.

Circonspect, tu doutes de sa sincérité. A raison.
Cain ne s’inquiète jamais. Ton existence lui passe au dessus de la tête, pour tout avouer. Tu pourrais crever dans un ravin demain qu’elle en viendrait à peine à soupirer, et ce malgré toutes les discussions que vous pouvez partager. Elle se doute que tu le sais - alors ta questions n’a pas besoin de réponse. Un bref mouvement de tête, les yeux qui se lèvent au ciel. C’est tout ce qui est mérité. Elle croise ses jambes - se doutant que tu ne partirais pas dans de grandes confessions.

Elle, fille d’un parrain.
Ca lui arrache un rictus, toujours aussi peu doux et affectueux. Oh, non. Elle s’autorise à garder son verre en main - pointe son doigt vers toi. Et si son toux est doux et son visage est poupon, malgré une pointe d’amusement dans ses yeux, c’est une blague qui déguise ses aveux.

Tu ferais mieux de me craindre moi, plutôt que mon père. Même s’il était parrain.

Elle lui ressemble tant, si tu savais.
Mais elle a appris à haïr et à cogner plus fort que lui, avec les années.
Et puis tu parles de bonne action et ça lui fait hausser un sourcil, vaguement. Une main soutient son visage alors qu’elle t’observe, reposant son verre l’espace d’une seconde simplement pour venir poser le même doigt qui te pointait entre tes sourcils. Délicate, loin de toute brusquerie, une familiarité rare - elle ne touche presque personne, ce n’est pas un secret. Il n’y a que ceux qui finissent dans son lit… Quand ils ne sont pas attachés. Mais ça, c’est une information qu’elle n’a pas besoin de partager.

Si tu continues à te faire du mouron tu vas ruiner ta belle gueule, attention.

Sans se cacher que, oui, elle trouve tes traits attirants.
Après tout, pourquoi s’en cacher ? Grand, baraqué, des jolis traits ; il n’y a aucun mal à admirer un semblant de beauté. Elle ne se cache jamais de laisser ses désirs parler.
(Sûrement qu’elle le ferait, si elle savait ce que t’étais. Que tu perdrais tout ce qui lui plaît.)
Elle reprend son verre, savoure une gorgée.
Remet derrière son oreille une mèche, son visage chérubin qui observe le tient.

Tu vas t’attirer des problèmes, un jour.

T’en as déjà.
Mais elle ne peut pas vraiment le deviner.
Au fond, on en a tous des problèmes, pas vrai ?
Alors elle se contente de tout ce qu’elle peut offrir - un rictus, toujours. Et faire souffrir.

Si un jour tu te fais laminer comme il se doit, sonne moi. Peut-être que dans ma grande bonté je volerai à ton secours.

Enfin.
Seulement si elle a quelque chose à y gagner.

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Tu as confiance en toi - et c'est bien. Elle préfère ça. Il faut se savoir conscient de tes atouts. Elle aussi sait parfaitement la valeur de sa beauté et les attraits de son intelligence qu'elle se cache bien de porter. Sûrement que tu ne t'en doutes pas ; les heures de lecture qu'elle passe dans le silence de sa chambre, pieds qui pendent dans le vide et yeux collés à chaque mot qui s'écrit sur le papier. Elle cache bien sa nature studieuse et littéraire. Peu sont au courant. Peut-être deux, seulement.
L'un parce qu'elle a été forcée de grandir à ses côtés.
L'autre parce qu'elle a décidé de le lui confier.

Ton sourire narquois assure tes positions.
Elle trouverait ça presque mignon. Cet humour d'adolescent qu'elle se prête à partager, parfois. Puérils - vous l'êtes, à n'en point douter. Tant dans les ardeurs qui vous prennent, jusqu'à sérieusement s'insulter, que dans des blagues de bas calibre qui vous font quand même bien marrer. Et elle ne partage pas ça avec beaucoup de monde, tu sais ? Du sarcasme, elle en fait. Mais souvent il se veut agressif et méchant ; savoir que les mots peuvent sortir sans que ça ne s'envenime pour autant lui fait grand bien.

Elle ferait beaucoup de choses.
Si elle en est loin aujourd'hui, elle a un jour rêvé d'être un héros. De voler au secours de quiconque se ferait faire la peau. De rendre le monde un peu plus beau.
(Ce que c'était stupide.)
Il ne peut y avoir de héros dans ce monde trop cupide. Alors comme tu t'en doutes, son sauvetage aura un prix. Elle avait jeté l'information comme ça, sans trop y penser. Une blague à demi-sérieux que vous auriez vite fait d'oublier.

Mais tu demandes une estimation.
Ah. Hmm. C'est qu'elle a de l'imagination.
Alors elle fait mine de dévier ses yeux sur le côté, de se perdre en pensées, lèvres dans sa boisson. Devrait-elle être sérieuse ou bien mentir ? T'agripper ou te faire fuir ? Les propositions ne manquent pas, elles tournent et s'agitent dans sa tête. Quelque chose, en particulier, lui semble bien à proposer. Sa réflexion, au final, n'aura durée que quelques brèves secondes. Elle repose son verre.

Laisse sa main monter vers ta gorge.
C'est ton col qu'elle agrippe, pour t'attirer vers elle.
Elle-même se redresse légèrement sur son tabouret, glissant son visage à côté du tient. Et c'est une voix plus douce que tu ne l'as jamais entendue qui vient s'échouer au creux de ton oreille - imprévisible et immuable. Un indécent aperçu de ce que tu pourrais savourer si tu te laissais avoir par le diable.

Toi.

Un simple petit mot qui en dit déjà trop.
C'est délicatement qu'elle relâche ton col, la pointe de ses doigts s'égarant l'espace d'une seconde sous ton menton quand elle recule sa tête pour croiser ton regard. Le sourire goguenard. Vous n'aviez pas même commencé à débattre qu'elle savait déjà avoir gagné. Ce n'était pas un combat ou une négociation, une simple étiquette en guise de constatation.

Elle s'éloigne, pourtant.
Descend de son tabouret comme si tu n'avais pas bien plus d'intérêt - ce n'est pas de la timidité, mais bien un ennui feinté - alors qu'elle te fait dos. Croise légèrement ses bras en admirant les bouteilles, pensant au prochain verre qu'elle se laisserait savourer sans la permission du protocole. Elle aime bien vos petits secrets. Oh. Elle a une idée.

On a reçu un nouveau whiskey, tu veux l'essayer ?

Sans même t'accorder une oeillade.
Pensant à toi malgré tout, puisqu'elle vient de te le proposer.
(Comme si elle n'avait jamais avoué que toi aussi,
Elle voudrait bien te consommer.)