Call me by Your Name

Tu es crispée Darya.

Tu inspires profondément.

T’es submergée par l’émotion, alors que tu gères tout parfaitement depuis un moment. C’est que Lancelot a une place particulière, c’est qu’avec lui t’es bien plus vulnérable et que tu as peur de sa réaction. Vous en aviez parlé tant de fois, de ce jour qui pourrait arriver, de toi prête à te marier. De lui qui devrait peut-être le faire un jour. De Naomi qui le ferait surement.

Le maigre de ta main qui toque à la porte des Avery.

On t’ouvre, tu souris poliment aux majordomes qui t'accueillent, avant de prendre la direction que tu connais par coeur, celle où il se trouve. Pousse la porte pour que ton regard tombe sur sa silhouette. T’esquisse le maigre d’un sourire, avance jusqu’à lui dans son dos, pour passer tes bras autour de lui.

— Hey…

Et c’est bon de sentir son odeur, tes épaules qui se détendent un peu. Et en même temps t’as peur Darya, tellement peur qu’il te repousse.

— Tu es faché ?

Call me by Your Name

C’est dur de l’entendre dire qu’il est à vif. Et même si tu n’es pas surprise tu sens que ton coeur se serre. Sa main qui serre la tienne. Si chaude quand la tienne est si froide. Ton front qui se loge entre ses homoplates. Tu bouges doucement comme pour le bercer. Tu réfléchis véritablement à sa demande.

— Mon âme te laisserait faire. Sans la moindre hésitation.

Tes doigts qui resserrent les siens.

— Mais mon coeur ne pourrait faire ça. Izar se retrouverait seul il vient déjà de se faire renier par mon père c’est beaucoup pour ses épaules, et je m’en voudrais à vie, de t’arracher à Naomi, à ta vie, Et si tu tombais amoureux Lance ?

Tu t’en voudrais trop de le priver de quoi ce soit, alors qu’à tes yeux il mérite le monde et plus encore. Il est tout ce qu’il y a de plus beau. De plus doux. Tu attends mais tu finis pour glisser de son dos, pour venir face à lui le regard douloureux. Tes bras qui passent autour de sa nuque, tes doigts dans ses cheveux, alors que tu le serres contre toi.

— Je ne veux pas être le monstre de ton histoire. Ni la raison pour laquelle tu as raté l’amour de ta vie, des rêves ou que sais-je. Tu imagines Lance si on partait ?

Si tu développais pour lui des sentiments que tu n’aurais jamais eu pour personne d’autre. Parce qu’à tes yeux s’il y avait un mari parfait, c’était bien lui. Et c'est ce qui te fait peur aussi. De ne plus le voir que comme un pilier de ta vie, mais plus que ça et que ça ne soit qu'à sens unique. Un baiser que tu déposes sur sa joue.

— Et puis si je ne marie pas un autre, tu ne voudras jamais être mon amant.

Tu veux détendre l’atmosphère trop lourde, trop étouffante.

Call me by Your Name

Tu sens ton coeur qui se serre un peu plus, à mesure qu’il parle, à mesure que tu perçois la douleur dans ses yeux, elle monte tes larmes Darya, voile ton regard, et si pour l’instant elles te tombent pas ce n’est pas que par une force ultime qui les retient, Une force que le moindre de tes mots pourra étrangler.

Tes mains qui se juchent à ses joues, le voir ainsi c’est ton âme qui se brise.

— Lance…

Et les larmes s’échouent sans que tu ne le veuilles alors qu’il appuit avec raison.

— Le fait que je me marie ne veut pas dire que je m’en vais. Je sais que tu aurais été tout ce que je voulais, parce que tu es déjà tout ce que je veux. Mais tu sais la réalité. Les règles du jeu.

Tu ne veux pas que ça puisse vouloir dire ça.

— Tu sais que je serais toujours là, que je t’aimerais autant qu’il le faut. Mon âme sera toujours tienne. Je te protègerai toujours.

Parce que ta vie n’a pas de sens sans lui à l’intérieur. Parce qu’il sera toujours plus qu’un ami, toujours plus que tout le reste, peu importe à quel point tu ne veux pas le réaliser.

— Je suis là. Personne ne peut m’empêcher d’être là. Ni un nom, ni un mariage.

A tes yeux, ça ne change pas. Tu n’en seras que plus libre. Ton père ne t’aurait jamais permis d’épouser Lancelot, aussi fort que tu l’aurais voulu. Et quelque part ça n’en aurait peut-être été que plus douloureux. T’es persuadé de ne pas savoir aimer Darya, mais lui si tu te laissais aller surement que quelque part ça aurait fini par te gagner. Force son visage à venir dans ta nuque avant de le serrer le plus fort que tu le peux contre toi.

— Ca va aller. Je te promets que ça va aller. On va s’en sortir.

Call me by Your Name

La pression de ses bras sur ta taille, la douceur de ses mèches contre ta nuque, les larmes qui sèchent contre tes joues, et son odeur qui vient emplir tes narines. Tu pourrais rester là toujours, ne jamais partir, vous oublier. C’est presque si tu te décolles du sol, pour mieux le coller lui, pour fusionner avec lui. Comme si tu allais le perdre, comme si tout était en train de t’échapper.

Est-ce que tout n’est pas en train de t’échapper Darya ?

Et ton coeur se serre à mesure qu’il parle. Qu’il parle de cet autre qui te ressemble. Tu n’as presque pas envie de l’entendre. Presque pas envie d’imaginer ce qu’il ressent. Mais comme pour enfouir un peu plus ce que tu ressens tu viens demander.

— De qui tu parles Lance ?

Tu cherches ton souffle, quand dans l’écho tu l’entends ta voix qui tremble.

— Est-ce que t’es tombé amoureux ?

Tu voudrais qu’il dise non. Mais en même temps ce serait plus simple qu’il dise oui, car si c’est oui alors ça simplifirait tout, alors ça casserait enfin ce que tu enfouis depuis trop longtemps, ça t’empêcherai de penser, ça brulerai les images impossible que tu as de vous deux.

Toutes ces images d’avenir que tu ne peux pas te permettre d’avoir.
Parce que ça n’aura jamais lieu.

Tu voudrais qu’il soit amoureux.

Tout en refusant de réaliser que c’est une partie de ton coeur qui viendrait à exploser, si il l’était.

Probablement qu’il l’est.

Call me by Your Name

Tu sens ton coeur qui tambourine quand il dit surement, tu ne sais pas ce que tu veux entendre ensuite Darya, tu ne sais pas quel regard tu as, tu ne sais pas, tu ne sais même plus, son regard, le tien, comme un écho, comme deux âmes noyées qui tentent vaines de sortir la tête de l’eau. Alors que tes doigts se posent doucement sur ses poignets, et c’est presque mortel de l’entendre.

— Ne choisit pas…la personne qui te brisera le coeur, s’il te plait.

Tu es fatiguée Darya, fatiguée de rejeter son image des rêves les plus doux, d’espérer quelque chose qui n’arrivera jamais. Tu dois épouser Clovis, tu vas épouser Clovis. Contre l’avis de son coeur, contre le tien. Peu importe les mots de Jasper, ceux des gens. Tant pis si tu accomplis ce que ton père veut. Parce que tu dois faire ce qu’il faut, et Clovis t’offre la plus belle porte de liberté. Celle qu’Uriel n’a pas pu tenir.

Celle que t’aurais aimé que Lancelot te tende, si il en avait eu le droit.

— A t’entendre j’ai l’impression…que je vais mourir Lancelot.

Mais est-ce que ce n’est pas une part de toi qui va mourir Darya ? Peut-être pour mieux renaitre.

— On savait que ça finirait par arriver, on a eu un peu de temps supplémentaire mais on savait que ça arrieverait.

Ta voix qui se casse à mesure que tu parles, brisée des sanglots que tu ne laisses plus s’échouer. Tu inspires longuement, profondément, tu dois être plus forte que ça, tu dois dompter tout ça, ne rien ressentir, ne plus ressentir quoi ce soit, tes doigts qui se resserrent sur la douceur de sa peau.

— On est plus que ça. Toi et moi on est plus que ça, plus qu’un mariage, ou des unions forcées, plus que les enfants qui en découlent. On est toi et moi. Même mon père ne peut pas changer ça.

Personne ne peut changer ça.

Call me by Your Name

Il sait.
Bien sur qu’il sait.
Et toi tu aimerais ne pas savoir.
Mais pourtant qu’il dise qu’il sait, ça attire ton sourire, en écho au sourire qu’il arbore. Parce que tu ne sais pas ne pas sourire face à lui. T’as le regard humide à la suite, mais ton sourire reste. Tu fais un petit non de la tête.

— Je ne t’en voudrais pas.

Tu sens ses doigts autour du tien mais tu t’en détache, pour les glisser contre ses joues, rapproche ton visage du sien doucement.

— Je ne t’en voudrais pas si tu n’as pas la force.

Mais tu voudrais qu’il soit là, pour te sentir moins seule.Tu te mets sur la pointe des pieds, laisse tes lèvres rencontrer doucement les siennes. C’est tendre, c’est sobre, alors que rapidement tu t’en détache. Il t’a semblé naturel ce baiser, comme s’il en avait toujours été ainsi entre vous.

— Je ne t’en voudrais pas.

Comme pour être sure, comme un appel à l’aide silencieux. Tu voudrais qu’il le soit. Là. Mais tu ne sais pas comment tu vivrais toi, de le voir amener une autre pour échanger des alliances. Mais tu te sens égoiste, tu as envie de l’être. Mais tu ne le verbalises pas.

— Ca va aller.

Call me by Your Name

T’es partie sans pouvoir dire un mot de plus.

Tu t’en souviendra plus clairement plus tard Darya de cette dernière soirée avec lui. Des sanglots qui t’ont fracturés quand t’as eu passé la porte de ta chambre une fois de retour au Manoir Black. Surement quand il te faudra aller jusqu’à l’hôtel, surement lors de cette première nuit, lors des matins difficiles, et de toutes ces journées où tu auras l’impression d’étouffer.

Tu te demanderas, et si tu étais restée ?

Si tu étais restée avec Lancelot, si t’avais choisi la liberté, choisi de tout perdre, peut-être que tu aurais tout à y gagner, ou rien justement. Tu t’accroches Darya, tu t’accroches fermement au fait que Lance n’est pas amoureux de toi, que c’est surement quelqu’un d’autre qui hante ses pensées, parce qu’il l’a dit pas vrai.

Il l’a dit, il ne sait pas.

Tu repenses à Jasper, et t’as la nausée, des sueurs froides, t’en viens à hurler, et t’espère que personne dans la maison ne viendra t’entendre. Tu ne veux voir personne, t’es présentable pour personne.

Tu étouffes.