C'est à quatre pattes qu'il parcoure le domaine, et à deux qu'il s'approche de la maison. Son ami ouvre déjà la porte, le salue. Il n'aura fallu que cet instant pour se dire que c'était une mauvaise idée.
Mais c'est la seule.
Ellair tente un sourire, et entre dans sa demeure. La porte qui se verrouille ne passe pas inaperçue. Un coup d'oeil vers elle, puis sa méfiance est désamorcée par l'offre une tasse de café.

- Merci.

Ellair laisse Atlas aux politesses, par vœux de silence certains diraient, mais surtout parce qu'il est préoccupé par autre chose en plus d'être distrait par la tasse qu'il lui sert. Il s'installe dès qu'il l'y invite.
Ses sourcils se froncent légèrement rien qu'en songeant à l'objet de sa visite. Atlas s'en réjouit, mais lui non.

L'ombre d'Atlas le couvre presque tant il empiète son espace.
Il suffit de lever les yeux et voir son visage, son sourire, pour comprendre qu'il s'attire des problèmes. Ellair soupire, baissant les yeux, joignant les mains sur sa maudite table.

- J'ai besoin de ton aide...

Les ennuis s'amassent déjà, il ne reste qu'Atlas et ses sourires tordus, ses idées malsaines, pour l'aider.

- De conseils.

Car si cela ne tenait qu'à lui, ce serait déjà fait.
Mais Ellair ne ferait que compliquer la situation des Cavendish, une nouvelle fois. Cette fois, il fallait faire preuve d'intelligence. Plus d'intelligence qu'il s'estime posséder, quelqu'un avec un autre angle sur la question.
Quelqu'un comme Atlas.
Ses yeux finalement viennent chercher les siens.

- Personne ne doit savoir. D'accord ?

Iris fixées sur son hôte, qui ne le quitteront que lorsqu'il aura donné sa parole.

Son attitude le fait penser aux chiens de chasses avant qu'on les lâche en forêt. Ironiquement, lui faisait partie de leurs rangs, et Atlas lui, des chasseurs.
Dans cette bestialité, Ellair y trouvait son compte. Un ami capable de voir son point de vue. Comprendre sa détresse. Mais même lui se surprenait à se méfier de ce même ami, resté sauvage. Il contemple son agitation, si sage comparé à lui; immobile et inexpressif inquiétant- pour la plupart du temps.

Atlas ne dira rien.
Son allure se détend dans un soupire, et finalement, ses mains viennent chercher la tasse de café. Le plus dur reste à venir : confesser ses faiblesses à Atlas, avide de ce savoir. L'image de l'homme de main infaillible ne pouvait pas tenir aussi longtemps, plus depuis que son champ de vision soit réduit de moitié.
Mais que de tous ses proches, ce soit Atlas qui l'écoute les avouer ?
C'est dur.
Son hôte lui donne l'impression d'y prendre du plaisir, ça le démange, lui et le peu d'honneur qu'il possède.

- Un dhampire a menacé les Cavendish, il y a deux trois mois.

Pas besoin de préciser que d'abord sa vie serait en danger, puis celle des Cavendish. Ce détail sordide de venir apporter sa tête de chien de garde à ses maîtres avant de s'en débarraser à leur tour ne lui semble pas nécessaire.

- Je n'ai pas réussi à m'en débarrasser seul...

Presque vidé de son sang, laissé impuissant au sol, il ne pouvait que la suivre du regard alors qu'elle fuyait, furieux.

Finalement, un peu de vie sur son visage.
Cette rage lui revient, juste assez pour s'y lire. Ses yeux se plantent dans les siens tandis qu'il se penche légèrement sur la table.

- Je ne peux pas la laisser revenir. J'ai besoin de savoir si sa mort causerait des ennuis ou non.

Ellair apprend vite, depuis l'incident Halloway.
Puis dans le cas de ce monstre là, il ne doit pas être le seul à la voir disparaitre...

- Je peux la traquer... Mais j'aurais besoin d'aide.

Il n'y a vraiment qu'Atlas qui lui vient en tête.
Lui non plus ne lâcherait pas avant d'avoir mis la proie hors d'état de nuire.
Un soupire agacé lui échappe. Le limier retourne dans le fond de la chaise, détournant le regard et tait sa frustration en buvant finalement son café; si seulement il pouvait s'y consacrer à plein temps... Elle ne serait déjà plus un problème.

- T'en penses quoi ?

Le masque tombe, révélant une paire d'yeux ravivant de vieux souvenirs désagréables. Ils suffisent à eux seuls à faire monter la colère. Au lieu de balayer d'un geste leurs tasses et de l'attraper par le col, Ellair le fixe en retour, serrant la mâchoire.
Qu'il le sous-estime.

Finalement son sourire revient.
Atlas ose venir poser ses mains sur ses épaules comme si de rien n'était, et lui ne dira rien, tendu, regardant toujours tout droit. Concéder l'accès à ses épaules ne sera pas suffisant, ni même l'honneur de l'avoir ainsi regardé de haut. Non, le chasseur allait l'humilier d'avantage.

- Celle là te plaira.

Une proie sans retenue, qui leur offrait un challenge de taille. Avec un sang lui plaisant tout particulièrement, Ellair pourrait même servir d'appât. Une idée qui devrait ravir le Priest.

Une gorgée de café, avant de fusiller l'une de ses serres s'enfonçant un peu trop dans son épaule, puis de relever ses yeux noirs vers Atlas.
Il s'oublie, son précieux ami. Il profite un peu trop de lui, déjà.
Mais à part ce regard sévère, Ellair reste encore silencieux sur ces écarts.
Pour le moment.

- Un peu plus petite que moi, cheveux trop colorés, parle beaucoup, avec un accent... Elle passe pas inaperçu.

Le limier scrute son visage pour y lire sa réponse : une telle peste ne laisse pas indifférent.

- Je n'ai pas son nom mais je pourrais encore la pister.

Impossible d'oublier une telle odeur.
Elle lui inspire une envie de violence bien trop pressante, en plus d'un dégout profond.
D'ailleurs...
Ses yeux reviennent à ses doigts plantés dans ses épaules.

- Pourquoi tu t'es arrêté ?

Quitte à se faire envahir son espace vital, autant que ce soit agréable.

- Nina...

Finalement, un nom à donner au monstre.

À la surprise du limier, Atlas continue son massage. Silencieusement, Ellair profite du court instant de détente -le seul, peut-être-.
Atlas connait la créature, et lui aussi n'a pas réussi à l'éliminer. Remarque qu'il se garde de prononcer à voix haute : il s'est déjà créé bien trop d'ennuis.

- Merci. Elle ne pourra pas nous échapper...

À deux, il y croit.
Sans relâche, brutes, même cette vipère ne saura pas où donner de la tête.

Atlas s'éloigne, et lui s'exécute quand il lui ordonne de le suivre. son café n'est pas fini, mais il est bien éduqué. Il le suit dans les escaliers. L'odeur désagréable du désinfectant le fait immédiatement grimacer. Un râle lui échappe, mais ses pas ne s'arrêtent pas.
Un coup d'oeil inquisiteur aux cages, une à une, à la silhouette des outils peu discernables au mur, puis à Atlas, sourcils froncés.
Silence de sa part, l'absence de conversation ne le dérange pas.
L'odeur par contre...

Ellair ne bouge pas, quand il mentionne la porte. Où compte t il l'emmener ainsi ? Toutes les portes chez le Priest sont verrouillées, et la seule qu'il lui laisse toucher est blindée. Rien ne va...
Aucun piège, dit-il.
Ellair souffle du nez, l'air pourtant toujours suspicieux, sans le lâcher du regard.
Finalement, Ellair se déplace, lentement, vers la fameuse porte.

- Mouais.

Atlas pourrait le faire lui même.

- Ca a intérêt à en valoir la peine.

Mais le voilà, à ouvrir la porte malgré tout. Pas besoin de demander ce qu'il y cache derrière, u peu de patience suffira.
Et puis, Atlas n'oserait pas le piéger.
Pas tout de suite.

Atlas a l'air bien trop ravi.
Cependant, il suit sans broncher.
Et il avait raison : cela en valait la peine. Cette collection devrait inquiéter, mais la soif de la traque vous parle, de la violence et il faut l'admettre; parfois de la torture. Ellair arpente la salle, laissant trainer ses yeux sur ces outils avec intérêt.
Son regard se pose sur son hôte.

- Vraiment ??

Pour Nina, il cèderait volontiers.

- Que recommandes tu pour un dhampire insupportable ?

Bien que défoncer son crâne au poing seulement le fait rêver...
Un léger sourire étire finalement ses lèvres, puis son attention se porte sur les trophées sous verre. Pas besoin de demander de quoi il s'agit, même lorsqu'il l'ignorait; c'est mieux ainsi.

Le limier reconnait ensuite une silhouette amicale, un collègue en quelques sortes, et s'approche, avant de se figer en réalisant à quel point elle est immobile. C'est un cane corso qui ne respire pas parmi les autres trophées. L'animal lui glace le sang. Ses yeux sans âmes plantés dans les siens, c'est presque se voir déjà mort. Sa dépouille empaillée pourrait très bien figurée à côté, doberman aux aguets, nouveau trophée d'Atlas.

L'avoir derrière lui n'arrange rien au malaise.
Dos à Atlas Priest... Cette salle l'avait bien trop fait baissé sa garde. Alors il se tourne enfin un peu vers lui, sans parvenir à quitter son regard de la chienne.

-... Accident de chasse ?

Un cou cassé... La pauvre.
Ce n'est pas un de ses semblables, mais tout comme à ses yeux.
C'est dérangeant, et triste.
Mais Ellair parvient finalement à se défaire de son emprise, contournant son hôte sans croiser son regard, tournant le dos à la bête, cherchant des yeux le nouvel instrument qui pourrait lui changer les idées.

Ellair ne semble pas impressionné par sa suggestion : la torture ne lui faisait pas plus plaisir que cela. Un individu pareil méritait juste d'expirer son dernier souffle. Ou peut-être pouvait elle continuer de souiller le monde de sa présence, une fois inoffensive, dents arrachées.
Mais le limier se doute qu'elle en reste là, sans ses crocs. La violence ne pouvait pas s'arrêter avec un être aussi dérangé.

- Hm. Pourquoi pas.

Mais pour voir la colère embraser son regard, cela en valait peut-être la peine. Atlas est un connaisseur, après tout. Son avis vaut sûrement la peine, au final.

Ses soupçons se révèlent être vrai.
Ellair soutient le regard d'Atlas, retient sa colère pendant qu'il se permet de l'avertir de son courroux. Il peut taper autant qu'il veut, ses yeux ne quittent pas les siens, ni se font plus tendre. Ces menaces déguisées ne sont un ton à prendre avec un ami, encore moins un ami qui a couru aux cotés de ces cane corso.
Alors il se joint au jeu.
S'avance vers Atlas et se plante devant lui, dans une attitude intimidante dont il épargne habituellement ses amis.
Mais si son hôte ne se gêne pas... Lui non plus.

- C'est dommage... Tu sais ce qu'on dit : il n'y a pas de mauvais chiens, juste des mauvais maîtres.

Ce petit jeu de hiérarchie commençait à le lasser, maintenant qu'on s'imagine Ellair obéir à quelqu'un d'autre qu'un Cavendish.

- Montre moi la pince.

Après tout, elle lui sera utile.
Sur Nina ou un autre.