la soirée battait son plein. rien de mieux que les mondanités vaines et un défilé de costumes pour qu'envy se sente à sa place. elle avait fait le tour de la salle, prenant le soin de t'ignorer lorsqu'elle t'avait aperçue, au profit de ses amies influenceuses et de leurs accessoires de la soirée, au profit d'azur, de son cavalier et de vieilles connaissances. le milieu faisait que malgré tout, souvent beaucoup étaient occupés. voyageant aux quatre coins du monde pour certains évènements, préparant leurs prochaines collaborations, passant des soirées entières à se complaire dans le faste de leurs petites vies, il n'était pas facile de toujours voir tout le monde.

mais après tout, il faut savoir prendre le temps. aussi, lorsque bering finit par lui dire qu'il va aller voir bertram, un petit moment après avoir croisé ce dernier au buffet, elle hoche la tête. d'abord décidée à aller auprès du buffet pour se resservir du champagne, elle finit par, en remarquant que tu t'éloignes de la foule, te suivre sans réfléchir. qui sait où tu pourrais aller si elle te laissait t'éloigner un peu trop, après tout ? elle te suit avec un peu de distance, se fait discrète pour échapper à la vision des gardes et n'hausse les épaules que lorsque tu la remarques.

alors, elle ne peut retenir un rire fasse à tes questions et, se targuant d'un petit clin d'oeil, se rapproche d'un pas rapide pour parler directement dans ton oreille.

vous n'avez pas entendu mademoiselle ? il semblerait que les étages soient interdits d'accès... je me demande si je devrais vous dénoncer.

elle sourit et t'embrasse rapidement sur la joue avant de s'accouder à la rambarde. sous le charme de la nuit s'agite un véritable essaim de fêtards. dans la foule il y a ci et là des visages familiers autant que de silhouettes étrangères. elle ne saurait pas dans quelle catégorie te ranger, evonice, tant outrée que curieuse de constater ton tempérament changeant. elle aime observer ce qui se cache sous la couche de glace et pourtant elle sait que tout n'est pas une façade dans ton allure. ça l'énerve. ça l'obsède. elle n'a jamais fait preuve du genre de patience qu'il lui faudrait pour te percer à jour.

je n'ai pas le droit de me balader ? enfin, evonice, on se connait toutes les deux, tu sais bien que ma présence à tes côtés ce soir à tout de fortuit.

elle plie et presse sa jambe contre la rambarde pour tirer son portable à elle et, s'appuyant légèrement contre toi, prend une photo. un large sourire sur son visage et seulement un fragment du tien apparaissent sur l'objectif mais elle est satisfaite. elle se retient de te taquiner, de te demander si elle devrait poster cette photo dans sa story, combat l'envie de te demander si elle peut te taguer. à la place elle ne fait que se tourner à nouveau vers toi, dans une proximité similaire à celle dont elle a fait preuve un peu plus tôt, pour se permettre de chuchoter contre tes lèvres.

et toi, tu fais quoi ici ? tu t'es déjà lassée du petit chien qui te servait de cavalier ?

tu te refroidis et elle te regarde à nouveau, détaillant rapidement ton allure de haut en bas puis de bas en haut, avant de se détourner rapidement. elle oublie si vite, lorsqu'elle joue, tout ce qui fait de toi ce que tu es toi. evonice en chair et en os, cruellement humaine même si l'admettre parfois la peine. ça serait plus facile si tu ne l'étais pas et comme ça, elle pourrait projeter sur toi tout ce qu'elle veut. une figure de fer à décoincer. une amourette pour s'amuser. une méchante de conte de fée. distraitement, elle range son portable dans la poche de son holster et à la place, elle en sort son briquet. elle l'allume et fixe la flamme quelques secondes.

le deuil est quelque chose qu'elle ne connaît pas vraiment. elle l'a surtout connu quand elle était enfant et elle se rappelle avant tout des pleurs de ses parents. elle avait perdu une soeur mais elle ne l'avait jamais connue alors est-ce que ça comptait vraiment ? face à l'inconnu envy ne peut que se renfrogner, dans cette fierté qu'on a tendance à lui connaître. ne jamais admettre avoir tort, ni la possibilité d'une telle éventualité. s'accrocher obstinément à l'envie de bien faire et prier pour que les intentions comblent tout le reste, quand elle se nimbe de maladresse.

je peux imaginer oui... enfin...

le ton de sa voix est un peu plus froid, lui aussi, alors qu'elle le voulait plus grave, d'avantage de circonstance. elle le regrette immédiatement et elle referme son briquet pour te priver de leur incandescence à tous les deux, noyer l'air mécontent d'elle-même dans la pénombre. dans cette salle de bal et en dépit de ce que l'on pourrait penser en voyant la nuit factice au dessus de vous, il fait beaucoup trop chaud à son goût. ses yeux se perdent à nouveau sur ton visage et elle continue de jouer avec le briquet, mécaniquement, pour occuper ses mains à quelque chose. ses lèvres se pincent.

je suis désolée. j'imagine même pas à quel point ça doit être dur d'être là sans eux aujourd'hui.

elle reste interdite un instant, pour laisser le silence planer quelques secondes, avant de se tourner encore un peu plus dans ta direction et d'effleurer ta joue du bout des doigts. sans se risquer à sourire elle caresse ta joue du bout du pouce et fait glisser le reste de ses doigts dans ton cou. ses pieds la font se balancer un peu d'avant en arrière et elle ne parvient à s'arrêter que quelques secondes après, lorsqu'elle reprend la parole et que sa main s'éloigne de toi.

je ferai... n'importe quoi pour te changer les idées. à ton service, tu te souviens ? demande juste. ça restera entre nous.