Tu avais encore du mal à te faire à ton nouvel.. État. Cette malédiction (puisqu'elle en porte tous les stigmates), n'était certainement pas comparable à celle de Leslie en termes de handicap, mais tu vivais mal le manque de réflexe et cette façon de réapprendre à vivre sans une notion aussi élémentaire que la chaleur. Le plus dur, était certainement de serrer Leslie dans tes bras sans t'en sentir réchauffé pour autant. Le plus pénible, était certainement de te brûler la langue et les doigts car tu ne t'étais pas rendu compte que le café était brûlant. Ces derniers jours, tu as fait de ton mieux pour faire comme-ci de rien n'était mais tu sais et sens que le poids de la culpabilité pèse sur la conscience de Leslie. En te couchant contre lui, hier soir, tu t'étais promis d'avoir une discussion sérieuse avec lui sur le sujet. Mais quand tu t'étais levé, ce matin, le lit était vide.

Dans un premier temps, tu ne t'en étais pas vraiment préoccupé. Peut-être avait-il regagné sa chambre, tu sais avoir quelques fois le sommeil agité. Peut-être était-il descendu au bain ou prendre son petit-déjeuner le premier. Tu t'étais habillé pour rejoindre la grande salle. Mais aucune trace de médicomage nulle part. C'est quand en demandant à l’accueil en anglais on t'avait informé que Leslie avait badgé une sortie de l'hôtel au beau milieu de la nuit que tu t'étais vraiment inquiété. Ton premier réflexe a été de l'appeler une bonne vingtaine de fois à la suite dans l'espoir qu'il décroche sans succès. Tu avais pris ton manteau et avais passé la journée a écumé Tokyo, les lieux que vous aviez visités ou dont il avait parlé pour essayer de le retrouver. Tu étais furieux autant que tu étais terrifié. Tu n'as pas pensé une seule seconde à l'île, pourtant l'une des options les plus évidentes. Tu as fini par rejoindre l'hôtel. Ne sachant vers qui te tourner tu avais appelé ton jumeau, paniqué.

— Sa valise est encore là, je ne sais pas où il a pu aller j'ai passé ma journée à le chercher en ville, rien ! S'il lui est arrivé malheur je-

C'est à ce moment-là que tu entends la porte de votre chambre s'ouvrir. Tu te tournes, manque de lâcher ton pinneaple.

— LESLIE ! Je- Je t'appelle plus tard.

Tu jettes ton pinneaple sur le lit avant de te précipiter sur lui, le regard orageux.

— SOMBRE CRÉTIN DÉGÉNÉRÉ AVEZ-VOUS LA MOINDRE IDÉE DE LA PEUR QUE J-Qu'est-ce que... Votre bras !

Ton regard s'est figé sur le bandage qui remonte, tu lui prends le bras, ton regard s'écarquille lorsque du découvre le rouge au niveau de son doigt.

— Seigneur ! Qu'est-ce que- Il faut soigner ça tout de suite.

Tu le conduis et le force à s'asseoir. Tu attrapes son visage, le force à se débarrasser de son manteau et l’ausculte à la recherche de la moindre blessure. C'est là que tu percutes.

— Vous... Vous y êtes retourné. Leslie !

Tu n'en crois pas tes yeux. Qu'il soit retourné là-bas, seul, sans te prévenir ! Tu secoues la tête, déçu avant de te précipiter dans tes bagages pour en sortir en nécessaire de soin. Tu es un homme prudent, trop, mais tu ne regretteras jamais d'avoir embarqué ce matériel avec toi. Tu t'agenouilles pour retirer le bandage et ausculté la plaie. Tu y découvres un doigt sectionné.

— ... Comment...

Tu souffles avant de lever les yeux sur lui.

— Expliquez-moi.

Tu as l'estomac encore retourné de toute l’inquiétude que tu as ressenti. Petit à petit, le besoin de contrôle te force à retrouver un calme relatif et à te faire procédurier. C'est alors que tu remarques la saleté, que tu captes les odeurs de boues et de transpiration. Enfin, c'est là que tu remarques l'absence des marques sur ses joues. Tu entrouvres les lèvres, l’interroges de regard en silence. C'est terminé, qu'il te répond.

Tu baisses les yeux sur la plaie. C'est terminé, grâce à ça ? Tu ne réagit pas les premiers instant. Trop occupé à nettoyer la plaie et dispenser des sorts de soins pour aider à la cicatrisation et empêchés l'infection. Enfin, tu finis par glisser tes doigts dans sa main meurtrie pour la presser doucement.

— Ce sera sans regrets ?

Tu baisses les yeux sur son doigt, les remontes pour lui faire face. Tu interroges le terne de ses yeux, comme-ci il venait de rentrer de la guerre.

— C'est tout ce qu'il a réussi à vous prendre ?

Ni les nuits paisibles, ni le droit au repos ? Tu finis par soupirer et te pencher en avant pour le prendre dans tes bras. Ton front contre le sien, tes doigts dans ses cheveux à masser doucement son crâne, tu déglutis avant de reprendre.

— Si ça en valait la peine, alors tout est pardonné.

Tu souffles cependant.

— Mais ne partez plus au front sans moi, d'accord ? Je suis sûr d'être devenu cardiaque.

Tu souffles un peu du nez, essayes d'étirer un sourire.

— Je vais faire votre bandage et vous jeter un charme pour que vous puissiez vous doucher sans le mouiller. Ensuite je vais vous faire couler un bain et vous allez tout me raconter.

Tu le défies du regard de ne pas accéder à ta requête. Tu estimes avoir le droit de réclamer des détails après avoir passé une journée entière affolée à courir dans l'une des plus grandes villes du monde.

Tu ne te dérobes pas tout de suite à votre étreinte. Le bain attendra encore quelques minutes. Là, tu as besoin d'ancrer sa présence, de laisser au corps et à l'esprit le temps de se rassurer. Il est rentré. Pas entier, mais débarrassé du plus néfaste. Petit à petit, tu prends conscience de ce que la fin de sa malédiction implique. Leslie va pouvoir te parler. Tu es véritablement heureux pour lui, mais tu restes frileux comme face à tout changement. Votre mode de communication était devenue presque normal au fil des mois.

— Je vais vous faire couler ce bain, venez.

Tu l'aides à se lever et gagnes la salle de bain. Tu tournes les robinets et par réflexes mets ta main sous le jet avant d'être ramené à la réalité.

— Je peux vous demander d'évaluer la température ?

Tu ne précises pas pourquoi et contient ta frustration. Tu fouilles dans les placards pour sortir des sels de bain et autres produits destinés à détendre ses muscles et à rendre les contrecoups de cette journée moins douloureuse. Tu en aurais bien besoin aussi après avoir autant crapahuté mais tu ne fais pas grand cas de ton état. Tu l'aide à se dévêtir en prenant soin de ne pas malmener son bandage. Ne voulant pas trop le materner, tu ponctues cette opération de quelques baisers sur sa peau sali de transpiration. Le bain remplit tu l'invites à s'y glisser et passes dans la chambre pour te tirer une chaise.

— Un changement de carrière qui m’apparaît comme envisageable.

Tu esquisses un sourire.

— Vous feriez un excellent prisonnier, ceci étant dit. Comment est l'eau ?

Tu étires ton dos, grimace. Maintenant que le stress est passé tu sens tes muscles manifester leur désapprobation. Tu considères la baignoire et finis par te lever.

— Faites-moi de la place.

Tu commences à déboutonner ta chemise, tu surprends son regard et esquisse un sourire en coin.

— Au lieu de m'observer comme on observe une pièce de musée, racontez-moi. Comment... Avez-vous su ?

Tu t'enfonces dans l'eau sans pousser le moindre soupir d'aise. Elle est chaude, mais tu la sens tiède. Un peu déçu, tu ne sais pas pourquoi tu continues d'espérer ressentir quelque chose qui t'es visiblement définitivement dérobé. Tu lances à Leslie un sourire maladroit. Tu ne te sens pas légitime à te plaindre de ta situation quand sa malédiction a été bien plus handicapante et lourde à porter. Tu te sens encore moins dans ton bon droit quand il en revenu, de cette malédiction, avec un doigt en moins. Tu profites de la largeur de la baignoire, pour écarter un peu les jambes pour qu'il puisse allonger les siennes. Du bouts des pieds tu caresses ses cuisses.

— Hm, un ami de longue date je présume.

Tu ne lui fais pas l'affront de le cuisiner plus en profondeur. Tu te doutes que cet ami de l'allée des embrumes n'a pas fait preuve d'autant de générosité à titre gratuit. Tu te doutes également que Leslie ne t'ait pas fait d'infidélité, tu lui fais confiance, mais il en reste que ton côté vieux jeu à encore du mal à faire avec son passé disons... Actif.

Néanmoins, ce qu'il t'apprend t'intéresse. Tu te prends le menton entre tes doigts en enrichissant.

— Hm, oui, le dessin-animé avec ses deux frères. Celui qui vous ressemble et celui avec l'armure, c'est cela ?

Tu te souviens lui avait la réflexion qu'Edward lui ressemblait. Aussi petite teigne que lui. Tu sais que ça ne va pas lui plaire, mais tu es incapable de ne pas penser à cette histoire d'échange. Un doigt pour une langue. Tu te demandes ce que tu devrais laisser pour retrouver tes sensations d'antan.

— C'est une théorie intéressante...

Tu lèves les yeux vers lui et surprends son regard.

— Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous inquiéter. C'est juste que...

Tes mains dans l'eau tiède tu fronces les sourcils.

— J'ai peut-être sous-estimé l'impact psychologique d'une telle perte de sensibilité. Mais qu'importe, on se fait à tout.

Quand bien même tu te rattrapes, tu sais avoir merdé. Alors tu t'approches de lui.

— Leslie.

Tu te penches en avant, cueilles ses lèvres avant de lui sourire, son front contre le tien.

— Je suis heureux de pouvoir entendre votre voix.

Un brin provocant, tu lui glisses dans l'espoir de le dérider.

— Il me semble que vous m'aviez promis de me traiter d'imbécile avec plus d'imagination. J'espère ne pas être déçu.

FAITES CHIER !

Tu notes l'insulte dans une grimace. Ce n'est pas fait chier, mais faites chier. Tu soupires et t'appuie un peu plus dans le fond de la baignoire. Tu n'as pas envie et donc tu ne t'excuseras pas de ressentir l'inconfort quant à ta situation. Tu n'y peux rien. Le manque de chaleur te pèse et si tu es prêt à alléger et prendre sur toi, tu n'es en revanche pas prêt à totalement te taire. De toute façon, quelque chose te dit qu'il le verrait.

— Je ne suis pas insensible à ce qu'il se passe mais soyons factuel quelques instants, cette malédiction n'a rien pour m'abattre.

Tu soutiens son regard quelques secondes avant de soupirer.

— Ne vous inquiétez pas, je ne compte pas retourner là-bas et tester votre théorie. C'est un mal objectivement mineur, il y a sûrement pléthore d'autres moyens de s'en débarrasser.

Mais tu vois bien que ça le bouffe. Alors tu t'approches, joues. Et, comme tu t'y étais attendu, il saisit la perche avec autant d'empressement que d'envie.

— Disons que je sais que votre vocabulaire est plus riche que ce que vous n'en dites. Alors ?

Vous êtes proches. Tu souris pour le provoquer alors que vos lèvres se cherchent sans jamais réellement se trouver. Tu le laisses énuméré diverses options, auxquelles tu ricanes.

— SOMBRE crétin dégénéré. Et, allons, je sais que vous avez plus d'imagination que cela. Peut-être avez-vous besoin d'être encouragé ?

Dans l'eau tu glisses ta main à sa hanche. Tu souffles délicieusement du nez en murmurant sur un ton volontairement paternaliste.

— Idiot, c'est mieux.

Mais à sa provocation tu réponds en pressant un peu plus sa hanche.

— Leslie, je vous saurais gré de ne pas me provoquer.

Et ta main glisse entre ses jambes, tu ajoutes sur un ton faussement inquiétant.

— Je n'ai pas pour habitude de ménager mes patients. Et entre votre insolence et votre tendance à vous échapper je pourrai être tenté de sévir.

Tu glisses à son oreille dans un souffle.

— Il se trouve que je suis très doué avec le sortilège d'incarcerem.

Tu redresses la tête et le provoques du regard. Muettement tu le forces à cesser de faire la tête. Muettement tu lui demandes : ai-je l'air de me laisser abattre ? Évidemment que non. Tu es Monday Stuart.

Dieu t'en est témoin, il joue avec ta patience. Ta vertu mise à l'épreuve mais tu as le regret d'être plus pécheur que pieu. Tu n'as jamais été bon pour appliquer les leçons que tu rabâches avec convictions et condescendance à tes cadets. Maître de tout, mais avec Leslie tu as l'infortune de n'être maître de rien, surtout de ta propre frustration. Tu plisses les yeux, l'air de l'invertir de ne pas aller trop loin. Ses cuisses qui t'emprisonnent entre elles. Tu poses tes mains contre ses genoux et averti.

— Leslie vou-

Mais tu n'as jamais le temps de finir ta phrase. Leslie passe une main dans ta nuque et avec une force insoupçonnée te force à fondre sur lui. Tu écarquilles les yeux et te laisses surprendre. Mais, au lieu de rencontrer ses lèvres c'est la peau de son épaule que tu heurtes sous l'eau tiède. Tu t'agites, en soufflant ton nez fait remonter des bulles assassines à la surface. Tu redresses la tête pour le regard l'air véritablement choqué. Ta voix prend une teinte plus rauque.

— Oh quel vil petit bonhomme...

Il plante un baiser sur ta joue, l'air satisfait de s'être joué de toi. S'en ai trop. L'excitation et la frustration se font trop fortes. Tu pousses sur tes jambes et en agrippant sa taille tu vous soulèves de l'eau non sans manquer de tomber dans la baignoire glissante.

— Il me semble être dans l'obligation de refaire votre entière éducation.

Tu passes un pied à l'extérieur de la baignoire alors que vous êtes encore trempé et plein de mousse mais peu t'importe. Tu le jettes sur ton dos et lui claque les fesses avec force en passant l'autre jambe hors de l'eau.

— Âne bâté, balourd, benêt, butor.

Tu vous sort de la salle de bain et le jette sur le lit deux places.

— Je vais vous apprendre à ne pas être désolé, insolent !

Tu fais fi de ses supplications en le jetant sur le lit. Le jeu te prend un peu trop aux tripes. Tu glisses trop facilement vers le déraisonnable comme si la fougue et la passion des premiers temps n'avait pas la force de se passer. Des mois que cet homme a juste à battre des cils pour ébranler jusqu'au tréfonds de ta détermination. La vérité, c'est que vous avez un don certain pour titiller les limites de l'autre. Leslie est aussi mauvais joueur et perdant que toi. Tu souffles du nez avec suffisance quand tu le toises d'en haut, tu poses un genou sur le matelas, mais le voilà qu'il hurle et, l'espace d'un instant, te le regarde scandalisé.

— Mais taisez-vous que diable !

Évidemment rien n'y fais et c'est presque s'il ne hurle pas encore plus fort. Tu claques ta langue contre ton palais et plonges sur lui pour plaquer ta main devant sa bouche dans une grimace qui peine à masquer ton hilarité.

— Vous cherchez tellement la punition que ça en devient indécent, duchess.

Et ton rire s'étrangle quand on tambourine à votre porte. Tu lances un regard paniqué à Leslie et sautes hors du lit pour prendre ta baguette et accio tes vêtements laissés dans la salle de bain. Tu passes ton pantalon à coup de grand geste maladroit et ta chemise que tu boutonnes avec empressement.

— OUI ! OUI ! J'ARRIVE !

Tu jettes un regard paniqué à Leslie.

— Par tous les saints, habillez-vous !

Tu te précipites à la porte et tombes sur un Japonais visiblement très en colère. Tu ne comprends pas un traître mot de ce qu'il baragouine ce qui semble l'énervé encore plus. Il te fixe alors et articule maladroitement des mots-clés en anglais, on croirait entendre Leslie parler. Bruit. Cris.... Meurtre ?

— Oh seigneur... Non ! Non ! Pas de meurtre ! J-Jeu ! Juste un jeu !

Tu te sens te liquéfier sur place et ton estomac se tordre de honte. Le réceptionniste fronce les sourcils, dubitatifs en passant ton regard toi à Leslie. Comment lui expliquer ? Tu n'as pas envie, t'as même pas envie qu'il comprenne. Qu'il est mortifiant d'exposé que tu étais sur le point de... Oh dear lord. Et Leslie qui surenchère.

— Leslie !

C'est sec et assassin. Tu tournes la tête vers lui comme un père qui aboie après son gosse mal élevé. Tu reviens vers le japonais.

— Navré. Pas de problème. Aucun problème ici, d'accord ?

Ton interlocuteur ne se prive pas pour vous juger non sans un certain dégoût. Tu lui adresses un sourire maladroit avant qu'il ne souffle avec condescendance (merde, c'est ta signature !) et ne tourne des talons. Tu refermes la porte et colles ton dos dessus.

— ............ Je vais vous étrangler ou vous arracher un autre doigt, probablement les deux, je n'ai pas encore décidé.

Tu es cramoisi de honte.